Il n'a pas vu l'après-midi défiler. Debout sur l'estrade face au parterre de participants, de personnel soignant et de bénévoles, Jax écoute son co-président remercier l'assemblée. Devant eux, les visages apaisés des familles créent en lui un puissant sentiment d'accomplissement. Comme le dit si justement son binôme, la vie au sein de l'hôpital n'est facile pour personne, encore moins pour ces enfants qui n'ont rien demandé d'autre que d'avoir une existence vide de tracas et de maladie. Mills est fier du travail accompli, fier des efforts combinés de chacun ayant permis d'offrir un peu de répit à tous. À défaut de guérir, ils rechargent les batteries de ceux dont la tâche et de se battre au quotidien. Plus encore, l'agent est fier d'Isaac et du sérieux avec lequel ce dernier a veillé à ce que tout se passe comme sur des roulettes pour cette première animation du pôle hospitalier de RUN FOR JUDY.
C'est pourquoi, à la fin de la prise de parole de Jensen, Jackson s'avance et demande à la foule encore quelques secondes de son attention. « Les personnes présentes à nos côtés depuis la création de l'asso savent à quel point il nous tenait à cœur, à Joy et moi, que RFJ devienne un soutien indéfectible pour les acteurs des scenarios s'écrivant entre les murs du service pédiatrique de cet hôpital ... » Mills tourne son regard en direction de l'infirmier. « Aujourd'hui nous devons remercier Isaac d'avoir accepté de succéder à Joy et de rendre possible la pérennité de l'association via la charge de travail qu'il encaisse en coulisses. » Son poing se tend en direction de celui qu'il met à l'honneur sous le regard brillant des enfants. « Thanks, Bro. » Mills check et l'attrape pour une accolade virile à laquelle il ajoute, en plus de quelques tapes dans le dos, des mots discrets articulés à sa seule attention : « J'pouvais pas espérer meilleur partenaire. Joy t'embrasse. On ira loin. » Il le pense autant qu'il l'affirme.
Je ne connaissais pas Jackson de façon personnelle... Même si l'on pourrait croire qu'à force de lire son dossier psychiatrique, on peut apprendre à connaître quelqu'un sous la facette la plus intime qui soit. Je « connaissais » certaines grandes lignes de Mills, mais je ne me donnais pas le droit d'oser dire que je le connaissais très bien. Depuis que j'ai rejoint l’association, il y a quelques années, on s’était un peu plus rapproché, mais de là à dire que nous étions devenus de grands amis, je n’oserais pas plus… Je respectais la limite qu’il avait instauré entre nous deux, n’y voyant aucun inconvénient, même si j’étais toutefois capable de voir dans son langage non-verbal qu’il n’allait pas bien. J’osais encore espérer qu’il saurait où me trouver le moment venu ou toute autre aide dont il aurait besoin.
En arrivant près de lui, je le saluais naturellement. Il me complimenta sur mon look, ce qui me fit grandement sourire. C’est vrai que ça faisait changement de l’habituelle blouse blanche. « Oh, ça va. Déjà à la troisième année... Des cas de plus en plus palpitant, un peu plus de confiance en moi. C'est vraiment différent du temps où je te suivais ! » dis-je en souriant. C'est vrai qu'il y avait une différence entre assister à une consultation et être celle qui mène ladite consultation. À peine nous avions eu le temps de discuter qu'Isaac se mis à l'avant pour faire un discours assez touchant. Ça me rendait encore plus fière de faire partie d'une petite organisation comme RFJ. J'applaudis lorsque le jeune homme termina son discours et ne fut pas pour le moins surprise de voir Jax s'avancer pour parler à son tour. J'applaudis à ses mots, c'est vrai qu'Isaac faisait un travail de moine depuis belles lurettes, mais encore plus dans la dernière année. Je restais debout, à applaudir, les yeux brillant devant l'émerveillement des enfants, mais aussi la bromance des deux hommes.