I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
1528.
"Joyeux Noël, votre Majesté." dit Grace en s'inclinant gracieusement devant son roi. Celui-ci fit un simple signe de la main afin que la famille Stafford se redresse. Celle-ci était composée de trois personnes, en ce réveillon de fin d'année. Il y avait Nicholas Stafford en compagnie de sa femme, le Comte et la Comtesse de Wiltshire. Le Comte avait également une petite soeur, Grace. Elle avait le même titre que son frère, grâce à un mariage arrangé avec Henry Somerset, Comte de Worcester. Mais la jeune femme n'était pas accompagnée ce jour-là, et depuis de nombreux jours d'ailleurs. En effet, son mari avait une santé fragile. Il était bien plus âgé que sa jeune épouse, sans pour autant être un vieillard. Grace lui avait trouvé du charme, lorsque l'union fut arrangée. Il n'avait pas été particulièrement beau. Mais c'était un mari attentionné aux demandes et aux besoins de la petite blonde. Personne n'en parlait vraiment. C'était le soir de Noël après tout, il fallait profiter des festivités et de la chaleur qui régnait à Hampton Court. Après avoir offert de coûteux bijoux au Roi et quelques mots de sympathie échangés, ils laissèrent place aux autres invités. L'on attendait qu'il ait eu tous ses présents avant de pouvoir commencer à danser. Cependant, le vin était servi avec abondance. Grace n'avait pas eu à attendre bien longtemps avant d'avoir un verre entre ses doigts. Anne Boleyn était également présente, cela ne surprenait personne. Pourtant, les médisants étaient toujours là. La petite blonde avait déjà eu l'occasion de discuter avec elle. Anne ne manquait pas de culture et d'intelligence. Et la famille de Grace faisait partie des amis du roi. Des deux côtés, il était intéressant de se connaître. Les deux femmes échangèrent un bref regard, accompagné d'un sourire amical. Les festivités continuaient de plus belle dès que le son des instruments s'élevèrent dans la salle. Anne finit par s'approcha de Grace. Après s'être inclinée, la bien-aimée du Roi dit. "Je m'attristais de ne pas vous voir à la cour ces derniers temps." "Je n'aurais pas été de bonne compagnie." répondit Grace avec un léger sourire. "Mais vous êtes à nouveau parmi, et je me réjouis d'avance de nos prochaines rencontres." Les deux femmes discutèrent pendant quelques minutes avant qu'Anne ne soit sollicitée ailleurs. Nicholas en profita pour offrir une danse à sa soeur, n'ayant plus de cavalier de choix. Grace aimait danser, ça l'apaisait. Comme beaucoup, elle adorait la musique. Elle était à l'aise pour n'importe quelle danse. Ca la faisait sourire, et cela réjouissait son frère. Leurs parents étant décédés, il était le chef de la famille, responsable de sa soeur. Ayant eu une première dotte plus qu'onéreuse, et ayant de l'affection pour sa soeur, il ne voulait pas précipiter le remariage de sa soeur cadette. Grace était peut-être douce, mais derrière ces grands yeux bleus qu'elle avait en commun avec son aîné, elle était dotée d'une grande détermination, et savait ce qu'elle voulait. Et pour le moment, elle se contentait de son célibat, bien qu'elle avait conscience que cela ne pouvait être éternel. Certains ne s'étaient pas gênés de venir quelques jours, voir quelques heures après le décès du Comte de Worcester pour espérer l'avoir comme épouse. Avec son teint pâle, ses lèvres roses et ses yeux bleus, Grace ne laissait pas indifférente. Mais elle, elle ne s'arrêtait jamais au physique, ni au titre. Elle portait une robe rouge, ample. Certains drapés s'envolaient légèrement lorsqu'elle dansait. Le nombre de personnes présentes dans la salle, en plus des dizaines de bougies qui permettaient d'éclairer la pièce rendait l'air peur respirable pour Grace. Elle s'excusa auprès de son frère quelques instants. Rien que l'air du couloir adjacent était moins encombré. S'éloigner du brouhaha l'apaisait aussi. Non pas qu'elle n'aimait pas la vie à la cour. Elle aimait tout autant s'en détacher. Grace fit quelques pas, une petite marche pour revenir de plus belle au bout de quelques minutes de silence.
Tous ces cadeaux. Un étalage de bijoux, d’étoffes, de fourrures et d’inutilités grotesques qui ne seront usés qu’une fois comme tous les jouets des enfants gâtés. Je souris narquoisement, le regard dédaigneux alors que j’approche du monarque. Je m’incline poliment, et humblement, avec une élégance certaine. Jane n’admet pas aimer le scandale, et encore moins être aux centre de ceux-ci. Pourtant Dieu sait que les Françaises adorent les ragots, et encore plus lorsque l’on parle d’elle. Ses mauvais tours lui ont valu un statut quasiment apatride pour une dame de la cour, n’étant plus désirée dans celle du roi d’Angleterre ni de France. Jane Popincourt, malgré ses bons services, s’est mise à dos les deux pays en multipliant les amants dans les deux camps, dont le Duc de Longueville et Henry VIII lui-même. La bienséance l’empêcherait de revenir en Angleterre. Pourtant c’est bien par provocation qu’elle se trouve ici ce soir avec moi. Et plutôt que de la faire renvoyer d'où elle vient, le roi, amusé par son audace, la laissa prendre part aux festivités. Elle est venue avec un cadeau, a-t-elle dit, et un cadeau ne se refuse pas. Personne n’a demandé qui je suis. Son fils peut-être, un frère, un cousin. Pour ceux qui s’en soucient, chacun va de son hypothèse. On remarquera que je ne suis pas titré, ni marié. Une femme sans mari après vingt-ans est regardée de travers et parfois soupçonnée de sorcellerie, mais un homme sans femme n’obtient pas d’aussi durs jugements et intrigue bien plus qu’il ne révulse. C'est un sujet à controverse qui fait parler, et je mentirais si je n’admettais pas avoir un petit frisson de satisfaction à chaque fois qu’un regard furtif se pose sur moi au milieu d’une discussion à voix basse. C’est agréable pour quelqu’un habitué à être invisible. Je suis sûrement celui qui a le moins sa place ici, et pourtant. Pour donner son cadeau, Jane s’approche du roi et lui murmure quelques mots. Puis nous disposons, et elle semble particulièrement fière de son coup. Entre nous, nous échangeons en français. Cela irrite tous ceux qui ne comprennent pas de quoi nous parlons et qui se languissent de tant de mystères. Nous savons bien que nous ne serons pas entourés et que nous ne pourrons compter que l’un sur l’autre ce soir. Personne ne voudra être surpris à discuter avec l’ancienne maîtresse du roi et son étrange cavalier. Quoi que je croise le regard intéressé de quelques femmes qui redeviennent toutes chastes dès que nous avons un contact visuel. Par rapport aux français ou aux italiens, les anglais m’ont l’air si négligés et sales. Je ne m’étonne pas de détonner dans le décor pour les pauvres dames en manque de raffinement. Il y en a finalement une pour oser m’approcher, faisant fi du rouge qui a grimpé jusqu’à ses joues. C’est le regard hautain et noir de Jane qui lui fait faire demi-tour. « Vous allez ruiner ma première impression. » dis-je avec un petit rire avant de porter le vin à mes lèvres. « Pardon, mais j’aimerais encore profiter de ta compagnie tant que je le peux. Tu iras danser plus tard, quand je serai assez saoule pour te laisser partir. » La pauvre est plus attristée qu’elle en a l’air, malgré son sourire joueur, je le sens lorsqu’elle prend ma main. Dans ce cas, je la tire vers les autres duos qui dansent, et nous prenons la chorégraphie en cours de route. Au moins, cela la fait rire. Et moi j’en profite pour repérer quelques visages dans cette cour qui m’est inconnue. Bien sûr, j’en ai entendu parler. Jane adorait m’en raconter tous les ragots lorsque ceux-ci parvenaient à ses oreilles. J’ai donc appris pour la volonté du roi de divorcer de son épouse actuelle, et les rumeurs à propos d’Anne Boleyn. Jane me l’a indiquée d’un discret signe de tête un peu plus tôt. Sans être une grande beauté, on ne peut pas lui retirer son charme et une certaine grâce. Il était étonnant de voir à quel point sa présence éclipsait celle de la petite blonde avec qui elle parlait à ce moment, alors que celle-ci a bien plus d’atouts. Je l’ai entrevue danser à l’autre bout de la grande salle. Et maintenant que j’y pense, elle a disparu. La danse s’accorde un interlude et nombreux sont ceux qui troquent la piste contre le dîner. Pour ma part, j’accorde la danse suivante à la jeune inconnue de tout à l’heure qui a retrouvé son courage. A la fin de celle-ci, la petite blonde est réapparue. Je ne sais pas pourquoi je le remarque. Je le remarque, c’est tout.
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Dernière édition par Jamie Keynes le Mer 21 Sep 2016 - 16:05, édité 2 fois
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Grace revint dans la salle et rejoignit son frère qui était en train de dîner. Elle s'installa à côté de lui, et on vint lui servir ce dont elle désirait. "Quelques seigneurs intéressés sont venus me voir ce soir." dit-elle tout bas avec un rire amusé. "Comptes-tu me marier dès ce soir ?" Il rit. "Non, tu sais bien que non." Grace s'entendait à merveille avec sa belle-soeur, Constance. Elles étaient très complices toutes les deux. Grace n'eut pas le temps de finir son assiette qu'un gentilhomme l'invita à danser. Il portait des vêtements et des bijoux de grande qualité. Il se présentait comme étant un Comte. Il avait de bonnes manières, mais elle le trouvait déjà bien trop sûr de lui vu le sourire qu'il affichait. Il avait même un air hautain. Elle accepta tout de même et posa délicatement sa main dans la sienne le temps qu'elle se lève de sa chaise. Il baratinait en tant que beau parleur, Grace n'écoutait que quelques unes de ses phrases. Elle avait hâte de rejoindre les autres danseurs. Par miracle, il se montrait moins bavard à ce moment-là. Il était un bon danseur, se dit-elle. "On m'a dit de vous que vous adoriez la musique, et la danse." finit-il par dire. "Il y aurait donc des rumeurs qui courent sur moi ? Je suis bien curieuse d'entendre les autres." lui répondit-elle tout en continuant d'exécuter des pas au rythme de la musique. "Il y a des rumeurs à propos de chaque personne ici présente, ma Lady." "Vous avez raison." Il sourit, certainement de satisfaction. "De ce que j'en ai entendu, il n'est dit que de bonnes choses à votre sujet." "Vraiment ?" "En dehors de la disparition de votre ami, bien sûr. Permettez-moi de vous présenter mes condoléances." "Bien que j'honore quotidiennement la mémoire de mon mari, je préférerais que l'on mentionne des faits plus joyeux le jour de la naissance du Christ." "Pardonnez-moi." Et la discussion se termina à ce moment là. La danse en cours voulait qu'il y ait un changement de cavaliers. Grace tourna sur elle-même, et sa main fut attrapée par celle d'un autre homme. Elle le regarda pour voir de qui il s'agissait. Grace ne l'avait jamais vu. Sa tenue était de moindre qualité que le gentilhomme pompeux qui avait été son cavalier. "Monsieur." dit-elle avec un hochement de tête en guise de salutations. Grace se laissait par ses pas jusqu'à la fin de la chanson, les musiciens furent applaudis. "Je ne vous avais jamais vu à la cour. Venez-vous d'y arriver ?" finit-elle par lui demander, après s'être mis à l'écart de l'endroit dédié aux danseurs. "Je suis Lady..." La petite blonde remarqua deux pairs d'yeux bien pesants posés sur elle. D'un côté, la jeune femme qu'il avait pour cavalière en début de danse, et de l'autre, une autre, assise parmi les autres nobles de la cour, un verre de vin à la main. Grace fit un sourire des plus amicaux à cet homme qui lui paraissait si mystérieux, nullement perturbée par ces regards insistants. "...Grace. Je vous épargne le titre." Elle continuait de sourire sereinement. "Je ne devrais pas vous parler davantage. Je crois qu'il y a déjà deux femmes qui rêvent d'être à vos côtés. Je ne voudrais pas être de trop." On s'habituait à ces jalousies à la cour. Grace s'en souciait peu. "Je ne devrais pas les priver de vous plus longtemps." Elle fit un nouveau signe de tête avant de s'éloigner et de retrouver sa place. "Peut-être que c'est toi qui a jeté ton dévolu sur quelqu'un." dit Nicholas dès qu'elle s'installa à nouveau à ses côtés. "Ne sois pas idiot. Je le connais à peine." dit-elle en reprenant ses couverts. "Tu ne me contrediras pas si je te dis qu'il a belle apparence." Grace soupira. "Malheureusement, il y a beaucoup de gentilshommes qui ont un beau visage, mais qui ne disposent pas de la moindre intelligence." rétorqua-t-elle avec un sourire amusé. La soirée se poursuivait. Pourtant, Grace le regardait de temps, mais lui ne la regardait pas. Il l'intriguait, surtout.
La voilà à mon bras, le regard bleu perçant droit dans le mien. De superbes yeux. Je lui souris instantanément alors qu'elle me salue avec courtoisie. Elle ne semble pas m'avoir remarqué comme je l'ai remarquée. C'est une sensation étrange que je ne croise que trop peu souvent. On me remarque toujours. Je ne passe jamais inaperçu. Alors elle ne m'a pas vu ? Je lui adresse un signe de tête similaire, avec un rictus amusé. Rafraîchissant. De toute la danse, je ne la quitte pas des yeux. Elle fait preuve de beaucoup de grâce et d'élégance. Ses pas, aériens, sont des plus agréables à guider. Elle est délicate, comme un courant d'air qui file entre mes bras. Intrigué, et quelque peu envoûté, je suis la jeune femme sur quelques pas pour ne pas déranger le reste des danseurs qui reprennent aussitôt. Curieuse, elle note que mon visage n'est pas familier. Je ne sais pas si on peut dire que j'intègre la Cour, mais je la découvre tout juste. « D'une certaine manière, oui. » Pas de la plus conventionnelle des manières disons. Elle se présente, et je me contente d'un « Enchanté. » tout bas. Mon regard passe furtivement par dessus mes épaules afin de voir ce qui a perturbé la petite blonde. Oh, mes cavalières précédentes n'apprécient pas que je leur fasse faux bond. Ce qui est visiblement assez pour que la Lady prenne congé. « Est-ce que ça veut dire que vous ne voulez pas être à mes côtés ? » je demande avec un sourire mutin, comme je sais bien les faire, un sourcil arqué. « Ce sont deux très mauvaises danseuses contrairement à vous, et elles m'ennuient. » Je ne supporte pas l'ennui. J'ai du mal à tenir sur un banc. Je ferais un mauvais roi, le derrière vissé sur un trône. La demoiselle s'en va, et je ne la retiens pas. « Comme il vous plaira. » Je lui adresse un nouveau signe de tête poli. Mais dans le fond, je suis terriblement contrarié. Voilà qui heurte ma fierté. Et puis, je m'appartiens à personne, chose qui doit être claire dès le départ. « Pouvons-nous reprendre ? » demande ma partenaire de danse qui s'est approchée de moi, naïve et impatiente à la fois, comme tous ces autres enfants. Je me tourne vers elle avec un sourire, la toise de bas en haut, et avec un haussement d'épaules je lui réponds très sympathiquement ; « Non. » Toute offusquée, ses yeux s'arrondissent et sa bouche forme un ovale ridicule de poisson mort. Le temps qu'elle réalise le refus sec qu'elle vient d'essuyer, je suis déjà loin. Je retourne sagement à ma place, auprès de Jane. Je termine une coupe de vin et grignote quelque chose en faisant la réflexion qu'au moins je ne pourrai pas me plaindre de la nourriture ici. Mais rapidement je ne tiens pas en place, et mon regard se pose parfois sur la petite blonde qui ne m'en adresse pas un. Est-ce qu'il est possible de la laisser si indifférente ? « Excusez-moi. » je me lève, mais Jane attrape mon bras pour me retenir, et son air dur m'ordonne de rester. « Jane, il va bien falloir que je laisse quelques personnes m'approcher. » « Ce n'est pas pour vous faire des amis que vous êtes doué, ne vous fatiguez pas. » dit-elle avec dédain. Elle a raison, je n'ai pas d'amis, je n'en ai jamais eu. Je m'entoure, je plais, je parle bien. Je séduis et je dors rarement dans mon lit. Hommes ou femmes, personne ne s'attache à moi. Et je ne sais pas m'attacher non plus. « Personne ne veut de vous ici mais moi je vais devoir vivre ici tous les jours désormais, alors laissez-moi essayer. » je peste en espérant faire aussi mal qu'elle. « Ils ne voudront pas de vous, vous n'êtes personne. » Elle a raison. Pas de titre, pas de carrière, rien. Je ne devrais même pas être là. Et le jour où tout le monde saura pourquoi j'y suis, le sobriquet que j'aurai ne sera pas des plus agréables à mes oreilles. Je soupire et me radoucit. « J'étais sur le point d'avoir une discussion avec Lady Grace, elle me semble agréable. » Jane me lâche, elle sait qu'elle n'a plus besoin de me tenir, que je n'irai nulle part. C'est toujours sûre d'elle et fort arrogante qu'elle souffle, un simple « Tss... » qui suffit à me faire passer pour le dernier des idiots. « Cessez d'être ridicule et asseyez-vous. » Bien, je plie les genoux et reprend mon siège. Dépité, je prend une grande gorgée de vin. Il coule à flots, et il est bon, autant en profiter. Cela rendra le masque plus facile à porter. Nonchalant, je m'affale sur ma chaise et attrape une pomme à découper au couteau pour occuper mes doigts. « J'ai aussi un cadeau pour vous. » dit Jane avec une voix mielleuse. Elle a toujours des cadeaux pour moi. Tout le monde a toujours des cadeaux pour moi. Elle prend l'une de mes mains et glisse à mon index une bague épaisse, le sceau d'un squelette dansant, un memento mori. « Pour que vous vous souveniez de moi. » Elle est chère. Très chère. Des deux côtés du sceau sont incrustées des émeraudes. « Merci, Jane. » Je glisse ma main sur sa nuque pour approcher son visage du mien et l'embrasser. « J'aurai quelque chose pour vous plus tard. » je murmure au bord de ses lèvres, le regard complice. Après tout, c'est le seul cadeau de Noël qu'elle veut de ma part. J'admire la bague encore un moment, et, sans vouloir faire preuve d'ingratitude, je finis par demander à mon amante ; « Puis-je retourner danser ? » Jane me connaît bien. Et elle connaît la jeunesse à la Cour. Alors, résignée, elle acquiesce d'un signe de tête mais non sans un petit sourire. Elle ne souhaite que mon envol après tout. Je quitte la table et fonce droit vers l'endroit où se trouve Grace. Je m'éclaircis la voix pour marquer ma présence et me permettre de couper sa conversation -de toute manière ça ne doit pas être si intéressant que ça, comme toutes les conversations de Cour. « Lady Grace ? Puis-je vous implorer de m'accorder vos talents de danseuse encore une fois ? »
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L'inconnu admettait qu'il était récemment venu à la cour. Grace ne l'aurait pas remarqué, elle n'avait pas été vraiment présente ces deux mois. Son absence s'est faite remarqué, mais l'on se plaisait plutôt à dire des messes basses de personnes qui étaient là, dans les alentours. On ne savait pas vraiment ce que faisait Grace de ses journées, durant les premières semaines de son deuil. Elle n'aimait pas en parler. La jeune femme rit doucement lorsque ce bel inconnu ne lui rétorque ce qu'elle pourrait supposer être des avances. Sans manquer de la flatter sur ses talents de danseuse. A croire qu'ils ne savaient que complimenter sur ça, mais il n'avait pas plus d'éléments pour elle qu'elle n'en avait pour lui. Grace finit par le laisser, persuadée qu'il trouvera son bonheur ailleurs. Elle discutait avec son frère et sa belle-soeur tout en continuant de dîner. Constance s'était mis à côté d'elle, pour lui parler tout bas. "Une Comtesse veuve revient après deux mois d'absence à la Cour et voilà qu'ils ont tous les crocs. Comment était celui qui t'a invité à danser ?" demanda-t-elle, curieuse. Constance avait de grands yeux de biche, avec des iris tout aussi verts que de l'émeraude. Elle avait un large sourire et ne manquait pas de charme. Même mariée et avec trois enfants, elle était toujours un réel plaisir pour les yeux. "Trop avenant, trop sûr de lui." "Vous n'avez parlé que quelques minutes ensemble." "Cela suffit largement pour cerner ce genre de garnements." Constance rit, continuant de boire son verre de vin. "A quel point vas-tu te montrer exigeante ? Etre si pointilleuse pourrait rendre ton frère particulièrement impatient." Elle plaisantait. "Peut-être, mais je pense qu'il peut me faire confiance. C'est lui qui avait accepté qu'Henry demande ma main, après tout." Grace n'avait certainement pas à se plaindre de sa condition, c'était sûr. Constance et elle continuaient de pouffer dans leur coin jusqu'à ce qu'un petit toussotement ne les interrompe. C'était le fameux inconnu, prêt à revenir auprès de la petite blonde pour lui demander poliment de lui accorder une nouvelle danse. Constance lança un regard complice à la jeune veuve et celle-ci se leva. Elle posa sa main sur la sienne et se laissa guider, bien intriguée par ce jeune homme venu de nulle part. "Eh bien, vos autres cavalières ne vous conviennent-elles pas ?" lui demanda-t-elle avec un rire amusé. "Est-ce vraiment une question de danse ?" Ils se positionnèrent l'un à côté de l'autre en attendant que la musique ne démarre. "Ou est-ce pour m'attirer les foudres de chacune d'entre elles ?" Ils commencèrent à faire quelques pas au rythme de la musique. "Que vous ai-je donc fait pour que vous teniez à me créer des ennuis ?" Grace gardait le ton léger, amusée. Ca ne restait que de la plaisanterie. Il la faisait sourire. "Alors que c'est moi qui devrais me sentir offusquée. Vous ne vous êtes même pas présenté à moi." En effet, elle ne pouvait toujours pas mettre un nom ou un prénom sur ce joli visage. Grace était intriguée. Il avait une sorte d'insolence en lui, comme un esprit sauvage parfaitement contenu. Bien qu'il ait de bien plus grandes mains que les siennes, il restait délicat lorsqu'il saisissait l'une d'entre elles. "Vous n'aviez pas de bague, avant." constata-t-elle avant de tourner sur elle-même. "Un présent ?" demanda-t-elle. La réponse était évidente, surtout en ce jour de fêtes. Il n'était pas difficile de deviner que le bijou valait une fortune. Grace l'avait rapidement remarqué. "Qui vous l'a offerte ?" Peut-être qu'elle connaissait le nom de cette personne généreux, cela leur ferait certainement un point commun. Elle ne savait rien de lui tout autant qu'il ne savait rien d'elle. Ils poursuivaient leur danse. Grace trouvait qu'il guidait merveilleusement bien. Jamais, à un seul instant, il ne quitta son regard bleu, comme s'il était envoûté. Il avait du charme, elle ne pouvait pas le nier. "Dites-moi, qu'est-ce qui vous amène à la cour ? Avez-vous un quelconque objectif en tête ?" finit-elle par demander, alors que la musique reprenait. Grace gardait toujours un sourire ses lèvres, il était assez discret. Mais elle trouvait cet homme singulier, il avait quelque chose de particulier, de différent des autres.
C'est assez sûr de moi que j’approche de la belle Grace, qu'importe avec qui ou de quoi elle discute. Pas un instant je ne pense qu'elle puisse me refuser cette danse, qui le ferait? Non, mais c'est sans un mot qu'elle accepte en glissant sa main dans la mienne. Je l'escorte jusqu'à l'espace de danse, et nous reprenons où nous nous en étions arrêtés. La jeune femme me fait rire, elle a de l'esprit et de la malice qui brillent dans ce regard bleu. « Je vous l'ai dit, elles m'ennuient. Et j'ai l'ennui en horreur. » Il n'y a pas pire ennemi. J'aime me garder toujours occupé. Ceux qui ne ressentent pas ce même besoin sont ceux qui n'ont pas peur de laisser de la place à leurs pensées, et ce n'est pas mon cas. J'ai appris à vivre à travers les autres, leur regard et leur conversation ; s'ils ne me regardent pas, je n'existe pas. Et s'ils m’ennuient non plus. Je ris à nouveau, la petite est surprenante. « Une petite joute de ce genre me divertirai au moins. » je rétorque. Qu'il serait amusant d'avoir une scène de ce genre, mais elle serait courte, car Jane a toujours su écraser ses opposantes. « Vous m'avez laissé. Ici, comme un piquet. C'est le genre d'affront que je n'apprécie pas. » j'ajoute avec mon plus bel air hautain. Elle s'est retirée sans cérémonie et sans bataille, laissant simplement la place à celles qui se trouvaient là avant elle. C'est louable, mais ce n'est pas le genre de noblesse que j’inspire d'habitude. Et la laisser faire n'a fait que laisser croire que l'on me possède, et si c'est une illusion que j'aime entretenir auprès des femmes à mon bras, je n'aime pas que l'on l'applique à ma place. « Je ne me suis présenté à personne. J'imagine que beaucoup de monde se sent offusqué alors. » Je l'espère. Mon nom m'appartient, pour une des rares choses qui sont miennes, alors je décide à qui je le donne. Lorsqu'il est gagné, il sonne plus précieusement. On désire toujours plus ardemment quelque chose que l'on ne peut avoir. On le chérit quand on l'a obtenu après maints efforts. En changeant d'une main à l'autre, Grace remarque la bague qui est apparue à mon doigt. “Observatrice.” Et fort curieuse. Mais au moins elle sait qu'elles questions poser. « La dame que j'accompagne me l'a offerte, Madame Jane Popincourt. Elle a toujours été généreuse avec moi. C'est triste de voir que plus personne ici ne l'estime à sa juste valeur. » Mais c'est ce qu'il se passe lorsque l'on joue avec le feu dans deux camps opposés en même temps. Elle a mal joué. J’arque un sourcil, la curiosité de Grace commence à piquer, mais je lui souris toujours. Toujours. « Je ne regarde pas assez au long terme pour avoir des objectifs. J'ai des espoirs que je ne cultive pas, c'est inutile de s'en encombrer. Et je garde les rêves pour la nuit. Néanmoins, je ne suis pas là par l'intervention du saint Esprit. Je suis doué de mes doigts, dit-on. » J’hausse les épaules. C'est une définition libre d’interprétation qui m'amuse beaucoup. « Je serai sûrement assigné à la Chambre du roi, selon son bon vouloir. Peut-être que je m'ajouterai à sa longue liste de portraitistes. » Il jubilera sûrement d'être peint par autre chose qu'une horde de flamands au style strictement identique. Mais en se mettant les français et les italiens à dos, le roi a grandement réduit ses possibilités. Sans oublier que désormais les accents chantants manquent cruellement à la Cour. Plus maintenant que j'y suis. « Vous m'avez l'air d'être ici depuis longtemps, vous. Je suis certain que vous connaissez toutes les ficelles, et tous ceux qu'il faut connaître, je me trompe ? » Après tout, c'est avec la très certainement future reine qu'elle discutait plus tôt. « Qu'avez-vous offert au Roi pour Noël ? Et que vous a-t-on offert ? Sûrement beaucoup plus d'or que ceci. » dis-je en désignant ma bague. « Est-ce que vous allez m'attirer les foudres d'un mari jaloux ? » je poursuis pour lui faire subir le même genre d'interrogatoire qu'elle l'a fait pour moi.
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Le jeune ne manquait pas de fraîcheur. Son audace faisait beaucoup sourire la jeune femme. "Personne n'aime s'ennuyer." lui répondit-elle en souriant. "Sauf ce qui sont las des plaisirs de la vie, mais je doute que vous êtes de cette trempe là." Il ne manquait pas de volonté. Grace était une femme noble respectée, à la cour. Son calme et sa gentillesse faisaient sa réputation. Elle n'était pas pour autant faible, comme certains pouvaient le dire. Elle n'aimait se mêler aux scandales ni en épandre d'autre. Elle restait en qualité d'observatrice, et c'était amplement distrayant à son goût. L'inconnu ne mâchait pas ses mots. "Ce doit être particulièrement plaisant pour un homme de voir plusieurs femmes se battre pour lui. Jouissif, je dirai même." répondit-elle en arquant un sourcil. "Il n'y a certainement pas plus grand plaisir que d'être envié à ce point là." Grace se savait convoitée, mais elle n'abusait pas de ce pouvoir là pour mettre le monde à ses pieds. Le jeune homme révélé qu'il fut particulièrement vexé lorsque la Comtesse s'était éloigné de lui. "Sachez, Monsieur, que je suis peut-être la première à vous faire cette mauvaise surprise. Mais je serai loin d'être la dernière." lui rétorqua-t-elle avec un air mutin. Elle tournoya sur elle-même. Il lui avouait que personne ne connaissait véritablement son nom. "Vous cherchez certainement à vous faire remarquer, cela ne fait aucun doute." lui dit-elle. "Et je pense que ça fonctionne plutôt bien. Vu les regards féminins posés sur vous." Parmi elles, beaucoup de femmes nobles. "Mais cherchez-vous simplement à vous faire remarquer et attirer l'attention, ou voulez-vous que l'on se souvienne de vous ?" lui demanda-t-elle, pour qu'il pousse réflexion jusqu'au bout. "Vous ne manquez pas d'audace ou d'ambition." Elle lui sourit. "Mais voulez-vous simplement vous faire remarquer, ou voulez-vous que l'on se souvienne de vous ? Parce que se souvenir, il faut que nous puissions mettre un nom à cet homme audacieux qui a horreur de l'ennui." Grace avait noté le nouveau bijou qu'il avait sur son doigt. "Il fallait bien que vous me trouviez une qualité à un moment donné." lui répondit-elle en riant. Puis il expliquait d'où venait cette bague. "Madame Popincourt a d'excellents goûts, dans ce cas." Grace avait eu vent du jeu dangereux de cette dame, mais elle n'avait rien contre elle. "Malheureusement, ce genre de réputation a bien du mal à s'effacer avec le temps. Mais je ne me fais pas de soucis pour elle. J'ai entendu dire qu'elle ne manquait pas de caractère, elle ne devrait pas avoir de mal à retrouver sa place." Mais la Comtesse préférait s'intéresser à son cavalier, et elle commençait à lui poser des questions. "Vous vivez au jour le jour." conclut-elle avec un sourire satisfait. "Certains s'inquiètent trop de leur futur pour apprécier le moment présent." L'inconnu se révéla enfin davantage à la jeune femme. Mais elle n'en dit pas plus pour le moment. Bon nombre d'artistes franchissait les porte de Londres dans l'espoir de pouvoir faire partie de la cour grâce à son talent. Il semblait également s'intéresser à elle. "En effet, j'y suis depuis maintes années." répondit-elle simplement. "Est-ce dont cela, ce qui vous intéresse chez moi, en m'invitant à danser ? Afin que je glisse votre nom qui m'est toujours inconnu à Lady Anne ou à Sa Majesté pour qu'il y ait davantage de regards posés sur vous ?" lui lança-t-elle en riant. Il n'aura pas été le seul, loin de là. "Je lui ai offert un collier en or, serti de saphir et d'émeraude, où le métal a été finement travaillé par l'un des bijoutiers les plus réputés du pays." lui répondit-elle. "Pour ma part, mon frère m'a offert des tissus et un livre cette année. Et des bijoux d'amis proches de la famille." résuma-t-elle. Elle épargnait les babioles offertes par ceux qui la convoitaient tant. "Vous ne risquez que d'attirer les foudres de ceux qui convoitent ma main. Mon mari a quitté ce monde pour le royaume de Dieu il y a deux mois de cela." Lui aussi semblait bien curieux, subitement, nota Grace. Elle ne comptait plus le nombre de danses qu'ils firent ensemble, mais ils finirent par se mettre à l'écart pour discuter un peu. Grace demanda à l'un des servants qu'on leur apporte à chacun un verre de vin. "Mais je doute que vous ne vous souciez réellement des regards jaloux portés sur vous." Grace prit le verre qu'on lui apporta et en but une gorgée. "Madame Jane vous a donc emmené ici dans le seul but de vous faire connaître ? Qui êtes-vous, par rapport à elle ? Un amie ? Un cousin éloigné, peut-être ?"
Comme Jane le sait et comme Grace l’apprendra, memento mori est l’expression que je préfère. Elle pousse à la fois à vivre au jour le jour, sans manquer d’ambition. Se souvenir que l’on va mourir, c’est profiter de chaque plaisir de la vie, tous sans exception, et penser à laisser une trace dans le monde des vivants une fois notre temps terminé. Quoi qu’il n’est pas question de trop grandes ambitions, car elles sont futiles ; qu’importe le pouvoir qu’avait un mort une fois que l’on est mort, n’est-ce pas ? A mes yeux, laisser une trace dans quelques cœurs suffit amplement. Si j’avais des proches, les leurs me suffiraient je suppose. « Attirer l’attention me suffit. Je sais que je ne serai jamais dans les livres d’Histoire contrairement aux gens comme vous, personne ne se souviendra de moi. Alors je me contente de marquer un peu mes contemporains. J’espère que vous serez la seule à m’évincer aussi facilement, mon ego ne se remettrait pas de trop de refus si les anglaises sont si difficiles. » Mais elles ne peuvent pas être pire que les françaises, si ? Pas de ce que j’ai constaté pour le moment, l’effet est toujours le même et les regards sont multiples. Je ne me cache pas de les apprécier, et d’en abuser tant que j’ai encore l’âge. Un privilège qui arrivera bientôt à expiration malheureusement, d’où l’urgence de me trouver d’autres atouts. « Ne dites pas n’importe quoi, j’ai toute une liste de qualités pour vous. Vous avez de l’humour, de l’esprit, de la curiosité, de l’allure et une grande beauté. » Mais le sens de l’observation est une chose plus rare que tout ceci. Bon nombre de personnes ne se soucient pas assez de leur environnement pour remarquer l’apparition d’une simple bague au cours de la soirée. C’est généralement la preuve que la jeune femme est attentive aux autres. Même à ceux qui ne le méritent pas certainement. Optimiste, elle parvient même à penser que Jane trouvera le moyen de remonter en selle. Ce fut le cas, récemment, auprès de la Cour d’Espagne où elle a avorté son séjour brusquement. « Oh non, c’est fichu pour elle. Mais elle s’en accommode bien. » Elle a conscience de se faire vieille, et qu’il est temps pour elle de se laisser entretenir par son riche Duc sans plus faire de vagues. Sa présence ici sera sûrement le dernier scandale d’une belle carrière. Mon sourire se fait plus sincère. Grace semble être quelqu’un à même de comprendre mon mode de pensée, chose rare. Et si elle n’y adhère pas, au moins, elle ne le montre pas et s’abstient de faire preuve de jugement. Elle se contente de jolis traits d’humour. Il est vrai que l’on pourrait croire que mon rapprochement est purement stratégique, cela ne serait pas étonnant de la part d’un nouveau à la Cour d’Angleterre. « Non, absolument pas. Je vous l’ai dit, vous êtes une merveilleuse danseuse alors que Jane n’aime pas ça. Elle s’est déjà chargée de glisser mon nom au roi. » Ils sont, au final, les deux seuls qui ont cette information en leur possession. Savoir ce que la jeune femme a reçu pour cette fête peut m’en dire plus sur elle. Par exemple, ce qu’elle retient des cadeaux de son frère ne sont pas les choses qui brillent, elle ne les mentionne vaguement qu’après. Ce qu’elle a reçu a de la valeur, mais ne brille pas. Des étoffes et un livre. Plus tard, elle me révèle être veuve. La jeune femme semble avoir bien du recul à ce sujet. Peu de femmes pleurent vraiment les maris qu’elles ont épousés par intérêt, elles pleurent leur compagnie les nuits d’hiver et la peur d’être mise entre les mains de pire homme que le précédent. Grace est sûrement fatiguée, alors que je pourrais poursuivre des heures. Elle m’attire loin des autres danseurs pour poursuivre la conversation autour d’un verre de vin. Je jette un rapide coup d’œil autour de nous pour voir s’il y a en effet des regards jaloux. Quelque uns. « Je les aime autant que les regards féminins. » dis-je avant de prendre une gorgée de ma coupe. Grace ne fait plus de détours pour en savoir plus à mon sujet, ses questions sont bien plus directes soudainement. Malgré la blondeur de Jane et mes cheveux de jais, elle se risque dans l’hypothèse que nous soyons de la même famille. Même un ami ne serait pas une définition exacte. « Rien de tout ça. » je réponds en secouant négativement la tête. « Je suis son cadeau de Noël pour le roi. » Je reprends un gorgée de vin, je n’hésiterai pas à en abuser. « Un peu moins clinquant qu’un collier en or, saphirs et émeraudes, mais je crois que cela lui a plu quand même. » Sans quoi nous aurions tous les deux été jetés dehors je suppose. « Nous sommes supposés nous entraider sur quelques points politiques beaucoup trop ennuyeux pour une dame comme vous. Mais si tout se déroule comme prévu, sachez qu’on se souviendra de moi. » Si Dieu le veut. Je soupire en observant la petite Lady, un sourire en coin, satisfait de cette rencontre. Soudainement, toute la salle se met en mouvement, les invités se lèvent de leurs bancs alors que le roi s’est également élevé. « Je crois qu’il est l’heure d’aller à la chapelle. J’espère vous revoir très vite, Lady Grace. » Nous nous quittons rapidement et je retourne auprès de Jane. Toute la procession quitte le château à pas lent jusqu’à la chapelle. A l’intérieur, le bruit de tout ce monde fait gronder un lourd murmure entre les vitraux. Chacun trouve une place qui lui convient sur les bancs face à l’autel. Même si je suis curieux de savoir quelle teneur aura la messe en ces temps où le roi et le Vatican ne sont pas dans les meilleurs termes qui soient, et même si les chants sont relativement divertissants, mon attention est vite détournée par Jane qui, elle, n’a guère envie de participer à ce genre de mascarade. Furtivement, elle me prend le bras et nous esquive hors de la foule. Après quelques couloirs sinueux, elle se jette sur mes lèvres et soulève sa robe.
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L'artiste ne rêvait apparemment de gloire, souhaitant se contenter d'attirer les regards et de plaire. "Qui vous dit que l'on se souviendra de moi ?" lui demanda-t-elle, toujours souriante et en arquant un sourcil. Grace était une femme discrète. Il y avait certes quelques portraits d'elle, mais elle n'était pas au coeur de rumeurs qui parcouraient toute la cour, voire même toute la ville. Ce genre de choses l'intéressait peu. "La cour anglaise aime les artistes, bien peu vous évinceront." lui dit-elle. On cherchait toujours l'exclusif, la nouveauté, l'inconnu, et chaque peintre devait montrer son talent pour espérer percer et être dans les plus hautes sphères. Grace continuerait sur l'humour, lorsqu'il parlait de ses qualités. Il n'hésita pas à en citer quelques autres. Contrairement à ceux qui n'avaient d'intérêts à dire ses mots que dans l'espoir de l'avoir pour femme, l'artiste semblait particulièrement sincère. Si ces mots sortaient de la bouche d'un portraitiste, c'était ce que cela était vrai. Grace était persuadée que ceux qui avaient de la créativité avaient le don de voir la beauté sous d'autres formes. Elle rit légèrement. "Vous me flattez, Monsieur." dit-elle simplement en lui souriant. Ils se mirent à parler brièvement de Jane. Selon lui, elle n'avait aucune chance de faire târir les rumeurs et la haine à son sujet. Grace haussa les épaules, ce n'était pas vraiment son problème. "Elle a voulu joué un jeu dangereux, je suppose qu'elle assume totalement ses actes. Sinon, elle ne serait certainement pas présente ce soir." Surtout le jour de Noël. En entendant ses projets, la Comtesse se demandait si le jeune homme comptait tirer un quelconque bénéfice. Le veuvage avait ses avantages, dont la richesse dont elle disposait. On pouvait aisément s'y intéresser. Mais il dit que ce n'était vraiment pas son intention. Que tout ceci n'était véritablement qu'une question de danse. Elle rit. "Et pensez-vous que, malgré sa réputation, sa parole ait encore de la valeur ?" demanda-t-elle, curieuse. "Le roi peut sembler intéressé, mais selon la personne qui lui transmet ce genre d'informations, eh bien, il peut en oublier quelques unes." Si Grace parlait si peu de son mari, c'est qu'elle n'aimait pas ce sujet de conversation. Y penser l'attristait beaucoup, et elle ne voulait pas être triste en ce soir de Noël. Il lui avoua qu'il était le cadeau même pour le roi. Grace haussa les sourcils."Et un esprit aussi libre que le vôtre accepte d'être considéré presque comme un objet à offrir à un roi, même si cela est la clé d'une ascension certaine ? Vous me surprenez." lui répondit-elle. Jamais elle ne gardait ce sourire, il l'amusait. "Je suis curieuse de voir les portraits que avez peint et ceux que vous peindrez." finit-elle par dire. Elle était d'autant plus surprise lorsqu'il parlait de politique. "En effet, la politique n'est pas vraiment quelque chose qui m'intéresse. Je la suivais avec mon mari, mais je ne m'y plongeais. C'est un jeu bien trop dangereux." Elle but une gorgée de son vin. "Et lorsque l'on voudra se souvenir de vous, vous oublierez tout simplement la merveilleuse danseuse avec qui vous aurez passé un peu de temps en ce soir de Noël." lui lança-t-elle. Grace n'était pas dupe. Lorsque le succès montait à la tête, on oubliait souvent d'où on venait et qui on avait connu avant cela. Autant ignorer son passé pour mieux construire son futur. Beaucoup d'hommes faisaient cela désormais. L'inconnu fila rejoindre Madame Jane alors que la Comtesse retrouva sa famille à la chapelle. Pendant la messe, Constant fut soudainement prise de nausées. Elle était enceinte. Grace se chargea de l'accompagner en dehors de la chapelle. Il lui fallut de longues minutes avant que la moindre odeur ne l'écoeure. Elle était bien pâle, Grace l'invita à s'asseoir. Constance voulait être laissée seule un moment, alors sa belle-soeur fit quelques pas dans les couloirs. Grace tombait alors par hasard sur Madame Jane, accompagné de ce mystérieux inconnu qui lui servait d'amant, pour sa propre satisfaction. Grace ne dit pas un mot, et se contenta d'observer la scène une poignée de secondes, et restait totalement inexpressive. Sans dire mot, elle reprit sa marche comme si de rien n'était, afin de retrouver Constance, qui préférait rentrer tant elle se sentait mal.
La nouvelle année venait de passer. Grace s'était rendue au cimetière pour prier devant la tombe de son mari et était ensuite allée se promener dans les jardins d'Hampton Court. Peu de gens voulait se promener par un temps aussi froid. Il commençait à neiger, ce jour-là. En milieu d'après-midi, elle rejoint la cour, il y avait encore peu de monde. Le roi était amateur de festivités depuis qu'il s'affichait librement avec Lady Anne Boleyn. A sa grande surprise, Grace aperçut le portraitiste dont elle ne connaissait toujours pas le nom. Le fait le plus surprenant, c'était que la femme qui l'avait amené ici n'était pas présente. La Comtesse fut abordée par un homme quelconque pour qui elle montra peu d'intérêt. Cela ne l'empêchait de rester polie avec lui. Elle s'approchait de l'inconnu, qui s'inclina légèrement devant elle. "Monsieur." dit-elle simplement. "N'accompagnez-vous donc personne, pour ce soir ?" demanda-t-elle en arquant un sourcil. "J'ai cru comprendre qu'elle avait du mal à se passer de vous." Il n'était pas bien difficile de savoir à quoi elle faisait allusion. Mais il ne pourra jamais voir dans son regard une quelconque jalousie, ou autre sentiment de la sorte. "Vous ne manquerez rien d'exceptionnel d'ici ce soir. Je peux vous proposer d'aller se promener un peu dans les jardins. Il a commencé à neiger." Et Garce retourna à l'extérieur, avec l'artiste à ses côtés. Ils marchaient d'un pas lent, le temps n'était pas derrière eux après tout. "Alors ? Avez-vous déjà eu un quelconque retour du roi, concernant vos portraits ?" finit-elle par demander..
“Vous me manquerez.” j'assure à Grace qui est persuadée de mon ingratitude, disant que je l’oublierai dès que j'aurai un nom. J'oublie rarement qui que ce soit. Mais le projet pour lequel on m'a offert en ce soir de Noël pourrait me conduire bien loin d'ici. Et quand j'aurai une mauvaise partenaire de danse, j’aurai une pensée pour la petite Lady qui m'aura offert un bien agréable moment.
“Vous me manquerez.” dis-je à Jane sur le quai du port, près du navire qui la fera rentrer en France, alors qu'elle me donne une longue accolade. “Ne dites pas de bêtises, vous m'aurez vite oubliée.” Je l'embrasse sur la joue, ému. “Jamais de la vie.” Son sourire est triste et ses joues rougies par la peine, mais elle me tourne le dos la tête haute pour monter à bord. Nous ne nous verrons plus jamais. Dieu sait si j'en aurai un jour des nouvelles. Ce qui me rend le plus triste, c'est que dans la disgrâce dans laquelle elle s'est plongée, personne ne connaîtra la date de sa mort, et l'une des seules personne l’aimant sincèrement ne sera pas auprès d'elle. Peut-être qu'elle ne vivra pas assez longtemps pour savoir si je suis parvenu à mes fins. Je quitte le port avant le bateau, je ne tiens pas à la voir s'éloigner. Je retourne au château pour m’isoler dans mes appartements un court instant. Je ne m'apitoie jamais longtemps. Non, pour consolation je me greffe à une jeune femme fraîchement mariée à qui je m'amuse à faire la cour jusqu'à ce que ses barrières s'abaissent une à une et qu'elle m’accepte dans sa couche. L'avantage des femmes mariées, c'est qu'elles ont bien trop peur pour ébruiter leurs aventures auprès de qui que ce soit, même leurs proches amies. Je sors de sa chambre en courant, en retard pour préparer le roi pour ce soir. C'est tout un rituel que nous exerçons avec les autres grooms, le barbier, le porte-coton, afin que le monarque soit toujours aussi éblouissant qu'il peut l'être -ce qui n’est pas difficile lorsqu'on se pare d'autant de bijoux. Puis nous l'escortons jusqu'à la grande salle, rejoindre sa belle. Anne est sûrement la seule que je n’approcherai jamais de près ou de loin tant le roi en semble épris. Congédié, je retourne auprès du reste de la Cour. J'avoue que je ne sais pas quoi faire pour tuer l'ennui soudainement, n'étant d'humeur à rien. Je pourrais presque remercier le ciel de m'envoyer Grace pour me tenir compagnie. Je la salue avec courtoisie, retrouvant mon sourire. La jeune femme ne manque pas de remarquer que je ne décore le bras de personne, notamment Jane. Malicieux, je suis presque satisfait qu'elle ait remarqué notre escapade il y a quelques jours. « Elle n’est pas la seule. » je réponds en observant la petite Lady. « Ou est-ce que je ne sers que de diversion pour échapper à ce noble Monsieur ? » j'ajoute en indiquant l'homme qui l'avait abordée d'un discret signe de tête. Pour répondre à sa question, je reprends, un peu plus sérieux -mais pas trop, je ne suis jamais réellement sérieux ; « Ma Dame a quitté l’Angleterre ce matin, nous nous sommes dit adieu. » Alors me voilà seul ici, dans cette Cour où je ne connais personne. Personne à part Grace, qui me propose de la suivre dans les jardins afin de prendre l'air. « Volontiers. » Nous nous mettons à marcher l'un à côté de l'autre entre les bosquets blancs aux fleurs endormies pour l'hiver. Le ciel gris perle semble s'être rapproché de la terre, et adopte la même teinte que l'herbe enneigée à l'horizon. Jusqu'à ce que Grace prenne la parole, l'on entendait que les gravillons sous nos chaussures. « Pas encore, il a été très occupé. » je réponds. « Il me passera commande plus tard. Mais merci de le demander. En attendant je me charge d’autres demandes. » J'ai de quoi occuper mes dix doigts, et je n'en demande pas plus. « Pour le moment, Sa Majesté m’a assigné à son habillement, ce qui est déjà un honneur. » Nous vivons à une époque étrange où le plus grand des honneurs est de pouvoir nettoyer le royal postérieur, le porte-coton étant finalement le plus proche secrétaire du roi. « Il est assez difficile d’allier les deux activités, alors je dois peindre la nuit. » Quand la lumière est fort mauvaise malheureusement. Qu'importe, peindre n'est pas le plus important. « Et nous avons eu deux ou trois entrevues pour évoquer la stratégie que nous souhaitons entreprendre par rapports à… nos intérêts commun sur le continent, disons. » Tout ce qui concerne l'Espagne, l'Italie, le Vatican et ce fameux divorce. Une affaire normalement de longue haleine qui doit être réglée vite. « Je ne peux pas vous en dire plus vous vous en doutez. » Et cette fois ce n'est même pas par envie de me faire plus mystérieux que je ne le suis. Il est des secrets d’État qui doivent rester scellés. Pendant que nous marchons, lentement, mon regard observe un peu le jardin, le château, ce paysage si grisâtre. Tout semble tellement piégé dans le temps, comme si l'hiver mettait toute la vie en suspend. Comme si les insectes n'osaient plus battre des ailes. « Je trouve l’Angleterre tellement triste sous la neige. » dis-je dans un soupir. « Florence est bien plus gaie en hiver. Je sens que je vais rapidement avoir le mal du pays. » Là-bas, les bâtiment colorés se devinent à travers la couche blanche, le paysage devient doré et argenté. Les beaux jours, les montages au loin rendent le cadre un peu plus poétique. « Toujours pas de nouveau mari en vue ? » je demande à Grace par curiosité. Une femme ne reste jamais célibataire longtemps. « Vous ne m’avez pas l’air pressée d’en trouver un. Vous auriez raison. Il faut profiter de votre liberté autant que possible. » Bien sûr, mon regard et mon sourire traduisent amplement ce que je sous-entends par là.
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Grace se souvenait qu'il avait qu'elle lui manquerait. Sur le moment, elle ne l'avait pas cru. On devinait qu'il aimait les femmes, qu'il appréciait leur beauté. Il aurait trouvé un autre beau visage pour remplacer le précédent. Elle était vêtue d'une robe bleue pervenche avec des galons et de la broderie beige. "Croyez-moi, je n'ai pas besoin de la présence d'une connaissance pour me débarrasser d'hommes qui ne s'intéressent qu'à mon titre et tout ce dont je peux disposer." lui rétorqua-t-elle avec un large sourire. "Certains disent que c'est tout un art de courtiser une femme. Ca me permet de voir jusqu'où ils sont prêts à aller pour moi. Je ne m'intéresse guère à ceux qui prétendent bien parler et pensent me conquérir en m'offrant des bijoux." La jeune femme n'en manquait pas vraiment. Et il fallait reconnaître que certains prétendants avaient mauvais goût. Jane avait apparemment quitté le pays. On l'y avait certainement obligé. Du moins, c'était ce que Grace avait supposé vu la réputation de la dame en question. Il ne semblait pas particulièrement attristé, alors qu'il partageait son lit avec lui. Grace lui proposa de se promener un peu dans le parc ou les jardins au lieu de rester à ne rien faire. Puis il y avait toujours des oreilles qui traînaient, et elle n'appréciait pas être écoutée à son insu. Une fois tranquilles, elle finit par prendre des nouvelles de sa carrière, qui ne devrait pas tarder à s'élancer. Mais le Roi n'avait pas encore eu le temps de passer commande. "Avez-vous eu beaucoup d'autres demandes ?" Il s'agissait peut-être de personnes qu'elle connaissait. "Et ça ne vous épuise pas trop, un tel rythme ?" Elle se demandait quand trouvait-il du temps pour se reposer, voire même manger. Ca devait être un rythme difficile. "Vous me surprenez, vraiment. D'être un artiste qui s'intéresse à la politique. En général, ils cherchent plutôt à la fuir." lui dit-elle avec un large sourire. "Et cela m'arrange que vous ne puissiez m'en dire plus, ce ne sont les pas les actualités politiques qui m'intéressent le plus. Juste de loin." Il y avait des moments silencieux où elle le voyait admirer le paysage. "C'est une palette de couleurs différente, tout simplement." lui répondit-elle. Son regard s'illumina lorsqu'il commençait à parler de Florence. "J'ai un ami qui voyage beaucoup, il est ambassadeur. Il ne me racontait que du bien de Florence. Je n'y suis jamais allée." Grace n'avait jamais voyagé, elle écoutait alors les récits de personnes qui venaient d'ailleurs. "A l'extérieur, ça donne guère envie d'y être, mais je trouve que ça rend d'autant les intérieurs plus chaleureux. Avec ce grand feu de cheminée, des bougies de toute part, du vin qui coule à flot et des danses à n'en plus finir. C'est notre façon de réchauffer les coeurs, à défaut d'avoir des hivers doux." argumenta-t-elle, partager sa manière de vois les choses. Il s'intéressa au statut de la Comtesse, qui se contenta de répondre à sa question en secouant négativement la tête. Puis elle riait à sa remarque, sachant largement à quoi il faisait mention. "En effet, je profite de mes libertés. Et je ne suis pas particulièrement pressée de trouver un nouvel époux. A vrai dire, je suis peu enthousiaste en voyant celles qui me font des avances. Ils pensent que tout est déjà gagner et rêve déjà de la dot qui suivra derrière." Parce que tout n'était que question d'argent. "C'est la seule chose qui me rend intéressante. Et c'est certainement la seule occasion de ma vie où je peux avoir un pouvoir décisionnel sur le choix de mon prochain mari, je compte me laisser le temps pour me décider. Mais je ne m'accorde pas tous les plaisirs que le veuvage puisse m'accorder." C'était une sorte de réponse à ses propres sous-entendus. Un nouveau moment de silence fit son apparition durant quelques minutes. "Si Madame Jane est partie, où logez-vous, actuellement ?" finit-elle par demander, perplexe. Il faisait nuit tôt, il ne tardèrent pas à rentrer, où la Cour s'était largement remplie et où les discussions allaient bon train. Un des servants aida Grace à se débarrasser de sa cape et de ses gants. Elle observa au loin les différents groupes qui s'étaient formées. Elle ne savait plus si son frère allait venir ou non. "Avant que nous nous mêlions à la foule, aurai-je le droit de connaître votre nom, ou devrais-je passer la soirée avec cet artiste qui désire toujours se faire mystérieux ?" lui demanda-t-elle en riant. Ils finirent par se mêler à la foule, où de nombreuses salutations étaient nécessaires. De brèves discussions qui ne relevaient que du politiquement correct et de dernières nouveautés. Bien sûr, certains s'intéressaient toujours à son statut, prétendant uniquement s'informer si les célébrations d'un mariage étaient à prévoir dans les semaines qui viennent. Grace prenait un malin plaisir à leur répondre négativement. Une fois qu'ils furent à nouveau seuls, elle profita pour lui glisser. "J'aimerais beaucoup que vous me montriez quelques unes de vos oeuvres à l'occasion. A moins que ça ne fasse aussi partie de vos nombreux secrets." lui lança-t-elle avec un regard malicieux.
Sans douter de la réelle curiosité de Grace, je pense surtout que son intérêt pour mon début de carrière de peintre à la Cour relve surtout de la politesse. Toutes les Lady ici sont comme ça, elles savent parfaitement feindre l'intérêt pour divers sujets dont elles n'ont que faire. Je leur soutire pour tout autre chose un intérêt bien plis sincère. C'est pourquoi je souris en coin lrsque la jeune femme me demande combien de demandes j'ai reçues. « Quelques unes. Quelques dames de la Cour. » Mais je ne m'occupe pas de leur portrait pour certaines, même si cela est une bonne excuse pour les approcher. « Le frère d'Anne, Georges Boleyn, semble prêt à passer commande. » Mais une rumeur a été soufflée à mes oreilles à propos de son hypothétique homosexualité, et qu'il fasse partie de l'autre catégorie de demandeurs ne m'enthousiasme pas vraiment. « J'ai bien plus d'énergie à revendre que vous autres objets de décoration de la Cour qui se fatiguent de se tenir debout. » j'ajoute avec mon flegme naturel. Après tout, à quoi servent mille personnes dans un château si ce n'est à éviter la solitude et décorer les immenses salles ? Aucun suiveur ne vaut mieux que l'un de ces parterres de fleurs, il faut le voir en face. C'est avec une certaine fierté que je ris quand Grace m'avoue être surprise par mes activités, artistiques et politiques. « Je suis tombé dedans un peu hasard il y a un peu plus une dizaine années. Avant, ça ne m'intéressait pas, peindre me convenait très bien. Mais m'impliquer dans ces affaires est rapidement devenu une nécessité. » C'est d'autant plus vrai aujourd'hui, et peut-être que je ferai dans ce monde une entrée fracassante. Moi qui suis toujours resté bien caché. Ma vie n'a pas été misérable, loin de là, mais il lui manque aujourd'hui la grandeur qu'elle mérite. J'arque un sourcil, surpris par le soudain enthousiasme de la petite Lady pour Florence. « C'est là-bas que j'ai grandi. Ca vous fait déjà bien plus d'informations à mon sujet que qui que ce soit en dehors du roi n'en a ici. » Ce qui fait d'elle une privilégiée. Fervente défenseure de son pays, elle tente d'en redorer le blason à me yeux et de le rendre moins triste et déprimant, mais je continue de trouver le temps maussade, et sans grand charme malgré la neige. Je ne connais pas encore assez les anglais pour juger de leur participation à la beauté de leur île ou non. Tout ce que j'ai noté, c'est que les femmes sont un peu plus difficiles qu'ailleurs. Ici, elles aiment être chassées et faire suer leurs prétendants. Tout comme l'avoue Grace qui ne compte pas arrêter son choix de mari trop vite, et jouit de tous les plaisirs du célibat, sauf un. « C'est bien dommage. » J'ajouterais bien qu'elle sait où me trouver si elle change d'avis, mais elle le sait déjà. Quoi que je me permets de prendre pour une petite victoire sa curiosité concernant le lieu où je vis. « Ici même, à la Cour. Par… ici, je crois. » dis-je en indiquant vaguement la toute fin d'une aile du bâtiment. L'une des dernières places vacantes je suppose. « Je dois être levé avant le roi pour l'habiller, alors je ne peux jamais être bien loin de lui. » Tout comme je dois être présent pour le moindre changement, au cours de la journée, et le soir. Je dois dire qu'en être aussi roche me convient à merveille. Alors que le soir tombe, Grace et moi rentrons au château. La grande salle est bien plus pleine de monde qu'à notre départ. « Ne soyez pas trop gourmande. » je réponds à la jeune femme avant que nous n'entrions. « Vous savez déjà que je suis florentin. » Si elle le suspectait de part l'accent, maintenant elle en a la confirmation formelle. Prenant la petite Lady pour guide, je la suis à travers la foule, salue qui elle salut, participe à ses discussions, et m'amuse de la voir si ravie de dire que son veuvage se poursuit pour le moment. Bien vite, elle nous isole des mondanités, et je suis parvenu à faire atterrir une coupe de vin dans ma main. C'est avec le même sourire que je réponds à sa requête concernant mes toiles ; « Elles n'ont rien de secret. Mais la plupart sont dans mes appartements, ce qui signifie qu'il vous faudra y entrer pour les voir... » Je ne lâche pas le morceau comme un chien rongeant un os. Mon sourire ne le montre pas, mais l'impassibilité de la dame à mon égard m'irrite terriblement. Elle ne semble ni intéressée, ni tentée le moins du monde. Elle ne me laisse aucune porte entrouverte, et je me surprends à devoir tenter de les enfoncer, moi qui n'ait jamais à me donner ce mal. « En revanche, j'ai un autre secret pour vous. » dis-je tout bas en approchant mon visage du sien. D'un geste vif mais délicat, je glisse une de ses mèches blondes derrière son oreille, et fait mine de sortir de là la petite fleur qui est apparue entre mes doigts comme par magie et que je lui tends désormais.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Les principaux clients qui attendaient une oeuvre de la part de l'inconnu étaient des femmes, ce qui n'étaient pas vraiment surprenant. Il devait s'y plaire, dans ce domaine, elle n'en doutait pas un seul instant. Grace eut un sourire en coin lorsqu'il mentionnait également George Boleyn. Elle eut vent des quelques rumeurs à son sujet, certains étaient même prêts à l'affirmer à voix haute. Le genre de nouvelles qui feraient scandale et qui promettraient bien des stratégies de cette famille connaissant une ascension phénoménale. Il avait sa propre vision de la Cour et de ceux qui la faisaient vivre. Il en avait une bien piètre image, selon ses dires. "Je suis flattée de savoir que vous me résumez désormais à un simple objet de décoration." lui rétorqua-t-elle, toujours avec autant de légèreté. "Mais un objet qui sait bien danser." Elle rit. La liberté d'esprit du jeune homme lui plaisait beaucoup. Il se dévoilait ensuite un peu plus, révélant que son penchant politique n'était qu'une suite de causes à effets, il avait fini par se plonger totalement dedans. Grace apprit une autre information qui n'était pas négligeable, c'est qu'il était d'origine italienne. Elle avait deviné qu'il n'était pas du pays, étant donné son accent prononcé. Elle sourit, satisfaite d'avoir su lui soutirer un quelconque détail à son sujet. Il semblait peu convaincu par les arguments qu'elle avançait pour mettre en avant le pays dans lequel elle avait grandi, mais ça ne la touchait pas plus que cela. Au-delà de ça, le portraitiste ne lésinait pas avec les sous-entendus, n'hésitant pas à lui faire comprendre qu'il se montrait tout à fait disponible si elle avait un quelconque sentiment de solitude. "Ne vous y méprenez pas. Je ne tiens pas à figurer sur votre précieuse liste de conquête." rétorqua-t-elle avec un sourire malicieux. Grace n'était pas égoïste, elle dirait plutôt qu'elle aimait avoir une certaine exclusivité. Elle aimait se fondre dans les masses, mais ne voulait pas être à l'image des autres. Un paradoxe complet qu'elle vivait très bien. Etre au service du roi était à la foi un honneur, et une corvée. Il fallait être matinal tous les matins, se montrer disponible au moindre moment. "Peut-être qu'un jour, le Roi vous demandera de vous concentrer uniquement sur vos oeuvres. S'il y a forte demande, vous pourrez vivre de manière tout à fait honorable. Assez pour que vous continuiez à vous faire remarquer." Puisque c'était ce qu'il convoitait. Grace était sincère, elle espérait qu'il ait plus de libertés au niveau du temps qui lui était accordé. Avant de se mêler à la foule, elle se permit de demander une nouvelle fois. "Et vous, à quel point êtes-vous gourmand ?" lui rétorqua-t-elle alors en arquant un sourcil, avant de venir saluer quelques connaissances. Ils parvinrent à s'isoler, et Grace continuait de montrer un certain intérêt pour ses oeuvres. Impassible, elle ne réagit pas aux premiers abords. "C'est bien dommage. Je vous aurai bien volontiers invité à dîner à ma demeure afin que vous me montriez quelques unes d'autre elles." finit-elle par dire avec un sourire discret. Il s'approcha ensuite d'elle, plus que n'importe quel homme qu'elle aurait pu côtoyer depuis le décès de son, pour replacer une de ses mèches de cheveux et faire apparaître dans ses doigts. En voyant cela, Grace lui offrit le plus large des sourires, prenant délicatement la fleur, du bout des doigts. "Vous avez des talents de magicien, c'est cela, votre autre secret ?" demanda-t-elle en gardant la fleur en main. "Vous n'avez pas répondu à mon invitation." finit-elle par dire, alors qu'un servant s'approcher lui ramener un verre de vin, qu'elle avait demandé plus tôt. "Ce serait bien sûr selon vos disponibilités, je ne voudrais pas vous perturber dans votre travail." Elle but une gorgée de son vin. "Et si vous n'arrivez pas à prévoir comment seront faits les prochains jours et les prochaines semaines, venez le soir qui vous conviendra. Mon cuisinier à la fâcheuse tendance de préparer bien plus qu'il n'en faut." Le Roi et Lady Anne firent leur entrée dans la salle avant de s'installer sur le trône. Une fois installés, tout le monde se redressait de leur révérence pour reprendre les festivités de plus belle. "Ou si vos oeuvres ne peuvent décidément pas sortir de vos appartements, venez sans. J'aime votre liberté d'esprit." finit-elle par dire. "Alors vous me les montrerez dès que l'occasion se présentera." Grace ne voyait pas son frère dans la foule. Il s'était certainement porté absent pour la soirée. Constance avait besoin de repos pour sa grossesse. Ce n'était pas la première, mais les premiers mois l'épuisaient toujours. La Comtesse l'invita alors à la suivre pour s'installer à table parmi les autres personnes de la Cour.
Avec l’aversion dont je fais preuve pour la vie royale et la Cour de manière générale, on est en droit de se demander pourquoi j’y suis et en quoi je tire le moindre honneur à avoir été assigné à l’entourage proche du monarque ou même pour quelles raisons les questions politiques m’intéressent et me concernant tant. Puisqu’il me plaît de peindre et que je n’ai jamais eu une ambition débordante, je devrais me contenter de mon art et d’une vie modeste. Je crois d’ailleurs que cela me siérait tout à fait. Pourtant je suis là, cherchant à m’intégrer, et contredisant une grande partie de mes principes, ce que j’espère du roi n’est pas la permission de vivre de mes portraits ni de l’habiller jusqu’à la fin de mes jours. J’espère bien plus, et sûrement trop. Je me vois déjà comme un albatros planant au-dessus de tous ces gens. Je suppose que cela creuse un peu plus le fossé de ma modestie. J’ai été élevé ainsi, avec la conviction que rien ne peut se dresser durablement sur mon chemin, que rien ne m’est impossible. Si je veux cette petite Lady, qu’importe qu’elle soit persuadée qu’elle pourra me rejeter jusqu’à la fin des temps et ne jamais apparaître sur cette liste de conquêtes. Elle finira bien par céder. Si ce n’est pas ce soir, ce sera un autre jour. Non, elle ne résistera pas éternellement. Sa fierté la pousse à se jouer de moi, néanmoins chaque jeu à un vainqueur, et sur ce terrain-là, je finis toujours couronné. La partie continue alors pendant le dîner. J’éprouve peu d’intérêt pour les mondanités, quelque peu accaparé par cette mission que je me suis donné vis-à-vis de Grace. Je me dis que sa curiosité pour mon travail pourrait suffire à la pousser à passer les portes de ma chambre, mais elle décline l’invitation sans ciller et en formule une autre plus surprenante. Ma tentative pour l’amadouer avec un peu de magie ne parvient qu’à la faire sourire, et j’admets qu’elle a le plus joli des sourires. Le petit éclat dans ses yeux à ce moment-là marque comme une seconde de trêve avant qu’elle ne revienne à la charge. Je crois qu’elle me nargue ; en m’invitant chez elle, elle saura que je viendrai avec des espoirs, et elle se plaira à des décevoir jusqu’à ce que je reparte bredouille. Elle pourrait me faire perdre une manche sur son territoire. Je réfléchis entre deux gorgées de vin. Ou est-ce que je ne parviens absolument pas à la cerner ? « Est-ce donc la seule chose que vous aimez chez moi, ma liberté d’esprit ? » je demande en lui emboîtant le pas alors qu’elle nous guide jusqu’à la grande table. « Je ne sais pas si je dois être flatté ou offusqué. » Je prends place à côté d’elle, ce qui me vaut quelques délicieux regards médisants auxquels je ne prête pourtant pas plus d’attention que ça, trop occupé à essayer de comprendre ce que Grace attend de moi. « Mais je viendrai. J’emporterai quelques toiles. Et j’espère que vous m’accorderez une commande. J’adorerais peindre d’aussi gracieux traits. » dis-je avec un sourire en coin. Un vrai sourire, pour une fraction de seconde, alors que mon regard glisse sur ce beau visage qui semble pourtant m’ignorer. Pensif, j’attrape en morceau de pain et en porte un bout à ma bouche. J’use sûrement de la mauvaise stratégie. Je reste silencieux encore un instant pendant que Grace échange quelques mots avec son autre voisin. Quand leurs échanges de banalités ont un temps mort, je m’accapare de nouveau la jeune femme. « Donc, vous n’êtes pas intéressée par la politique, ni par votre remariage, et encore moins toute l’attention que les messieurs vous portent, mais vous vous penchez sur la peinture et vous aimez les livres ainsi que la danse. Et malgré toutes ces informations vous demeurez un mystère pour moi. A croire que je me donne vraiment du mal pour rien. » Elle ne semble pas sujette à la moindre frustration à l’idée d’en savoir encore moins à mon sujet. « Est-ce que vous avez des enfants, Lady Grace ? » je demande finalement par curiosité. Toutes les femmes de son âge en ont alors je suppose que oui, bien évidemment, mais la question n’a pas d’autre but que de garder son attention. J’apprécie avoir ces prunelles bleues pour moi.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Grace n'était pas dupe. Il n'était pas difficile de deviner les attentions du bel artiste en la suivant de près, et en glissant des avances à tout bout de chou. Parfois, il les mêlait parfaitement à ses phrases. Ou sinon, il y allait un peu plus franchement, cherchant savoir quelle méthode adopter avec la Comtesse. Jusqu'ici, les résultats n'étaient pas probants, mais il était particulièrement persévérant. Qualité que la jeune femme appréciait. Alors qu'ils s'approchaient des tables afin de s'y installer, le jeune homme semblait particulièrement vexé que Grace ne souligne que sa liberté d'esprit. "Vous devriez être flatté. Tout le monde n'a pas la même audace que vous." dit-elle en souriant, et en s'installant sur son siège. Elle fut ravie d'entendre qu'il comptait venir un soir, ou peut-être plusieurs pour lui montrer ses toiles. "Mais puisque vous semblez vous soucier de ce que je pense de vous, je peux aussi vous dire ce qui me plait d'autre." finit-elle par dire. Lors de leur première rencontre, l'inconnu n'avait pas lésiné sur les compliments au regard de la jeune femme. Elle le regarda longuement, afin de réfléchir sur ce qu'elle allait dire. "J'apprécie aussi votre persévérance. Vous savez ce que vous désirez, et je suis prête à parier que vous feriez n'importe quoi pour l'obtenir. Je ne peux encore complimenter votre talent, étant donné que je n'ai vu aucune de vos oeuvres pour le moment." Elle sirota son verre de vin et en but une gorgée. "Et bien sûr, votre physique ne me laisse pas indifférente. Je ne sais pas si c'était l'information que vous cherchiez à avoir." Grace rit un peu. Il y avait bien des hommes qui la désiraient au titre d'épouse, ou pour le rêve d'une nuit, mais il y avait aussi des regards féminins particulièrement envieux rivés sur lui. On interpella Grace par la suite par un de ses voisins de table. Mais à la moindre seconde de silence, l'inconnu voulait avoir à tout pris son attention. "Vous avez voulu qu'une partie de vous soit un mystère, je me devais de rendre la pareille." lui rétorqua-t-elle avec un doux sourire. Mais cela ne l'empêchait pas d'être terriblement curieux à son sujet. Elle acquiesça d'un signe de tête. "J'ai un fils oui. Je l'ai eu un an après mon mariage." C'était son seul enfant. Grace se mit à parler plus bas, près de son oreille. "On ne m'en a pas permis d'avoir d'autres, mon mari avait ensuite quelques soucis... d'impuissance." C'était une chose qui l'avait véritablement complexé, mais Grace ne lui en avait jamais tenu rigueur, bien qu'il y avait de nombreuses où elle avait envie qu'il exerce son devoir conjugal. Elle haussa les épaules. Son mari n'avait pas été le seul, et il y en aura certainement beaucoup d'autres après lui. "Depuis le décès de son père, Edward passe beaucoup de temps avec ses cousins, et mon frère. Il s'est porté garant de tout ce dont je ne peux pas lui enseigner." Il était encore un garçon. Grace nota le sourire de satisfaction qu'il avait à chaque qu'elle lui parlait. Il était discret, mais elle le remarqua. "Et vous ? Avez-vous laissé un amour ou une famille derrière vous en quittant Florence ?" A moins que l'ambition ne l'ait poussé à ne pas s'attacher à qui que ce soit. Les plats arrivèrent en bon nombre. La multitude de servants servaient les personnes installée alors que la musique commençait de plus belle. Le tout formant un brouhaha où les messes basses étaient inaudibles. Ils avaient parfois tous les deux de longs échanges de regards. L'un comme l'autre cherchait à se cerner, très certainement, à être celui ou celle qui aura une petite longueur d'avance. "J'adorerais que vous me peignez, un portrait, ou pour ce dont vous pensez être le plus doué." dit-elle finalement, d'un air intéressé. "J'aimerais voir ce que ça donne, lorsque vous peignez des traits qui semblent vous inspirer." Son mari avait déjà engagé de nombreux peintres et portraitistes pour avoir de nombreuses oeuvres représentant Grace. Il ne faisait que complimenter sa beauté à tous ceux qui voulaient l'entendre, impossible de le raisonner ou de le freiner dans cet élan. La jeune femme était impatiente de quelle façon il allait la représenter. Un gentilhomme s'approcha de Joanne et l'invita à danser - ce qu'elle refusait, prétextant qu'elle n'en avait pas la moindre envie pour le moment. Ce qui était assez vrai pour le moment. L'intervention du gentilhomme semblait avoir agacé l'inconnu, mais était satisfait d'entendre qu'elle avait décliné l'invitation. "Savez-vous déjà quand est-ce que vous comptez venir ?" finit-elle par demander. "Je dois avouer qu'être constamment interrompus commence quelque peu à m'agacer."