I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
C’est une solution lâche, de préférer taire la vérité plutôt que de l’assumer ainsi que tous les questionnements et les jugements qui viendront avec, et pourtant, peut-on vraiment me blâmer de vouloir garder l’information pour moi vingt-quatre heures supplémentaires afin d’assurer la tranquillité de tous pour ce réveillon ? Peut-être sauraient-ils tous jongler avec la nouvelle et faire comme si de rien n’était, peut-être nous amuserions-nous tout de même, mais honnêtement, qui pourra nier ce fond de malaise qui pincera légèrement le cœur à chaque fois qu’il sera question de s’adresser à nous ? Quels sujets pourront être abordés ou non sans trembler à l’idée de mettre les pieds dans le plat et déclencher une guerre ou des larmes au milieu de repas ? Les mensonges ne sont pas une solution enviable, mais ils sont parfois nécessaires ; parfois, un petit mensonge est même nécessaire. Je sais que Joanne le comprend mais cela ne l’empêche pas de cracher sur cette stratégie qui n’est pour elle que le synonyme d’une soirée plus pénible encore qu’elle n’aurait pu l’être à la base. « Si tu ne sais pas mentir aux autres, mens-toi à toi-même, tu excelles dans ce domaine-là. » je lâche avec dédain, répondant ainsi à ma manière à l’ironie de la jeune femme. Dent pour dent. Un long moment passe pendant lequel nous n’articulons plus un mot ; chacun observe le feu dans l’âtre ou Daniel jouant avec sa peluche aléatoirement en laissant passer le temps à la vitesse qu’il voudra nous imposer. Quand vient l’heure de se préparer pour la soirée, Joanne et moi nous séparons pour notre plus grand soulagement ; je récupère mes affaires dans la chambre après elle mais demeure dans la suite avec Daniel tandis qu’elle se cherche une autre pièce où se changer. J’avais au départ prévu un costume rouge, mais après avoir joué au Père Noël toute une soirée, l’envie m’est soudainement passée d’arborer une fois encore cette couleur. J’opte alors pour une veste anthracite brodée d’un motif broquart détaillé et légèrement brillant sur un simple pantalon noir et des chaussures toujours impeccablement cirées. Normalement, un nœud papillon serait de mise, mais je préfère laisser mon cou dégagé ; l’air sera déjà bien assez étouffant. Daniel, lui, porte un petit costume tout ce qu’il y a de plus classique, sa bouille fait à elle seule tout son charme et son allure de beau bébé anglais. C’est fin prêts que nous rejoignons le reste des invités dans le grand salon, bons derniers arrivés, la faute aux gigotements du petit garçon. Mon regard tombe immédiatement sur Joanne, et mon cœur, lui, ne sait plus vraiment sur quel tempo battre. Elle porte les bijoux que je lui ai offerts à Noël, et ils lui vont si bien. J’admire en silence, pendant quelques secondes suspendues dans le temps, son visage angélique, son regard bleu brillant, sa silhouette finement mise en valeur, et les fleurs qui scintillent discrètement dans ses cheveux. C’est la voix d’Helena qui me rappelle la nécessité de respirer. « Eh bien, jeune Lord, est-ce que vous n’avez rien à dire ? » Mes yeux s’arrondissent. Joanne a vendu la mèche, ce n’est pas possible. « Est-ce que vous ne la trouvez pas magnifique ? » m’aiguille Helena, me procurant un vif soulagement au passage. « Si, elle l’est… » je murmure en m’approchant doucement. Je ne me permets que de frôler son visage du bout des doigts alors que mes yeux l’admirent dans le détail. « Magnifique. » La gouvernante rit légèrement, attendrie par la scène. « Voyez, il en perd son latin, le pauvre garçon. » Contrairement à Daniel qui, lui, tout émerveillé de voir sa maman sur son trente-et-un, fait pleuvoir sur elle des dizaines de compliments en babillages –du moins, vu son enthousiasme, on devine qu’il s’agit d’éloges. Nous sommes présentés aux amis des gardiens du domaine et n’oublions pas de souhaiter également bonsoir à Fiona et ses sœurs qui se sont également élégamment vêtues pour l’occasion –l’aînée rougit au moindre compliment. C’est une soirée décidément très féminine. Enfin, les Woodley apparaissent à leur tour. Mon ancien collègue n’hésite pas à m’étreindre. « Comment tu vas mon vieux ? » Je glisse que tout va bien, un autre petit mensonge nécessaire que tout le monde utilise au quotidien. J’embrasse sa femme sur les deux joues. « Tu es ravissante. Voici Daniel, et je vous présente ma… » Je me tourne vers elle, et aucun qualificatif nous faisant plus mentir que nécessaire ne me vient à l'esprit. « Joanne. » Le possessif suffira comme marque d'affection. En tout cas, avec le sourire tendre, cela semble faire illusion. « La fameuse. Enchanté. » Le chef de famille fait de succinctes présentations de sa tribu ; « Cole, Sonia, et voici Juliet et Maggie. » Deux petites métisses dont l'une est injustement bien plus belle que l'autre, possédant des traits fins et de beaux yeux vert clair. La cadette est bien plus rondelette et ingrate, mais n'a pas moins l'air adorable. « Ca fait plaisir de vous voir. » Non, c'est un crève coeur. Vous votre amour, vos filles, les anneaux à vos doigts qui vous lient à jamais, votre réussite. Je vous hais. « Nous t’avons raté à chaque fois que tu es passé à Londres, alors pas cette fois mon cher ! » Il ne fallait pas, vraiment. Puisque l'apéritif est servi, je siffle rapidement le premier verre de whisky, déplorant le traditionalisme de Gauthier qui tient à garder le champagne pour minuit, et prends mon temps sur le second tout en faisant la discussion ici et là avec aisance. Joanne est bien plus réservée. C'est Cole qui se décidé à aller vers elle dans l'espoir de l'intégrer à la soirée. Qu'elle ne se soit pas faite belle pour n'être qu'une décoration supplémentaire. « Vous savez, j’ai été à votre place. Le vilain petit canard au milieu de cette marre trop grande pour moi. » Mais elle devrait avoir pieds dans celle de ce soir, il n'y a que de bonnes âmes qui la peuplent et ne demandent qu'à passer une agréable soirée avec elle aussi. « Il ne faut pas avoir peur. »
crackle bones
Dernière édition par Jamie Keynes le Mar 20 Déc 2016 - 16:03, édité 1 fois
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Non que Joanne soit une alcoolique, mais elle avait hâte que le premier verre soit servi. Même si elle se trouvait toute seule dans la pièce, elle était déjà nerveuse au possible, masqué par ce manque d'enthousiasme de passer un réveillon pourtant magnifiquement bien préparé par la famille du majordome. Les mains jointes devant elle, elle attendait. Jamie finit par faire son apparition avec le petit dans les bras, tous les deux sur leur trente-et-un. C'était toujours la même chose, lorsque l'un et l'autre découvrait la tenue choisie pour un événement. Difficile de croire qu'il y ait encore véritablement des sentiments, ils devaient peut-être simplement admettre la beauté de l'un l'autre, mise en valeur par des bijoux ou des costumes parfaitement bien taillés. Helena finit par intervenir, leur remettant les pieds sur terre avec une question qui fit pâlir Jamie. Mais celui-ci fut rapidement soulagé de savoir à quoi elle pensait. Le bel homme se permit d'avancer jusqu'à Joanne. Il semblait être hypnotisé, ailleurs. Il avait même porté une main sur son visage pour frôler la peau de sa joue, peinant de trouver un qualificatif pour la définir. La petite blonde se demandait si ça faisait aussi partie du mensonge, ça. Elle ne savait véritablement plus croire de lui et faisait de son mieux pour que les mots qu'il lui disait ou la manière dont il pouvait la regarder ne l'atteigne pas trop. C'était troublant pour elle. Elle connaissait les talents d'acteur de Jamie et craignait de tomber dans le panneau, comme tous les autres invités. Ceux-ci furent présenter à Joanne, qui, venant à peine de faire leur connaissance, leur serra la main en guise de salutations. Jamie était incapable de trouver un mot pour définir Joanne. Celle-ci se demandait en quoi elle pouvait être fameuse. Les présentations faites, on démarra l'apéritif. Joanne avait opté, comme à son habitue, et à défaut d'avoir du champagne, pour un verre de muscat. Elle restait en retrait, à regarder tout ce beau monde. Les filles qui faisaient la connaissance de Daniel, Jamie qui bavardait avec ses proches, Fiona qui s'approchait de lui dès qu'elle en avait l'occasion. Elle aurait préféré ne pas être là, finalement, elle regrettait d'avoir accepté de venir. Elle subissait ce tableau aux allures parfaites, et elle en souffrait énormément. Ce qui ne la rendait pas très bavarde. "Ce n'est plus une mare, là." rétorqua-t-elle tout bas, avec un sourire quelque peu forcé. "C'est un océan, sinon plus grand si ça existe." Cole la regarda avec un air désolé. "Je n'ai pas de très grandes capacités d'adaptation." Certaines personnes s'y font très vite. On s'habituait à la richesse comme à la pauvreté, à une promotion ou une démission. Et en plus de cela, elle devait prétendre que tout allait bien alors que c'était faux. Elle ne s'habituait finalement pas au temps Anglais, ni à leurs habitudes. Brisbane lui manquait. "Ca prend du temps, ça dépend de chacun." répondit-il, avec un sourire encourageant. Joanne n'en était pas convaincu. A vrai dire, il était déjà même trop tard pour ce genre de réflexion là. "Comme vous faites ?" Elle et Cole ne parlaient pas bien faire, contrairement aux autres groupes de discussion environnant. "Eh bien, j'ai le soutien de la femme que j'aime, deux adorables filles qui me rappellent chaque jour pourquoi je suis là. Et ça vient tout seul." Cette conversation virait au crève-coeur. "Vous, vous avez Jamie, vous avez un fils qui va rendre folle la genre féminine, mais il suffit de voir les regards qu'il lance à sa mère pour comprendre que personne ne vous détronera de la place que vous avez dans son coeur. Vous faites partie d'une très belle famille, Joanne." Elle sentait ses jambes faiblir par le poids de ces paroles échangées. "Et Jamie excelle dans ce monde là, c'est un très bon guide, faites-lui confiance." Mais non, Joanne ne lui faisait plus confiance tout comme elle savait qu'elle ne pouvait plus compter sur lui pour avoir de son soutien dans des situations qu'il parviendrait à gérer haut la main. Elle se sentait alors soudainement oppressée, ses poumons commençaient à chercher un peu plus d'air. "Vous vous êtes fiancés, n'est-ce pas ? Vous n'avez pas de bague ?" Voilà que son coeur commençait à paniquer. Vite, il fallait qu'elle trouve une excuse, un stratagème. "Je..." Elle bégaya longuement avant de trouver quoi dire. "La pierre qui ornait la bague est... tombée. Elle est chez le bijoutier depuis un moment, je dois la récupérer... dès que nous serons rentrés." Et ce nous qui venait enfoncer un nouveau poignard en elle. Un tout premier mensonge, un tout petit, et elle ne se sentait pas bien. Joanne ne voulait pas que ce soit ainsi pour le reste de la soirée, c'était trop dur. "Excusez-moi une petite minute, j'ai oublié de prendre un médicament, je reviens tout de suite." dit doucement Joanne, navrée de devoir laisser le seul interlocuteur qui avait bien voulu l'approcher pour discuter avec elle. "Bien sûr, allez-y. Je ne bouge pas d'ici de toute façon." dit-il avec un petit rire et un regard amical. Joanne se précipita à l'étage à chercher le comprimé en question qu'elle avala avec le verre de muscat qu'on venait tout juste de lui remplir pour une deuxième fois. Ce n'était pas le moment de faire une crise, pas le soir de Nouvel An. Elle restait quelques minutes assises sur un fauteuil de la chambre avant de retourner au rez-de-chaussée. Elle lança un bref regard à Jamie. Avant même de s'approcher à nouveau de Cole, l'une de ses filles s'approcha timidement d'elle. D'abord impressionnée, elle finit par demander. "Joanne, Daniel ne veut pas me prêter son jouet." La petite blonde s'approcha alors de son fils et s'accroupit pour constater le petit problème. "Ah mais tu sais, c'est la peluche préférée de Daniel. C'est son doudou." "Mais je voudrais juste la regarder." "Mais il faut la lui rendre tout de suite après, d'accord ? Il est trop petit pour comprendre ce genre de choses." C'était d'un regard inquiet que Daniel regardait sa peluche avec inquiétude aller dans les mains de la plus petite des filles de Cole. Le petit s'appuya sur les cuisses de sa mère pour se lever. On lui rendit alors sa peluche, mais il voulait également être dans les bras de sa mère également pour se blottir contre elle quelques minutes avant d'être reposé. "C'est dingue comme la couleur de ses yeux est exactement comme la vôtre." dit Cole en s'approchant de Joanne. "Il fallait bien qu'il tienne une petite chose de moi." Il rit, et se permit de remplir le verre de Joanne. "Et pas des moindre !C'est un très beau mélange de vous deux, vraiment. Il va en faire tomber plus d'une. Il a de la chance de vous avoir comme mère." Joanne s'était entre temps redressée. "Je fais de mon mieux." dit-elle avec un vague sourire. "Vous êtes un peu pâle, vous allez bien ?" "Oui oui." assura-t-elle. "C'est justement pour ça que j'ai du prendre un cachet, ça va passer." Cole semblait véritablement soucieux, peut-être s'inquiétait-il que le malaise de Joanne ne lui joue de sales coups. Gauthier arrivait alors avec un plateau plein d'amuse-bouches magnifiquement monté. Toute une variété de mignardise pour cet apéritif. Gourmande, Joanne en prit quelques uns. Cole dut s'absenter, sollicité ailleurs. La jeune femme s'installa alors sur un fauteuil, et les deux fillettes se précipitèrent sur elle pour la complimenter et lui poser une multitude de questions. C'était pour le coup bien plus facile pour elle, de discuter avec les petites. Jaloux comme tout, Daniel se précipita alors vers elle pour bien rappeler que c'était sa mère, mais elles n'en tenaient pas compte, émerveillées par la moindre réponse que Joanne pouvait donner à leurs questions.
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Constatant que les petites filles ne comptaient pas laisser sa maman tranquille, Daniel, fatigué de faire l’intéressant en vain, débute une petite crise de larmes qui rougit ses grosses joues et noie ses jolis yeux bleus dans la contrariété. Afin d’avorter l’incident diplomatique, je m’excuse auprès de Gauthier et de ses amis afin de m’approcher de mon fils et le prendre dans mes bras, espérant qu’il saura se contenter de son père, même si ne pas être monopolisé par d’autres enfants me rend soudainement bien moins intéressant que Joanne. Cela suffit tout de même à faire cesser ce début de chagrin, et le petit finit par se blottir contre moi pour se consoler, ne perdant pas une miette des sourires et à l’attention que sa maman adresse aux fillettes. « Oui, je sais que c’est difficile de partager maman, mon bonhomme. » je lui murmure, en toute connaissance de cause, puis lui dépose un baiser compatissant et réconfortant sur la tempe. Non, la possessivité familiale n’épargne pas le plus petit qui est bien trop jeune pour comprendre que sa mère puisse parler à d’autres enfants sans que cela signifie qu’elle perde son intérêt pour lui. A vrai dire, je ne m’attends pas à ce qu’il l’assimile un jour puisque son père, à trente-cinq ans, ne l’a toujours pas compris. « Les filles, et si vous laissiez un peu d’air à Joanne ? » suggère Sonia avec un regard insistant. Obéissantes, elles s’en écartent et rejoignent leur parent, sagement postées à leurs côtés. J’en profite pour m’approcher de mon ex-fiancée dont j’ai bien remarqué la courte absence un peu plus tôt, et je devine sans mal que l’idée de passer le Réveillon entourée d’inconnus, loin de chez elle, et obligée de mentir sur notre relation lui a assez pesé sur la poitrine pour lui couper la respiration un instant. « Tout va bien ? » je demande en lui rendant un Daniel fort ravi de récupérer sa maman. Je m’accroupis face à elle et lui adresse un sourire se voulant rassurant. « Personne ne va te manger ce soir. Nous sommes entre amis. » Les miens et ceux de Gauthier, mais disons qu’elle n’a pas d’ennemis ici, personne dont elle doit se méfier. Tous les invités n’ont que bienveillance les uns pour les autres et cette harmonie est accentuée par l’esprit du Réveillon. Il faut qu’elle profite de la soirée, elle aussi. « Si cela intéresse quelqu’un, et je ne doute pas que cela soit le cas de tous bien évidemment, le jardin s’illuminera dans une minute. » D’un signe de tête, je fais signe à Joanne de venir avec le reste des convives s’approcher des fenêtres du salon pour admirer l’illumination du domaine. Quelques longues secondes nous font patienter pour mieux créer cet effet d’émerveillement qui fait briller les yeux des plus grands enfants lorsque toutes les guirlandes se mettent à briller dans les arbres et les bosquets. C n’est jamais tout à fait le même paysage d’année en année. Tantôt Gauthier se laisser tenter par des ampoules clignotantes ici et là, parfois il préfère se lancer dans un camaïeu d’une unique couleur. « C’est toujours aussi beau. » je murmure en glissant délicatement une main sur la hanche de Joanne. L’assemblée se laisse envoûter par le paysage un instant, puis la voix du majordome met fin au règne du silence. « Je me souviens, un hiver… » « Non, Gauthier... » Je connais l’histoire, il ne peut pas s’empêcher de la raconter à qui veut l’entendre. «… Jamie devait avoir cinq ans, et il n’était vraiment pas très grand comme garçon. » Gauthier me lance un petit regard de défi plein de malice, et reprend ; « Il était tellement excité par la décoration du jardin qu’il voulait absolument aller les voir de près, alors il a sauté dans son manteau et ses bottes, il a couru sur la terrasse et, hop, il a disparu. Littéralement. Il avait tellement neigé cette année-là que les petites marches pour accéder à la pelouse étaient ensevelies, on ne les voyait plus, alors il s’est rétamé en beauté du premier au dernier palier d’une traite. Tout ce qu’on a vu, c’est une paire de fesses de petit Lord détaler à toute vitesse puis se faire engloutir tout entier par la neige. » Le père de Gauthier est allé me récupérer dans le trou que formait ma silhouette, c’était plus de peur que de mal, mais ma mère n’a fichu une rouste, et l’on m’a laissé décongeler près du feu avant que je n’attrape froid. « Vous ne manquiez pas d’énergie à l’époque. » C’est bien connu. Aujourd’hui, cela donne des histoires drôles. Ce n’était pas tant le cas avant. Je ris légèrement, car le passé est passé, mais impossible d’effacer l’amertume pour toujours.
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Tel père, tel fils. C'était une vérité indéniable. Il fut un temps où Jamie voulait toujours avoir Joanne auprès d'elle. Si un homme l'approchait, sa possessivité le prenait de plus belle et il se sentait parfois obligé de sortir les crocs. Une jalousie qui avait toujours rassuré Joanne quelque part, se disant que c'était une preuve d'amour comme une autre, quoi que parfois excessive. Elle en avait un peu abusé, avec Lionel, mais il méritait qu'on lui donne une leçon après ce qu'il avait fait subir à leur couple. L'ancien supérieur de Joanne était aussi grandement fautif de bon nombre de disputes. La jalousie de Daniel ne faisait que se rajouter sur le nombre de choses qui angoissait Joanne et qui l'empêchait de respirer correctement. Elle avait hâte que son traitement fasse effet, ce sentiment d'oppression s'accumulait avec tout le reste et c'était insupportable. Avant qu'elle ne puisse dire quoi que ce soit, Sonia rappelait ses filles à l'ordre, au grand désespoir de la jeune femme. Elle était plutôt bien avec elles. Il s'accroupit face à elle, après avoir lui donné un Daniel bien content de n'avoir sa mère rien que pour lui. Les yeux de Joanne était particulièrement brillants à cause de l'émotion, ce début de soirée n'était pas une franche réussite pour elle, et elle n'arrivait pas à se divertir comme tous les autres. Le vilain petit canard, avait dit Cole. Le mot était faible, mais c'était ça. "Oui oui, ça va bien fini par passer. J'espère." dit-elle tout bas avec un sourire forcé. On pouvait deviner sa gorge se serrer dès qu'elle ouvrait la bouche. Entre amis, disait-il. Devait-elle le considérer lui comme ami également ? Est-ce que son inquiétude pour elle faisait partie du reste de la supercherie ? Se souciait-il véritablement du fait qu'elle passe une bonne soirée ou non ? Joanne ne savait plus vraiment quoi croire de ce qu'il lui disait, ou de ce qu'il faisait. Ce qui était vrai et ce qui ne l'était pas. Daniel devait sentir que sa mère n'était pas au meilleur de sa forme, parce qu'il s'était bien blotti contre elle et qu'il demeurait silencieux, sage comme une image. Gauthier les invité à s'approcher des fenêtres pour pouvoir admirer les illuminations. Une fois redressé, Jamie invita son ex à le rejoindre. Une fois qu'elle était postée auprès de Jamie, Gauthier avait éteint les lumière à l'intérieur afin de pouvoir mieux profiter des illuminations du domaine. Joanne restait muette, en admirant le décor. Elle se figea lorsqu'elle sentit la main de Jamie glisser jusqu'à sa hanche. Elle s'était promis de refuser le moindre contact physique de sa part, mais elle ne pouvait pas le rejeter comme ça, on se poserait des questions. Elle se demandait si ça faisait partie du mensonge de la soirée, ou si ce n'était qu'un de ces réflexes. Il savait pertinemment qu'elle était loin d'être remise de leur rupture, et que tout ce qui pouvait lui rappeler ces quelques mois d'idylle la faisait souffrir. Elle avait l'impression qu'il s'acharnait et Joanne faisait de son mieux pour se persuader que cette main posée là ne faisait que partie de la pièce de théâtre qui se montait là, et rien de plus. Gauthier se mit à conter une bien vieille histoire de Jamie durant un hiver. Beaucoup des autres invités riait, et Joanne le regardait, voyant qu'il n'était pas si ravi que ça que le majordome remonte à la surface. Ca ramenait une toute autre mélancolie, bien moins réjouissante pour lui. La petite blonde le regarda, toujours silencieuse, d'un air compatissant. Puis ses iris bleus allaient se perdre à nouveau à l'extérieur alors que d'autres convives préféraient revenir aux festivités. Et sa main n'avait pas bougé de place. "Joanne, je vous ressers ?" demanda Gauthier avec un sourire amical, bouteille en main. "Volontiers, oui. Ce muscat est excellent." "J'avais un vague souvenir que c'était l'apéritif que vous préfériez, je me devais de vous trouver une bouteille qui vous convienne." dit-il en lui remplissant le verre. "Jamie, désirez-vous un verre de whisky, à nouveau ? Ou autre chose ?" Et il s'éclipsa pour chercher ce qu'il fallait. "C'est magnifique. Ca fait rêver." dit-elle bien bas, en scrutant toujours l'extérieur. Joanne adorerait s'y promener, et ce serait une occasion parfaite pour s'éloigner de cette soirée qui n'était pas la sienne. Mais ce serait bien impoli, et ça mettrait certainement Jamie en colère. Elle ne pouvait pas supporter une nouvelle querelle. Qu'il préfère rester là ou s'éloigner d'elle, la jeune femme continuait d'admirer longuement les illuminations. Il devait savoir que c'était typiquement le genre de choses qui la faisait rêver. Et Joanne ne pouvait s'empêcher de penser aux illuminations qu'il y aurait du avoir à leur mariage. Elle sursauta lorsqu'on la sollicita. "Nous allons passer à table, Joanne." avait dit Cole en s'étant approché d'elle. Joanne lui sourit et le suivit. Forcément, l'une des places aux côtés de Jamie lui avait été réservé. Elle avait envie de prendre les jambes à son cou. Tout le monde était assis, discutait ou riait. "Installez-vous, Joanne !" dit Helena. "Nous avons préparé un petit plat rien que pour Daniel, je vous l'apporte, peut-être ?" Touchée par cette attention, la petite blonde regardait avec beaucoup de reconnaissance la dame. "Merci beaucoup. Oui, c'est l'heure de manger pour lui." Elle s'installa, en gardant Daniel sur les genoux, et son repas fut rapidement apporté. Un tout petit plat de lasagnes rien que pour lui. De base, il avait bon appétit, mais il se faisait particulièrement gourmand lorsque ses plats étaient aussi bien préparés. Il aimait déjà la bonne cuisine. Il était certain que c'était plus raffiné que les plats concoctés par sa mère. "Ne m'attendez pas pour commencer l'entrée. Daniel aime parfois prendre son temps." dit-elle timidement, voyant qu'on l'attendait pour poursuivre les festivités. Et être un fantôme pour les autres ne la dérangeait pas. "Nous ne sommes pas pressés, ce serait injuste de commencer sans vous. Et ça nous permet de prolonger un peu l'apéritif, il reste plein d'amuse-bouche, qui en veut ?" dit Gauthier.
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Je ne sais pas moi-même pour quelle raison ma main s’est frayé un chemin jusqu’à la hanche de Joanne. Sûrement pour parfaire le tableau, une question de crédibilité, mais j’avoue n’avoir pas réfléchi au geste qui s’est imposé de lui-même. J’imagine que notre petite comédie de ce soir est l’occasion pour tous les vieux réflexes de se refaire une place pour quelques heures. Tout cela sera bien rapidement balayé une fois que nous serons seuls. Les masques tomberont. Pour le moment, chacun remplit son rôle et l’illusion semble être parfaite aux yeux des autres convives qui ne nous ont jamais connus lors de nos véritables bons jours. Faute d’élément de comparaison, l’apparence du bonheur, la surface superficielle leur convient bien. De toute manière, personne n’aime la compagnie des couples sur le déclin, ils préfèrent croire que tout va bien, ils le veulent, alors c’est ce qu’ils voient. Ce parfait petit couple avec ce parfait bébé. Hypnotisé par les lumières, la voix de Gauthier me fait légèrement sursauter. « Je vais continuer avec le whisky, merci. » je réponds avec un léger sourire. Mon verre accueille rapidement le liquide ambré, et celui-ci rencontre aussitôt mes lèvres. Qui eut cru que je puisse tolérer cette boisson un jour. Joanne, Daniel et moi demeurons un instant songeurs devant le spectacle offert par le jardin. Il fait rêver, cela est bien vrai. Je finis par rejoindre les autres invités, laissant la jeune femme là avec un baiser sur le front. Perdre le contact physique avec elle fait revenir cette ancienne sensation de manque qu’elle me laissait toujours dès que nous nous éloignions. Je picore quelques amuse-bouche lorsque je commence à avoir faim, mais visiblement tous les estomacs crient discrètement famine et les hôtes le remarquent bien ; nous sommes alors invités à passer à table. Joanne est bien entendu assise à mes côtés. Daniel est le premier à dîner sur les genoux de sa mère son petit plat personnel. « Des lasagnes, le chanceux. » Puisque la faim demeure, je reprends un petit four ou deux pour accompagner mon doigt de whisky en attendant que le petit ait terminé. Les conversations vont et viennent jusqu’à ce que le garçon soit déposé sur une vieille chaise haute dont Gauthier et sa femme ne se sont jamais résolus à se débarrasser. L’entrée est servie. « Cela fait combien de temps que vous êtes ensemble ? » lance Sonia sans penser à mal. « Bientôt deux ans. » Je devine immédiatement quelque chose ressemblant à de la surprise et une petite pointe de jugement dans l’air et le regard de quelques convives. Pas prêts pour le mariage, mais prêts pour un bébé. « Nous savions que nous voulions des enfants, mais Daniel était une surprise. » j’ajoute avec un faux sourire pour justifier sa présence si tôt dans notre relation déjà terminée. « Une belle surprise. » je corrige même, qu’ils n’aillent pas croire qu’il fut gardé par dépits ou par conviction comme cela fut le cas de mes parents me concernant. Il est notre trésor, je pense que cela est absolument évident lorsque l’on nous voit avec lui. « Je suis curieuse de savoir comment vous vous êtes connus. » reprend Sonia avec un air malicieux, se voulant presque complice, mais qui nous oblige uniquement à nous battre contre notre malaise intérieur. Même les souvenirs agréables laissent encore des plaies qui attendent de cicatriser, regarder en arrière revient à gratter une croûte fraîche.« Ce n’est pas une histoire très intéressante. » je réponds en me réfugiant dans mon verre. Les regards de toute la table insistent pourtant pour connaître cette histoire et en juger d’eux-même. Je déglutis, difficilement, mais fais mine que cela ne me dérange pas tant que ça de me résigner, si cela peut leur faire plaisir après tout, et puis nous sommes si heureux depuis. Quelque chose du genre. « C’était à un gala du musée où Joanne travaillait et dont je suis un donateur. Le directeur nous a présentés, le courant est immédiatement passé. Une de ses collègues essayait de me faire les yeux doux, mais je préférais la compagnie de Joanne. Nous nous sommes infiltrés dans les salles fermées au public d’une exposition à venir pour être un peu seuls, mais on nous a rapidement sommés de retourner dans la salle de la réception. » Je crois que l’alchimie entre nous fut trahie dès ce moment-là. « Après le gala, j’ai invité Joanne à boire un verre chez moi. Mon chien, Ben, l’a immédiatement adoptée. Moi aussi. Elle était si craintive, alors que tout ce que je voulais c'était mieux la connaître et… être avec elle. J’aimais déjà tellement sa présence.” Je surprends la conviction dans mes mots, la sincérité et la nostalgie. Même la véracité du sourire. “Il ne s’est rien passé ce soir-là, sauf… un véritable coup de foudre. » Comme toujours, ce n’est jamais la véritable rencontre que je raconte. L’autre est bien plus représentative du chaos de notre relation, et ce qu'ils veulent, ce n’est pas tellement la vérité. Juste une belle histoire avec un peu de rêve. Je pourrais poursuivre, parler du parc, du restaurant, du premier baiser, puis la plage et Londres, mais je vois que les invités sont contentés avec ce que je leur ai servi. Avant de reprendre le repas, qui s'est naturellement interrompu pendant le récit, mon regard se pose sur Joanne comme pour déceler son ressenti, mais sûrement traduit-il bien plus de tendresse que je ne l'aurais cru car Sonia, nous observant avec un sourire conquis, lance l'air de rien ; « Voilà bien longtemps que Cole ne m’a pas regardée comme ça ! » Son mari écarquille les yeux, provoquant l'hilarité générale. « Quoi ?! » « Je plaisante. » murmure-t-elle avec un sourire en se penchant sur ses lèvres pour l'embrasser. Je termine mon verre et laisse Fiona me servir en vin pour accompagner ce qu'il reste de l'entrée.
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Dernière édition par Jamie Keynes le Mer 21 Déc 2016 - 15:45, édité 1 fois
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Ils n'y voyaient que du feu. Ils pensaient tous que le malaise de Joanne n'était du qu'au fait qu'elle était loin de chez elle et qu'elle ne connaissait personne parmi les invités. Ils étaient peut-être les amis de Jamie et de la famille de Gauthier, mais pas les siens, malgré toute leur gentillesse. Ils n'avaient pas idée de ce qui rongeait la jeune femme, et Jamie s'efforçait de parfaire ce tableau en devenant tactile. La jeune femme était déjà épuisée pour toute cette comédie, ce tissu de mensonge. Et le repas n'avait même pas encore commencé. Joanne donnait silencieusement à manger à son fils, sous le regard attendri de certains. Elle ne voulait pas y faire attention, ça l'arrangeait. Le petit mangeait bien et avec entrain. Il savait qu'il arriverait à faire sourire sa mère s'il mangeait bien et buvait bien de l'eau. Une fois repu, il était installé dans une chaise haute afin que la jeune femme puisse également profiter du repas. Curieuse, Sonia s'interrogeait sur le couple, n'ayant aucune idée à quel point ses interrogations faisaient saigner des plaies qui venaient à peine de se cicatriser. Tout le monde était surpris de la venue de Daniel, compte tenu du temps qu'ils étaient ensemble. "J'ai... quelques problèmes de fertilité." dit Joanne timidement. "Comme l'a dit Jamie, nous savions que nous voulions des enfants, et nous ne pouvions décemment pas passer à côté de cette chance là. On se fichait bien de savoir que nous étions un jeune couple, nous savions dans la seconde où nous avions appris la nouvelle que nous aimerions cet enfant plus que tout." L'on pouvait deviner dans le regard de la jeune femme que son parcours pour avoir un enfant avait été compliqué. Du moins, les mères qui étaient à table semblaient comprendre et elles la soutinrent du regard avec un sourire amical. "Nous aimerions en avoir d'autres, mais il faut attendre, et voir si un miracle veut bien survenir à nouveau." conclut-elle avec un vague sourire, en lançant un regard désolé à Jamie. Désolée d'avoir enchaîné les fausse-couches et de ne pas avoir pu lui donner cette petite fille dont il rêvait tant. Comme pour toutes les fois précédentes, Jamie parlait du gala du musée comme étant leur première rencontre. Ils n'étaient que tous les deux à savoir la vérité, et ils s'en cachaient bien. Tout le monde était attendri pour cette histoire. Même Joanne, qui savait qu'il était sincère. Que ce n'était pas quelque chose qu'il venait d'inventer pour satisfaire tout le monde. L'alcool devait certainement l'aider à le rendre sincère. Joanne le regarda avec tendresse, prise d'un grand moment de nostalgie lorsqu'il parlait de cette soirée. C'était un regard tout aussi affectueux qu'il lui lançait. "Et vous, Joanne ? Comment avez-vous vécu ce moment-là ?" demanda Sonia après avoir suffisamment plaisanté avec son époux. La petite blonde prit un certain moment répondre, vidant son verre de vin qui accompagnait son entrée. Il était aussitôt rempli. "Eh bien, au fond de moi, je suis tombée sous le charme dès le tout premier regard. Il a tout fait pour me mettre en confiance, et il s'est montré particulièrement patient avec moi. Ce n'est pas donné à tout le monde." dit-elle avec un rire nerveux. "J'ai rapidement compris que je ne pourrai pas me passer de lui. Qu'à la seconde où nous nous séparions avec un rendez-vous, j'avais envie de le revoir, d'être près de lui. Et quoi qu'on fasse, quoi qu'il se passe, il y a toujours ce magnétisme qui opère, tout le temps. Difficile de lui résister. Certains étaient sceptiques, mes parents en premier, parce que nous sommes différents. Surtout parce que nous ne sommes pas du même milieu. Mais à mes yeux, nous nous complétons. Lui me montre les soirées mondaines par exemple, et moi je lui donne goût à une vie plus simple, et je crois que ça lui plaît." Sans vraiment s'en rendre compte, Joanne avait discrètement pris l'une des mains de Jamie, qu'il avait posé sur son genou. Elle avait entrelacé ses doigts avec les siens et elle les serrait fort, histoire de décharger sa nervosité quelque part. "Vous formez un si beau couple, tous les deux." ajoutait Sonia, charmée par cette image idyllique, qui fut un jour vrai. Fiona rougissait toujours rien qu'en approchant Jamie, même si ce n'était que pour lui servir du vin. On terminait de manger tranquillement l'entrée. Joanne avait gardé la main de son ex dans la sienne, et l'avait même posé sur ses propres jambes. Sa main libre lui permettait de continuer à boire son vin. Elle ne savait plus le nombre de fois qu'elle avait déjà été servi depuis le début de la soirée. Mais cela la rendait un peu plus bavarde et à l'aise. On récupéra les assiettes des entrées et Gauthier s'absenta pour dresser les assiettes du plat principal. Sonia et Cole s'embrassaient régulièrement. L'image du couple parfait. L'espace d'un instant, elle espérait qu'il en soit toujours de même pour Jamie et elle. Elle adorait tant l'embrasser, passer ses doigts dans ses cheveux ou lui faire comprendre en toute subtilité lorsqu'elle avait envie de lui. Ces moments de complicité là lui manquaient. Pourtant, ils étaient bien complices dans leur petit jeu. Il ne fallait pas qu'ils y tombent également, ils pourraient facilement se faire avoir, surtout en continuant de boire autant de vin.
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Jamais ne me sais-je permis d’évoquer lesdits problèmes de fertilité de Joanne, et je suis surpris de l’entendre l’évoquer de la sorte face à mes personnes qui lui sont pour la plupart inconnues. Elle ne fournit pas le détail du problème, certes, et peut-être est-ce la dominance féminine autour de la table qui lui a inspiré confiance. A moins que, comme moi, le regard de ces invités désorientés par l’arrivée d’un bébé si précocement dans notre relation l’a poussée à vouloir jouer toutes les cartes pouvant nous justifier. Ils semblent enfin convaincus par notre décision. J’oubliais presque que nous sommes entourés de personnes qui demeurent traditionnelles à propos de quelques sujets, les enfants avant le mariage par exemple, mais moins que ne le furent nos parents. Sonia, abusant encore un peu de sa curiosité naturelle qui doit bien aller de pair avec celle de son journaliste de mari, propose à Joanne de livrer ses sentiments parallèles au récit que j’ai fait de notre prétendue rencontre. Gêné, mon regard fuit sans trouver de point d’accroche. Si nous pouvons être d’accord sur un point, c’est bien le magnétisme qu’elle évoque et le scepticisme de son entourage. Quant à la complémentarité de ce couple, je reste sans émettre de commentaire. Je me contente d’un sourire à la remarque de Sonia. Nous sommes bien assortis, voilà tout, et pour rendre le tableau plus crédible, je porte la main de Joanne à mes lèvres pour y déposer un baiser aérien. Alors que la soirée bat son plein et que le vin délie les langues, le temps passe et Daniel commence à fatiguer. Il me faut quitter la table un peu avant le dessert pour le changer, l’inconfort d’une couche sale le rendant d’autant plus grognon, puis je le garde sur mes genoux jusqu’à la fin du repas et lui fait goûter chacune des gourmandises préparées par Fiona ; c’est elle uniquement qui s’est occupée du dessert, mettant ses talents culinaires au service d’un café gourmand des plus raffinés qui mérite les félicitations de tous. Daniel fait ensuite comprendre que la fatigue l’emporte sur son envie de rester parmi nous. « Je vais le coucher. » dis-je en sortant de table une dernière fois. Gauthier a préparé pour le petit la chambre juste à côté de la nôtre, au second étage. Puisqu’il fait ses nuits correctement, il n’y a pas de raison de s’inquiéter de la distance entre lui et nous pour le reste de la soirée. Le garçon s’endort presque pendant que je lui enfile son pyjama, et une fois allongé, il sombre complètement. Nul besoin de chanson ou d’histoire. Il est bien tard pour lui. Quand je rejoins le rez-de-chaussée, les invités sont retournés dans le salon. L’ambiance est plus calme, les enfants jouent ensemble sous la surveillance de Fiona et les couples demeurent seuls à seuls un instant. Gauthier a pris soin d’inclure un peu de musique en fond sonore. Je rejoins Joanne, toujours en retrait le regard rivé sur les lumières au dehors. De derrière, je passe mes bras autour de sa taille et dépose un baiser sur sa joue. « Tu es vraiment superbe dans cette robe. » je susurre à son oreille, sincère et un brin alcoolisé. Les vins assortis aux plats n’ont pas manqué pendant le dîner et il aurait été criminel de ne pas abuser d’une si bonne cave. Quelques secondes de paix, j’hume simplement le parfum de la jeune femme, apprécie la chaleur de son visage près du mien. Il n’y a que Sonia pour oser percer cette bulle. « Vous venez jouer en attendant minuit ? » Je redresse la tête et arque un sourcil. « A quoi jouons-nous ? » « Action ou vérité. » répond-t-elle fièrement. Je pouffe de rire. « Est-ce que nous ne sommes pas un peu vieux pour ce genre de jeu ? » Malicieusement, elle me tapote le haut du crâne. « L’âge c’est dans la tête ! Venez ! » Puisqu’il serait impoli et franchement désagréable de refuser, je prends Joanne par la main et l’entraîne vers les canapés où tout le monde s’est installé –excepté les plus jeunes qui n’ont pas été invités à la partie. Il ne reste qu’une heure avant minuit, cela nous permettra de faire passer le temps. « Qui commence ? » j’interroge en m’asseyant. « Celui qui demande. » me rétorque-t-on fièrement. C’est donc pour ma pomme. « Action ou vérité ? » De la part de quelqu’un d’autre qu’Hannah, c’est un peu comme me proposer de choisir entre mourir brûlé ou noyé. « Action, tant que je tiens encore debout. » je réponds avec un petit rire qui ne sonne presque pas faux. Sonia, aimant instaurer le suspens, m’observe longuement, puis chacun des autres participants, jusqu’à ce qu’un rictus mutin apparaisse au coin de sa bouche. « Hm… Alors tu vas nous montrer à quel point tu es fort. Tu dois faire dix pompes, en costume, avec Fiona assise sur ton dos. » « C’est juste impossible. » « Teuh teuh, on ne discute pas. » Fort bien. Je me lève et m’exécute tant bien que mal –beaucoup de mal- ayant sur moi une demoiselle écarlate ne sachant plus où se mettre ; heureusement pour elle, j'abandonne au bout de la septième, écourtant ainsi notre calvaire.
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La soirée se poursuivait tranquillement. Il n'était pas habituel que Joanne parle tant d'elle, mais elle préférait se révéler davantage que de supporter plus longtemps ces regards perplexes. Ca créait pour elle un malaise qui était déjà bien trop grand pour se faire supportable. C'était étrange à quel point certains gestes revenaient naturellement, dans ce petit jeu du menteur. On ne saurait dire si c'était faux ou véritable. Mais le baiser que Jamie déposa délicatement sur sa main fit galoper son coeur à tout allure. Elle l'avait regardé faire, comme envoûtée par ce geste. L'alcool brouillait et rendait flou les limites, et elle ne savait plus dire si ce qu'il faisait était bien ou pas. Au moment du dessert, Jamie se porta volontaire pour aller coucher leur fils, pour qui il était bien tard. La petite blonde embrassa Daniel et lui souhaita bonne nuit avant qu'il ne s'éloigne pour démarrer sa nuit. Elle demeura alors bien silencieuse durant leur absence, écoutant de loin les quelques conversations en terminant son dessert, et son verre de vin. Elle finit par se lever, et se rapprocher à nouveau d'une fenêtre pour admirer les illuminations extérieures alors que les autres étaient assis près du feu, à discuter. Les verres continuaient de se remplir sans mal. Heureusement que personne ne conduisait, ce soir-là. Elle ne sursauta même pas lorsque Jamie s'était approché d'elle en glissant ses mains sur ses hanches et en se collant à elle. Elle ne le repoussait même pas, peut-être parce qu'elle avait envie, tout autant que lui, de ressentir sa chaleur. Il se permit de glisser un compliment dans son oreille avant de venir s'imprégner de son odeur. Joanne avait posé ses mains sur les siennes, et avait fermé les yeux durant ces quelques secondes de tranquillité. Là, elle était bien. Fort heureusement, l'alcool l'aidait grandement. Joanne avait même été agacée que l'on vienne les interrompre. Surtout pour un jeu qui ne l'enjouait absolument pas. Mais le bel homme prit sa main dans la sienne pour aller rejoindre le reste des invités en s'installant sur le canapé. Jamie était le premier à devoir s’exécuter, en faisant quelques pompes avec la jeune fille qui fondait complètement pour lui sur son dos. Il rejoignit Joanne un brin essoufflé. L'alcool continuait de couler à flot. Les tours passaient, jusqu'à ce qu'on finisse par la choisir elle. "Joanne, c'est à toi ! Action ou vérité ?" L'esprit embrumé, elle prit un certain temps à choisir. Elle n'aimait pas vraiment ce jeu. Mais au lieu de mentir davantage, elle préférait faire quelque chose. "Action." dit-elle tout bas, on ne peut plus nerveuse. Malicieuse et alcoolisée à souhait, elle réfléchissait longuement en fixant la petite blonde avec un regard perçant. "Mmh... Pas d'épreuve physique pour toi, non..." dit-elle en réfléchissant. "Mais puisque vous n'êtes pas encore marié, je suppose que il ne verrait pas d'inconvénient à ce que tu embrasses un autre homme." Voilà qu'on se mettait à lancer un défi digne d'un adolescent, et c'était avec des yeux ronds que Joanne dévisagea Sonia, le temps qu'elle choisisse l'heureux. "Allons pour... Andrew." L'un des autres invités à qui elle n'a pas adressé la parole une seule fois. Grand, brun, avec un costume parfaitement à sa taille. Joanne avait cru comprendre qu'il était avocat. Elle lança un bref regard à Jamie, se souvenant subitement qu'elle ne pouvait pas réclamer son aide parce qu'ils n'étaient pas ensemble. "Pas de jalousie, pas vrai, Jamie ?" dit Sonia en riant et en lui faisant un clin d'oeil. "Allez Joanne !" Le dénommé Andrew n'avait pas l'air totalement contre et se tenait même déjà debout. Joanne finit cul-sec son verre avant de le confier à Jamie et se leva également, la peur au ventre. Elle s'approcha timidement de lui. Bon dieu, que ce fut perturbant de ne pas sentir les lèvres de Jamie sur les siennes, ou même celles d'Hassan. Elle n'aimait absolument pas sa manière d'embrasser et lui faisait son possible pour prolonger un petit peu le baiser. Il était d'une certaine indélicatesse, avec ses mains baladeuses. Ca faisait beaucoup rire les autres. Joanne finit par s'écarter de lui et de retrouver rapidement sa place. Quelqu'un avait eu l'intelligence de lui remplir son verre de vin, elle but quelques gorgées. Pendant que quelqu'un d'autre passait à la casserole, Joanne approcha ses lèvres de l'oreille de Jamie. "Il avait pas le droit..." lui susurra-t-elle tout bas. Mais on aurait mal pris qu'elle ne se prenne pas au jeu, très certainement. "Son baiser ne vaut clairement pas les tiens." Joanne n'aurait jamais voulu être embrassé par quelqu'un d'autre, voilà chose faite. Elle préférait qu'Hassan et Jamie soient les deux seuls hommes qui aient pu l'embrasser. Rien qu'un baiser, cela signifiait bien trop pour elle. Gauthier s'était brièvement absenté pour aller chercher les bouteilles de champagne - parce qu'il y en avait beaucoup plus d'une- et les flûtes, prêt à la servir dès les premiers coups de minuit. "Toi aussi, tu es magnifique dans ce costume." dit-elle en passant sa main sur sa veste, tout aussi sincère que lui. Elle parlait tout bas, afin que personne ne l'entende. Ils étaient de toute façon bien trop occupé à rire de leur petit jeu. "On était bien, là-bas, juste tous les deux." se surprit-elle à dire, en regardant la fenêtre. Un soupçon de la bulle qu'ils avaient toujours parvenu à se constituer. Ce n'était que là, durant les soirées mondaines ou tout autre événement du même genre, qu'elle se sentait le plus en sécurité avec lui. Tout ceci lui semblait si lointain, soudainement. "Ah, attention ! La décompte va commencer !" s'exclama Gauthier, en regardant l'horloge. "Dix...neuf... huit... sept... six..."
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A la fin, mes bras sont tremblants et engourdis, et mon dos commence à sérieusement souffrir. Je dirais bien que les tempes grises ne sont pas le seul signe de l’âge dont la balance penchera bientôt vers une nouvelle dizaine, mais c’est plutôt la décélération du rythme des entraînements qui est trahi par cette forme qui amorce sa baisse. Pourtant il aurait été bénéfique pour moi de défouler une montagne de frustration à la salle de sport, néanmoins, entre le travail, le jugement, le déménagement, les thérapies, les visites chez Joanne pour voir Daniel, autant l’envie que le temps n’y étaient pas. Cette démonstration suffit à me sonner les cloches ; le retour à Brisbane signera le retour des bonnes habitudes, appelons cela les bonnes résolutions de chaque nouvelle année. Je sais qu’après ce gage, on ne me reprendra plus à choisir l’action au lieu de la vérité, qu’importe à quel point les questions peuvent être ridicules, embarrassantes ou me forcent à enfoncer le mensonge dans lequel Joanne et moi baignons ce soir. S’il en est un. Plus tard vient son tour, et la jeune femme fait également l’erreur de préférer se tenir loin des épreuves de vérité, le concept étant poussé à ses frontières actuellement. Le défi imposé par Sonia me rend soudainement amer. Mes lèvres affichent pourtant un sourire pincé et bon joueur qui ne dupe absolument personne –quiconque me connaît sait ma jalousie et ma possessivité, autant vis-à-vis des personnes que des objets, autant pour ce qui est à moi que ce qui l’a été, le sera, ou devrait l’être. Sonia s’en joue bien, j’imagine que cela amuse le reste des invités –qui pourrait s’empêcher de rire en voyant un fiancé jaloux réprimer son envie de s’interposer entre sa belle et celui qu’on lui demande d’embrasser ? « Peut-être un peu. » je réponds en haussant les épaules, n’allant pas atteindre le ridicule en niant l’évidence. Et ce n’est pas que le jeu, ce n’est pas que de la comédie. Ces lèvres sur lesquelles se posent celles d’Andrew sans délicatesse ni tendresse étaient miennes et portent ma marque, cette silhouette sur laquelle il se permet de poser ses mains disgracieuses et impudiques s’avancent sur un territoire que j’ai conquis et qui, je le sais malgré moi, m’appartient encore. Ce baiser dure bien trop longtemps à mon goût, de toute manière, j’ai cessé de les observer faire et les autres rire dès lors que leurs lèvres se sont frôlées. Quel jeu stupide. Cela m’atteint, même si ça ne le devrait pas –ou le devrais-ce ? Je ne sais plus. La frontière se brouille à cet instant. Même Joanne se sent obligée de m’assurer qu’elle ne consentait pas à ce baiser. « C’est le jeu. » J’hausse les épaules, histoire d’avoir l’air moins jaloux que je ne le suis, peut-être le suis-je trop à ses yeux, et pas assez pour les autres, je ne sais plus. Je pouffe en me noyant dans le fond d’un nouveau verre de vin ; « J’espère bien. » Si mes baisers ne valaient pas mieux que ceux de l’autre gruau, je m’en serais vexé. Même mon amour violent a le mérite d’accorder de la considération à ma partenaire qui manquait cruellement à l’attitude de l’avocat. Mais ces personnes ont tendance à ne penser que par et pour elles, que tout leur est dû. J’adresse un fin sourire et remercie tout bas Joanne pour son compliment. Mon regard suit le sien lorsqu’elle observe brièvement l’endroit où nous nous tenions tout à l’heure, près de la fenêtre. C’est vrai, nous y étions bien. Mais n’étais-ce pas plus mal que nous soyons rappelés à l’ordre ? Gauthier arrive avec le champagne, prêt à le sabrer dès la fin du décompte. Je ne sais jamais vraiment pourquoi c'est une telle explosion de joie à chaque nouvel an, mais c'est le cas cette fois encore, et pendant que les coupes sont remplies tous s’enlacent et se font la bise. « Bonne année ! » je m’entends dire et prononcer de nombreuses fois. Peut-être que cette année ne sera pas si terrible que ça. Les coupes vont de main en main, débordantes de champagne. Avant que la mienne et celle de Joanne me soit confiée, on nous fait un signe général de me retourner. J'aperçois alors Cole qui tient l'une de ses filles sur ses épaules, et celle-ci tenir au-dessus de nous une branche de gui. J'imagine que tous ont remarqué que Joanne et moi n'avons pas échangé le moindre baiser depuis notre arrivée, et voilà leur réclamation. Sans m'accorder un suspicieux temps de réflexion, je me saisis délicatement du visage de la jeune femme et dépose mes lèvres sur les siennes. Que le baiser soit long ou court, je ne saurais le dire, je ne sais que l’infinie tendresse, bien réelle, qu'il y a dans cette caresse.
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Voilà pourquoi Joanne avait horreur de ce jeu. On incitait les personnes à faires des choses dont elle n'avait pas envie, juste pour faire rire les autres en s'amusant des situations embarrassantes. Embrasser Andrew n'avait rien d'agréable ni d'hilarant pour la jeune femme, qui avait bien du mal à se résoudre de tout ceci. Elle avait jamais se pincer les lèvres, donner une réponse qui devrait contenter les autres convives. Et quelque part, elle savait que ce n'était pas vraiment du cinéma. Il était bien difficile d'imiter une jalousie qui demeurait naturellement en lui, alors qu'ils étaient bel et bien séparés. La petite blonde se réinstalla à ses côtés, partageant un peu de son inconfort vis-à-vis de cette situation alors qu'elle ne le devrait pas. Elle avait beaucoup, elle ne savait plus trop où elle en était. Elle pensait sans cesse à Hassan, à ce qu'il lui avait dit lors de leur dernières rencontre. Elle espérait qu'il allait bien, elle savait que c'était une période assez difficile pour lui. Durant le trajet menant jusqu'au domaine, elle s'était souvenue que ça faisait vingt ans tout ronds que ses parents étaient décédés. La jeune femme avait alors espéré qu'il ne passe pas les fêtes tout seul, qu'il ait pu passer un peu de temps avec son frère, ou Yasmine et Sohan. Jamie tentait de prendre la situation avec moins de jalousie qu'auparavant, mettant en avant sa prétendue indifférence avec un haussement d'épaules. Elle préférait tout de même lui assurer qu'elle préférait largement ses baisers, ce qui était une quasi évidence pour lui. Jamais il ne se serait comporté de cette façon avec elle. Il avait beau adorer posséder énormément de choses, il en prenait, et restait délicat au moindre de ses touchers -certains riraient bien jaune en entendant cela, surtout ceux qui avaient vu les marques autour des poignets de la jeune femme. Le décompte pour la nouvelle année commençait alors à se faire, Gauthier prêt à sabrer le champagne. Tout le monde se souhait les meilleurs voeux à l'un l'autre, et Joanne avait hâte récupérer sa coupe de champagne. Mais Jamie se retourna face à elle. Ses iris bleus se levèrent légèrement pour constater la branche de gui qui pendait au-dessus. Tout le monde voulait les voir s'embrasser. Sans attendre, le bel homme prit son visage entre ses mains pour poser ses lèvres contre les siennes. Son baiser était si tendre qu'il était impossible qu'il fasse partie de la supercherie. Joanne avait déposé ses mains sur ses hanches, se laissant embrasser d'autant que lui le voulait. Le baiser était particulièrement long, si bien que chacun avait fini par commencer à boire le champagne, à discuter et à rire. Une fois que leurs lèvres avaient fini de se caresser, leur visage restait proche l'un de l'autre. Malgré la quantité d'alcool qui coulait dans ses veines, Joanne avait eu ce moment de lucidité qui la poussait à se rappeler de leur conversation durant leur promenade. Et voilà qu'il changeait du tout au tout sous prétexte de devoir mentir au reste des invités ? Il avait rompu, il lui avait fait comprendre jusque là qu'il n'en voulait plus, qu'il ne voulait plus d'elle. Il se disait même qu'une quelconque amitié entre eux serait impossible. Cette soirée était une erreur, avoir accepté d'y venir. Mais elle ne voulait pas se confronter de nouveau à son courroux parce qu'elle refusait de venir alors que c'était pour lui le seul moyen de voir Daniel. Ca la faisait culpabiliser. Hassan ne serait pas content d'apprendre ça non plus. "Un dernier baiser, hein..." souffla-t-elle tout bas, en faisant référence à la soirée du gala où ils se l'étaient dit. Elle y avait répondu, à ce baiser, avec tout autant de tendresse que lui. Mais au fond d'elle, elle n'était plus si sûre que ça de ses sentiments. Il avait qu'elle avait charcuté son coeur depuis longtemps, et lui en avait fait de même, à charge de revanche certainement, ces derniers mois. S'il avait voulu l'écoeurer, il avait réussi. Enfin, on leur donna les coupes de champagne, et elle avait reculé d'un petit pas Elle but une gorgée, puis dit à Jamie. "Allons voir Daniel." Lui souhaiter bonne année, le prendre dans ses bras pour la première fois de ce mois-ci, même s'il était profondément endormi. Si elle avait un autre homme à embrasser en ce début d'année, c'était bien lui. Il était adorable, dans sa turbulette bien chaude, la tétine en bouche et sa peluche en main. Tout en délicatesse, Joanne le prit dans ses bras, le petit reposait lourdement sa tête contre son épaule. "Bonne année, mon trésor." dit-elle tout bas avant de l'embrasser longue sur sa tête. "Maman et papa t'aiment très fort, et on ne t'aimera jamais moins, toujours plus." Ce qu'elle espérait avant tout, c'était sa bonne santé. "Ce serait chouette aussi que tu aies tes weekends rien qu'avec papa, c'est ce qu'on peut espérer, tu ne crois pas ?" Elle le berçait doucement, profitant de sa chaleur tout comme le petit devait inconsciemment profiter de la sienne. "Tu veux aussi le prendre un peu ?" A moins qu'il ne voit pas d'intérêt de discuter avec son garçon endormi.
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Jamais je ne la laisserai partir. C’est ce qui se murmure dans un coin de mon esprit embué par les trop nombreux verres de vin alors que mes lèvres caressent tendrement celles de Joanne. Qu’importe la durée de l’instant, cela ne sera jamais assez long pour étouffer la peur de la séparation, et de ce qui se passera une fois que nos visages se seront détachés, une fois la soirée terminée, une fois le soleil levé. Je ne veux pas qu’elle s’en aille. Peut-être que cela me plait, au fond, de faire semblant –mais pas si semblant que ça. C’était la pire idée qui soit. Dans quel état sera mon cœur demain, lorsque tout reviendra à la normale… Lorsque je n’aurai plus d’excuse pour me montrer un peu plus affectueux, et qu’il faudra reprendre cette autre comédie consistant à mettre le plus de distance entre nous. Entre un rôle et l’autre, je ne sais plus moi-même discerner le vrai du faux, ce que je ressens de ce qui est monté de toutes pièces. Que ce soit l’amour ou mon aversion pour la jeune femme, tout semble à la fois si faux et si sincère. Je crois que je me suis perdu. Que tout me dépasse et me glisse entre les doigts. Mon regard désorienté cherche dans les iris bleus de Joanne son phare habituel, mais il n’y a plus rien auquel se raccrocher, et cette pointe de rejet qui est le seul éclat que j’y devine me transperce de part en part ; voilà le résultat que tu attendais, et te voilà comme un idiot avec un cœur battant bon à jeter aux ordures. « Je… » Il n’y a rien à dire en réalité. Joanne a raison, le dernier baiser est passé, nous avons eu nos ultimes ébats. Mieux vaut s’en tenir à ça. Je soupire, la coupe de champagne au bord des lèvres, puis prends une gorgée pétillante dans la bouche. Un peu malgré moi, je me laisse entraîner deux étages au-dessus pour aller voir Daniel –drôle d’idée puisqu’il dort. Joanne vient visiblement à lui souhaiter une bonne année malgré tout. Comme si cela ne pouvait pas attendre demain. Je termine ma coupe en l’observant glisser quelques mots doux au petit profondément endormi. Lorsqu’elle me propose de le prendre dans mes bras, je décline d’un signe de tête. « Non, laissons-le dormir. » Je me dirige déjà vers la porte, abandonnant mon verre vide sur une commode sans même y réfléchir –sûrement par habitude de ne même pas avoir à songer à ce genre de détail en soirée, habituellement, les serveurs sont là pour ça, et Gauthier nettoiera demain. « Je ne vais pas tarder à faire de même, je pense. » j’ajoute pris d’un coup de fatigue aussi bien qu’un coup au moral. Et puis, demain, j’ai un avion à prendre, après avoir décuvé comme il se doit. J’avoue ne plus être très sûr de marcher droit, le couloir me semble alambiqué. J’aimerais profiter de la soirée plus longtemps, mais toute cette pseudo-comédie me fatigue plus que je ne voudrais l’admettre. De toute manière, ce n’est qu’une question de qui ira se coucher en premier pour laisser un peu de paix à l’autre, et puisque cette mascarade n’a pas permis à Joanne de profiter de la fête, autant que ce soit moi. « Je vais en profiter pour te préparer une chambre. » je murmure de plus en plus bas, une main passant par mes cheveux pour retrouver quelques idées claires ou qui ne soient pas complètement noyées dans l’alcool. Je quitte donc la chambre et me rend dans celle se trouvant un peu plus loin. La pièce juxtaposée à celle où notre fils se repose est inutilisée, à la fois bureau et débarras de choses et d’autres. La suivante est, elle, une de ces trop nombreuses chambres d’amis qui donne sur une petite salle de bains privée. Cela devrait amplement suffire à Joanne. Les draps sont dans l’armoire ; malgré la malhabileté de mes mains moites ce soir, je parviens à dresser un lit correct. Cela fait, je retourne pour un court instant auprès des invités ; un petit groupe s’étant formé à l’extérieur pour fumer une cigarette, je me joins à eux pour une dizaine de minutes, ce qui est assez pour me faire demander par Helena si Joanne et moi avons prévu un nouvelle date pour le mariage, « parce que nous aimerions tellement pouvoir venir », et de me donner un peu plus envie de m’esquiver pour de bon, quitte à faire le mort demain matin pour ne pas avoir à souffrir le brunch en compagnie de tout ce beau monde et poursuivre ce mensonge plus longtemps. « Non, pas pour le moment. » je réponds, las, avant de m’excuser, prétextant la fatigue pour claquer une bise finale sur les joues des convives un à un et rejoindre le lit qui m’attend. Sûrement pas pour dormir, mais pour veiller, yeux grands ouverts, cerveau en ébullition, pendant autant d’heures qui manqueront à mon quota de sommeil demain matin.
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Joanne avait bien senti qu'il en voulait plus. Que ce baiser dure plus longtemps, qu'il devienne plus amoureux, plus langoureux, jusqu'à ce cette forme d'envie naissent en eux pour poursuivre ces caresses d'une bien autre manière une fois qu'ils auraient rejoint leur chambre. S'ils avaient été encore fiancés, peut-être même mariés, ils auraient démarré la nouvelle année de cette façon là. Mais le scénario avait bien changé. Plus de bague au doigt, juste un baiser. Jamie avait commencé à boire il y a quelques temps déjà, mais ce n'était pas si courant que ça qu'il en consomment autant. Cela semblait décupler son avidité vis-à-vis d'elle. Alors qu'il avait préféré l'éloigner de lui, toucher là où ça fait mal pour qu'elle s'éloigne et qu'elle n'en veuille plus. Il avait brillamment excellé dans cette pratique, sinon Joanne se serait laissée une nouvelle fois envoûter. Mais ce n'était pas le cas. Jamie s'était plongé dans son regard à la fin e ce long moment de caresse. Au dernier gala, ils s'étaient dits que c'était le dernier baiser, leur dernière fois. Alors pourquoi ce baiser si tendre ? Qu'allait-il chercher dans son regard ainsi ? Il ne trouvait même plus les mots, il ne trouvait rien à dire. Il préférait alors se laisser traîner par Joanne qui tenait plus que tout à aller voir Daniel. A l'enlacer et lui glisser quelques mots d'amour durant de brèves miutes. Jamie ne voulait pas faire de même, préférant voir Daniel au fond du berceau et poursuivre tranquillement sa nuit. Jamie, épuisé et grandement alcoolisé, était bien parti pour en faire de même. Il avait petite mine, il ne semblait pas particulièrement heureux ou satisfait. Il ne marchait pas très droit, et partait préparer une chambre à part pour la jeune femme. Il prépara même tout le lit. Lorsqu'il avait terminé, Joanne le remercia. Elle le suivit lorsqu'il descendit au rez-de-chaussée. Lui n'y allait que pour aller fumer et dire bonne nuit à tout le monde, tandis que Joanne était restée à l'intérieur. Il y avait tout un plateau de mignardises sucrées qui accompagnaient parfaitement bien le champagne. Joanne se permit e se montrer gourmande. Cole la rejoignit à l'intérieur quelques minutes plus tard. "Je crois qu'il ne tient pas très bien l'alcool, votre cher et tendre." dit-il en riant, en prenant une tartelette aux framboises et pralinés. "Il s'y est mis il n'y a pas si longtemps que ça. Et il quand même beaucoup plus bu qu'il ne l'a déjà fait. C'est bien une heure où l'oreiller devient son meilleur ami." répondit Joanne en s'installant sur l'un des fauteuils. Ainsi, la conversation avait démarré, et avait duré. Elle avait fini par enfin trouver ses aises avec Cole, à partir du moment qu'ils parlaient d'autre chose que de leur couple. Joanne avait beaucoup à dire avec son ancien métier et la fondation, mais elle ne voulait pas s'attarder non plus. Elle connaissait un petit bout de chou qui n'allait pas forcément faire une très longue grasse matinée. Cole était bien placé pour la comprendre, il était père de deux filles après tout. Joanne souhaita bonne nuit à tout le monde avant de retrouver la chambre que son ex lui avait préalablement préparé. Ce qui l'empressa de dormir était bien le fait de retrouver Brisbane. Elle ne partait que le surlendemain, voulant régler quelques petites choses sur place à la fondation avant de prendre l'avion. Elle avait hâte de retrouver son chez-elle. Suite à la conversation avec Hassan, elle avait commandé quelques meubles pour aménager sa chambre et le séjour, et devrait les recevoir peu de temps après son retour. Elle voulait que sa maison ressemble véritablement à une maison, où il y avait suffisamment de choses dans les pièces pour que l'on entende plus d'écho lorsqu'on parle. Elle se réveilla de bonne heure, vers sept heures. Elle ne savait pas trop comment elle avait deviné que son fils s'était réveillé. Après s'être habillée, et avoir habillé Daniel, elle rejoignit le rez-de-chaussée. Gauthier était levé, mais tous les autres dormaient. "Il y en a un qui se montre bien matinal !" "Lui n'a surtout pas veillé et forcé sur la bouteille." rétorqua Joanne avec un rire, la majordome pouffant également. "Installez-vous ! J'avais presque fini de tout préparer. Un biberon pour le petit ?" "Oui, juste un biberon, merci beaucoup." Gauthier avait déjà commencé à faire chauffer de l'eau, il n'y avait plus qu'à mélanger le lait en poudre avec. La table du brunch était déjà particulièrement garni, et continuait de se remplir au fur et à mesure que les convives arrivaient les rejoindre. C'était au compte-goutte, et il n'y avait que Jamie qui ne venait pas. Joanne ne s'inquiétait pas plus que ça, c'était un bon dormeur. De plus, elle n'avait aucune idée de l'heure à laquelle il partait. Joanne comptait retourner à la fondation au courant de l'après-midi, et son avion était le lendemain matin, vers midi. Cela lui laissait également le temps de faire un dernier petit tour à Londres avec son fils.
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Un oeil entrouvert, je cherche la chaînette non loin de la tête de lit en tâtonnant sur le mur ; lorsque mes doigts parviennent à la saisir, je tire légèrement dessus. Cela a pour effet de faire retentir une petite clochette dans la cuisine, au-dessus d'un écriteau indiquant de quelle pièce provient l'appel. Sonia, sourcils froncés, devine rapidement de quoi il s'agit. “Vraiment ?” s’amuse-t-elle face à ce système presque archaïque, médiéval. Une sonnette pour appeler les servants à soi, c’est bien une installation de Lords. “Le système est installé dans la maison depuis bien longtemps, personne n’a eu à coeur de le retirer ou d'en abuser.” explique Gauthier, que cette méthode ne dérange pas grâce à sa rareté. Il faut dire qu'habituellement, en dehors de sa propre famille, le domaine est inhabité, délaissé de ses maîtres. Ce n’est pas tous les jours qu'il a qui que ce soit à servir concrètement en dehors des rares portes ouvertes du château, une fois par mois. Si cela ne tenait qu'à lui, l'accès serait libre au public bien plus souvent, afin qu'il se sente utile ici, mais je ne l'ai jamais approuvé. Et cela reste chez moi, après tout. Gauthier étant occupé par le service du brunch, c'est sa femme qui se dévoue pour me rejoindre dans les étages et venir jusqu'à ma chambre. Attentionnée, elle frappe même avant d'entrer. Un grognement lui suffit pour mettre un pied à l'intérieur. “Eh bien, regardez-vous. Vous vous êtes endormi tout habillé.” Oh, qu'importe. Au vu des heures passées à ruminer, j’aurais eu largement le temps d’enfiler quelque chose de plus adapté pour la nuit, mais je ne trouvais pas l'envie. La gouvernante, un sourire attendri aux lèvres, s'approche et s'assoit sur le bord du lit. Elle passe délicatement ses doigts à travers mes cheveux. Pendant quelques secondes, je ferme les yeux et je me sens comme un petit garçon. “Le brunch est prêt dans la salle à manger, il ne manque que vous.” Sur le moment, rejoindre les invités, sourire, jouer un rôle est une épreuve insurmontable que je suis prêt à éviter par tous les moyens. Je ne demande qu'à être seul. “Je vais déjeuner ici.” je murmure. J'ouvrirai la baie vitrée de la chambre pour dégager la vue sur le jardin et prendre un peu l'air en sirotant mon thé. Ce programme me paraît bien meilleur. Helena ne discute pas cette décision, cela ne lui vient même à l'esprit de me remettre en question. Si je ne souhaite pas me joindre aux autres, soit. Libre à moi de débuter mon année comme je l'entends. Elle demeure près de moi encore un peu. Nul besoin d'être devin pour deviner que quelque chose ne va pas ; toutes armes baissées, toute la détresse se devine dans chaque inspiration qui remplit mes poumons de cette peine qui semble transpirer par tous les pores de ma peau. Cela non plus, elle ne l'interroge pas. Elle s'en inquiète, mais ne le montre pas, et je l'en remercie intérieurement. Enfin, elle quitte la chambre et ne remonte qu'une fois les bras chargés d'un grand plateau composé d'une portion de tout ce qui se trouve sur la table de la salle à manger. Même si Héléna a conscience que je mangerai peu, l'estomac sûrement retourné par l'alcool, elle tenait à me laisser un large choix. Les pancakes fument encore et leur odeur embaume l'air immédiatement, voilà tout ce qui parvient à me tirer du lit. L’effort est minime ; je traîne mon corps jusqu'au fauteuil à quelques pas de là et l'y laisse tomber mollement. “Merci beaucoup.” La gouvernante m’adresse un sourire et repart déjeuner avec le reste de ses hôtes. Il n’y a plus que moi et un trop plein de pensées qui s'est enfin tu grâce à la fatigue et la lassitude ; un grand vide donc, et un grand silence dans lequel ne résonne plus un battement de coeur malmené et résigné. J’aurais aimé que Joanne n’abandonne pas. Que malgré tout ce je mettais en place pour qu'elle ne veuille plus de moi, elle persiste et ne me laisse pas tomber. J'aurais aimé avoir tort et faillir cette mission que je m'étais donnée. C’est le problème. Désormais je suis face au résultat de mes actes, une nouvelle réussite, et cela ne me satisfait pas. Au contraire, je suis blessé. Je réalise que Joanne peut véritablement tirer un trait sur moi. Elle le pourrait. Elle est en train de le faire. Tout était bien plus simple lorsque je ne l'en croyais pas réellement capable, lorsque l'hypothèse n'était faite que de paroles et non d'actes concrets.
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Tout le monde avait été intrigué par le bruit de la petite sonnette. Même Daniel, qui était sur les genoux de sa mère pendant qu'elle lui tenait le biberon de son petit-déjeuner. Ce fut Sonia qui réagit la première, riant un peu du comportement de Jamie. Pour la petite blonde, il n'était pas difficile de deviner qu'il préférait s'isoler dans la chambre, que quelque chose n'allait pas. Du moins, il n'avait pas la moindre envie de prétendre d'être encore en couple avec Joanne. Celle-ci fronça les sourcils, perplexe de ce qui avait pu le mettre dans cet état là. Serait-ce la remarque qu'elle aurait faite par rapport au baiser ? Il n'y avait pas de raison, ils avaient bien convenu tous les deux, lors du précédent gala, que c'était les dernières fois. Ils avaient effectivement tort concernant le baiser. Mais celui-ci ne faisait partie que de la mascarade, n'est-ce pas ? Elle ne savait plus, les lèvres de Jamie semblaient caresser les siennes avec beaucoup trop de tendresse pour que ce soit un mensonge. Mais Jamie montrait depuis des semaines qu'il n'avait plus de sentiment amoureux pour elle. Juste de l'affection. Alors elle ne comprenait pas. "On va aller voir papa ?" demanda-t-elle tout bas à Daniel, une fois qu'il avait terminé son biberon. Qu'il le voit avant que Jamie ne prenne l'avion pour retourner à Brisbane. Elle le porta dans ses bras et s'excusa de son absence au reste de la tablée avant de se rendre dans la chambre. Celle-ci lui évoquait beaucoup de souvenirs, difficile d'oublier leurs nuits passées ici. Jamie était vautré là, dans un des fauteuils. Joanne devina qu'il n'avait même pas pris la peine de retirer ses vêtements de la veille. Ses traits étaient tirés, les cernes sous ses yeux montraient qu'il n'avait que très peu dormi. On devinait qu'il avait très peu de volonté à faire quoi que ce soit, et qu'il n'allait pas être en très grande forme pour la reprise du travail. Silencieuse, Joanne déposa Daniel par terre, il s'occupait tout seul à gambader à quatre pattes ou à se tenir debout en se tenant aux meubles. Jamie faisait presque peine à voir, mais elle n'osait pas vraiment lui demander ce qui n'allait pas. A moins qu'il ne vive très mal la gueule de bois, difficile à déterminer. "Viens là." dit-elle tout bas en s'approchant de lui. Elle voulait au moins qu'il se débarrasse de sa veste de costume. Il y avait une vague odeur de transpiration et d'alcool, Jamie aurait également grand besoin d'une douche. Sans qu'il ne dise quoi que ce soit, elle lui retira délicatement la veste de son costume, et la déposa soigneusement sur le lit. "Je vais ranger tes affaires, pendant que tu manges." Il se ferait sacrément rosser par le studio s'il manquait un jour de travail par fainéantise, surtout en cette période, où il devait se tenir à carreau pour garder son poste. Elle récupéra silencieusement les affaires qu'il avait laissé traîner ça et là, ne laissant que le nécessaire pour qu'il se douche et se change. Cela lui laissait le temps de manger encore un peu, histoire d'éponger et d'éliminer l'alcool qui coulait encore dans ses veines. "Daniel serait content de passer un peu de temps avec toi avant que tu ne partes." Peut-être que cet argument là allait le motiver à s'extirper de son fauteuil pour prendre le petit dans ses bras, et l'embrasser. Mais pas de réponse, il ne disait plus rien. Quelque chose n'allait véritablement pas, et elle ne savait pas de quoi il pourrait s'agir. Une fois toutes les affaires rassemblées, la jeune femme le regardait d'où elle était. Elle ne savait pas vraiment quoi faire. Elle aurait pu même lui proposer de l'accompagner jusqu'à la salle de bain s'il se sentait si mal que ça, mais peut-être qu'il ne voulait rien de tout ça. Elle s'approcha silencieusement de lui. Toujours debout, elle glissa quelques secondes ses doigts dans ses cheveux. Elle se souvenait lorsqu'il demandait sans cesse de son affection, incapable de se détacher physiquement d'elle. Voilà qu'il avait voulu se séparer, et qu'il avait une aversion certaine pour le moindre de ses touchers. Comme lorsqu'elle avait posé sa main sur sa joue, quelques jours plus tôt. Il n'avait vraiment pas apprécié ce geste. Elle retira sa main. "Je devrais peut-être plutôt te laisser tranquille." finit-elle par dire, résignée, tout bas.
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Il n'y a jamais de petite tristesse ou même de peine à la mesure d'un événement ; il n'y a toujours que cette sensation de vide désespérante et cette impression que le monde dans lequel j'évolue se déréalise, s'écroulant sous mes pieds petit à petit. La moindre contrariété prend des proportions qui m'échappent, et je me retrouve bien plus souvent que je ne le voudrais au bord du gouffre, piégé et me battant pour réunir mes esprits. Mais j'imagine que cette fois, la panique et l'angoisse ont bien des raisons d'être. Si j'ai plusieurs fois assuré à Joanne qu'elle saura m'oublier et aller de l'avant, ce n'était pas comme si je l'avais toujours pensé et souhaité en mon fort intérieur. La possibilité d'être mis de côté, rejeté, relégué au passé comme à m'effrayer alors que le processus est mis en marche, et celle machine infernale lancée à pleine puissance me laisse sur le carreau, impuissant et déstabilisé. J'ai moi-même créé de mes propres mains le train qui doit mener Joanne au loin, forgé avec du rejet et de l'aversion, de la rancœur et de l’amertume ; aujourd'hui il démarre et je me vois assister à ce départ depuis le quai avec ce sentiment qu'il emporte avec lui un bout de moi qui ne reviendra pas. Ce n'est pas le grincement distinctif de la porte s'ouvrant qui me tire de ces pensées, mais les babillages d'un Daniel en quête d'aventures dans la chambre, explorant déjà les recoins à quatre pattes. Puis je remarque Joanne près de moi qui, sans poser de questions, se contente de me retirer ma veste sentant l'alcool et le tabac froid. « Merci. » je souffle bien bas, sans pourtant lui accorder un regard, peut-être par honte ou par lassitude. La jeune femme se met en tête de préparer ma valise, sachant que mon départ n'est pas dans si longtemps. J'aurai de bien nombreuses heures de vol pour décuver et songer à cette soirée, avec l'espoir d'être plus en forme et avec les idées plus claires une fois à l'autre bout du globe, en chemin pour la radio. « Ce n'est vraiment pas nécessaire, Gauthier s'en occupera plus tard. » je murmure sans conviction, sachant que Joanne s'est déjà mise à la tâche et que je n'ai franchement pas la volonté de l'en empêcher. Alors, le regard rivé sur le jardin, je bois mon thé à petites gorgées, et déguste de ça et là quelques bouchées qui ne soient pas une trop grande épreuve à digérer pour mon estomac fragile d'aujourd'hui. Mon regard se pose finalement sur Daniel qui s'est tracté sur ses deux jambes en se tenant au fauteuil. Je lui souris vaguement. Dans trois semaines, nous aurons la décision du juge et du psy concernant sa garde, nous serons fixés sur la marche à suivre, et peut-être que ces directives ne nous feront pas de mal. Peut-être est-ce la proximité qui nous blesse tous. Nous n'étions pas si mal lorsqu'une demi-planète nous séparaient. Vaporeux, il me faux quelques secondes pour réaliser que Joanne glisse ses doigts entre mes cheveux. D'un geste mou de la main, je dégage la sienne. « Ne fais pas ça. » Pas la peine de feindre de l'affection, il n'y a plus personne à piéger. Il n'y a plus rien, voilà tout. « Reste un peu avec Daniel. Je reviens tout de suite. » Non sans grimacer à cause de mes muscles engourdis, je quitte mon fauteuil pour me rendre dans la salle de bains annexée à la chambre, juste le temps de prendre une douche assez froide pour me réveiller définitivement. Il n'est pas question de demeurer un légume toute la journée. Évidement, n'ayant pas tous les hémisphères du cerveau en bonne marche, je n'ai pas pris de quoi me changer avec moi, c'est donc couvert d'une serviette nouée autour de la taille que je reviens. Daniel se jette littéralement à mes pieds pour avoir le câlin que ma léthargie lui refuse depuis tout à l'heure ; cette fois, je le prends dans mes bras et lui colle un baiser sur son visage joufflu. « Mon petit bonhomme... Est-ce que tu seras toujours la seule chose de bien que j'aurai jamais faite ? » J'admire son regard bleu et son adorable sourire. C'est ce qu'on appelle un bébé réussi. Mignon, sage, en pleine santé, curieux de tout et de tout le monde, affirmant déjà son caractère et ses passions, aimant ses parents inconditionnellement. Il est parvenu à passer au travers de tous nos mauvais côtés afin de ne concentrer que le bon. Il est un petit miracle pour bien des raisons. « Je prends le relais. » dis-je à Joanne, comme une manière de lui faire comprendre que cette fois elle peut disposer. Je pourrai m'habiller une fois qu'elle sera partie, et jouer un peu avec mon fils avant mon départ. Encore une fois, mon séjour à Londres se passera d'une visite au centre de repos de ma mère. En ce moment, je me passe de ses discours sur mon incompétence généralisée.