Le sourire de Célia resta affiché sur ses lèvres aux propos d'Enzo. Un peu râleuse sur les bords ? Alors c'était son papa tout craché. Cela la faisait sourire. « C'est bien de reconnaître ses défauts. » Avoua la jeune femme en gardant ses yeux verts sur lui. Elle se demandait si elle, un jour, elle arrivera à construire sa propre famille. Ça lui semblait à des années lumières pour l'instant. Mais c'était quelque chose qui lui plaisait. Pas dans l'immédiat mais oui, plus tard pourquoi pas. Si elle trouvait la bonne personne, qu'ils se sentaient prêt tous les deux. La jeune femme prit une dernière gorgée de son verre en voyant le serveur qui apportait leurs assiettes. A la question du policier, elle reposa son regard sur lui tandis que le serveur déposait leurs plats. Célia le remercia puis elle haussa un peu les épaules. « Pas grand chose. Je n'ai pas sauvé le monde. » Avoua-t-elle avait un petit sourire. Non c'était loin de là. Elle n'avait même pas pu sauver la seule personne qu'elle voulait sauver. Elle chassa rapidement ses sombres pensées et reprit : « J'ai laissé tomber la médecine... toutes ces heures à l'hôpital, ça devenait infernal. » Même en le disant à Enzo, elle arrivait à s'en convaincre elle-même. Mais la médecine lui manquait. Son premier métier lui manquer mais pas aussi cruellement que son premier petit patient. « J'ai acheté une boutique, sur Pine Rivers. J'ai toujours aimé les antiquités, alors j'en ai fais mon métier. Ça me change. C'est plus... reposant. Et puis, ça me permet d'avoir plus de temps pour moi. » Oui, enfin sauf qu'elle ne sortait pas souvent. Et Selina lui en faisait constamment le reproche. « Et je me suis associée avec quelqu'un pour créer une fondation pour les animaux qui ne peuvent plus être adoptés. » Cela lui tenait à cœur. Célia adorait les animaux. Puis elle esquissa un mince sourire en reposant son attention sur Enzo. « Dis comme ça, ça fait vraiment femme désespérée. » C'était tellement difficile pour elle, tout ça. Parce qu'elle avait mis trop longtemps sa vie personnelle de côté, maintenant elle avait un peu de mal avec les gens. Alors qu'à une époque, elle avait été un super médecin. A présent, tout était différent. Et même après trois ans, Célia cherchait encore ses repères...
Reconnaître mes défauts, ça j’ai toujours su faire, un peu trop d’ailleurs. Je ne suis pas du tout du genre à me vanter, juste à vanter ce qui fait de moi une personne qu’on ne peut pas aimer. Ou difficilement. Je n’irais pas non plus crier sur tous les toits que je suis infernal, non, on peut me supporter, mais à force de recevoir des échecs sentimentaux, je crois bien que ça m’a vraiment rendu négatif vis-à-vis de ma personne. Bien que je préfère en rire la plupart du temps, ça me permet de garder mon moral fort, et avec mon boulot, pas question de faiblir. Et puis bon, je sais que je n’ai jamais été parfait et j’ai appris à vivre avec. Toujours est-il qu’on avait bien assez parlé de moi et de ma nouvelle vie depuis toutes ces années où on ne s’était plus revus avec Célia. Elle me fit d’ailleurs sourire en me disant qu’elle n’avait pas sauvé le monde. En même temps, qui pouvait réellement. Mais je fus vraiment surpris quand elle m’annonça qu’elle avait abandonné la médecine Vraiment ? Lui demandais-je un peu par réflex, par réel surprise et choc d’entendre ce revirement de situations. Pourtant j’étais persuadé à l’époque que Célia aimait son travail Faut croire que ça lui pesait bien trop Et tu fais quoi maintenant du coup ? Lui demandais-je avant qu’elle ne m’explique qu’elle avait acheté une boutique d’antiquité et que ça avait toujours été l’une de ses hobbies. Pourquoi pas. Je n’aurais jamais pu penser ça d’elle. Par contre, ce qu’elle m’annonça par la suite, me semblait déjà un petit peu moins surprenant. J’avais déjà cru comprendre qu’elle aimait les animaux oui. Une bonne idée. Lui répondais-je simplement avant qu’elle ne rajoute qu’elle semblait désespérée. J’eus alors un rire, repensant à ce rencard forcé par conséquent. C’est sûrement ce que pense Selina oui, d’où ta présence ici, mais si ta vie te convient comme elle est, c’est le principal, tu ne crois pas ? Après tout, je ne pouvais pas la juger, je passe tout mon temps au boulot, ou avec ma fille, je ne suis vraiment pas mieux niveau désespoir.
Célia a toujours aimé faire les vide-grenier, les brocantes. Ce genre de truc, elle appréciait même si pour cela, elle devait se lever aux aurores. Cela ne la dérangeait pas. Parce que c'était aux premières heures de la journée, qu'on pouvait faire les meilleures affaires. Elle avait récupéré pas mal de petites merveilles. Certaines allaient sur les étagères de sa mère, d'autres sur celles de ces grands parents. Maintenant qu'elle était adulte et qu'elle avait sa propre villa, elle se faisait plaisir. Mais c'était différent à présent. Elle en faisait son métier. Elle n'avait pas cherché longtemps, son domaine de reconversion. Elle appréciait ce qu'elle faisait, même s'il y avait encore des membres de sa famille qui ne comprenaient pas ce retournement de situations. Seulement, cela plaisait à Célia et c'était quand même le principal. Elle ne regrettait pas son choix. Même si la médecine lui manquait. Célia n'était pas du genre à vivre avec des regrets, ce n'était pas dans sa nature. Enzo ne semblait pas étonné par son choix. Ou peut-être qu'il ne le montrait pas. Il ne la jugeait pas en tout cas. Il n'était pas ce genre de personnes qui faisaient des remarques déplacées, voire blessantes. L'antiquaire reprit une bouchée de son plat puis elle répondit un instant plus tard : « Pas pour tout le monde. » Bonne idée, c'était une conception subjective. Ses parents étaient sceptiques même si sa boutique fonctionnait bien et qu'elle avait été bénéficiaire dès la première année. Elle souriait ensuite à la réplique du policier. « Oui, c'est ce que je me dis, mais j'aimerai bien que Selina en soit convaincue aussi. Après tout, elle devrait être celle qui me comprend le mieux. » Puis le sourire de la jeune femme s'estompa un peu avant d'ajouter : « Enfin, de toute façon en ce moment, on a vraiment du mal à communiquer. On se prend la tête sans arrêt. » Célia ne savait pas si entre Enzo et sa sœur, le courant passait mieux, apparemment oui, mais avec elle, c'était les montagnes russes. Il faut dire que l'antiquaire s'inquiétait souvent pour sa sœur et elle avait parfois l'impression de se substituer à leur mère. Seulement Selina avait 3o ans.
Cela ne semblait pas être une bonne idée pour tout le monde apparemment le fait qu’elle ait ouvert une association. A moins que ce soit pour sa boutique ? Peut-être les deux. Et la conversation me fit revenir sur Selina finalement et Célia rebondit sur le fait qu’elles ne s’entendaient pas tout le temps. Mais ça, ça paraît assez normal et compréhensible, c’est toujours comme ça entre frère et sœur, mais peut-être qu’en ce moment particulièrement elles ont du mal à être sur la même longueur d’onde. Ca va passer, j’en suis sûr. Si ça vous arrivait pas autant avant, y’a pas de raison pour que vous retrouviez ça. Lui répondais-je pas vraiment sûr de ce que j’avance vu que je ne connais pas non plus en profondeur leur problème de communication et ce n’est pas moi qui vais en demander davantage, mais c’est vrai que Selina me parlait beaucoup moins de Célia en ce moment. Déjà qu’elle n’est pas du genre à me parler d’elle très souvent, sûrement du à notre relation foireuse, ça ne risquait pas d’arriver en ce moment en effet. Vous avez de la chance d’être là l’une pour l’autre, c’est le principal. Je me sentais tellement seul avant de retrouver Mina, c’est vraiment pas facile de se retrouver seul. Lui racontais-je alors pour la faire se sentir un peu mieux par rapport à sa relation avec sa sœur, ne sachant pas si j’avais eu des paroles déplacées ou non. Avec Célia je ne sais plus comment réagir concrètement.
Le repas se déroulait dans une ambiance plutôt apaisée. Ce qui n'avait pas été le cas au tout début. Mais maintenant que les choses avaient été mises à plat, l'entente s'en ressentait. Et c'était agréable. Oui, tellement plus agréable. Célia aimait profiter de ce genre de soirée. Ces derniers soirs, elle avait passé son temps sur des listings d'objets ou devant des films de Paul Newman. Aux paroles du policier, Célia posa ses yeux sur lui. « Je ne sais pas. On s'est déjà prise la tête, mais jamais comme ça. » Cela ennuyait l'antiquaire, mais pas plus que les décisions décousues de sa sœur. Cela l'inquiétait et elle avait parfois l'impression que Selina faisait exprès. Comme pour la punir de quelque chose dont elle en connaissait pas le motif. C'était difficile. Leurs conversations et leurs soirées à deux lui manquaient terriblement. Mais cela ne semblait pas être sur le point de s'arranger. En tout cas, pas dans les jours à venir. Célia esquissa toutefois un sourire, voyant qu'Enzo essayait de la rassurer à sa façon. Mais aux mots suivants d'Enzo, Célia perdit un peu de son sourire. « Être seul et avoir quelqu'un dans sa vie sont parfois deux choses différentes. On peut être avec quelqu'un, et se sentir seul quand même. » En tout cas, c'était ce que ressentait la jeune femme, de plus en plus souvent. Même la présence de sa jumelle n'arrivait pas à apaiser ce vide qu'elle avait en elle. Puis elle se força quand même a avaler quelque chose. Elle reprit la parole un instant plus tard. « Mina c'est ta sœur d'adoption c'est ça ? » Elle ne se souvenait plus très bien. Enzo lui en avait déjà parlé par le passé.
Avec les paroles de Célia, je n'avais pas trop l'impression que sa relation avec ma meilleure amie pouvait vraiment s'améliorait. Elle allait forcément s'améliorer, les liens du sang finissent par gagner, ça je le sais mieux que personne, surtout qu'elles n'ont vraiment aucun réel sujet de discorde, elles se sont toujours bien entendues, du moins de ce que j'ai pu constater et voir, alors je ne voyais pas pourquoi ça n'irait pas mieux pour les sœurs. Faut bien que quelqu'un ait foi en elles. Je rajoutais que c'était important d'avoir de la famille, et que je savais ce que c'était, surtout quand je me suis retrouvé seul à l'orphelinat avant de retrouver enfin Mina. Et forcément, parler de Mina avait permis à Célia d'enchaîner sur autre chose. Mais je voyais parfaitement où elle voulait en venir quand elle disait que parfois on se sent seul même entouré. Oui je comprenais J'ai vécu exactement la même chose avec Maxyn. Je sais ce que c'est. Sauf que moi j'avais pris la fuite, alors que lorsque ça t'arrive avec de la famille, c'est un peu impossible, ou alors faut carrément changer de vie. Toujours est-il que Célia me demanda si Mina était ma sœur adoptive. Je lui souriais et lui répondais Non non c'est ma sœur de sang, la vraie. En même temps, je n'ai jamais eu de famille adoptive. J'ai quitté l'orphelinat à 16 ans pour l'armée. C'est quand j'ai quitté l'armée que j'ai pu retrouvé Mina.Lui expliquais-je, me rendant compte, qu'on n'avait jamais vraiment parlé de ça auparavant. Ma vie n'est pas un secret non plus, mais c'est vrai que je ne confie pas ce genre de détails à tout le monde, tout dépend si ça arrive dans la conversation ou si je me sens du genre à vouloir me dévoiler ou non, ou si je me sens en confiance. Et pourtant je l'ai toujours été avec Célia.
Célia était aussi perdue que pouvait l'être Enzo sur sa relation avec sa sœur. C'était la première fois que cela arrivait. La première fois que le malaise était si grand. Bien sûr, elles avaient déjà eu des disputes. Elles s'étaient criées dessus à plusieurs reprises, parfois plus méchamment que d'autres. Mais là c'était différent. Le souci, c'est que Célia gardait tout pour elle à présent. Elle se refermait complètement. Elle ne se sentait plus elle-même depuis un moment et elle ne savait pas vraiment quoi faire pour changer les choses. Peut-être trop solitaire, ou sûrement trop orgueilleuse pour avouer qu'elle n'allait pas bien. Le fait est que cela ne changeait rien à cette situation. Et ce n'était pas l'attitude de sa sœur qui allait arranger les choses. Selina ne rendait pas les choses faciles en se braquant, en ne l'écoutant pas ou en partant au quart de tour. Cela ne donnait même pas envie à Célia de lui parler. Aucune envie. Alors elle se taisait mais maintenant un fossé s'était créé entre elles. Et elle ne savait pas si elles allaient pouvoir le reboucher ou si au contraire, il allait s'agrandir dans les semaines qui arrivaient. Enzo semblait la comprendre quand elle lui avouait qu'elle se sentait seule. Mais en même temps, elle la cherchait cette solitude. Comme un rempart contre les autres, un moyen de ne pas souffrir, de s'éviter des déceptions. Elle s'enfermait dans son boulot. Et il fallait des subterfuges pour qu'elle accepte de quitter ce cocon dans lequel elle se sentait à l'abri. Quand le policier reprit la parole, elle reposa ses yeux verts sur lui. Il est vrai que Célia ne lui avait jamais posé des questions sur sa vie à l'orphelinat. Elle n'avait pas envie de lui rappeler de mauvais souvenirs. Et elle n'était pas sûre qu'Enzo puisse avoir envie de partager ça avec elle. Pourtant, il répondait à sa question. Ce qui la surprenait un peu, mais pas dans le mauvais sens du terme. Célia trouvait ça triste de vivre à l'orphelinat. Parfois elle se disait qu'elle devrait adopter un enfant, lui donner une chance d'être heureux et d'avoir un équilibre auprès de personnes qui s'intéressaient à lui. Mais encore une fois, le risque de perdre cet enfant, était trop grand pour Célia. Et elle repoussait tout ça dans un coin de sa tête. Et puis, pour l'instant, elle n'avait pas trouvé la personne qui lui donnait envie de fonder une famille. Et elle doutait que ça puisse arriver un jour. Elle allait quand même avoir trente-et-un ans cette année. « C'est super alors que tu puisse l'avoir à nouveau dans ta vie. Il faudra que tu me la présentes un jour, peut-être qu'on pourra être amie. » Enfin en même temps, elle n'était pas certaine qu'il y aura un prochain rendez-vous avec Enzo, amical ou non. S'il était là, c'était quand même à cause de Selina. Puis elle finit par demander, un peu curieuse. « C'est pour quitter l'orphelinat que tu as intégré l'armée ? » Elle s'était posée la question quand Enzo lui en avait parlé. Puis elle ajouta rapidement, tout en repoussa l'assiette, n'ayant plus faim. « Enfin, tu n'es pas obligé de répondre. J'imagine que tu ne dois pas avoir de bons souvenirs de cette période. »
Parler de nouveau avec Célia, comme si on faisait de nouveau connaissance est plutôt plaisant. J’avais l’impression de la retrouver après toutes ces années, et je me rendais compte qu’elle m’avait plutôt manqué. Faut dire aussi que mes amis je les compte sur les doigts d’une main, alors quand je peux en retrouver un, c’est toujours très agréable. Malgré le fait qu’entre elle et ma meilleure amie, ça semblait être assez froid. Mais voilà le sujet à peu près clos, que j’ouvrirais très certainement de nouveau avec Selina quand je la verrais, et on parlait à présent de moi. Chose logique après tout, même si ça parlait de ma famille et de mes galères d’enfance. J’avais pu faire le deuil de tout ça, m’en accommoder, même si mon père me manquera toujours énormément et que ma mère, je la regrette forcément. Mais j’ai appris à vivre avec tout ça, et en parler ne me dérange plus. A vrai dire, ça ne m’a jamais réellement dérangé. J’évite de trop parler de tout ça voilà tout, de rentrer particulièrement dans les détails. Je souriais à Célia quand elle semblait emballer à l’idée de rencontrer ma sœur et qu’elle pourrait elles aussi devenir amies Oui pourquoi pas. Lui répondais-je simplement, ne sachant pas trop si ça se fera un jour, mais le fait qu’elle soit si spontanée et enthousiaste me touchait particulièrement. Elle ajouta alors une autre question, à laquelle je m’apprêtais à répondre quand elle se reprit pour me faire justement savoir que ça pourrait me déranger de parler de cette période de nouveau Non, ça va, j’ai quand même rencontré de chouettes personnes à l’orphelinat avec qui je suis toujours ami. Il y a du bon dans chaque malheur. Mais oui j’ai intégré l’armée pour vite me barrer de l’orphelinat, ça va un peu, et puis je voulais surtout vite retrouver mes sœurs. Même si l’armée ne m’a pas du tout aidé à les retrouver, au moins j’ai extériorisé toute ma souffrance.
Célia s'était promis de faire des efforts pour aller vers les autres. En tout cas c'était ce qu'elle voulait. Elle était du genre à aimer sa zone de confort. Seulement, cette conversation avec Enzo lui rappelait un peu trop qu'elle avait oublié cette promesse. Des rencontres, elle n'en faisait pas. Mais c'était surtout de sa faute. Elle prétextait toujours être occupée, ou être absente ou de ne pas être intéressée. Mais à vrai dire, elle était un peu maussade ces temps-ci et elle n'avait pas envie d'infliger sa présence à qui que ce soit. Avec le policier, cela allait un peu mieux. Peut-être parce qu'ils avaient été amis et qu'ils n'avaient jamais pris de gants pour se dire certaines choses. Alors Célia essayait de reprendre ses marques. Et quand Enzo lui avait parlé de sa sœur, elle avait trouvé ça tout naturelle, de la rencontrer. Parce que mine de rien, l'antiquaire ne connaissait pas la famille d'Enzo. Elle n'avait jamais eu l'opportunité de la rencontrer. Même si elle savait que pour lui, tout ça était un peu difficile. Elle espérait simplement que le flic n'allait pas mal le prendre. A vrai dire, ce n'était pas dans ses habitudes de provoquer des rencontres de ce genre. Mais finalement, ce n'était pas désagréable et puis, c'était une bonne façon d'aller de l'avant. Rencontrer de nouvelles têtes, s'ouvrir un peu plus. C'était agréable, même si cela l'angoissait un peu. Elle était peut-être une maniaque du contrôle sans le savoir. Cela la fit sourire avant qu'Enzo ne reprenne la conversation. Elle se demandait si ce dernier allait commander un dessert. Elle avait bien envie d'une crème glacée. Elle s'était toujours demandé pourquoi il avait fait l'armée. Elle, c'était un truc qui la rendait perplexe dans le sens où quand il s'était engagé, il n'était même pas un homme, juste un gosse. Comment pouvait-on en arriver là ? Mais elle comprenait les raisons qui avaient poussé le policier à faire ça. « Je pense quand même que c'est triste de n'avoir eu que cette opportunité pour partir de l'orphelinat. » L'assistance publique était dure, tout comme l'armée. « Mais je trouve ça courageux. » Peu de personnes auraient fait le même choix qu'Enzo. Il était combatif sur plusieurs points. « Et je te retrouve bien dans cette décision. » Un fin sourire s'afficha sur les lèvres de la jeune femme. Cela lui rappelait les soirs où elle l'avait accueilli chez elle, le pull ou le t-shirt en sang. Ou cette fois où elle lui avait recousu l'avant bras au milieu de sa cuisine.
sd&schyzo
Dernière édition par Célia Scott le Mar 12 Avr 2016 - 21:18, édité 1 fois
Mon enfance a été loin d'être simple et plaisante. Mais je m'efforçais toujours de ne penser qu'aux bons moments, qu'aux événements qui ont fait ce que je suis aujourd'hui. Même si je ne pourrais jamais trouver le moyen de comprendre la réaction faible de ma mère. C'est la seule contre qui j'ai une réelle haine et profonde déception. Le reste, ne fait que parti de la vie, malheureusement. Et même si j'en ai aussi beaucoup voulu à mon père de nous avoir abandonné, il a été victime du destin qui fait qu'on ne peut pas lutter contre la mort. Depuis que j'ai enfin réussi à comprendre ça, je me sens beaucoup mieux et j'arrive à parler de mon enfance assez dure. Encore ça a été plus simple pour mes sœurs, elles étaient plus jeunes et on put avoir une autre et meilleure famille. C'est alors que j'expliquais à Célia que j'avais pu quitter l'orphelinat grâce à l'armée et elle trouvait ça triste de s'être rabattu là-dessus en quelque sorte. Tu sais, mon père était dans les forces de l'ordre, le passage a l'armée était parfaitement logique pour moi, et j'étais sûr depuis longtemps que je passerais par cette case. C'est juste arrivé un peu plus tôt que prévu. De toute façon je détestais l'école, alors c'était vraiment parfait. Lui expliquais-je pour lui dire que non, c'était loin d'être dommage, j'avais pu trouver ma voie, peut importe les tristes événements horribles que j'avais vécu. En attendant oui elle trouvait ça courageux et que ça me convenait. Oui j'étais bien d'accord avec elle. Mais le repas touchait à sa fin et je lui demandais tout de même Tu voudrais peut-être un dessert ? Moi je ne savais pas trop, je me contenterais peut-être d'un simple café je pense.
Célia avait du mal à imaginer vraiment ce qu'avait pu être la vie d'Enzo à l'orphelinat. Pas seulement lui, mais celles de tous les enfants qui avaient plus ou moins grandis entre ses murs. Une famille, c'était crucial. En tout cas, c'était ce que pensait l'antiquaire. C'était au sein d'une famille qu'un enfant apprenait à grandir, à évoluer, à découvrir le monde. C'était la vision de Célia de la famille. Parce qu'elle avait eu cette enfance. Et qu'elle avait été très heureuse et épanouie. Et c'était peut-être pour cette raison qu'elle avait du mal à s'imaginer fonder une famille. Parce qu'elle avait besoin de bases solides et ça, elle se sentirai probablement perdue. Enfin de toute façon, le sujet ne se posait pas. Elle était loin de tout ça. Même quand elle y réfléchissait, elle se voyait avec des enfants. Mais ça, entre se voir et le réaliser, il y avait parfois une sacré différence. Quand Enzo reprit la parole, la jeune femme reporta son attention sur lui. Elle ne savait pas pour son père. A vrai dire, elle ne savait pas grand chose sur Enzo. Il ne s'était jamais vraiment confié à elle. Célia imaginait sans mal qu'il faisait ça avec sa sœur, si tout au moins, il était du genre à se confier à quelqu'un. « Tu voulais faire comme ton père ? » Cela en donnait tout l'air. Même si elle pouvait le comprendre. « Et donc, quand tu as terminé l'armée, tu es rentré dans la police ? Tu ne voulais pas faire autre chose ? » Parce que même si on n’appréciait pas vraiment les études, il y avait d'autres métiers, que ceux qui nous mettaient constamment en danger. Même si ça restait courageux. Elle, elle n'avait jamais songé à faire autre chose de sa vie, avant la mort de Timothée. Cela avait toujours été la médecine. Elle avait hésité un temps entre la pédiatrie et la cardiologie. Puis finalement, en s'occupant de Tim, elle s'était promis de tout faire pour le guérir... Célia quitta ses pensées à la question du policier. « Non, mais je veux bien un thé. »
C’est assez rare quand je parle autant de mon enfance, que je me sente assez à l’aise pour en parler ainsi, en y mettant une certaine distance, ou voire même en appréciant de le raconter. En général, je le fais parce que les adages le veulent, mais là, j’avais envie de partager plus que des bandes blanches avec Célia pour une fois. Au final, on avait très peu appris à se connaitre et grâce à Selina on rattrapait un peu ce temps perdu. Seulement je ne pensais pas que ma vie et les choix que j’avais fait, pouvaient autant intriguer la jolie blonde Je voulais faire comme mon père oui. Un peu trop bateau et gamin je sais. Lui répondais-je tout en ayant un petit rire qui s’y accompagnait. Elle semblait vraiment surprise que je n’ai pas d’autres buts dans la vie, elle semblait insister sur ce point-là, je ne voyais pas trop pourquoi elle insistait. Ce n’est peut-être pas une carrière de choix selon elle. Quand j’ai quitté l’armée, j’ai d’abord fait quelques petits boulots dans la sécurité, et c’est après que j’ai voulu rentrer dans les forces de l’ordre. Mais la police ne me tentait pas vraiment. J’avais besoin aussi de mon indépendance, j’ai préféré les stups en fait. Lui expliquais-je alors, sentant qu’elle allait encore me poser trop de questions si je ne lui avouais pas que mon métier était un peu plus complexe et original que simple flic. Je sauve moins de civils en soit, c’est moins gratifiant, mais c’est ce qui me convient le mieux. Le repas touchait à sa fin, et je lui demandais si elle voulait un dessert tout de même. Ce fut un thé qu’elle préféra à la place. C’est pas une mauvaise idée, je vais prendre comme toi. Lui répondais-je tout en rappelant le serveur jusqu’à notre table pour les commander.
C'était agréable d'en apprendre un peu plus sur Enzo. Parce que finalement, il ne se connaissait pas beaucoup. Ils s'étaient souvent dit des banalités. Ou en tout cas, des choses qui n'entraient pas dans le cadre de la vie personnelle. Mais c'était différent ce soir. Enzo lui parlait facilement et elle aussi. La jeune femme appréciait qu'il parle autant en sa compagnie. C'était une première fois. Et ce n'était pas désagréable. Au contraire. Même si Célia était plutôt secrète, cela ne voulait pas dire qu'elle ne s'intéressait pas aux autres. C'était même tout le contraire. Mais contrairement à Selina, elle était moins bavarde que sa jumelle. Et peut-être que c'était pour ça que les gens lui parlaient plus facilement. Et c'était un comble quand on pensait que l'antiquaire avait personnellement, de gros soucis pour s'ouvrir aux autres. Mais elle apprenait peu à peu à le faire, comme ce soir. En tant normal, elle n'aurait même pas parlé de sa sœur et pourtant, elle l'avait fait. Un sourire s'afficha sur les lèvres de Célia. « Cela ne doit pas être facile tous les jours. Mais c'est chouette d'avoir pu faire ce que tu voulais. Beaucoup de personnes n'ont pas cette chance. Et elles portent leur boulot comme un fardeau. Je pense que peu importe le métier qu'on fait, il faut l'aimer. Et c'est ça le plus important. » Elle s'arrêta un instant avant de poursuivre : « Je t'avoue qu'après la médecine, je ne savais plus trop quoi faire... » Son sourire s'estompa un peu et elle observa un instant sa tasse fumante où son thé infusait doucement. Elle remua un peu la cuillère, laissant l'arôme se diffusait lentement dans le récipient, comme elle aimait. « Puis j'ai trouvé cette bâtisse en ruine. » Elle releva son visage sur Enzo et ajouta : « Selina croyait que j'étais folle de l'acheter. Mais maintenant je suis fière de ma boutique. »
C’est vrai que peu de personnes en ce bas monde ont la chance (ou les couilles) de faire le métier qu’ils aiment. Faut dire qu’il y en a beaucoup également qui n’aime rien et encore moins travailler. Dans ces cas-là, c’est évident qu’ils ne seront jamais épanouis dans leur métier. Mais ce n’était pas mon cas, et ce n’était plus non plus celui de Célia. Je pensais que la médecine était toute sa vie, puisque lorsqu’on s’engage dans de telles études, c’est forcément pour y consacrer beaucoup de temps. Mais finalement, voilà, elle avait préféré acheter une boutique pour en faire son autre vraie passion. Et c’est ainsi beaucoup mieux pour elle apparemment. Ça doit bien te changer de l’hôpital ! Tant que ça marche pour toi, c’est le principal aussi. C’est vrai que gérer une boutique, avec tous les frais qu’il y a, j’imagine que ça doit faire un peu flipper. Du moins, pour Selina. Oui parce que Célia semblait simplement épanouie, et plus stresser du tout. Ca s’apprend difficilement la gestion de l’argent, d’une boutique, d’un commerce tout simplement. Surtout aussi indépendant. Les thés étaient finalement bien arrivé, et ils commençaient peu à peu à s’infuser dans l’eau encore bien bouillante. C’était pas pour tout de suite que j’allais pouvoir le boire. La café je peux le boire bien chaud, mais c’est bien différent pour les thés et tisanes. Déjà j’en bois beaucoup moins. Faudra que je vienne voir ta boutique d’ailleurs un de ces quatre. Enfin, si tu veux bien. Oui parce que peut-être n’était-elle pas désireuse de me revoir après ce rencard forcé, et je ne pourrais que comprendre son refus.
Pendant de longs mois, la jeune femme avait été incapable de se projeter dans l'avenir. Quand elle avait arrêté la médecine, quand elle avait raccroché son stéthoscope, elle s'était sentie terriblement perdue, mais à la fois soulagée. Il avait fallu que quelques mois passe, pour ressentir cette angoisse de l'avenir. En quoi était-elle douée, à part faire ce qu'elle faisait depuis des années ? S'occuper de la santé des autres. Elle dessinait mais elle ne pouvait clairement pas en vivre. Elle n'était pas Monet ou Picasso. Elle adorait les enfants et elle avait songé à devenir institutrice sauf qu'elle n'avait pas les compétences et surtout, aucun diplôme. Pareil quand elle avait songé à devenir assistante sociale. Elle avait fini par abandonné toutes ses voies alternatives. Puis, elle était passée devant cette vieille bâtisse et cela avait été le coup de foudre. « J'ai acheté ma boutique sur un coup de cœur. Et c'est vrai que je n'y connaissais rien en gestion et marketing. Mais j'ai fais appel à un conseiller. Et j'avoue qu'il m'a bien aidé. Il est resté quelques mois à mes côtés. Une fois que j'ai pu me débrouiller seule, je l'ai fais. Après tout, c'était ma responsabilité. J'avais voulu cette boutique, je devais l'assumer sous tous les angles. » Elle ne pensait pas à cette époque, être capable de gérer ce genre de reconversion toute seule. Ces études de médecine ne l'avaient pas préparer à gérer un commerce. « Ce n'était pas facile tous les jours. Mais j'ai persévéré et maintenant je fais des bénéfices. Je trouve même de plus en plus des objets de grande valeur. » On pensait souvent que les boutiques d'antiquités ne regorgeaient que de choses anciennes, poussiéreuses et sans intérêt mais pas du tout. « J'ai même installé une alarme la semaine dernière. Je ne pense pas qu'on viendra cambrioler ma boutique mais bon, au moins ça rassure mes proches. » Oui, c'était idiot de penser à ça. Qui viendra visiter sa boutique alors que dans le quartier où elle était implantée, il y avait une banque et une bijouterie. Célia prit une gorgée de son thé. Puis aux propos d'Enzo, elle reporta son attention sur lui. Elle était un peu surprise à vrai dire. « Oui pourquoi pas. Enfin, tu sais que tu n'es pas obligé non plus. Maintenant qu'on a mis les choses aux claires, j'imagine que tu as autre chose à faire. » Elle ne pensait pas qu'il allait avoir envie de la revoir. « Et je ne t'en voudrais pas si tu ne passes pas. » Non. Elle avait appris à garder ses distances avec les autres. Et maintenant, c'était devenu une véritable façon de vivre.