« ...Du reste, je lègue la totalité de ma fortune à la fondation Oliver Keynes. » Voilà qui sonne le glas. Ma mère hérite de tout le matériel dont elle n'aura jamais l'utilité dans son établissement spécialisé. Mon oncle reçoit quelques babioles de valeur et le portefeuille d'actions qu'il doit gérer pour lui et Marie. Moi, rien. Pas un centime. Mon coeur se soulève alors que je ne suis même pas étonné. J'avais de l'espoir, mais je ne sais même plus pourquoi. Et puis, je ne savais même pas que cette fondation existait. Lorsque je vais voir l'exécuteur du testament pour demander si j'ai des recours afin de récupérer l'argent qu'il m'a extorqué, tout ce que l'on me répond c'est « Effectivement, vous pouvez saisir la justice. Mais cela peut prendre des années avant que la somme vous soit rendue. » Ce qui n'est d'aucune consolation. Je l'interroge un peu sur cette fondation qui porte de nom de mon frère. Elle vise à accueillir et aider les familles de jeunes suicidaires ou suicidés. Un comble lorsque l'on constate la manière dont a terminé son fondateur. « Néanmoins, c'est votre mère qui est désignée comme nouvelle directrice de la fondation, mais il est clair de son état de santé ne lui permet pas de remplir cette fonction. Elle vous revient donc. » je ris nerveusement. Tout cela ne peut avoir été que minutieusement préparé. Me prendre ma fortune, se suicider, tout léguer à une association et ensuite m'en laisser la charge. J'ai donc la joie d'administrer cette fondation qui sert de coffre fort à mon propre argent, auquel je n'ai pas accès. Je remercie cyniquement le notaire et claque la porte. Toutes mes missions ici sont finies et s'achèvent sur cette merveilleuse note. Mon avion de retour était prévu pour dans deux jours. Mais je file à l'aéroport avec pour seule hâte de quitter de nouveau le sol anglais. Je change mon billet pour avoir le premier vol, n'importe lequel. Je n'en informe pas Joanne. Je me dis qu'elle appréciera la surprise. Je pensais fermement que toutes les expériences sont bonnes à vivre jusqu'à ce que je découvre la classe économique sur les vols long courrier. Et je me suis demandé pendant douze heures comment fait le commun des mortels -dont je fais un peu plus partie désormais- pour survivre à ce genre d'épreuve. La halte à Singapour est la bienvenue. Mon dos est en bouillie, mes jambes terriblement raides. Heureusement que je ne suis pas difficile en matière de nourriture, sinon la liste de mes complaintes serait encore longue. Le trajet reprend pour la dernière ligne droite. J'en profite pour feuilleter sur mon ordinateur toute la paperasse concernant la fondation qui m'a été transmise afin de rapidement connaître toutes les structures qui la composent, leurs actions, leurs résultats. L'organisme date d'il y a quatre ans, un peu après mon départ de Londres. Un bon nombre de familles y ont recours. Il y a un petit dossier de retombées de presse qui en font l'éloge. Je rentre donc à Brisbane fauché comme les blés, mais à la tête d'une fondation respectable et respectée. Nous sommes samedi matin quand je pose le pied sur le sol australien. Les taxis ne courent pas les rues à quatre heures du matin, mais je parviens à en attraper un après quelques minutes de patience. Il est cinq heures lorsque je tourne délicatement ma clé dans la serrure de la porte et que je la referme derrière moi, priant pour que les chiens ne me sautent pas dessus avec un bruit de fanfare. Je laisse mes affaires et ma valise en vrac dans l'entrée et file à l'étage. Comme prévu, je trouve Joanne et Daniel dans notre lit. Tout habillé, je m'allonge tout doucement auprès de ma petite famille, sur le flanc, un bras replié sous la tête. N'ayant pas assez dormi dans l'avion, je me laisse somnoler puis tomber dans le sommeil le plus reposant que j'ai u avoir depuis des lustres. Les dernières lignes de ce chapitre macabre sont terminées et closent cette histoire que je ne souhaite qu'oublier. Je suis auprès de mes deux amours. Tout va bien.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Le temps était horriblement long, sans lui. Comme s'il était restait en suspend dès qu'il s'absentait. D'autant plus que Joanne n'osait pas sortir de chez elle avec Daniel, du moins, pas toute seule. Elle était encore très méfiante de la moindre personne lambda, même si la menace principale était définitivement écartée. Mais elle profitait de son fils, qu'elle voyait évoluer de jour en jour, et cela suffisait à son bonheur. Entendre les premières voyelles qu'il prononçait, le voir découvrir son propre corps, avec déjà cette manie de porter ses doigts à sa bouche. Il était plus expressif au niveau du visage, se montrait attentif à ce qu'il pouvait entendre. C'était une telle source de motivation et de bonheur de le voir ainsi s'épanouir et progresser de jour en jour. Les visites ponctuaient ses journées. Dany, l'officier de police, passait encore régulièrement la voir. Conscience professionnelle ou autre chose, il sonnait à sa porte au moins une fois par semaine pour s'assurer que tout aille bien. Ca devait certainement le changer de la voir sourire ainsi, à chaque fois. Joanne en profitait pour lui montrer toute sa reconnaissance à chaque fois. Elle comptait les jours et les heures avant qu'il ne revienne. Sa présence manquait cruellement dans la maisonnée. Elle avait l'impression que Daniel le ressentait, que son papa s'était longuement absenté. Comme chaque nuit, la jeune femme prenait Daniel avec elle dans le lit. Elle le plaçait toujours bien au milieu, et dormait à côté d'elle. Parfois, elle se demandait si c'était une mauvaise habitude ou non. Mais elle ne s'en inquiétait plus plus que ça, puisqu'il faisait bien ses siestes dans sa chambre. Elle ne s'était pas couchée trop tard. Les nuits précédentes avaient été courtes à cause de ses insomnies. Elle se réveilla d'elle-même vers neuf heures du matin, avec la plus belle surprise qui soit. Un large sourire se dessina sur son visage alors qu'elle émergeait à peine. Discrètement, elle prit Daniel pour le mettre dans son berceau. Il s'était réveillé en milieu de nuit car le ventre criait famine, il allait encore dormir un bout de temps. Puis Joanne se réallongea et s'approcha de Jamie. Tous ses gestes étaient délicats. Elle déposa sa main sur sa joue qu'elle caressa doucement. Elle savait qu'il devait être exténué avec le décalage horaire et le voyage, mais elle ne pouvait s'empêcher de l'embrasser afin de le réveiller. Pendant qu'il s'extirpa de son sommeil, elle riait doucement de joie, de le retrouver. Elle gardait son visage entre ses mains. "C'est fini, mon amour." lui dit-elle tout bas. "Tu es là, avec nous, maintenant. Cette histoire est bel et bien terminée." Elle s'approcha de lui afin qu'il puisse venir se blottir contre elle. Juste avant, elle ouvrit un peu plus sa chemise pour qu'il se sente un peu plus confortable dans ses vêtements. La jeune femme le couvrait de baisers, tous plus amoureux les uns que les autres. Une fois les retrouvailles faites et qu'ils étaient bien calés l'un contre l'autre, le calme revenait quelques minutes dans la chambre. Joanne ne pensait même pas à l'argent ou à tout ce qui pouvait s'y associer. Tout le monde allait bien, et c'était l'essentiel. L'expérience vécue était le genre de choses qui permettaient de relativiser les priorités dans une vie. Celle de Joanne, c'était sa famille. Et à partir du moment que tout allait bien, le reste allait forcément suivre. Elle n'avait pas le fin mot de cette histoire, et on continuait de la couvrir d'opportunités à longueur de temps, mais rien ne s'était concrétisé. Il y avait notamment un courrier et un appel téléphonique qui l'avait interpellée et qui l'intéressait vivement. Elle voulait à tout prix porter sa pierre à l'édifice. "Je pense que je serai tout à fait capable de dormir encore avec toi." lui dit-elle tout bas. "Ou alors... Nous sommes tranquilles pour les prochaines heures, donc je te proposerai bien un bain bien chaud, histoire de soulager tes muscles. Tu m'as l'air tout tendu." Elle l'embrasse tendrement. "Vos désirs seront des ordres, Mr. Keynes."
Profondément endormi, je suis absolument imperturbable. Je ne suis réveillé que par les lèvres de Joanne sur les miennes. Un grand sourire apparaît sur mon visage immédiatement. Je devine cette face angélique à travers mes paupières entrouvertes. J'entends son petit rire qui sonne comme le tintement d'un grelot au-dessus de la porte pour dire que l'on est arrivé chez soi. M'extirpant doucement de ma léthargie, je glisse mes doigts entre les cheveux de la jeune femme, appréciant leur caresse si douce, puis frôle ses joues . Les tracas sont terminés. Notre fils est là. Notre famille est sain et sauve. Les menaces sont loin, loin derrière nous. Six pies sous terre ou entre quatre murs à l'autre bout du monde. Notre cocon n'a plus qu'à vivre des jours heureux -ou du moins, vivre enfin une vie normale. Mes yeux se ferment tout seuls, je suis encore bien fatigué par le voyage et toutes ces émotions. Il n'est pas dit que reprendre cette vie en l'état soit des plus simples, et je ne suis pas pressé de renouer avec ce monde qui tourne bien vite. Les bras de Joanne sont ma barrière qui me protège de la réalité pour le moment. Souriant, riant doucement de temps en temps, je la laisse me noyer sous les baisers et autres gestes d'affection qui m'aident à me réveiller de la manière la plus agréable qui soit. Je lui réponds parfois, ou je me contente de la serrer bien fort dans mes bras. J'inspire son parfum, l'odeur de la maison. Je me permets de glisser mes mains sous son haut, dans son dos, pour pouvoir palper la douceur de sa peau et en sentir la chaleur qui en émane. Je pourrais rester là des heures. Des jours. Me rendormir ne me poserait pas de problème. J'ai bien des heures de sommeil à rattraper et celui-ci semble enfin capable de réparer quelque chose. Mais la proposition de Joanne me fait sourire et m'intéresse vivement. Plus qu'une boîte de loukoums. Un bain chaud. Je m'y vois déjà, et mes muscles en effet bien tendus sont on ne peut plus d'accord avec cette idée. « Vous savez comment me parler, Miss Prescott. » dis-je, amusé, avant de récupérer ses lèvres pour l'embrasser avec délicatesse. Alors que je suis blotti là, la jeune femme me surplombe, ses mèches blondes tombant de part et d'autre de son visage d'ange. D'une main, j'en glisse une partie derrière son oreille, laissant ainsi la lumière du jour éclairer ses traits et rendre ses iris plus translucides et brillants qu'ils ne le sont déjà. Elle est si belle. « Je t'aime. » je murmure, happé dans ma contemplation. Je ne suis parti que quelques jours, mais j'ai l'impression de ne pas l'avoir vu depuis des semaines. Pas de cette manière en tout cas. Je lui souris tendrement, l'embrasse de nouveau, puis me décide à activer mes membres endoloris par les nombreuses heures de vol. « Allons-y pour ce bain. » Je prends la main de Joanne et l'attire dans la salle d'à côté. Bien sûr, il n'est pas question d'entrer dans cette baignoire seul. Et puisque mes désirs sont des ordres, la demoiselle ne peut pas objecter. Et depuis, je doute qu'elle l'eut fait si elle avait eu le choix. J'active la coulée de l'eau chaude qui commence à remplir la cuve. En attendant, petit à petit, je défais les boutons de ma chemise et retire celle-ci. Même mon épiderme semble avoir besoin d'être revigoré. J'ose à peine jeter un coup d'oeil à mon reflet dans le miroir. Je ne veux pas voir le coup de vieux que toute cette histoire a pu me faire prendre en quelques jours. Après m'être débarrassé du reste de mes vêtements, j'entre dans le bain qui continue de se remplir, et j'invite Joanne à s'installer entre mes jambes, adossée à moi, comme elle le fait toujours. Je loge mon visage au creux de son cou, ayant encore et toujours besoin de me sentir enrobé par son odeur et sa présence, seule chose capable de me nourrir actuellement. Je reste silencieux un moment, le temps que la baignoire soit remplie. J'écoute le clapotis du jet d'eau dont le son régulier est particulièrement apaisant. Comme s'il était capable de complètement envahir mes pensées, résonnant de tous parts, jusqu'à complètement s'y installer, m'empêcher de songer à quoi que ce soit d'autre que ce bruit. Le jet éteint, un silence parfait s'installe. Le bruissement de l'eau se devine discrètement parfois. « Tu m'aimeras toujours si je te dis que je ne suis plus l'aristocrate fortuné que j'étais ? » je demande tout bas au bout de quelques minutes. Je suis toujours aristocrate, certes, ce qui est une maigre consolation au final. Comme quoi, le titre importe vraiment peu.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Voir un sourire sincère s'afficher sur le visage de son fiancé était le plus beau de ses bonheurs. Depuis combien de temps l'avait-elle vu faire uniquement des rictus de façade, juste pour faire croire que tout allait bien ? Il n'y avait pas beaucoup de choses qui allaient bien à ce moment là. Mais le voilà revenu de Londres, débarassé de tout ce qu'il avait à faire. Que les nouvelles soient bonnes ou non, il avait un poids en moins sur les épaules. Jamie ne faisait que profiter de la présence de Joanne, de ses baisers et de ses caresses en la serrant fort contre lui. Ses mains avaient glissé sous son haut pour qu'il puisse être en contact direct avec la peau de son dos. Il avait besoin de cette affection, plus que n'importe quand. Il avait les traits fatigués, il devait être encore exténué par tout ceci. Dépassé. Malgré tout, l'idée d'aller prendre un bain le fit sourire. Elle savait qu'elle marquerait un point en lui suggérant ceci. Il l'embrassa tendrement après avoir repris ce jeu du vouvoiement, qu'ils utiliseront certainement jusqu'à la fin de leur jour. Il la regardait longuement, plaçant quelques une de ses mèches de cheveux derrière l'oreille. Jamie avait souvent ces moments où il ne faisait que la regarder, l'admirer. Joanne se demandait comment il faisait pour ne pas s'en lasser. "Je t'aime aussi." lui dit-elle avec un sourire. Il finit par l'entraîner avec lui dans la salle de bain, comptant bien profiter de sa belle tout en se détendant. Joanne le suivit volontiers, toute souriante. La baignoire n'était pas encore remplie lorsqu'ils y allèrent, mais Joanne aimait sentir le niveau de l'eau monter peu à peu sur sa peau. A peine installé, le bel homme logea son visage dans son cou. Joanne y porta l'une de ses mains pour lui caresser doucement les cheveux. Elle avait cette intuition que quelque chose n'allait pas. Certes, il était encore très fatigué, mais elle savait que ce n'était pas la seule chose qui lui faisait ressentir le besoin de se revigorer autant auprès d'elle. Il y avait ces petits signes qui ne trompaient pas, lorsque quelque chose n'allait pas. Une fois la baignoire bien remplie, le silence prit place. C'était agréable. Joanne restait immobile, il n'y avait que ses doigts qui bougeaient doucement entre ses mèches de cheveux. Au bout de quelques minutes, il prit de lui-même la parole. C'était donc ça. Elle se retourna d'un quart de tour pour pouvoir le regarder tendrement. Il n'y avait dans son regard ni pitié, ni compassion, juste de l'amour. "C'est Jamie Keynes que j'ai l'intention d'épouser." lui assura-t-elle. "Et lui est riche de tellement d'autres choses." Joanne l'embrassa tendrement. Elle ne parlait pas trop fort, pour ne pas trop perturber le silence qui régnait dans la pièce. "L'une de ses plus grandes richesses est en train de dormir dans la pièce juste à côté, par exemple. Le plus incroyable de tous les trésors" Depuis qu'ils se connaissaient, Joanne ne s'était pas intéressée à son argent. Lorsqu'il l'invitait à le dépenser, elle n'osait tout de même pas. Ce n'était pas pour la prestigieuse maison qu'elle voulait l'épouser. "J'espère qu'il découvrira de lui-même ses autres richesses." Elle se doutait bien que ça allait être très difficile pour lui d'être réduit au commun des mortels qui se soucient tous les jours de leur compte en banque. Un sentiment qui n'avait jamais réellement quitté Joanne. Elle avait grandi dans ce milieu, ses habitudes ne s'étaient pas perdues. La chute serait bien plus difficile pour lui, elle le savait. Il allait certainement devenir susceptible à ce sujet, et refusera toute aide extérieure. "Je crois que je préfère ça que tu aies récupéré l'argent sale de ton père." avoua-t-elle. "Tout ce qu'on construira à partir de maintenant, on le devra qu'à nous, à nos efforts, et à notre amour." Elle haussa les épaules. Quelque part, elle avait l'impression que ça les faisait repartir sur une base plus saine. "Ma famille va bien, elle est saine et sauve, et je n'en demande pas plus. Tout le reste sera du bonus, finalement, et je sais qu'on s'en sortira, et qu'on y arrivera." Elle n'avait aucun doute là-dessus. Elle se mettrait aussi à travailler, ça ne lui posait pas problème. Et si garder Daniel auprès d'elle était vraiment une contrainte, elle savait qu'elle pouvait compter sur ses parents pour le garder de temps en temps. Oui, ils allaient s'en sortir.
Ma question n’a pas vraiment lieu d’être, je ne la pose pas parce que je doute des sentiments de ma fiancée. Cela me sert surtout à lui faire comprendre que, comme prévu, pas une livre de l’héritage de mon père ne me revient, et je rentre à la maison comme je suis parti : avec un seul et unique chiffre bien trop rond sur mon compte en banque. Toutes les caisses sont vides. Je suis sûrement le Lord le plus fauché qui soit, et cela est particulièrement difficile à digérer. Cela a le don de remettre les idées en place, en tout cas. Une redescente sur terre en bonne et due forme. Un aller simple pour le commun des mortels. Et je me sens comme l’un des plus petits d’entre eux. Entendre Joanne m’assurer que cela ne change rien est d’un certain réconfort. J’ai sûrement besoin de l’entendre dire que tout ira bien, que nous serons toujours ensemble et que l’argent n’importe pas tant que ça. Je souris en coin, légèrement triste. Ce n’est pas de cette manière que j’imaginais les choses, et d’ailleurs, je n’aurais absolument jamais cru en arriver là un jour et me sentir si vulnérable. Je l’écoute me rappeler que notre vrai trésor dort tranquillement au fond de son berceau. Je me dis que tout ceci a lieu pour lui, uniquement pour lui, et alors je fais que cela en vaut la peine. Il n’y avait qu’une chose à faire, c’était de toute mettre en œuvre pour récupérer notre garçon. Et il est là, paisible. Je pense comprendre pourquoi Joanne dit qu’elle préfère presque cette situation plutôt que de vivre grâce à l’argent de ma famille. « J’aurais quand même apprécié récupérer la petite partie que j’avais gagnée moi-même. » dis-je avec un petit sourire. Ce montant-là n’avait rien de sale. Mais c’était tout ou rien. Et puis, il y a quand même quelque chose de beau dans l’idée de tout reprendre de zéro, bâtir notre foyer avec nos propres ressources. Ce qui implique des efforts que je n’aurais pas pensé devoir faire un jour. Bien sûr que notre famille est tout ce qui importe réellement. Nous sommes tous les trois, en bonne santé, avec un toit sur la tête ; nous avons toujours largement de quoi dire que nous sommes heureux et chanceux. « J’espérais pouvoir t’offrir une vie simple, avec tout ce que tu méritais. » dis-je tout bas, baissant un peu les yeux. Mais je suppose que cela lui convient bien, l’idée de ne plus vivre à mes crochets. Retrouver de la normalité. « Il y avait ce manteau dans une boutique à côté du notaire, avant la lecture du testament. Je le trouvais adorable pour toi. Je sais que tu es très attachée à ton trench, mais celui-ci avait beaucoup d’allure. Et là, je me suis surpris à regarder un prix sur une étiquette pour une des premières fois de ma vie, et je ne pouvais absolument pas te l’offrir. » D’ailleurs, je dois tout mon séjour à Londres à mon oncle, que l’histoire du kidnapping a bien fait rire. « J’ai pensé aussi à la suite à Sydney, en réalisant que maintenant nous sommes de ceux qui doivent être de côté pour pouvoir s’offrir un week-end là-bas. » Je ris nerveusement, à la fois amusé et dépité. Quelle situation cocasse. « Ca ne sera pas simple de se faire à cette idée. » J’hausse les épaules. Il le faudra bien. C’est notre vie désormais. Je ne peux même pas demander à la justice de me rendre ce qui est à moi. Edward devait se douter que je n’oserais pas arracher une telle somme à sa fondation. « On trouvera des solutions. Je vais mettre un peu de pression à Nyx pour exposer et accepter quelques passages télévisés. » Ce sera déjà ça de gagné, et pas des moindres. Juste de quoi maintenir ma famille en sécurité et éviter de faire dégringoler notre niveau de vie. Je relève enfin les yeux et retrouve ceux de Joanne qui savent si bien m’apaiser dans la seconde. Je la serre tendrement dans mes bras et dépose un long baiser sur ses lèvres. « Qu’est-ce que je ferais sans toi ? » je murmure, mon front apposé au sien. Je reste ainsi un petit instant avant. Au moindre mouvement, mon dos habitué à la délicatesse d’épais sièges de qualité se plaint lui aussi de sa condition. « Je hais la classe éco. » dis-je en m’étirant un peu. Puis j’adresse un sourire malicieux à Joanne, une idée derrière la tête. « Qu’est-ce qu’un petit anglais revenu d’un long périple doit faire en échange d’un massage ? »
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Joanne comprenait qu'il aurait aimé récupérer l'argent qu'il avait durement gagné. Et l'héritage de sa grand-mère qu'il affectionnait tant. Elle lui caressa tendrement la joue. Il était triste, cela allait sans dire. "Peut-être que tu pourrais quand même tenter de lancer une procédure pour récupérer la somme que tu as du verser pour récupérer Daniel." suggéra-t-elle. "Je sais que ça prendra beaucoup de temps, et que ça ne sera pas facile. Mais avec nos dépositions et toute l'enquête, peut-être que nous pourrons en tirer quelque chose, je ne sais pas." Le jeune couple sera mené à parler argent beaucoup plus régulièrement, ils le savaient tous les deux. Joanne s'efforçait de trouver des solutions, et elle avait déjà une petite opportunité qui s'ouvrait à elle. Mais c'était encore en projet, et il y avait beaucoup d'étapes à franchir, alors elle gardait ce petit secret pour elle jusqu'à ce qu'il y ait des choses plus concrètes. Le bel homme baissa les yeux, triste de ne pas pouvoir offrir la vie à Joanne comme il l'aurait pensé. "Je ne pense pas mériter plus que tout ce que j'ai déjà actuellement." dit-elle tout bas. "Je n'aurai jamais pensé être fiancée et être maman, c'est ça, les plus beaux des cadeaux." Cela allait certainement lui manquer, de lui offrir des bijoux hors de prix ou des robes de grands créateurs. Il allait être limité de ce côté là pour lui dire à quel point il l'aimait, mais elle savait qu'il se trouverait d'autres moyens. Il racontait avoir vu une veste pour elle, et qu'il avait regardé pour la première fois l'étiquette du prix, réalisant qu'il ne pouvait pas le lui offrir. Il était dépité de faire face à toutes ces situations qu'il ne connaissait pas très bien. Cela allait prendre des semaines, des mois, ou peut-être jamais. "Alors, nous économiserons." finit-elle par dire, d'une voix douce, toujours avec le sourire. "Ou lorsque tu vendras tes tableaux. Nous pourrons garder une somme pour nos voyages, l'autre pour les études de Daniel quand il sera grand." proposa-t-elle. Le fait qu'il mentionne Nyx était loin de lui plaire, mais il n'avait certainement pas le choix que de passer par elle pour l'aiguiller un peu. "Avec un peu de chance, tu gagneras en notoriété dans le monde la peinture. Il suffit que certaines personnes soient là au bon moment pour que les prix s'envolent." dit-elle. "Et je m'exposerai plus, si ça peut nous faire gagner quoi que ce soit." Un défi qu'elle pouvait relever, surtout que c'était nécessaire. Tant que Daniel restait en dehors de tout cela, elle était d'accord."Et quand nous arriverons à remonter la barre, que Daniel vivra sereinement son enfance sans manquer de rien, ce sera grâce à nous, et à nos efforts. Si nous y parvenons, ce sera à mes yeux une belle victoire." lui dit-elle tout bas. "Edward Keynes aura fait ce qu'il voulait pour mettre son fils au plus bas, il se damnera jusqu'à la fin des temps lorsqu'il comprendra que ça n'aura pas suffi pour qu'il ne se relève, encore plus étincelant et majestueux que jamais, car tout ce qu'il aura gagné, ce ne sera que grâce à lui. En se perdant lui-même, il a tout perdu, même cette incessante guerre contre toi. Parce que toi tu as acquis des choses qu'il n'aura jamais obtenu." Jamie l'embrassa longuement tendrement, certainement en guise de remerciement, mais aussi pour chercher du réconfort, peut-être s'assurer qu'elle l'aimait vraiment. Il avait connu le malheur de faire un long voyage en classe économique, et son dos en avait clairement pâti. Il réclamait un massage. Joanne rit, les yeux tout aussi malicieux. "Mmh... Je ne sais pas." dit-elle tout bas, en lui volant un baiser. "Peut-être que si je confie Daniel à mes parents pour la soirée, tu pourrais me dire avec tes propres mots à quel point tu m'aimes." Elle se blottit contre lui. "Avec toutes ces aventures, j'ai l'impression que ça fait une éternité que nous n'avons pas fait l'amour, et tu me manques." Le genre de chose dont il était incapable de refuser. Ils échangèrent les places, afin qu'elle ait accès à son dos. Elle s'occupait autant de ses épaules que de ses lombaires, ne pouvant résister d'embrasser à plusieurs reprises là où se trouvait son tatouage. Ses gestes étaient toujours délicats, aléatoires ou calculés selon les moments. Elle ne s'était jamais trouvée très douée pour ce genre de choses. "Je t'aime." lui dit-elle à un moment, tout bas.
« Je le pourrais, oui, et je suis assuré de pouvoir tout récupérer d’ici un ou deux ans si je lance ce genre de procédure. » je réponds à Joanne en haussant les épaules. Tout est plus compliqué dans la mesure où les méfaits ont été commis en Australie par un Anglais ayant fait transférer l’argent en Suisse –pour ne pas faire original. Il y a tellement de croisements de juridictions que cela allonge considérablement le temps nécessaire pour récupérer l’argent. Et encore, il faudrait que j’aie le cœur à lancer toute cette machine. « Mais c’est devenu un peu plus compliqué que ça. » j’ajoute dans un soupir. A moins que cela ne soit compliqué qu’à mes yeux, et que Joanne verra des solutions que je n’envisage pas encore. Il faut dire que face à ce genre de situation, il est particulièrement difficile de prendre du recul, de réfléchir à une question sous tous ses angles, et le plus souvent ce sont les points de vue extérieurs qui permettent d’y voir plus clair. « Edward a tout légué à la fondation Oliver Keynes, que je ne connaissais absolument pas et dont je suis désormais l’heureux dirigeant. » j’explique donc. Mais ce n’est pas un sujet que je souhaite aborder en profondeur à cet instant. Ce bain n’est pas fait pour parler affaires. « Je te montrerai tout ça dans le détail plus tard. » j’ajoute pour écourter cela. Quoi qu’il en soit, je ne me vois pas reprendre de l’argent qui est si attendu et utile ailleurs. Pas même si j’en ai besoin. Le nom de mon frère doit y être pour beaucoup. Je préfère encore que nous redoublions d’efforts ici pour remonter la pente nous-mêmes. Economiser pour les cadeaux, les voyages, l’avenir. Les études de Daniel. Des autres enfants. Je passe une main sur mon visage, dépité ; « J’avais presque oublié ce détail. » Sur le moment, les rôles sont inversés ; tout me semble insurmontable, comme si une immense montagne se dressait devant moi, alors que Joanne s’efforce de me montrer tous les moyens que nous avons de nous en sortir très bien, et tout ce que nous avons déjà accompli. Je ne suis pas habitué à ce sentiment de vulnérabilité, et je le déteste. Heureusement qu’elle est là. Ses paroles me font sourire, et parfois rougir. « Vous parlez fort bien, miss Prescott, et vous savez trouver les bons mots. » je murmure après un long baiser amoureux. Réclamer un massage la fait rire. Je me doute bien qu’elle a également quelque chose en tête lorsqu’elle me jette ce petit regard. Mais sa condition me surprend, je l’avoue, dans le bon sens du terme. Elle sait bien que je ne peux pas lui refuser cela. « C’est vrai, ça commence à faire longtemps… » En calculant rapidement, cela fait quasiment trois semaines. Je me rends compte que l’envie s’est complètement absentée pendant cette période, et cela m’étonne un peu. Pas un fourmillement depuis des semaines, pas une vraie étincelle de désir. « Je pense que nous avons un accord dans ce cas. » Je lui tapote le bout du nez avec un sourire complice. « Tu vois que tu es une négociatrice hors pair. » A moins que ça ne soit moi qui suis bien faible face à elle. Nous échangeons les places, et les petites mains de Joanne s’activent sur les muscles crispés de mon dos. La moindre pression fait un bien immense. Des cervicales aux lombaires, il n’y a pas une vertèbre qui ne soit pas douloureuse. Il doit y avoir énormément de nervosité emmagasinée le long de mon échine. « Je t’aime aussi. » je murmure alors qu’elle dépose un petit baiser sur le tatouage de mon épaule. Nous restons dans le bain encore un long moment, jusqu’à ce que l’eau soit trop froide. Il est quasiment dix heures lorsque nous sommes enroulés dans nos serviettes. Une fois habillé, je file auprès de Daniel qui s’est éveillé. Il est de plus en plus actif, les yeux toujours grands ouverts sur le monde qui l’entoure, souriant à ses parents. Je le prends dans mes bras et le couvre de baisers. « Salut mon bonhomme. Tu m’as tellement manqué. Il paraît qu’on tient sa tête tout seul, tu fais voir ? » Installé sur le bord du lit, j’installe le bébé assis sur mes genoux, et attends de voir s’il réussira à se tenir droit seul. C’est encore un effort pour lui, mais sa petite tête se redresse bien pendant quelques secondes, et en effet, il affiche le sourire vainqueur le plus mignon qui puisse exister. « Bravo, mon cœur. » Je le reprends tout contre moi et descends au rez-de-chaussée. D’entre mes affaires, je tire mon ordinateur portable. Je le pose sur la table de l’espace salle à manger et l’ouvre sur le portail du site internet de la fondation. Lorsque Joanne nous rejoins, je l’invite à découvrir la fameuse tirelire dans laquelle est planquée mon argent. « Tiens, je te présente la fondation Keynes pour jeunes en difficulté. » Pendant ce temps, je me balade dans le salon avec mon fils, jouant avec ses petits doigts potelés. Il attrape fermement mon index et le porte à sa bouche, bien décidé à le dévorer. Ce qui me fait penser que nous devrions déjeuner quelque chose. « Je pense que c’est papa qui va faire à manger. Du rôti de Daniel. » dis-je en soulevant le petit t-shirt du bébé pour dévoiler son ventre et souffler dedans pour le faire rire. Il gigote et gazouille adorablement.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Joanne s'attendait à plus de temps que ça pour espérer récupérer son argent. Mais il y avait apparemment un élément qui le freinait à prendre cette démarche, mais il ne voulait pas en parler de suite. Jamie préférait largement profiter du bain, du réconfort de sa future et de toute la tendresse qu'elle avait à lui donné. Edward avait créé une fondation, dans laquelle il avait injecté tout l'argent qui lui restait. Jamie en était désormais le dirigeant, alors qu'il n'en connaissait pas l'existence. Rien que le nom donné à cette fondation devait le toucher d'une manière ou d'une autre. Il ne voulait pas ajouter de détails, reportant ce sujet de conversation pour plus tard. La jeune femme n'insista pas davantage. Mais son fiancé fut encore plus dépité lorsqu'elle mentionna les études de Daniel, il avait un peu oublié cette facette. "Jamie, nous avons encore le temps. Daniel n'ira pas à la fac demain. Nous avons toutes ces années pour nous redresse, et nous y arriverons." lui assura-t-elle. Joanne voyait bien qu'il s'énervait contre lui-même, de ne pas supporter sa condition et de ne pas se sentir capable de surmonter ce lot de difficultés qui se dessinait à l'horizon. Mais il était temps de balayer ces idées de leur moment et de se mettre à ce fameux massage. "J'arrive à négocier parce que c'est toi, et je sais sur quoi appuyer pour avoir ce que je convoite." lui dit-elle, amusée. Ses mains parcouraient la peau de son dos. Elle sentait bien sous ses doigts à quel point il était crispé, tendu, énervé. Joanne continuait les message, puis colla son torse contre son dos, ses lèvres embrassant inlassablement l'encre qui était sous sa peau. L'eau finit par se refroidir, signe que cela faisait un petit moment qu'ils étaient dans le bain et qu'il était temps d'en sortir. Jamie s'habilla et s'empressa d'aller chercher et chérir son petit garçon. Après s'être séchée, Joanne se vêtit d'une simple robe et d'un gilet avant de rejoindre les deux hommes de sa vie au rez-de-chaussée. Jamie avait allumé son ordinateur portable pour lui montrer le site de la fondation dont il avait parlé quelques temps avant. Elle souriait en le voyant s'amuser avec son fils, puis se reconcentra sur le site internet. Même si elle connaissait le créateur, elle se disait que c'était une bonne intention. Peut-être qu'Edward ne cherchait pas à dorer son blason, peut-être qu'il l'avait vraiment fait au nom de son fils. On ne le saura jamais. "La somme que tu as versé pour la rançon revient à cette fondation ?" demanda-t-elle. "Que diraient les parents de ces jeunes s'ils savaient que l'argent utilisé pour aider leurs enfants n'est qu'une somme récolté pour accepter de rendre un bébé de trois mois à sa famille ?" finit-elle par se questionner. Elle se doutait que d'une manière ou d'une autre, l'enlèvement de Daniel allait s'ébruiter et remonter aux oreilles de ce genre d'organisme. Joanne essayait de se mettre à la place de ces parents démunis. Elle se disait qu'elle en aurait encore plus sur la conscience si elle savait que l'argent utilisé pour la fondation était loin d'être propre. "Tout ce que je vois, c'est qu'il a tout orchestré pour appuyer là où ça fait mal, et à te voir, ça marche, Jamie." Elle soupira. "Mais ça reste une belle initiative, peut-être même qu'on pourrait chercher à l'améliorer." Elle haussa les épaules, et se leva pour rejoindre Jamie. Elle posa une main sur le bas de son dos, l'autre sur celui de Daniel. Elle embrassa la mâchoire du bel homme, puis son cou. "Ton père pense ne t'avoir laissé que des fardeaux et des bâtons dans les roues. Il a eu incroyablement tort." dit-elle tout bas en souriant. D'une manière ou d'une autre, Joanne savait que Jamie allait énormément s'attacher à cette fondation. Et elle savait qu'ils pouvaient en faire quelque chose d'encore plus fantastique. Pourquoi pas y aller un jour, leur montrer que le nouveau dirigeant ne les oublie pas. "Vu l'heure, on peut se faire un brunch." dit la jeune femme en se dirigeant vers la cuisine, afin de tout préparer. Elle fit également des oeufs au plat et grilla quelques tranches de bacon. "Pendant ce temps, tu pourrais tenter de lui préparer un biberon." dit-elle d'un air amusé. "J'ai commencé un petit la transition au biberon. Un tous les deux jours. Je me suis dit qu'il fallait faire ça en douceur." expliqua-t-elle, lui partageant son raisonnement. "Il était un peu perturbé les premières fois. Il est toujours très câlin lorsque je l'allaite." Elle se retourna pleinement, et la taquina. "Il profite pleinement de l'espace dont tu lui as entièrement dédié." dit-elle alors avec un large sourire. Elle se demandait s'il allait être jaloux, ou envieux, ou si au contraire, il allait toujours autant respecter cette partie du corps de sa douce.
Dans le fond, je ne doute pas vraiment qu'Edward ait créé cette fondation à la mémoire d'Oliver, plus que par intérêt. Cela serait sûrement son genre d'aller blanchir je ne sais quoi à travers ce genre d'organisation, lui qui n'a jamais eu assez de pouvoir pour le satisfaire, mais je préfère croire en l'innocence de son action, et dans les bienfaits que dépeignent les coupures de presse lues dans l'avion. Même s'il est assez ironique de penser que pareil monstre se soit vu comme un défenseur de la veuve et de l'orphelin en créant pareille action, je me dis qu'il voulait vraiment aider des compatriotes. Peut-être avoir une unique chose positive et saine dans son existence. Pourquoi pas après tout. Je laisse Joanne prendre un peu connaissance du tout. La structure est particulièrement complète à mes yeux. Cellule psychologique, addictologie, refuge. La fondation réunit déjà un tas de fonctions. Et bien sûr, elle doit coûter particulièrement cher. A ce que j'ai compris, les caisses étaient quasiment vides avant la mort de mon père. Soudainement, elle se porte bien mieux. « Pas que la somme de la rançon. » j'explique à Joanne. « La totalité de la fortune d'Edward est partie dans cette fondation. Il n'a pas laissé d'argent à qui que ce soit d'autre. » Ni à moi, ni à sa femme, ni à son frère. Ces deux-là ont des actions à faire fructifier et dont ils peuvent récolter les fruits directement sur leur compte. Cela les garde à l'bri du moindre besoin pour bien des années. Moi en revanche, je n'ai plus qu'à me débattre comme n'importe qui. Et prendre soin de la seule chose qu'il m'a laissé. Je ris, cynique, en écoutant Joanne se demander ce que les familles prises sous l'aile de l'association penseraient de la provenance des fonds qui les aident. « Qu'ils s'en fichent à partir du moment où ça leur profite, je suppose. » dis-je en haussant les épaules. Ce qui est sûrement cruel de ma part, je l'accorde. Mais je pense que la plupart des gens sont aux abois, que les temps sont difficiles, et que l'argent soit propre ou sale les importe peu. Du moins, pas pour ceux qui frappent à la porte de cette association. « Pas tout le monde a ta conscience. » Et ça, même si elle veut croire de tout coeur en l'humanité, même armée de toute sa naïveté, elle ne peut pas le nier. Il y a ceux qui penseront comme elle et ceux qui resteront aveugles avec plaisir. On ne peut pas les blâmer, je suppose. Oui, Edward appuie où ça fait mal. Non, je ne marche pas, je cours. « Qu'est-ce que tu ferais à ma place ? » je demande, vraiment perdu. Je ne sens tellement désarmé face à pareille situation. Je prends tous les conseils. « Les personnes qui font appel à cet organisme ont besoin de cet argent. Encore plus de monde peut être aidé. Tu te verrais leur reprendre ? » Parce que moi, pas vraiment. Je préfère leur laisser. Je peux me redresser de mon côté, je peux finir par m’accommoder d'une vie moins aisée qu'elle ne l'a jamais été. Je préfère que tout cet argent soit utilisé pour eux plutôt qu'il ne soit dépensé dans des bijoux et des robes, je préfère apprendre ce nouveau mode de vie, plutôt que de me montrer égoïste à ce point. Après tout, si je savais que cette fondation existait depuis le début, est-ce que je n'aurais pas tout donné sans même réfléchir ? Sur les ordres de Joanne, je me mets à préparer le biberon de Daniel pendant qu'elle prépare le brunch. Très vite, le rez-de-chaussée sent bon le bacon et les œufs. On ne peut pas enlever à la viande sa bonne odeur lorsqu'elle est grillée, c'est sûr. Je me dis que je vais bientôt vivre avec deux carnivores, et je me demande quand même quel camp Daniel choisira lorsqu'il sera lus grand. Je ris légèrement et jette un faux regard noir à Joanne qui se moque de ma perte de territoire au profit de mon fils. « Qu'il en profite, tant qu'il le peut. » Le petit-déjeuner disposé sur la table avec soin, j'amène le cosy du petit tout près de la table et le dépose dedans. S'il proteste pendant quelques secondes, retrouver la douceur de son ami l'ours en peluche semble suffire à le contenter. « A quoi tu pensais, quand tu disais qu'on peut améliorer la fondation ? » je demande au bout d'un moment, remuant ce sujet dans ma tête inlassablement. Après tout, je suis à la tête de tout ceci, je dois en prendre soin, et je ne peux pas complètement m'y soustraire. Mais je peux le mettre entre de bonnes mains et garder un œil dessus. « Est-ce que ça te plairait de t'en occuper ? » je finis par demander à Joanne. Elle qui souhaite s'occuper, être utile, elle qui aime s'occuper des autres, et qui souhaite mettre sa pierre à l'édifice. « J'ai déjà une montagne de travail, je ne me vois pas trop ajouter ça en plus. Je vais sûrement finir par en déléguer une grande partie. Autant que ce soit à quelqu'un de confiance. »
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Il n'y pouvait certainement rien, mais le ton qu'il employait était tout autre, lorsque ça parlait d'argent. Jamie précisa que toute la fortune d'Edward a été déversée à cette fondation, en plus de l'argent de son fiancé. Joanne ressentait une certaine amertume. Edward Keynes aura craché de son venin même après sa mort. Quel homme ignoble, se disait-elle. Jamie était persuadé que tout le monde se ficherait bien d'où venait l'argent, tant que cette somme leur était bénéfique. Il y avait comme un malaise qui régnait. Joanne n'était pas d'accord sur ce point. Peut-être qu'elle était trop naïve, trop innocente, mais elle n'était pas la seule à être ainsi. Peut-être était-ce sa fortune perdue qui le rendait si amer, presque désagréable, et peut-être qu'il en voulait au monde entier. Il lui rappelait bien que beaucoup n'avait pas la conscience. Elle haussa les épaules, sans rien dire, se disant que cette conversation allait aboutir à quelque chose. Il était fatigué, triste, certainement encore plus énervé, elle n'allait en tirer rien de bon. Le bel homme finit tout de même par lui demander ce qu'elle ferait à sa place. "Je ne sais pas, Jamie." lui répondit-elle rapidement. Toute cette situation la dépassait beaucoup pour qu'elle puisse essayer d'être à sa place et imaginer ce qu'elle ferait. "Si ce n'était que moi, à ta place, je pense que je serai dans le même que juste après mon divorce, c'est-à-dire, rien de glorieux." ajouta-t-elle, en haussant les épaules. Et il enchaîna avec une nouvelle question à laquelle elle ne pouvait pas répondre. Elle restait muette, continuant de préparer leur repas. Une fois que tout était prêt, ils s'installèrent pour manger. Joanne pensait en avoir fini avec ce sujet de conversation, mas il le ramena quelques minutes plus tard. "Je ne sais pas encore. Je suis peut-être trop perfectionniste, mais je me dis que toute chose peut être améliorée." Surtout quelque chose de construit par Edward Keynes. Elle commença à manger et manqua de s'étouffer lorsque Jamie lui proposer d'être en tête de la fondation. Elle but un verre d'eau pour faire passer la bouchée de bacon qu'elle tentait d'avaler, et elle le regarda avec des yeux écarquillés. "Tu es sérieux ?" Joanne eut ce petit rire nerveux, mais qui état loin d'un rire ravi qui indiquait qu'elle allait accepter cette proposition. "Tu me demandes, de prendre la tête d'une organisation fondée par ton père ? Qui, pour être sûr de pourrir la vie de son dernier fils -l'homme que j'aime plus que tout- jusqu'au bout, organise le kidnapping de son petit-fils -pour soit dit-en passant, soulager la folie de sa femme, qui était persuadée que Daniel était la réincarnation d'Oliver. Qui lui demande une rançon avec la somme exacte qu'il avait sur son compte pour espérer récupérer son enfant. Promesse qu'il n'aurait pas tenu parce que Marie le tenait encore très bien quand nous sommes arrivés. Le même homme qui a engagé des salopards qui m'ont blessée sans raison, alors que tout ce que je voulais, c'était notre enfant. Le même homme, qui a injecté la totalité de sa fortune, plus la tienne dans une fondation ? Et tu voudrais que je prenne la tête d'une fondation qui a dans ses caisses la valeur monétaire de notre fils ?" Joanne était plus blessée qu'autre chose, elle en avait les larmes aux yeux. Le bleu sur son visage commençait enfin à s'effacer, la petite blessure ouverte à cicatriser. On ne voyait plus les entailles faites sur son annulaire gauche. "Peut-être qu'il partait d'une bonne attention en créant la fondation au nom d'Oliver, peut-être qu'il voulait dorer son blason, je me fiche bien de ses raisons. Peut-être qu'elle aide effectivement des jeunes qui sont à bout. Mais à quel prix, Jamie ?" Aucune fois elle avait le ton, ou avait montré de l'énervement. "Je sais qu'il faudra faire avec, de toute façon. Mais ne viens pas me dire que je dois juste ignorer. Je vais partie de ces personnes naïves qui ont trop de conscience pouvoir ignorer ce genre de trucs." Là, elle était peut-être un peu plus amère. Joanne déglutit difficilement sa salive, histoire de retrouver son calme et de ne pas fondre en larmes devant lui - bien que le traumatisme, plus que présent, lui en donnait totalement le droit. Quelques secondes de silence planèrent, lourdes de sens. "Alors oui, je m'en occuperai puisque tu n'auras pas le temps. Mais j'aimerais qu'à court ou moyen terme, nous trouvions quelqu'un à qui déléguer cette tâche, si ça ne le gêne pas d'être rémunérer avec l'argent issu de la rançon." Elle avait les mains qui tremblaient. "Parce que je me dis, que si je dois m'y rendre, et rencontrer ces jeunes, ces familles. Ce ne sera que des sourires forcés ou des paroles que je ne penserai pas parce que j'aurai cette éternelle amertume, et ce souvenir permanent qui hantera l'édifice de tout ce qu'il s'est passé. Et je pense que la fortune seule d'Edward suffit largement à subvenir au besoin du bâtiment en question." Elle ne savait pas combien il avait sur son compte, mais certainement beaucoup plus que Jamie. Elle espérait qu'il comprenne un peu ses maux, d'autant qu'elle tentait de panser les siens. Mais tout était encore si frais, si récent, c'était encore un peu difficile de se prendre en main et de se prendre en main. "Et puis tout ce que m'avait dit ta mère..." dit-elle bien plus bas, comme si elle cherchait à ce qu'il ne l'entende pas. Mais ces paroles là l'avaient énormément heurté. Elle hésita parfois à lui demander si c'était vrai. Elle voulait juste être rassurer, être sûre que rien de ce qu'elle avait dit était vrai. Elle revint vite à autre chose. "Pardonne-moi, je ne voulais pas être si... méchante." Elle ne trouvait pas le mot qui correspondait le plus, mais au premier abord, elle ne s'était pas trouvée agréable. Tout était encore si tendu, pour tous les deux. "Et puis... j'ai peut-être un autre projet qui se dessine, qui occupera bien mes journées tout en pouvant rester maman à plein temps. Je ne voulais pas le mentionner avant qu'il y ait des choses plus concrètes, mais... Voilà. Mais si j'ai bien compris, et si ça aboutit, ça pourrait nous apporter beaucoup." Et par beaucoup, elle ne pensait pas forcément à l'argent. A cette phase, Joanne lui sourit enfin, avec beaucoup d'amour et de tendresse.
Je pouvais m'attendre à bien des réactions, mais sûrement pas à celle que Joanne se sert ici. Elle aurait pu refuser parce qu'elle ne se sent pas à la hauteur, parce qu'elle n'a pas les compétences pour gérer ce genre d'organisme, ou tout simplement parce que cela ne l'intéresse pas. J'écarquille les yeux et reste complètement muet, la mâchoire légèrement tombante à cause de la surprise. Je ne suis sûrement pas habitué à ce que la jeune femme me refuse quoi que ce soit, mais cette faveur semble être en trop pour elle. Sur le moment, j'ai bien du mal à comprendre son point de vue. Dans le fond, je ne faisais que lui proposer d'aider des gens, de faire quelque chose de bien. Les personnes aidées par la fondation, même si elle a été crée par mon père, n'ont rien à voir avec ses méfaits et n'ont pas à pâtir de ceux-ci. Petit à petit, même si je ne suis pas certain de tout cerner, je comprend bien que la provenance des fonds de l'association rebute bien trop Joanne, qu'importe s'il est possible de faire quelque chose de bien avec. Si elle ne se sent pas capable ou si elle ne veut vraiment pas y être mêlée, autant qu'elle n'y touche pas. « Je... » A la fin de sa tirade, je me sens particulièrement idiot et petit. Je ne sais pas où me mettre, je ne sais pas quoi dire, ni sur quoi poser mon regard. Déstabilisé, il me faut un petit moment avant de réussir à prononcer quelque chose. « Je ne voyais absolument pas les choses sous cet angle. » j'avoue finalement. Je ne sais pas si je dois lui expliquer ou non mon intention de base, si ça l'intéresse de l'entendre pour comprendre ce à quoi je pensais en lui proposant une telle chose. Je m'y risque quand même, afin qu'elle sache que je ne pensais vraiment pas à mal. « Je pensais juste que tu aimerais aussi aider ces jeunes, et puis, tu voulais être utile... » Non seulement pour les autres, mais aussi pour nous. Le salaire qu'elle aurait touché de cette manière n'aurait été qu'un moyen de remettre notre argent dans nos caisses, et le directeur d'une fondation peut parfois gagner gros. « Quitte à ce que notre argent soit là-dedans, qu'il profite à ceux qui en ont besoin, autant garder une main dessus et l'utiliser avec sagesse, d'une manière gratifiante. » Mais pour Joanne, la manière dont l'argent a été obtenu a bien trop d'importance. On ne peut pas faire le bien à partir du mal. « Je… Je ne voyais personne d'autre pour s'occuper de ça, donner un nouveau visage à cette fondation, en faire quelque chose de plus sain. » Je n'ai plus qu'à me tourner vers quelqu'un d'autre et laisser quelqu'un que je connais moins bien et en qui j'ai moins confiance gérer notre fortune perdue et un organisme qui me tient déjà à coeur. Je hausse les épaules. Tant pis. « Je vais la confier à quelqu'un d'autre, ce n'est pas grave. Quelqu'un qui sera tous les jours sur place, ça sera bien plus pratique. Je ne veux pas que tu te sentes obligée de quoi que ce soit. » Si cela la fait sentir mal, alors ça n'a pas d'intérêt. Ce n'est pas le but. « Mieux vaut que tu te concentres sur ton propre projet. » dis-je en toute bienveillance, avec un sourire tendre. Elle se sentira sûrement mieux en créant quelque chose de son côté, en concrétisant quelque chose qui l'intéresse. Elle semble déjà enthousiaste face au projet en question, c'est une bonne chose. « Est-ce que je peux en savoir plus dessus ou est-ce que c'est top secret ? » je demande avec un petit sourire avant de porter ma tasse à mes lèvres pour prendre une grande gorgée de thé.
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Joanne se doutait bien qu'il ne pensait pas à mal, qu'il avait toutes ces raisons de lui confier cette responsabilité. Elle s'était calmée, et lui était enclin à argumenter sa manière de voir les choses. Sa bienveillance demeurait jusqu'au bout, même si la fondation avait un fond très souillé. A ses yeux, il était tout à fait possible de rendre à la structure l'allure et la réputation qu'elle pourrait avoir. Jamie avait vu juste en pensant qu'elle aurait apprécié s'occuper de cela et il voyait juste. S'occuper de la fondation l'aurait certainement aider à se valoriser un petit peu, bien que Joanne n'aurait pas su comment gérer tout ça. C'était un travail titanesque, et le gérer à distance ne rendait que la tâche plus compliquée. Jamie se sentait véritablement navrée d'avoir ainsi heurtée sa fiancée, ce n'était pas comme ça qu'il voyait les choses. Quelque part, elle s'en voulait un peu d'avoir été aussi excessive, mais sur le coup, c'était la première chose qui lui venait à l'esprit. Chose à laquelle lui n'avait pas songé. Il semblait triste, peut-être même déçu, qu'elle refuse de manière assez catégorique sa proposition. A moins qu'il n'ait absolument pas l'habitude qu'elle lui refuse quoi que ce soit. "Je m'en occuperai le temps que l'on puisse potentiellement trouvé quelqu'un." répéta-t-elle, plus calmement. Elle ne cherchait pas non plus à le mettre en difficulté. "Peut-être que... D'ici là, j'aurai relativisé, et fait la part des choses." Un effort qu'elle était prête à faire pour lui. Elle y trouverait peut-être goût à la longue. C'est tout à fait le genre de fondation à laquelle elle peut s'attacher très facilement, car l'initiative en elle-même était à mettre en avant. Joanne prit doucement sa main, l'embrassa et l'appuya contre la joue qui n'était pas blessée. L'autre lui faisait encore mal. "Laisse-moi un peu de temps pour mettre tout ça à plat, d'accord ?" lui demanda-t-elle avec un regard tendre. Elle reste quelques secondes ainsi, et dit tout bas. "C'est encore dur." Son regard devenait subitement triste. Mais il s'illumina lorsqu'elle parlait de ce projet mystère. La belle blonde finit par lâcher main de Jamie. Celui-ci se montrait bien évidemment curieux à ce sujet, et ne le cachait pas. Elle hocha négativement la tête, d'un air désolé. "Pas tant que j'ai des choses plus concrètes à te montrer." Il état très difficile pour Joanne de garder un tel secret, c'était dur de ne pas céder à un regard si curieux. "Pour le moment, c'est beaucoup de on-dit et de messages subliminaux, et pas de papier pour prouver quoi que ce soit. Je préfère attendre un peu et voir comment ça évolue, et si les personnes en question étaient vraiment sérieuses lorsque nous discussions." Elle rit nerveusement, en se grattant un peu la tête.[color=#006699] "Mais si ça se fait, ça résoudrait, je pense, nos problèmes, et c'est quelque chose qui me rendrait vraiment heureuse." Ses yeux pétillaient, comme ils n'avaient plus briller depuis longtemps. Ils finissaient de manger tranquillement leur brunch, et Daniel commençait à s'agiter. "Le brunch te donne déjà envie, mon trésor ?" lui dit-elle doucement lui caressant le ventre. Il gazouillait et riait un peu. Elle finit par se lever pur entraîner Jamie jusqu'à leur petit salon, le cosy de Daniel dans l'autre main. Elle le déposa sur la petite table, puis elle invita le bel homme à s'allonger et poser sa tête sur ses genoux. Ainsi, elle pouvait le regarder, caresser délicatement son visage. Ses traits étaient tirés, il était encore épuisé. Mais pas seulement par le voyage, mais par tout ce qu'il venait de vivre. Des traces qui ne disparaîtront peut-être jamais. Il ne devait que trop bien le savoir. Ses doigts passaient sur touts ses traits, sur sa bouche, son nez, ses pommettes. "Tu es tellement beau." lui dit-elle tout bas, totalement sous le charme. "Je suis la plus chanceuse d'épouser un si bel homme, qui est en plus le père de mon fils." ajouta-t-elle avec un sourire sincère, tout en continuant ses caresses. "Endors-toi, mon amour. Je veillerai sur toi." dit-elle encore tout bas, voyant bien qu'il luttait contre la fatigue.
C’est une petite déception dont je peux très bien m’accommoder. Après tout, ce n’est pas si grave. Je peux très bien me débrouiller sans que Joanne ne se force à quoi que ce soit. Elle insiste sur le fait qu’elle prendra en effet la direction de la fondation le temps que j’emploie une autre personne pour ce travail. Peut-être que cela lui plaira, au final. Peut-être qu’elle se prendra d’affection pour la cause, pour les jeunes et les familles qui sont soutenues par cet organisme. Peut-être qu’elle sera satisfaite du fruit de son travail. J’acquiesce d’un faible signe de tête. Je me doute bien qu’elle le fait pour me faire plaisir –et m’aider dans la mesure où je n’aurai vraiment pas le temps pour cette charge de responsabilités supplémentaire- et non de gaieté de cœur. « Nous verrons bien. Je vais essayer de trouver quelqu’un rapidement. » je réponds avec un sourire en coin. J’espère pouvoir la soulager de ce poids au plus vite. Car si cette situation et cette responsabilité ne lui plaît vraiment pas, il n’est pas question qu’elle y reste coincée trop longtemps. Je vois venir de nombreuses heures sur Skype pour m’entretenir avec des personnes qui feraient de bons directeurs potentiels. Des heures en moins avec ma famille dont je me passerais bien. Je suppose que ce sera ainsi pendant encore un petit moment, le temps de s’ajuster à notre nouvelle situation et nous sortir du fond du trou. Cela ne sera pas simple des deux côtés. « Je sais bien… » je murmure en caressant délicatement la joue de Joanne. Son hématome a bien dégonflé, son épiderme reprend de sa teinte normale, mais je me doute qu’elle a encore mal. Pas seulement physiquement. Les souvenirs sont encore frais et les sensations vives. La blessure intérieure prendra plus de temps à s’effacer. Histoire de se changer les idées, je l’interroge un peu au sujet du fameux projet qu’elle semble vouloir garder bien secret tant qu’elle-même n’en saura pas plus. Je plisse les yeux, curieux à souhait, intrigué, cherchant à avoir des indices dans son regard comme si la vérité pouvait s’y lire. Mais rien du tout, je reste dans le flou total, ayant à cet instant pour seul élément l’étincelle de joie qui brille dans ses iris lorsqu’elle y pense. Quelque chose qui pourrait résoudre nos problèmes. « Eh bien, j’espère pour toi que ça se fera, ça a l’air d’énormément t’enthousiasmer. » Ce qui fait vraiment plaisir à voir après toutes ces semaines de sombres tracas. Joanne remontera la pente sûrement plus vite que moi. Il faut dire que j’ai dégringolé quelques marches de plus qu’elle avec une certaine violence. Néanmoins, je tente de garder mon optimisme et d’être assez confiant pour l’avenir. Le brunch prend fin une fois les assiettes terminées. Je m’apprête à tout ranger lorsque ma fiancée m’attrape par le bras pour m’attirer dans notre petit salon. Daniel face à nous sur la table basse, gigotant ses pieds, jouant avec ses doigts et sa bouche, il gazouille et lance quelques voyelles dans l’air dans de vaines tentatives de communication. Pour ma part, je m’allonge sur le canapé, la tête sur les cuisses de la jeune femme. Je la laisse frôler mon visage, faire le tour des nouvelles rides dessinées par de longues journées d’inquiétude et d’angoisse. Moi qui n’aie déjà pas le visage particulièrement juvénile, il me semble avoir pris cinq ans en un mois. Je pouffe nerveusement lorsque Joanne me murmure un compliment. « Je ne pourrais pas moins le croire qu’aujourd’hui. » dis-je avec un sourire amusé. Je suis fatigué, stressé, fort faible et nerveux, et rien de tout ceci n’est beau. Je ferme les yeux pour profiter des caresses de ses doigts qui glissent entre mes cheveux. C’est toujours si agréable, si apaisant. « Je vais être complètement décalé si je dors… » je murmure avant de sombrer dès la minute suivante, désarmé face à la volonté de mon corps de récupérer après toutes ces émotions. Je pourrais dormir plusieurs jours de suite si cela ne tenait qu’à moi. J’émerge plusieurs heures plus tard, au milieu de l’après-midi. Joanne parle un peu et joue avec Daniel qui adore absolument toutes les interactions qu’il peut avoir avec sa mère, même à distance. Sur le flanc, je l’observe sans rien dire. Le plus beau des trésors. Je me demande s’il ressemble tant que ça à Oliver. Si c’est cette ressemblance qui a fait basculer ma mère. Ou si elle n’avait plus toute sa tête depuis plus longtemps que ça. Je finis par me redresser et m’étirer. Je dépose un baiser sur la joue de Joanne pour la remercier de m’avoir laissé dormir. Tant que la maison est plongée dans cette quiétude, je fais quelques pas pour m’installer devant le piano blanc qui trône toujours dans le salon. Dans mon esprit, je feuillette rapidement mon répertoire musical et opte pour un air lent et léger signé Ravel.
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Comme elle s'y était attendu, Jamie sombra très rapidement dans un sommeil des plus profonds. Elle continuait de caresser son visage ou son torse, le regarder avec tendresse. Il en avait plus que besoin, autant pour revigorer son corps que son âme. Joanne ne savait pas combien de temps elle était restée ainsi, à la bichonner. Mais cela se comptait en heures, car Daniel commençait à couiner, ayant certainement faim. "J'arrive, mon trésor." lui dit-elle tout bas, en lui faisant un doux sourire. Daniel y répondit de la même manière, vraisemblablement ravi que le message soit passé. Délicatement, elle prit la tête de Jamie entre ses deux mains pour pouvoir dégager ses genoux. Elle mit à la place un coussin, et elle le recouvrit d'un plaid. Elle lui déposa un très léger baiser sur sa bouche et caressa une dernière fois sa joue avant de s'en détacher. La jeune femme prit ensuite Daniel dans ses bras. Elle dégagea son bras de l'une des bretelles de sa robe afin de pouvoir lui donner le sein. Daniel avait toujours sa petite main posée sur celui-ci. Au bout d'une dizaine de minutes, il commençait à somnoler, bercé par les berceuses et la chaleur du corps de sa maman. "Encore un peu, Daniel." lui dit-elle tout bas. Et il rouvrait un peu plus les yeux en reprenant de plus belle sa tétée. Une fois qu'il avait terminé, elle se rhabilla et attendit son rot, comme d'habitude. Elle le gardait dans ses bras, s'asseyant par terre, juste à côté du canapé où dormait Jamie afin qu'elle puisse aussi veiller sur lui. Son bébé avait les yeux grand ouverts, émerveillés par tout ce que sa mère avait à lui raconter. Quand elle souriait, il lui souriait. Il s'enthousiasmait à chaque fois qu'il articulait une voyelle et qu'elle lui répondait. Il était très chatouilleur, aussi, un rien le faisait rire. Mais il cherchait avant tout l'affection et la douceur de sa maman. Il se blottissait toujours contre elle dès qu'elle le prenait dans ses bras, et se sentait rassuré dès qu'il avait un contact physique avec elle. Un peu comme Joanne avec Jamie. La jeune femme lui glissait continuellement des mots d'amour, en l'embrassant de partout ou en lui caressant la tête. Jamie finit par se réveiller, après de longues heures de sommeil, il en avait bien besoin. Il embrassa rapidement sa dulcinée avant d'aller devant le piano. Dès que les premières notes flottaient dans l'air, Daniel redressa sa tête et écarquilla les yeux, émerveillé. "C'est Papa qui joue du piano, mmh ?" lui dit-elle tout bas, tout sourire, en voyant son fils découvrir pour la première fois cette douce musique. Elle l'embrassa sur la temps et se redressa, avec le petit dans les bras. "Viens voir, je vais te montrer. Tu verras comme il joue bien." Joanne vint s'installer sur la petite place qui restait du tabouret. Elle invita son enfant tourner la tête vers son père. Lorsqu'il était dans son champ de vision, il esquissa un large sourire. "Regarde, c'est Papa qui fait cette belle musique." lui dit-elle tout bas. Daniel était sous le charme, ce sourire ravi toujours pendu à ses lèvres. Mais il ne disait rien. On remarquait en voyant son visage qu'il était très attentif à ce qu'il écoutait. "Il en a les larmes aux yeux, regarde." dit-elle à Jamie, tout aussi émue de Daniel ainsi. Mais son sourire ne le quittait pas. Le bel homme acheva avec douceur son morceau. Elle le regarda d'un air tendre. "Je maintiens ce que j'ai dit tout à l'heure." dit-elle en approchant son visage du sien. "Vous êtes tellement beau, Jamie Keynes." Elle l'embrassa doucement. "Je crois que même votre fils est tombé sous votre charme." ajouta-t-elle en riant, tout bas. Elle caresse l'arête de son nez avec le bout de ses lèvres, recréant ces moments de tendresse devenus inexistants au cours des dernières semaines. "Mes parents viennent le récupérer en fin d'après-midi, début de soirée." lui dit-elle ensuite. Elle leur avait envoyé un SMS pendant qu'ils dormaient. Dès qu'il s'agissait de garder Daniel, ils étaient tout à fait capable de se libérer pour profiter de leur petit-fils. "Comme ça tu pourras te gaver de loukoums en guise de dîner devant la piscine si le coeur t'en dit." dit-elle, amusée.[color=#006699] "Dis moi ce que tu veux manger ce soir, et je te le ferai." [:color]Elle voulait tout faire pour lui, en fait. Elle prenait soin de lui d'autant qu'elle le pouvait, elle lui était entièrement dévouée. Joanne lui sourit tendrement et l'embrassa une nouvelle fois. "J'ai une question que je n'arrête pas de me poser depuis... le jour là. Mais je n'osais pas vraiment te la poser pour... Je ne sais pas vraiment." Son sourire avait disparu. Elle haussa les épaules. "C'est juste que...Enfin je crois que..." Elle bégaya longuement, et soupira, désespérée de ne pas parvenir à construire sa phrase. "Je pense que j'ai besoin d'être rassurée." avoua-t-elle, d'un air désolé. "Tout... Tout ce que ta mère avait dit, l'autre soir... Rien de ce qu'elle avait dit n'était vrai, n'est-ce pas ?" Elle cherchait ne serait-ce que dans son regard l'élément d'une réponse, se rassurer pour savoir que ce n'était vraiment que des mensonges. Mais on disait souvent qu'une mère connaissait par coeur ses enfants et sur ce fait, elle s'était bien embrouillée, n'ayant pas oublié une seule miette de tout ce qu'elle avait pu lui cracher dessus. Et le léger froid qu'il y avait eu concernant le mariage avant qu'il ne se rende à Londres n'arrangeait pas vraiment les choses.
Les moments où je m’assois devant le piano sont bien trop rares. Soit je n’ai pas le temps, soit je ne le prends pas. Et puis, il y a souvent Daniel qui dort et que je ne veux pas réveiller. Alors je profite qu’il soit avec nous pour faire résonner un petit air dans le salon. Il ne faudrait pas que mes doigts rouillent plus que cela n’est déjà le cas. A travers la queue du piano, je peux voir Joanne et Daniel installé par terre dans le petit salon. Quand je lève les yeux des touches pour voir si le petit a une réaction en écoutant la musique de cet instrument pour la première fois, j’aperçois ses yeux bleus grands ouverts comme deux diamants brillants à l’autre bout de la pièce. Je vois de mieux en mieux sa bouille ébahie alors que Joanne s’approche avec lui dans ses bras pour s’asseoir à côté de moi et montrer le clavier au bébé. Pour un petit qui découvre à peine l’usage de ses mains et de ses doigts, voir ceux de son père qui courent sur les notes est absolument merveilleux –et incompréhensible à la fois. Il sourit, émet un petit cri parfois, l’air ravi, sûrement pour dire que cela lui plaît. « Nous avons un petit mélomane. » dis-je en voyant les deux prunelles brillantes de Daniel. J’achève le morceau, et il semblerait que le retour au silence le fascine tout autant. La manière dont les dernières notes résonnent puis s’effacent tout doucement dans l’air. J’ai droit à de nouveaux compliments et un baiser de ma fiancée qui me font légèrement rougir, comme d’habitude. « Cesses donc de dire des bêtises. » Je ris doucement lorsqu’elle ajoute que Daniel est aussi sous le charme. « Sous le charme du piano, je pense. » je rétorque avec un sourire. Je laisse ma belle frôler mon nez du bout des lèvres, amusé, et lui vole un baiser à la première occasion avec malice. Ce minuscules moments complices ont cruellement manqué. Je ne cache pas mon ravissement à l’idée de passer la soirée en tête-à-tête avec ma fiancée. Même si je ne devrais pas être aussi content de laisser mon fils aux soins de ses grands-parents alors que je viens à peine de rentrer, et surtout après les derniers événements. « Je parie qu’ils n’ont absolument pas objecté. » Ils doivent comprendre que nous avons besoin de temps pour nous, que je suis fatigué, et puis ils ne manqueraient pas une occasion de passer du temps avec Daniel. Le programme proposé par Joanne me fait rire. Elle est adorable. Tellement douce et dévouée. Je me demande toujours si je mérite toutes ces attentions. « Honnêtement, me gaver de loukoums me convient très bien. » Elle sait d’ailleurs qu’il suffit de me mettre une boîte entre les mains pour que je régresse de plusieurs dizaines d’années. « Sinon nous pourrions commander quelque chose, chinois par exemple, pour ne pas avoir à se préoccuper de cuisiner. » Faire les feignants, pour une fois, et nous prélasser jusqu’au dernier moment. Cela fait longtemps que nous ne nous sommes pas accordé ceci. Après un baiser, le sourire de Joanne s’efface étrangement. Je fronce les sourcils en la voyant chercher longuement ses mots sans pour autant comprendre ce qui la tracasse. Jusqu’à ce qu’elle parvienne à avouer que les paroles de ma mère l’ont réellement touchée. « Joanne… » Je ne pensais pas qu’elle pourrait donner le moindre crédit aux dires d’une femme en pleine crise de folie. Ma mère encore moins, la moitié de ce monstre à deux têtes. « Bien sûr que tout était faux. » je murmure en captant son regard, une main dégageant son joli visage des quelques mèches blondes qui le traversent. « Elle délirait. Et de toute manière, elle n’a jamais été vraiment humaine. » Alors les émotions sont une chose qui lui échappe. L’homme qu’elle aimait était un manipulateur qui ne cessait de l’humilier en couchant à tout va. Son fils adoré s’est pendu. Elle a bien des raisons de ne plus croire en l’amour. De ne plus croire en rien. J’embrasse délicatement ma fiancée et lui souris tendrement. « Je vous aime, miss Prescott, n’en déplaise à qui que ce soit, et j’ai la ferme intention de vous épouser parce que je suis fou de vous, et de notre fils. » Notre famille n’est pas insignifiante. Ce n’est pas une distraction. « Vous êtes toute ma vie. » j’ajoute, car désormais ils sont ma seule richesse. Il n’y a plus rien que je fasse qui ne soit pas pour eux. « Mes deux petits anges… » Je caresse doucement la petite tête de Daniel qui m’adresse un large sourire. Je dépose un baiser sur son front, puis demande du regard à sa mère si je peux le prendre à mon tour sur mes genoux. « Tu veux essayer le piano ? » J’installe le petit adossé à moi et prend l’une de ses minuscules mains que je pose sur une des touches. « On appuie, et ça produit un son. » dis-je avant d’illustrer la parole par le geste. Une note se met à résonner dans la pièce et a quasiment fait sursauter le bébé. Je ris en voyant ses yeux écarquillés. De la même manière, je lui fais appuyer sur plusieurs touches à la suite ; « Do, ré, mi, fa… » Daniel se laisse faire, sans broncher, écoute les sons. L’air plongé dans une intense réflexion, il porte son autre main à sa bouche. « Ca le fascine complètement. » dis-je à Joanne.