Il s'est battu pour en arriver là mais Tim sait qu'il n'en a pas terminé, qu'il devra fournir encore plus d'efforts pour se sentir vraiment heureux. Il s'accroche à ce voeu depuis ce qui semble être des siècles et de bien des manières, il a obtenu ce qu'il a tant recherché, sinon comment expliquer la présence des deux petits êtres dans la pièce voisine? Il a deux enfants à aimer, deux enfants pour qui il est essentiel et le sera durant à peu près deux décennies. Il compte enfin, pour quelqu'un et surtout, pour ce qu'il est. Sa mère a essayé de le changer, son père l'a abandonné sans émettre le moindre regret, c'est son heure de briller maintenant, de ne plus penser à ce passé qui rouvre constamment des plaies qu'il croit refermées. Il sait ce que c'est de vivre seul, de ne pas avoir le moindre espoir pour l'avenir... Tim ne veut plus avoir à se confronter à ce genre de moments alors, il a décidé quelques temps auparavant de prendre le taureau par les cornes et de ne pas se laisser abattre et ce, même si Heïana est partie, même si son droit au bonheur s'est certainement envolé en même temps que l'avion qui l'a emmenée le plus loin possible de lui. "Loin de moi cette idée, Nini." Il lèvre les bras en signe de défaite assumée: non, Timothy n'aurait pas osé la freiner dans la moindre once de créativité, il a toujours su à quel point c'est une part importante de la vie, en tout cas de la sienne. Il est fleuriste, Decastel et il sait que c'est son salut, d'avoir une telle passion, celle qui le porte depuis l'adolescence et en qui il continue de croire malgré tout. "Me traumatiser? T'exagères un poil tu sais. Le Tim d'il y a deux ans d'accord mais... Je te rappelle que j'ai deux enfants et qu'ils sont pas arrivés là par magie totale." Il se met à rire parce qu'il est probable qu'il aura toujours cette image de pureté pour les gens qui l'ont connu avant cette période douloureuse de son existence et ceux qui ont récupéré les morceau après coup. Niamh l'avait rencontré avant, lui qui rougissait sans savoir comment s'arrêter et qui ne savait pas tellement comment déambuler avec sa carcasse beaucoup trop grande pour qu'il puisse la porter tout seul. "Hors de question que je m'entraîne sans toi pour le hockey, je te rassure... En plus, je suis jamais monté sur des patins, pas même des rollers, je risque pas de tricher." Il doit sûrement être nul dans ce domaine sportif. Timothy a des bras en acier parce qu'il a passé son temps dehors à remuer la terre mais il n'a jamais été un friand de sports collectifs de manière générale. Il compte bien apprendre néanmoins et il sait qu'avec Niamh, il peut parfaitement s'amuser, sans ressentir la moindre pression de la réussite. Enfin, il ressent une autre pression à peine deux seconde splus tard puisqu'elle dépose papier et crayon devant lui pour qu'il écrive sa liste. Clairement, il ne l'a pas vu venir. "Je suis pas capable, Niamh, je suis désolé, pas comme ça... J'ai toujours besoin de temps pour faire les choses, ça désespère ma thérapeute d'ailleurs mais on m'a tellement fait de mal que je pèse souvent trop le pour et le contre avant de faire quoique ce soit. Enfin, c'était vrai avant, maintenant... Je sais plus trop qui je suis et ça me fait un peu peur. Comment je pourrais savoir ce que je veux vraiment?" c'est l'interrogation qu'il a, Tim, parce qu'il a radicalement changé en deux ans. Il s'est épanoui, il a pris sur lui, il s'est ouvert aux autres mais du coup, il ne comprend plus tellement sa façon de fonctionner et il ne sait pas tellement où il désire aller. La peur se lit sur son visage alors qu'il a le regard posé sur la feuille. Elle restera probablement vierge ce soir, tout comme sa vie entière l'a été durant des décennies, le drame de sa vie.
“It's not enough to be up to date, you have to be up to tomorrow.”
Début avril, Brisbane.
« Me traumatiser? T'exagères un poil tu sais. Le Tim d'il y a deux ans d'accord mais... Je te rappelle que j'ai deux enfants et qu'ils sont pas arrivés là par magie totale. » Un drôle de rire s'échappe des lèvres de Niamh. Un rire de fanfaron. L'insolence de la jeune femme est amusante, et elle agite les sourcils prenant des faux airs de pervers. « C'pas faux mais … je ne préfère pas prendre de risques … parce que euh … fais moi confiance. », elle roule des yeux comme si le simple fait de se souvenir cette soirée la fait rougir. « Tu es le candidat parfait. Ca va être magnifique, j'en suis certaine. » Elle s'imagine déjà avec Timothy en train de se tenir l'un à l'autre, riant aux éclats, tout en ignorant le monde autour d'eux. Car elle est persuadée qu'il allait être le parfait candidat pour cette aventure. Avec lui, elle rirait aux éclats. Avec lui, elle n'aura pas peur du ridicule et puis … avec un peu de chance, il serait plus riducule qu'elle sur patins. Les doigts sont croisés, les amis. « C'est comme ça que commence les plus grandes aventures. », qu'elle dit sur un ton solennel, le poing levé comme si elle état une super héroine. Puis la soirée prend un rude virage puisqu'elle voit le visage de son ami changer en un rien de temps. La pression. Les fêlures. Les doutes. Les étincelles de ses prunelles s'endorment et elle le regarde avec la plus grande tendresse au monde, celle d'une sœur pour un frère. Un sourire timide vient se poser sur les lèvres de la jeune femme. « Je ne suis pas sûre moi-même de savoir ce que je veux vraiment. Je crois qu'il y a suffisamment de bouquins dans ta librairie qui prouvent que cette question est au centre de toute vie : ce qu'on veut faire, avoir, être et devenir. » Sa main se pose sur son genou et elle essaie de saisir son regard, pour le faire quitter la vision de cette page blanche. « Peut-être que tu as un livre que tu souhaites lires et que tu n'as pas encore lu, faute de temps ou simplement pas eu l'occasion … ou alors envie de tenter un restaurant dans lequel tu n'es pas encore rentré … Paraît qu'il faut savoir profiter des petites choses, que ce sont elles qui sont primordiales. » Elle tapote son genou tout en lui souriant d'un air rassurant. Puis, son bras se tend vers les confiseries pour en avaler une autre bouchée, accompagnant ce geste d'un : « Elles sont plus importantes que l'on ne croit. »
Il rigole parce qu'elle a toujours eu cet effet salvateur sur Tim, la jeune femme, elle a un humour ravageur, il faut le dire même si la plupart du temps, Niamh ne le fait même pas exprès. Il faut toujours qu'elle se retrouve dans de sacrées aventures et quand elle les raconte de bout en bout, Timothy est toujours absorbée: elle n'est pas commune, son amie, c'est une évidence et il n'y a qu'elle pour sortir cet air-là alors qu'elle rougit de manière significative. Au moins, le français se sent moins seul vu le nombre de fois par jour où il finit dans cet état à cause de sous entendus non voulus qu'il capte par la suite ou de maladresses qui le gênent. "Je te fais confiance, bien sûr mais quand tu rougis comme ça, forcément..." Il lui fait un clin d'oeil, non, il ne va pas l'embêter avec une histoire qu'elle n'a pas l'air de vouloir raconter. Chacun son jardin secret après tout, même si Timothy n'en garde pas tellement pour lui de son côté. Il est plus ou moins un livre ouvert, si on exclue toutes les peurs qu'il a tendance à terrer tout au fond de lui: il ferait clairement n'importe quoi pour ne pas avoir à se confronter à tout ce qu'il ressent, même si le tout devient forcément difficile lorsque la situation devient plus tendue. Il souriait jusqu'à cette épopée de hockey à venir, pour sûr qu'un film vaudrait le coup pour eux vu leur nullité à venir et Tim avait hâte... Jusqu'à ce que Niamh le pousse dans ses retranchements et qu'il sent alors la panique l'envahir. Comme d'habitude, celle-ci est insidieuse et le brun ne l'avait pas spécialement vu venir. Il a le regard collé à la feuille vierge devant lui, écoutant de manière plus ou moins distraite les dires de son amie. Il sait qu'elle a raison pourtant, que c'est une question existentielle pour la majorité des individus, les rêves, les ambitions, savoir ce qu'on veut devenir et la route qu'il faut emprunter pour atteindre ses objectifs mais pour Tim, c'est plus dur encore que pour les autres, sans qu'il ne sache franchement pourquoi. "Je t'assure que j'ai même pas ce genre de besoins ou d'envie... Tout ce qui me vient, ça concerne les autres. Je veux juste que Nono trouve le bonheur avec quelqu'un, que mes enfants soient heureux, que ma mère ne soit plus folle... J'ai rien pour moi. J'ai jamais rien voulu pour moi, je sais pas faire ça." C'est un fait, le pauvre Timothy n'a pas une once d'égocentrisme en lui, autant dire qu'il se fout en l'air un peu plus chaque jour à cause de cela. "Les petites choses, ce serait juste de voir mes enfants sourire tous les jours, les voir marcher et prendre confiance en eux, qu'ils aient l'enfance que j'ai jamais eu... Je veux rien de plus, Nini, vraiment." Il ne désire rien pour lui, il veut juste que les autres soient heureux, ce qui constitue une peine immense car cette feuille restera définitivement blanche. Tim le sait et il a encore plus conscience que ce n'est pas normal, qu'il ne le sera jamais lui-même.
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Début avril, Brisbane.
Niamh l'écoute avec attention. Elle boit ses paroles et se rend compte un peu plus des émotions de son ami. Elle se rend compte qu'elle a mis le doigt dans un rouage qu'elle ne contrôle pas, qu'elle ne contrôlera jamais. Elle a mis les pieds sur un terrain glissant. Gaston Lagaffe. Elle frappe soudainement dans ses mains et s'avance pour saisir la page blanche qui semble troubler le jeune homme plus que prévu. « Tu sais quoi ? Oublie cette foutue liste, on s'en fout. C'est surtout pour les cinglés dans mon genre qui sont incapables de vivre pleinement et ont toujours besoin de s'accrocher à des listes » Pendant qu'elle prononce ces quelques mots, elle met en boule la feuille blanche avec énergie. Ce n'est psas tout à fait faux. Elle a le besoin viscéral de tout organiser. Une folie du post-it. Une maladie presque. Et alors que la page blanche est une boule de papier, elle la balance par dessus son épaule avec nonchalence. « Hop ! Tu vois, on s'en fout ? » Elle sourit avant de pencher la tête sur le côté, affichant une moue désolée. « Oui, bon on s'en fout … mais je vais quand même la ramasser … je veux pas mettre le bazar chez toi, c'était pour le côté théâtral. Ca avait l'air carrément bien dans ma tête ... » Elle se lève pour ramasser la feuille de papier, la voix rieuse. « … une fois que j'l'ai balancée, je me suis souvenue qu'à un moment ou à un autre, il allait falloir la ramasser ... » Elle la jette sur la table basse en reprenant place aux côtés de son ami.
Enroulant son bras autour du sien, elle laisse doucement sa tête se reposer sur son épaule. « Tu sais, je m'estime vraiment heureuse de t'avoir dans ma vie, Tim. » Elle tourne la tête vers lui, sans pour autant la décoller de son épaule. « A mes yeux, tu es parfait. Parfait comme tu es. Je ne te l'ai jamais dit mais tu fais vraiment partie de ceux qui comptent. » Elle sourit avec tendresse avant de reprendre place plus confortablement contre son épaule.
L'émotif Timothy est de retour, comme s'il était parti un jour. Ce pauvre Decastel n'a jamais rien pu faire contre son intense sensibilité: il pourrait tout à fait mettre tout cela sur le dos de son enfance difficile mais il s'agit surtout d'un trait de sa personnalité qu'il ne contrera jamais. Est-ce si grave d'être ainsi? Jusque là, le monde a eu tendance à lui prouver que ce n'était pas idéal pour un grand dadais comme lui mais le français ne peut pas tellement se changer, encore moins se réinventer. Et puis, il a aussi conscience que ce fait peut aussi devenir une qualité car il s'inquiète toujours atrocement pour les autres et il sait à quel point on peut l'estimer pour cela. Tim est tout à fait le genre de garçons qu'on peut appeler n'importe quelle heure du jour et de la nuit, il s'arrangerait toujours pour venir au secours de la personne en détresse. Ce n'est probablement pas commun, d'avoir autant de générosité en soi mais en contrepartie, un grand mal à gérer les échecs et les abandons qui viennent pourtant forcément. Pauvre de lui, pauvre de ce beau brun qui ne sait pas tellement comment faire pour aller mieux, pour paraître plus normal qu'il ne l'est en réalité, comme si être lui est une fatalité des plus difficiles à vivre. "Non, tu as raison d'en faire, je pense. Je ne vis pas plus que toi en n'en faisant pas, j'imagine que je me laisse plutôt couler la plupart du temps." Il va dans des placards, il se cache derrière son frère ou de piètres excuses pour ne pas avoir à affronter les couleurs plus sombres de son existence. Heureusement, Niamh, elle, est colorée, elle qui déchire cette fameuse page blanche et qui la lance par dessus le canapé sous l'oeil ébahi de Tim. Comme s'il allait la gronder pour un bout de feuille par terre et pourtant, elle se répand en excuses, comme s'il avait agi de la pire manière. "Tu sais qu'il y a des jeux de mômes partout? Un bout de papier de plus ou de moins pour le ménage..." Ce n'est clairement pas grand chose et Tim n'est pas maniaque pour un sou, en tout cas pas depuis qu'il a les jumeaux. Il baisse les yeux un petit moment, jusqu'à ce qu'il sente le bras de Niamh s'enrouler autour du sien et finalement sa tête se poser contre son épaule. Ses yeux se tournent vers elle et il sourit alors qu'elle lui offre un bien joli discours. Il ne doit pas s'émouvoir normalement, il doit lutter mais Tim reste Tim et il a les yeux qui brillent en conséquence, il n'y peut rien. "Parfait, je ne sais pas mais de toute façon, j'ai peu de chance de changer maintenant... Mais je suis aussi très heureux de t'avoir rencontrée, Nini, même si j'ai été un piètre rencart, il faut le dire, content qu'on soit allé au delà de ça." Vu leur caractère respectif, ce n'était pas si étonnant et puis, être amis, c'est ce qui leur réussit le mieux maintenant car ils s'épaulent, ils sont présents l'un pour l'autre et c'est la seule chose dont Tim semble avoir besoin. "Tu comptes aussi, Nini. J'espère que tu seras heureuse maintenant et qu'on va te lâcher la grappe un peu." Qu'elle sourit tout le temps, qu'elle ne soit plus l'objet d'un quelconque drame, la jeune femme mérite tellement mieux que ce qu'elle a obtenu jusqu'ici.
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Début avril, Brisbane.
Quelle solution est la bonne ? Elle n'en a absolument aucune idée. Pour elle, les listes sont devenues une solution. Elle en fait pour tout, tout le temps. A croire que cela la rassure. Elle a toujours eu ce besoin de voir les choses pour en prendre conscience, de les écrire. La reine des post-it. Mais si cela la rassure et l'aide comme une béquille, elle sait également qu'elle perd pas mal de temps le regard rivé sur le papier … quitte à parfois louper ce qui se passe sous ses yeux ou ce qui pourrait bien se passer sous ses yeux. « Les résidus d'une éducation plus ou moins stricte de mes parents ... », dit-elle dans un haussement d'épaules désinvolte. Si elle est la petite princesse des parents, y n'empêche qu'ils ont veillé à lui inculquer pas mal de règles … et à bien se comporter. C'est le genre de choses qui reste ancré dans la vie d'adulte qu'on le veuille ou non.
Et, elle se retrouve à ses côtés, le bras enroulé contre le sien, la tête posée contre son épaule. Enjoy the little things. C'est également une partie de l'équation. Se poser, prendre le temps d'apprécier les choses simples. Prendre le temps de respirer en harmonie avec un ou une amie. Être ensemble. Rien de plus. Ce regard humide, elle ne peut pas le regarder trop longtemps. Niamh fait partie de ces gens qui pleurent en voyant quelqu'un les larmes aux yeux. Même un inconnu. Même le personnage d'un film. Réaction chimique ou empathie un peu trop acerbée. Elle ne peut pas s'empêcher de rire quand il se décrit comme un piètre rencart. « Question de perspective, tout est une question de perspective. Ce rencard était en réalité génial puisque … regarde où on en est. Imagine, on se serait embrassé ou un truc du genre … déjà ihhhh. » Elle abuse naturellement sur le « ihhh » pour le taquiner. « Et on aurait loupé pas mal de choses. J'le souhaite à tout le monde de vivre un rencart comme le notre. », dit-elle avec assurance. L'assurance d'une femme convaincue car c'est ce qu'elle est. Elle est convaincue que ce rencart ait été une bonne chose pour eux. « Oh oui ! T'inquiètes pas pour moi. Ca va aller et quand on sera vraiment vieux … on en reparlera et on en rigolera de cette période. Sans aucun doute ! »
Le pauvre Tim s'est élevé tout seul, une bien triste réalité quand on constate à quel point il offre à autrui, à quel point il est généreux, sans jamais rien attendre en retour. Il n'est même pas capable de trouver la source de ce trait de sa personnalité: peut être que c'est sa façon à lui de dire au monde qu'il ne ressent pas le besoin de se venger malgré tout ce qu'il a subi, un beau fuck à la galaxie entière au bout du compte. Le jeune Decastel ne pense jamais de la sorte: il agit par envie et jamais parce qu'il a de mauvaises pensées: de toute façon, il n'est capable que d'en avoir envers lui-même. On le blesse et il s'en veut alors qu'il n'est pas forcément toujours responsable de ce qui lui arrive. Pourtant, le brun a toujours une argumentation en béton pour expliquer qu'en choisissant la route A plutôt que la route B, c'est lui qui s'est mis dans le pétrin et que, donc, il mérite la sentence obtenue. Qu'il est misérable, Timy, mais c'est sûrement pour tout cela qu'on l'apprécie parce qu'il a beau apparaître comme l'idéal prince charmant, il est surtout ce grand bonhomme craquelé de toutes parts. "Stricte... C'est à dire?" Il a peur qu'elle ait eu à subir des choses elle aussi, même une simple gifle, ce serait déjà trop aux yeux du français. Non, il ne désire pas penser à ce genre de choses, il se concentre sur le souvenir commun qu'ils ont de leur rencart raté. Enfin, raté est un bien grand mot car ils sont devenus amis grâce à lui, autant dire que ce fut une franche réussite en définitive. "Imagine oui... J'aurais été à chier et t'aurais été dégoûtée." Il rigole parce qu'il n'avait jamais embrassé de filles à cette époque: oh bien sûr, Timothy s'est bien rattrapé sur la question depuis, ce qui l'aide sûrement à en rire, à se moquer de lui-même et de sa timidité d'antan, celle qui l'a handicapé dans plus ou moins tous les domaines de son existence par ailleurs. "Mais tout le monde n'est pas nous, ma chère Nini, on est unique, tu vois." Il se doute que ce genre de rencarts se terminent rarement comme le leur: en général, les gens se disent bonne nuit et ne se rappellent jamais en vue du contexte mais eux, ils avaient choisi de faire différemment, tant mieux. "Tu veux qu'on aille à l'EHPAD ensemble maintenant? Nini avec un dentier, tant d'élégance." Il rit à nouveau mais Tim n'arrive pas à voir aussi loin en réalité, à chaque jour suffit sa peine à ses yeux. "On va déjà tâcher d'être jeunes dans un premier temps. J'ai pas mal de retard sur le sujet, paraît-il." Vieux avant l'âge, c'est ce qui le définit probablement le mieux, le sacré Timothy mais il n'est pas si mal, c'est ce qu'il doit se dire. "Tu m'aides à coucher les petits?" L'heure tourne mine de rien et il est hors de question que les jumeaux continuent la destruction massive de leur chambre jusqu'à des heures indécentes.
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Début avril, Brisbane.
« Trois fois rien … ils ont fait de moi quelqu'un de bien. » précise-t-elle. Ses parents, ses héros, ses modèles. Ils ont toujours été là pour elle. Toujours. Et ils le seront aujourd'hui encore. Malgré le divorce, ils sont une équipe. Un trio de chic et de choc. Elle peut remercier le destin de l'avoir fait naître au sein de cette famille. Un nouvel éclat de rire alors qu'il résume en quelques mots ce à quoi cela aurait pu ressembler. « Comment ais-je pu oublier ce détail ? » Elle prononce ces paroles en exagérant, utilisant une voix digne d'une diva. Elle agite même sa main libre comme le font les divas. A sa proposition, elle se redresse aussitôt comme si un courant électrique venait de la traverser. « On la rockerait l'EHPAD … quoique attends, laisse-moi y réflechir, je crois qu'il n'y a que les gens has-been qui disent rocker. Merde ! » Les doigts posés sous son menton, elle a un air pensif … même si elle le dit d'une voix amusée, elle prend néanmoins conscience du fait qu'elle utilise encore des expressions totalement has-been. Un jour, elles redeviendront à la mode. Un jour ou l'autre, dans le doute, elle continue de les employer. Elle ne loupera pas le coche. « Jeunes, fous, plein d'insouciance … Je te rappelle qu'on est en train de boire du thé alors que certains jeunes se déhanchent sur le dance floor --- mais merde depuis quand est-ce que je parle comme une quinquagénaire ? » Elle laisse ses mains s'abattre sous ses cuisses après s'être rendue une fois de plus compte qu'elle utilise des vieilles expressions. Vraiment vieilles. Elle a un air choqué, et s'accroche à son bras. « Dis-moi que je suis pas totalement has-been, Tim. Et surtout dis-moi que ça se dit encore « has-been » ! » Regard de supplication. Et finalement, elle se lève avec enthousiasme. « Volontiers. Mais il y a quelque chose que je dois savoir avant … une tradition … un truc à ne pas dire … quoi ? Je m'y connais pas. » dit-elle en haussant les épaules, désabusée.
Tim aurait aimé avoir un peu plus d'innocence, se sentir moins seul également mais ce n'est pas ce que le destin a décidé pour lui. Il voulait ses larmes avant tout, le forger de la plus dure des manières alors que le misérable garçon n'avait clairement rien demandé. Il tâche de tout remettre en perspective maintenant, le français, en se disant que tout cela n'est qu'un mal pour un bien, qu'il a pu grandir à sa façon et ce n'est peut être pas aussi efficace que celle du voisin mais il a fini par sortir la tête de l'eau. Le principal réside là et pourtant, il a un sourire amer sur ses lippes durant quelques secondes parce que Niamh a eu des parents géniaux apparemment et lui n'a rien eu du tout. La vie est ainsi et il hausse les épaules avant de la regarder partir dans ses délires: elle a toujours eu cette énergie débordante que le brun n'aura probablement jamais. Oh, bien sûr, il se nourrit de toute cette énergie mais Timothy a aussi conscience qu'il manque toujours quelque chose parce qu'il restera très renfermé sur plein de sujets. Il n'a pas l'expérience pour se libérer de tout le fardeau qu'il traîne sur ses épaules, il n'a clairement que ses yeux pour pleurer et ses jambes pour continuer à avancer, trébuchant plus qu'autre chose d'ailleurs. "Je suis désolé, Nini, mais tout ce que tu dis a l'air sacrément has been pour le coup. J'avais pas entendu ce mot depuis 2002, c'est te dire." Il lui donne un léger coup de coude, qu'il accompagne d'un clin d'oeil appuyé parce qu'ils aiment bien se charrier aussi lorsqu'ils peuvent se le permettre. Niamh et lui, c'est un duo qui détonne très nettement dans le décor mais on ne leur demande pas d'être comme tout le monde, de faire attention au moindre mot et au moindre geste. "Allez, viens, ma petite quinqua' préférée... Et je te rassure, il y a pas de manuel ni de notice sinon je l'aurais appris par coeur moi-même. Suis ton instinct et ce sera très bien, ils veulent tata Nini, pas une version moins sympa d'elle, va." Tim se relève à son tour et il enchaîne les pas jusqu'à la chambre. Les petits ont l'air d'être moins emplis de ressources qu'un peu plus tôt dans la soirée, signe que le jeu les a épuisés. Tim attrape Gabriel avec un sourire, sous l'oeil envieux de sa petite soeur mais le français ne doute pas que Niamh prendra le relais sur la question. Il pose le petit être au fond de son lit et commence à lui murmurer quelques mots d'apaisement. Il raconte des histoires, il lance quelques berceuses et il voit que le tout fonctionne bien, pour une fois, parce que le petit bonhomme n'est pas le plus simple à assoupir. "Ca va, tu t'en sors?" Qu'il murmure à l'attention de Reed alors qu'il observe son fiston prendre de l'air plus doucement, les yeux fermés, et cela fait sourire Tim. Tant qu'il a les jumeaux, il est heureux, c'est tout ce qu'il sait de sa liste à écrire.
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En guise de réponse, une grimace puérile et enfantine bien qu'elle soit doublée d'un sourire mutin. Apparemment, Niamh n'est plus une personne cool. Elle est complétement has-been. Mais à bien y penser, elle n'a jamais été vraiment cool. Elle a toujours été la « nerd » de la famille, laissant le statut de coolness aux cousins et cousines qu'elle a toujours envié … dans le fond. « Ok. Je ne me mets pas de pression alors. » dit-elle plus pour se rassurer elle-même que pour autre chose. Tata Niamh est l'effet coca. Elle est celle qui joue, qui rie, qui fait des grimaces, qui paie des glaces et fait des bêtises en riant à gorge déployée. Elle n'est pas celle qui borde, qui met au lit et qui a des responsabilités. C'est un tout nouveau numéro qu'elle est sur le point de jouer. Et, elle a le trac. Quand, il mentionne le fait de suivre son instinct, elle sourit timidement. On lui a ôté tout ce qui a á voir avec l'instinct maternel. Alors bon … disons qu'elle est encore moins en confiance mais parvient à le cacher derrière une démarche pleine d'assurance, presque théâtrale. « J'vais suivre mon instinct, mon capitaine. », qu'elle répète avec amusement. Du coin de l'oeil, elle observe Timothy avant de l'imiter. Le petit bout entre les bras, elle dépose automatiquement un tendre baiser sur son front tout en la déposant dans son lit. Niamh a le sentiment que sa poitrine se resserre, devient minuscule. Foutues hormones ! La main posée sur le ventre de ce petit être, elle a une nouvelle voix. Une voix doucereuse et apaisante. Elle lui souffle quelques mots doux, se surprenant elle-même dans cette scène de science-fiction. Son regard se perd sur les traits ronds et candides de la poupée alors que son ami lui demande si tout va bien. Rien ne va. Elle a le sentiment de se noyer. Un nouveau sourire prend place sur ses lèvres, un sourire crispé car elle retient des larmes la Niamh. Elle se pince les lèvres tout en positionnant la couverture sur ce petit corps qui s'endort paisiblement. Les regards se croisent une nouvelle fois et les paupières se ferment. L'une et l'autre. L'une pour tomber dans les bras de Morphée, l'autre parce qu'elle a le sentiment de ne pas avoir été préparée pour cette scène du quotidien qu'elle ne connaîtra sans doute jamais. Elle se redresse, pose le revers de sa main sous son nez avant de se lever. Elle étouffe un drôle de sanglot en silence avant de quitter la chambre à pas feutrés, posant la main sur l'épaule de son ami au passage … comme pour lui signaler que tout va bien, qu'il ne doit pas s'inquiéter. Quand il la rejoint, elle est adossée contre le mur face à la porte de la chambre d'enfants. Les bras croisés, elle pose son regard sur Tim. « J'aurais été une fantastique maman. » souffle-t-elle, admettant pour la première fois depuis son diagnostic une vérité qu'elle s'est toujours cachée.
Il ne doute pas une seule seconde que Niamh sera à la hauteur de la tâche parce qu'elle a absolument tous les atouts pour s'en sortir auprès d'enfants. Et puis, si Timothy s'en sortait depuis maintenant plus d'un an, il n'y avait vraiment aucune raison pour que quelqu'un comme la Reed ne trouve pas de solutions pour gérer des pleurs en masse ou autres crises existentielles de la part de bambins. S'il y a bien une personne en qui il a parfaitement confiance avec les jumeaux en dehors de son frère, c'est bien son amie. Il ne supervise même pas ses actions quand elle borde Willow: Timothy l'entend vaguement derrière lui mais il décide de lui laisser le champ totalement libre parce qu'elle n'a pas besoin d'avoir un père chiant sur le dos. Et puis, il n'y a aucun sanglot qui émane du lit, rien d'autre que de l'apaisement à peine quelques minutes plus tard, de quoi prouver à Decastel qu'il n'avait pas eu tort de faire confiance à Niamh. Il sent quelques instants sa main sur son épaule et puis le vide, plus rien. Elle est partie: Tim n'a forcément pas vu les larmes qu'elle retient, il n'a pas relevé les yeux à ce moment-là alors qu'il aurait dû parce qu'elle a besoin de lui, tout comme lui a eu besoin d'elle tant de fois par le passé. Il se doit de lui rendre la pareille aujourd'hui, pour tout ce que Niamh est, a été et sera à ses yeux, elle qui s'est échappée sans partir trop loin puisque Tim la retrouve derrière la porte de la chambre, adossée là, en proie à une détresse qu'il n'a jamais vu chez elle. Timothy s'approche et il entend la portée de ses mots: le message est glaçant, il lui brise le coeur. Une fantastique mère, bien sûr qu'elle aurait été cela mais elle ne pourra jamais avoir le moindre enfant biologique maintenant qu'elle a retiré ses organes reproducteurs pour se sauver d'une mort certaine. Tim sent ses yeux qui se mettent à briller lui aussi mais il se cale devant Niamh et ses doigts viennent délicatement se poser sur sa joue, avec un sourire réconfortant sur ses lèvres. "Je sais, Nini. Je sais. Mais eh, peut être que tu adopteras... Et ce sera aussi ton enfant, à toi, tu pourras être maman même si la formule est un peu différente, le résultat sera identique, je t'assure." Si elle pleure, il va pleurer aussi parce qu'il est beaucoup trop émotif et sensible, le français, surtout après les derniers jours qu'il vient de passer et finalement, il porte ses bras de part et d'autre des épaules de Niamh pour l'entraîner vers lui, qu'elle ressente le besoin de pleurer si elle en a envie, il ne lui refusera pas cela. Au contraire, Tim l'étreindra jusqu'à ce qu'elle arrête, cela lui va très bien. "Laisse toi aller, Nini, c'est normal d'être triste après tout ce qui t'est arrivé." Il est son ami et il ne la laissera pas tomber, surtout pas maintenant.
“It's not enough to be up to date, you have to be up to tomorrow.”
Niamh lève ses prunelles humides sur son ami. Elle a le sentiment que son palpitant est pris dans un étau et qu'un sadique s'amuse à le presser. Elle a la gorge nouée. Elle n'est pas celle qui pleure. Elle n'est pas celle qui se laisse bousculer par la vie. Elle est celle qui voit le positif en tout. Elle est celle qui sourit, donne des petits coups de coude en parlant de marcel comme d'une vieille blague. Elle est celle qui brandit le majeur aux mauvaises nouvelles. Et puis, soudainement, elle est une femme brisée. Elle prend conscience de ses choix. Elle prend conscience de ces conséquences. Oh elle les connaissait. Mais là, elles avaient un visage. Elles auraient pu avoir un visage. Les doigts de son ami se posent sur sa joue et elle sourit timidement. Il a les mots justes. Il dit la vérité. Il expose les faits auxquels elle s'est accrochée lors de sa prise de décision. Elle les connait les possibilités de devenir mère. Mère autrement. Elle sait qu'il a raison et pourtant l'étau ne semble pas se desserrer. Bien au contraire. Alors, elle renifle tout en abaissant ses épaules. Et quand il l'invite à venir dans ses bras, elle s'y blottit comme si sa vie en dépend. Elle se blottit contre lui, collant sa joue à son torse et enroulant ses bras autour de sa taille comme un octopus. Les paupières closes, elle se laisser bercer par ses mots. Et alors que les larmes roulent sur ses joues, elle a enfin le sentiment de faire le deuil de ce qu'elle a laissé au St Brisbane Hospital quelques semaines plus tôt. Ses doigts s'agrippent à Tim. Et, elle le contraint à rester ainsi pendant de longues minutes. Un silence de plomb. Il est le premier devant lequel elle pleure vraiment. Sans aucune retenue. Le premier. Se détachant doucement de ses bras, elle renifle une nouvelle fois tout en essuyant les larmes de ses joues d'un revers de la main. « J'suis désolée. Ca doit être les médocs, les hormones où j'en sais rien … je … » Elle ne sait pas alors elle se tapote les joues du bout des doigts comme pour calmer ses émotions et surtout redonner un teint normal à ses joues rosies. « Je crois que je viens vraiment de prendre conscience de ce que j'ai fait. »
Il se sent impuissant à l'heure actuelle car le misérable Decastel ne peut pas comprendre le conflit intérieur qui met Niamh à terre. Elle a perdu son droit à être mère le jour où elle a décidé de se rendre sue une table d'opération: certes, elle a sauvé la vie mais le prix à payer en conséquence semble gigantesque. Tim ne vivra jamais quelque chose d'aussi difficile car lui a déjà des enfants et il ne risque pas d'attraper un cancer des ovaires. Il se sent idiot mais le français la serre contre lui autant qu'il le peut, autant qu'elle le lui permet. Si elle a des larmes à laisser couler, Timothy sera là pour les sécher. En tout cas, il se montre présent en apaisant ses maux à l'heure actuelle: il ne parle pas, il la laisse être triste parce que c'est exactement ce dont elle a besoin pour le moment. Elle n'a probablement pas fait le deuil de sa future vie de mère biologique, elle a tout enchaîné, la Reed, les opérations, les séances de chimiothérapie et elle a sûrement dû relativiser chaque instant depuis l'annonce de sa maladie. Surtout, elle a probablement fait en sorte d'apparaître invincible devant la moindre personne de son entourage, en jouant de son humour légendaire pour que personne ne s'inquiète pour elle car elle allait bien. Elle n'a probablement jamais été aussi bien, voilà ce qu'elle a laissé miroiter à sa famille, ses plus proches amis et sûrement même son nouveau petit ami. Néanmoins, il fallait qu'elle craque et faire face aux jumeaux de Timothy a fait cédé la barrière. Au moins, elle n'est pas seule, il est là alors qu'elle se détache légèrement de lui pour sécher ses larmes. "Eh, pourquoi être désolée? C'est tout à fait normal de pleurer, je vais même te dire que c'était nécessaire. Tu te rends compte de ce que tu viens de traverser, Niamh? Tu n'es pas un robot, tu as des émotions et il faut qu'elle s'exprime." Lui le fait constamment, il pleure trop, pour ce qui semble être un rien même parfois mais Timothy reste un homme entier et il n'ira jamais juger sur son amie quand, pour une fois, elle ose échapper des sanglots plutôt que des rires. "T'as fait ce qu'il fallait pour te sauver, oui, mais ça t'a aussi coûté ça... Tu dois faire ton deuil, prendre ton temps et pleurer quand tu en ressens le besoin. C'est dur ce que tu as fait mais c'est aussi extrêmement courageux. Tu es courageuse, Nini." Il lui dit et il le pense, le grand brun. Tim vient essuyer quelques larmes qui restent sur les joues de son amie avant de lui tendre un sourire naturel. "Est-ce que tu veux qu'on fasse quelque chose de particulier pour te redonner le sourire ce soir?" Il ne sait pas ce dont elle a réellement besoin mais Tim sera là quoiqu'il arrive, c'est cela que Reed doit retenir, qu'il est son ami et qu'il ne la lâchera pas de sitôt, qu'importe la douleur qu'elle peut ressentir à l'heure actuelle.
“It's not enough to be up to date, you have to be up to tomorrow.”
Elle lève les yeux vers Timothy, qui lui annonce avec la plus grande simplicité qu'il est normal de pleurer. Pleurer. Niamh n'est pas quelqu'un qui verse une larme ou même deux. Elle encaisse. Elle encaisse et met tout dans un petit carton, le fourre dans un coin de son esprit et continue. Elle fonctionne comme ça depuis l'adolescence. L'humour comme issue de secours. Elle essuie ses larmes tout en écoutant les sages paroles du père célibataire. Dieu soit loué, c'est chez lui qu'elle craque et pas devant Jax. Elle acquiesce d'un signe de tête au mot robot. Hélas, elle n'en est pas un. Parfois, ce serait néanmoins plus pratique. Elle a le sentiment d'avoir été retréci, tant elle se sent minuscule quand il pose les mains sur ses joues pour chasser les dernières larmes. Elle se sent minuscule et elle déteste ce sentiment. Un faible sourire vient se poser sur ses lèvres alors qu'elle hoche fébrilement d'un signe de tête. Elle ne se sent pas comme Dame Courage, Niamh a agi dans l'urgence. Elle a agi comme un robot. Elle sait que cela peut être interprété comme du courage maisil n'en est rien. Néanmoins, elle ne le contredit pas. Car parfois on a besoin d'entendre ce genre de mots pour régénérer les batteries à plat. « Merci », souffle-t-elle en englobant le tout. Les gestes. Les paroles. Ce sourire auquel elle a décidé de s'accrocher. Merci pour tout. D'être là, d'être lui. Simplement.
« Y'a pas un truc débile à la télé … à regarder ? Histoire de se moquer un peu ... », dit-elle d'une voix timide, affichant une petite moue. Son péché mignon, commenter les émissions de télé-réalité débiles. Elle sait combien de neurones elle perd par épisode mais elle a le sentiment d'en apprendre toujours un peu plus sur sa génération de dégénérés et puis cela lui permet de mettre son cerveau sur pause pendant quelques minutes voire heure. Elle plonge son regard dans celui de Timothy sentant que ce dernier est en train de faiblir, trouvant cette idée sûrement débile mais elle vient saisir son tee-shirt du bout des doigts pour le secouer doucement comme aurait pu le faire une enfant boudeuse. « C'est toi qui a demandé », ajoute-elle avec ce brin de malice dans la voix.
Il tente de la réconforter comme il le peut même si Tim ne peut pas mesurer sa peine à l'heure actuelle. Il sait simplement qu'elle aura toujours un trou béant dans le coeur lorsqu'elle repensera à ce qu'elle a sacrifié pour que sa vie soit plus simple à l'instant T. Quel autre choix aurait-elle pu avoir? Timothy ne va pas lui demander car, de toute façon, sa décision a été prise bien des semaines auparavant, dans le plus grand des secrets puisque lui-même apprend tout ce qui s'est passé seulement ce soir. Il ne désire surtout pas la brusquer parce qu'il se doute que rien n'a été pris à la légère, qu'elle a dû passer de longues nuit à réfléchir à ce qu'elle pourra bien faire pour s'en sortir avec le moins de chagrin possible, comme s'il y avait une solution miraculeuse pour ce genre de choses. Evidemment, la réponse est non et Tim ne peut que la serrer contre lui en attendant qu'elle arrête de sangloter, Niamh qui le remercie alors qu'au bout du compte, le français n'a pas fait grand chose pour l'aider. Certes, il a été là ce soir mais si elle a réagi de cette façon, c'est aussi parce qu'il l'a confrontée à ses propres enfants et c'est la raison qui l'a poussée à craquer. Il se sent quelque peu responsable des larmes qui ont coulé et le brun lui fait un sourire timide alors que son amie a l'air de reprendre un peu du poil de la bête. Alors, Decastel en profite pour lui demander si elle a des désirs particuliers pour terminer la soirée maintenant que les jumeaux dorment à poings fermés et que rien d'autre que la faim ne viendra les réveiller d'ici bien des heures, du moins Timothy l'espère. "Tu sais que je regarde jamais la télé, Nini? Je viens d'acheter celle-là mais je l'ai juste branchée, je sais même pas vraiment m'en servir en vrai. On avait pas ça chez les deux petits Decastel. On avait déjà pas toujours de l'argent pour manger alors..." Cela n'avait pas été la priorité et Tim n'a jamais ressenti aucun manque, pas de ce genre de divertissements dont Niamh pouvait lui parler. "Tu regardes ça, toi? J'en ai entendu un peu parler mais alors, je suis loin de capter le délire. Je suis un vieux, tu sais bien." Trente cinq ans et le mode de vie d'un octogénaire, rien que cela pour ce cher Decastel qui l'invite à revenir vers le canapé, là où ils seront bien plus à l'aise pour discuter, et pourquoi pas rigoler, c'est ce que Tim espère en tout cas, que l'orage est passé, que tout ira mieux maintenant.