Matteo essaie de rester calme, de ne pas s’emporter, parce qu’il connait cette émotion, il connait la douleur. Mais avec fermeté il vient s’adresser au secouriste qui a osé parler à Kaecy de cette manière. Il ne l’accepte pas mais il ne cherche pas à rentrer dans un quelconque conflit. Alors une fois qu’il s’est excusé Matteo propose de faire demi-tour il est temps de sortir de ce train, il est temps de rentrer chez eux comme le dit la jeune femme. Pourtant il sait qu’ils allaient devoir faire un détour par l’hôpital, surtout lui qui risquait de devoir y rester plus longtemps. « J’aurai besoin de votre aide pour couper ma nourriture alors. »  ajoute-t-il alors que ses lèvres s’étirent un léger sourire. L’atmosphère est toujours pesante, l’atmosphère un peu trop lourde, mais ils ont besoin de retrouver un peu de légèreté, de se vider la tête. Ils avancent sans encombre jusqu’au wagon bar, là où ils peuvent commencer à souffler, même si Matteo sait qu’il ne va pas poursuivre sa route sans montrer sa main aux secouristes s’il ne veut pas perdre son doigt. Et c’est Priam qui s’adresse le premier à eux, lui parlant de sa main, ce à quoi Matteo répond d’un signe de tête pour le remercier. « Je vous laisse voir par vous-même. »  Il enlève le bandage couvert de sang pour montrer son doigt aux secouristes présents. Une légère grimace vient s’afficher sur son visage quand il voit l’état de celui-ci, mais il leur fait confiance pour parvenir à le remettre en place. « Vous devriez venir à l’hôpital aussi, simplement pour vérifier que tout va bien. » dit-il à Kaecy et Priam. A vrai dire il se demande si les secouristes ne les obligeraient pas à tous y aller de toute manière mais il préfère s’en assurer.

Lui qui avait du mal à faire confiance aux autres se sentait totalement à l’aise en compagnie de Mattéo et de Kaecy, il savait désormais que la mort avait le pouvoir de rapprocher les gens. Ils avancèrent finalement à leur rythme en direction des voix qu’il entendait un peu plus haut et ce fut presque naturellement qu’il leur proposa de venir dîner chez lui un soir « J’aurai besoin de votre aide pour couper ma nourriture alors. » un sourire étira ses lèvres alors qu’il imagina la scène qu’il jugeait assez drôle « Je te ferais une soupe ne t’en fais pas… avec une paille » dit-il d’un air moqueur alors que cette simple petite blague semblait avoir détendu l’atmosphère. Au bout d’une dizaine de minutes ils arrivèrent finalement dans le wagon principal ou tous les blessés semblaient se trouver. Il tomba sur des personnes qui avait l’air d’être dans un état similaire au sien et sur d’autre qui en revanche semblait être plus amoché ; il remarque une secouriste qui venait de se libérer et attira immédiatement son attention. Elle approcha immédiatement saluant le trio en s’assurant que tout le monde aille bien « Je vous laisse voir par vous-même. » elle regarda la main de Mattéo avec attention et lui expliqua qu’il fallait aller à l’hôpital, elle était rassurante et confiante quant à l’état de sa main, elle avait dans l’espoir de sauver son doigt. Priam écouta le discours de la jeune femme avec attention, rassuré de constater que tout irait bien pour lui « Vous devriez venir à l’hôpital aussi, simplement pour vérifier que tout va bien » le sportif se tourna vers Kaecy et un sourire étira ses lèvres lorsqu’il rapporta son attention sur Mattéo « T’as quand même pas cru qu’on allait te lâcher maintenant ? On est ensemble jusqu’au bout maintenant vieux » il avait presque la sensation de parler à un vieille ami ainsi. Il quittèrent le train en direction de l'ambulance qui se trouvait un peu au dessus « En plus, j'ai toujours adoré ces engins » dit-il en désignant le camion, il attrapa de nouveau la main de Kaecy et monta dans la camionnette avec la secouriste et Mattéo jusqu’à l’hôpital.

@Matteo Hellington @Kaecy Wilson

Matteo se met à penser à toutes les choses qu’il ne pourrait plus faire seul le temps que son doigt guérisse. A savoir, dans un premier temps couper sa propre nourriture, mais ce n’est pas ce qui l’inquiète le plus, c’est plutôt de ne pas pouvoir prendre Cami dans ses bras, de ne pas pouvoir s’occuper d’elle aussi bien qu’il le devrait. « C’est gentil, je note l’effort. » Il est trop vieux ou alors pas assez pour manger avec une paille, mais il rit volontiers de la situation. Il a besoin de quelques instants de légèreté comme celui-là, parce qu’il sait que ce qui les attend sera moins drôle. L’hôpital, l’arrêt de travail, l’annonce du nombre de morts et tout ce qui allait en suivre. Rapidement Matteo vient enlever son bandage pour montrer l’étendue des dégâts à un des secouristes disponibles. Il sait qu’il a eu de la chance, d’avoir encore son doigt, d’être encore en vie. Mais il avait frôlé tellement de fois la mort qu’il avait fini par se dire qu’elle ne voulait pas de lui, pas encore. Il essaie de se changer les idées et de ne pas regarder quand le secouriste examine sa main, préférant parler avec Priam et Kaecy avant qu’il ne lui explique ce qui allait suivre, heureux de savoir qu’il allait sûrement pouvoir garder son doigt. « Mince, moi qui avais espéré me débarrasser de vous. » répond-il dans un sourire, quand, en réalité il est heureux de savoir qu’il sera accompagné des deux jeunes gens. « Moi je suis plus char d’assaut . » Une passion qu’il avait surtout lorsqu’il était petit, et qui s’était estompée depuis son retour d’Irak. Ils finissent tous par monter dans la même ambulance, pendant qu’on lui explique qu’une fois arrivés à l’hôpital il leur faudra recoudre son doigt sous anesthésie locale. Il inspire longuement tandis qu’ils sortent de l’hôpital, il a déjà connu pire, comme il se le répète depuis le début. Ils veulent l’amener directement, mais une seule personne est autorisée à le suivre. « Kaecy tu devrais appeler Elio pour lui dire que tu vas bien. Tu pourrais appeler Heidi aussi s’il te plaît ? » Il la rappellerait plus tard, mais il se dit qu’il y a une chance pour qu’elle ait vu les informations. Une fois Kaecy partie un peu plus loin il se retrouve désormais seul avec Priam et un médecin. « T’es pas obligé de venir avec moi, je peux me débrouiller. » La douleur il saura la gérer, il comprendra si Priam ne veut pas assister à ça.

« C’est gentil, je note l’effort. » il afficha un petit sourire en le regardant, personne ne pensait jamais à l’utilité d’un doigt avant que celui-ci soit sur le point de disparaitre. Par le biais de l’humour, Priam tentait d’apaiser un peu la situation, il venait de vivre une chose tragique en assistant à la mort deux fois de suite et d’une certaine façon il espérait pouvoir calmer les esprits de ses camarades. Finalement au bout de plusieurs minutes tout sembla s’arranger, une secouriste s’occupait désormais de la main de Mattéo et contrairement à ceux qu’il avait rencontré plutôt elle était sympathique et rassurante. En croisant le regard de Kaecy, il comprit qu’elle avait eu la même idée qu’eux, ils avaient franchi un grand nombre d’étapes ensemble et il n’avait pas dans l’idée de s’arrêter en si bon chemin. « Mince, moi qui avais espéré me débarrasser de vous. » il leva les yeux au ciel en faisant mine d’être vexée et monta dans l’ambulance en compagnie de Mattéo, Kaecy et de leur secouriste qui d’après son badge s’appelait Alice. Pendant un instant, le sportif se senti comme un gamin et ne put s’empêcher de leur faire part de sa passion pour ce type de véhicule « Moi je suis plus char d’assaut. » il se rappela de ce que Mattéo avait dit plutôt sur l’armée, il comprit alors que c’était de ce domaine qu’il tenait son courage et sa volonté de vivre. Au bout d’une dizaine de minutes à peine, ils arrivèrent à l’hôpital et Priam se senti immédiatement soulagé en voyant le grand bâtiment, tout irait bien ici, il en était persuadé. Rapidement, ils expliquèrent l’intervention assez rapide à Mattéo, même s’il ne devait pas être rassuré, il n’exprima rien du tout « Kaecy tu devrais appeler Elio pour lui dire que tu vas bien. Tu pourrais appeler Heidi aussi s’il te plaît ? » il afficha un petit sourire en voyant Kaecy attraper le téléphone, cette fille était un réel amour « T’es pas obligé de venir avec moi, je peux me débrouiller. » il soupira et s’installa sur une des chaises qui se trouvait à côté de la table ou était installé Mattéo « J’irais nulle part » dit-il sûr de lui, il avait été un soutien hors pair alors Priam refusait de l’abandonner maintenant ; c’est alors qu’il repensa aux mots que Mattéo avait eu à l’attention de Kaecy quelques secondes plutôt « Heidi comme Heidi Hellington ? » demanda-t-il curieux, ce n’était pas un prénom commun après tout.

@Matteo Hellington @Kaecy Wilson

La jeune femme fut soulagée de voir que ses deux compagnes allaient bien et qu’elles avaient été prises en charge par las secours. Milena devait être soulagée, elle qui craignait tant de ne plus pouvoir marcher. Elle fit un petit sourire à Lydia en acquiesçant de la tête

« Oui… Pénélope… C’est le nom de la jeune femme. Pénélope a un problème de la rate mais elle est en route pour l’hôpital elle aussi. On a eu de la chance. Les secours sont arrivés à temps… Si ils avaient tardé un peu plus… »

La fin de la phrase mourut sur ses lèvres tandis qu’Eliane frissonna de terreur rétrospective à la pensée de ce qui aurait pu arriver à son amie… Elle se raccrochait à l’idée que les secours étaient arrivés à temps comme le lui avait dit Nissrin. Jetant un regard derrière elle, Eli vit avec horreur que le train était à moitié suspendu dans le vide. Est ce que… Non, elle priait de tout son cœur que rien d’irréparable ne soit arrivé aux autres. Pas de morts… Il ne fallait pas qu’il y ait de morts…

« J’avait bien pensé que ce train était une antiquité. Mais qui aurait cru que ce dinosaure nous mènerait à ça… »

Ce murmure était adressé aussi bien à la blonde qu’à elle-même. Elle avait encore du mal à réaliser ce qui s’était passé. Elle avait l’impression que c’était un mauvais rêve et qu’ils allaient tous se réveiller d’un instant à l’autre. Mais le bruit autour d’eux était bien trop réel pour que cela ne soit qu’un cauchemar.

« D’accord, je viens avec vous… Milena a-t-elle eu des nouvelles de Mattéo ? C’est son ami. Elle était très inquiète pour lui… »

Elle regarda la jeune femme que les ambulanciers étaient en train d’installer dans leur véhicule. Et repensa à Félix. Il devait être à l’hôpital. Il le devait…

Le trajet se déroule sans encombre, il imagine qu’ils doivent tous souffler, et se remettre des émotions qu’ils viennent de vivre. C’est d’autant plus difficile maintenant qu’ils s’éloignent du train, même si c’est le soulagement qui vient finalement prendre le dessus. Il écoute attentivement les secouristes qui sont en train de lui faire un nouveau bandage lui indiquer quelle va être la procédure lorsqu’ils arriveront à l’hôpital. La salle dans laquelle ils l’emmènent est trop petite pour qu’ils tiennent à quatre dedans. Sans plus réfléchir il dit à Kaecy qu’elle devrait certainement aller appeler Elio pour lui dire qu’elle va bien, pensant que Priam sera peut-être plus à même de supporter la vue de l’opération que la jeune femme. En même temps, il lui demande de bien vouloir appeler sa sœur et toutes les autres personnes qu’elle jugera nécessaire de prévenir. Priam quant à lui n’est pas obligé de rester s’il ne le souhaite pas, mais il est vrai qu’avoir quelqu’un près de lui pour lui faire la conversation n’est pas pour lui déplaire surtout lorsqu’il sent l’aiguille venir se planter dans son poignet. La douleur est plus forte que celle qu’il ressentait jusque-là dans son doigt, mais il serre les dents, essaie de ne pas y penser quand Priam lui parle d’Heidi. « Oui c’est ma sœur. »  Il fronce un peu les sourcils, se demandant comment il peut la connaître et surtout quelles sont les chances que cela soit le cas. « Tu la connais comment ? »  Il imagine que s’il connaît son nom de famille, c’est qu’ils ont déjà dû se rencontrer. Il espère qu’il n’est pas encore un de ceux qui lui tournent autour, sinon il pourrait sortir les crocs, mais il imagine mal que ce soit le cas, et la vie sentimentale de sa sœur semblait déjà bien trop compliquée pour qu’on vienne rajouter une autre personne dans l’équation.

« Trompé de quoi ? » demande Debra et je hausse simplement les épaules « laisse tomber » bon, parlons-en de ce rêve bizarre, il parait que quand on est sur le point de mourir, on se laisse gagner par les souvenirs de sa vie et de quelques culpabilités. Question : est-ce que je me sens coupable par rapport à Keandra ? La nana est quand même montée dans sur ses grands chevaux comme grande, quoiqu’à ce stade, ça doit sûrement être la tour Eiffel ou le sommet de la statue de la liberté ou bien l’Empire State Building… non, ce n’est plus le plus grand immeuble, il faut se tourner vers les Emirates, notamment Dubai. Va savoir à quoi sert un gratte-ciel de cent soixante-trois étages, à part être certain de réussir son suicide, en tout cas, ils ont plutôt intérêt à ce que les ascenseurs ne tombent pas en panne. « TU ETAIS MORT ! Enfin, tu faisais le mort. J’ai paniqué. » c’est pas encore l’heure, il n’y avait pas de lumière, ni de route, ni de je ne sais quoi que l’on associe au fait de passer l’arme à gauche. « T’inquiètes, je suis encore là, fidèle au poste, juste que la prochaine fois opte pour de l’eau, je ne voudrais pas abîmer mon si beau visage » si je dois mourir autant que ce soit ma gueule intacte, on ne sait jamais ce qui peut se passer dans l’au-delà, qui je peux rencontrer et dans quelle genre d’orgie indienne je peux finir. « Et au fait, c’était bien les secours qui avaient fait ce bruit affreux. Ils viennent nous voir dès que les cas les plus graves sont bien en charge - ou quelque-chose comme ça. » je hoche simplement la tête, mauvaise idée, c’est que même le plus simple geste devient compliqué à exécuter. « On a plus qu’à attendre alors, toi et moi, dans les toilettes, durant de longues minutes, je me demande à quoi ça ressemble aux yeux des autres » Oui, on se demande bien à quoi penseront les gens avec une telle description.

« C’est promis » assurai-je à Eliane avec un petit sourire. Il était hors de question que je lâche Penelope avant d’être certaine qu’elle était bel et bien prise en charge. Je me sentais quelque peu responsable d’elle, sans doute était-ce ma manière à moi d’éloigner les fantômes de tous ces civils que je n’étais pas parvenue à sauver. Cette fois ce serait différent, certes je ne serai pas celle qui réalisera l’opération, mais la jeune femme devait vivre. Et elle vivra. Une rupture de la rate n’était pas si difficile à prendre en charge, néanmoins, l’on n’était jamais à l’abri de quelques funestes surprises. Les surprises semblaient malheureusement régir cette journée, l’on ne semblait pas être à l’abri de nouvelles découvertes comme la situation d’une partie du train plongée dans les eaux. Il n’y avait plus rien à faire, me répétais-je mentalement alors que l’on entamait notre traversée, au loin, j’étais certaine d’entendre de mornes accords de Basson ouvrant le royaume du désespoir, et les violons y répondaient à contre temps, par un râle de douleur. Nous rejoignîmes ensuite l’ambulance tandis que je me forçai à ne pas regarder derrière moi, il n’y avait plus rien à faire. L’histoire devait déjà être dans les nouvelles, j’imaginais sans mal des familles entières contacter leurs proches afin de s’assurer qu’ils ne seraient pas comptés dans les victimes, se heurtant au silence. L’inquiétude rendrait la respiration difficile, certains appelleront les hôpitaux avec plus ou moins de succès, d’autres les postes de police pour annoncer des disparitions. A cela, il ne leur restera plus que l’attente, qui était sans aucun doute la pire chose dans ce type de situation. Penelope installée dans le véhicule, celui-ci démarra et je restai en retrait pour les laisser faire leur travail, tenant la main de la jeune femme pour lui faire savoir qu’elle n’était pas seule. Aux urgences, tout se déroula à une telle vitesse que j’eue à peine le temps de déposer un baiser sur le front de ma blessée qu’elle était emportée au bloc, preuve de leur efficacité, j’avais ainsi confiance en la suite. Tout se passerait bien, cette pensée tournait en boucle dans mon esprit alors que je faisais les cent pas dans un coin, m’éloignant quelque peu de l’agitation.

Milena et Lydia étaient sorties saines et sauves du train, même s’il allait bientôt falloir amener Milena au bloc opératoire pour soigner sa blessure. Mais le plus dur semblait être derrière elles, même si les dégâts de cet accident semblaient être bien plus importants que ce qu’elle avait pu penser quand elle était dans le train. Elle qui avait pensé que personne n’avait péri, se rendait maintenant compte qu’elle avait eu de la chance de s’en sortir avec simplement un poignet cassé. Elle s’apprête à monter dans l’ambulance quand elle entend une voix s’adresser à elle, elle se retourne et aperçoit Eliane qui vient tout juste de sortir du train à son tour.  « Tant mieux alors, ça ne sert à rien de penser à ce qui aurait pu arriver s’ils n’étaient pas arrivés. » Penelope allait bien, bien qu’elle ne l’ait jamais rencontré, et ça reste dans l’immédiat le plus important, même s’il est difficile de ne pas penser à toutes ces personnes qui ont tragiquement perdu la vie aujourd’hui. « Matteo ? Non ça me dit rien, j’espère qu’il était pas dans l’autre partie du train. » Elle hausse les épaules, une légère grimace sur le visage, parce qu’elle espère que l’amie de Milena est encore en vie. Heureusement les secouristes étaient en train de s’occuper d’elle et elle ne pouvait entendre ce qu’elles étaient en train de dire. Elles n’ont plus le temps de parler plus qu’il est temps de partir. Finalement Eliane monte dans l’ambulance avec elles, et le trajet se fait dans un silence pesant. Un silence qui semble refléter les inquiétudes de chacun après un tel accident. Une fois à l’hôpital des médecins emmènent Milena vers le bloc, et il est désormais temps pour elles de se diriger vers la salle d’attente. Lydia ne pense plus à son poignet, il est toujours douloureux mais elle est encore secouée par ce qu’elle vient de voir. Alors qu’elle va s’assoir, elle remarque Nissrin qui semble désormais seule. « Vous allez bien ? Vous faites quoi ici ? » Elle semble aller bien, mais pendant quelques secondes Lydia se demande pourquoi elle n’est pas rentrée chez elle.

@Eliane Samuels @Nissrin Bashir

Oui, on se demande bien à quoi penseront les gens avec une telle description. Surtout que maintenant je viens reposer ma tête sur son épaule, sans lui demander son avis. Elle me doit bien ça après la gifle qu’elle m’a foutue dans la tronche et dont je sens encore assez la brulure pour ne pas m’endormir, il n’est pas impossible qu’elle m’en mette une autre et au vu de notre proximité physique actuellement, ce ne sera pas si compliqué. Ceci dit, je ne pense pas que ce soit l’idée du siècle cette position, car elle reste petite Debra et mon dos ne semble pas apprécier, loin de là. Malheureusement, j’y suis déjà, donc j’y reste, il n’aura qu’à garder son mal en patience, de toute façon, un pompier ne devrait plus tarder à venir s’occuper de moi… et de Debra aussi. Tiens, j’ai l’impression qu’à l’oral cette phrase sonne très bizarrement ou j’ai les idées très mal placées. Non mais sérieux, un pompier qui vient aider un couple coincé dans les toilettes depuis de longues minutes, ça aura vite fait de finir en partie à trois… ou alors j’ai trop fait mon éducation avec des films pour majeurs. Ou bien encore c’est ma blessure à la tête qui me joue des tours, de toute façon dans un cas ou dans un autre, je ne suis pas capable de faire grand-chose dans mon état, je jouerai à coup sûr les spectateurs, il en faut toujours un. Je m’égare encore, la douleur à différents endroits de mon corps me rappelle à l’ordre. Je me demande ce qu’ils vont faire pour ça, pas de plâtre j’espère, j’aimerais une solution naturelle mais efficace, c’est dans ce genre de situation que l’acupuncture peut se révéler utile non ? Je l’ai fait une fois, je me suis certes endormi mais je sais qu’après ma séance je me sentais mieux, non, ce n’était pas l’effet placebo. J’aimerais bien reprendre le boulot le plus vite possible et réaliser mes stages de cascade et de boxe thaï comme convenu.

Elle monta dans l’ambulance à la suite de Lydia. Aucune des trois jeunes femmes ne parlèrent durant tout le trajet. Ce qui semblait normal après tout ce qu’elles venaient de vivre. Le silence n’était pas gênant pour Eli. Elle en avait pris son parti depuis plusieurs mois déjà. Le silence était devenu son compagnon de tous les jours dès lors qu’elle rentrait chez elle seule. Non, Eli n’était plus celle qui adorait mettre la musique à fond chez elle pour danser et chanter à tue-tête par-dessus. Sa vie en couleurs était devenu une vie assez terne seulement rythmée par son travail. Et lorsqu’elle essayait de revenir dans la vraie vie, voilà ce qui e passait. Peut-être aurait-elle du se trouver dan l’autre partie du train. Au moins comme cela, Alex n’aurait pas à attendre quelque chose d’elle. Car elle savait qu’il ne ferait pas le moindre pas attendant qu’elle initie le divorce s’il devait y avoir divorce entre eux. Au moins, Eli morte la question ne se posait plus…
Une fois arrivée à l’hôpital, l’effervescence repris. Des gens étaient un peu partout. Les hommes et femmes en blanc semblaient tourbillonner autour d’eux sans vraiment faire attention à la blonde et à la brune qui se trouvaient là. Lydia et elle n’avaient que des blessures mineures donc elles n’étaient clairement pas leurs priorités. Eliane se dirigea alors vers l’accueil pour demander si ils avaient réussi à établir une première liste des blessés pris en charge. On lui répondit gentiment que lorsque ce sera fait, un panneau serait là et qu’elle devait aller attendre sagement là-bas qu’on leur donne plus de nouvelles. En soupirant, elle se retourna alors pour voir Lydia se diriger vers une jeune femme. Nissrin. Elle se dépêcha alors de les rejoindre.

« Ness ! Pénélope va bien ? T’as eu des nouvelles ? »

@Nissrin Bashir @Lydia Waters

Le temps semblait s’écouler lentement, trop lentement. Mon regard restait accroché à l’horloge de la salle des urgences et seules les secondes s’égrenaient. Je lâchai un soupir alors que je m’approchai du distributeur pour un thé vert sans sucre. J’espérai que cela me calmerait ou me donnerait autre chose à penser, mais les boissons des hôpitaux étaient loin d’être fameuses, je ne pus que le confirmer. Tant pis, cela allait de pair avec cette journée désastreuse. Un autre coup d’œil à l’horloge m’indiqua que deux minutes seulement s’étaient écoulées mais la pièce semblait plus remplie encore. J’avais donc raison, les victimes se comptaient par trentaines, si ce n’était plus et ceci correspondait essentiellement aux blessés, ceux que l’on pouvait encore sauver, mais les autres… je secouai la tête pour chasser ces réflexions de mon esprit, réflexions qui me mèneraient à tous les coups à me souvenir des champs de bataille, plus particulièrement de la Syrie et rien de bon n’en ressortait de ce lugubre pèlerinage. Soudain, une voix me sortir de la contemplation de mon thé et je levai la tête pour tomber sur Lydia qui semblait beaucoup plus consciente cette fois. « Je vais bien oui, je suis ici pour une autre personne à vrai dire » Malgré moi, je lançai un coup d’œil en direction de la porte où Penelope avait disparu voilà quelques minutes « J’ai trouvé la blessée, Penelope et il a fallu l’opérer de toute urgence » Nous avions de la chance au niveau du timing, il fallait bien le reconnaître. « Et toi, ça va ? » je fis un petit signe vers son poignet dont la douleur devait être de tout instant. Nous fûmes ensuite rejoints par Eliane que j’accueillis avec un grand sourire qui s’évanouit bien vite à sa question « Non pas encore, elle se faire encore opérer » et selon son était physique , cela pouvait prendre plus ou moins de temps, en espérant qu’elle fût en état pour cela. « Tu as retrouvé ton ami alors ? Et J’imagine que Milena a été rapidement prise en charge »  

Eliane ne se rappelait pas vraiment du moment où tout avait basculé. Elle ne se rappelait que d’une grande secousse et elle s’était réveillée sous ces tables… Sans Priam et cet homme… Arthur, elle n’aurait probablement jamais pu sortir de là. Elle avait beau être une minimoy comme elle l’avait dit à Pénélope, elle n’était pas assez minuscule pour passer entre les tables encore. Elle ne voulait pas repenser à tout ça mais les images revenaient sans cesse la hanter. Tout comme l’image du train suspendu lorsqu’elle avait réussi à en sortir. Elle n’avait pas osé demander si il y avait eu des morts mais comment pouvait-il ne pas y en voir avec un train à moitié dehors ? A moins d’un miracle… Mais Eliane ne croyait plus aux miracles depuis longtemps. La jeune femme était passée d’une femme à l’optimisme à toute épreuve à cette femme triste et terne. Alors oui, elle avait peur. Peur de voir la liste des morts être affichée et d’y voir des noms qu’elle connaissait…

Elle écouta Nissrin lui répondre mais vit surtout son sourire s’évanouir. Il était arrivé quelque chose à Pénélope ? Son accès de panique fut vite apaisé par les paroles qui se voulaient rassurantes.

« Elle était faible nan ? Mais ils sont arrivés à temps hein ? »

Hochant la tête, la jeune femme reprit

« Oui Milena est au bloc. J’ai demandé à l’accueil si ils avaient pu établir une liste déjà mais non… C’est trop tôt. Il faut qu’on attende encore pour avoir plus de nouvelles… »

Attendre… Encore et toujours attendre. La jeune femme avait l’impression de ne faire que ça d’attendre. Elle savait bien que ce n’était de la faute de personne mais c’était extrêmement frustrant. Elle détestait ne pas pouvoir agir elle-même et rester oisive n’était vraiment pas sa tasse de thé.

@Nissrin Bashir @Lydia Waters

Elle préfère ne rien dire, contempler ce qui vient de se passer en silence, alors que l’effet de l’alcool sur son cerveau commence à dissiper presque totalement alors que c’est peut-être en ce moment précis qu’elle a besoin de tout oublier et de ne penser à rien. Une fois à l’hôpital ils emmènent Milena là où elles ne peuvent plus la voir. Elle pourrait aller se faire soigner et rentrer chez elle dans une heure tout au plus, mais elle n’en a pas envie, pas maintenant, elle n’est pas prête à tout oublier. Elle n’est pas prête à retrouver sa vie, pas tant qu’elle ne saura pas si la jeune femme va bien. Instinctivement elle se dirige vers la salle d’attente, tente de garder son esprit vide, d’oublier la douleur lancinante qu’elle essayait d’ignorer jusque-là. Là-bas elle croit voir le visage de Nissrin qui les avait tant aidées un peu plus tôt dans le train. « Oh elle va s’en sortir alors ? » demande-t-elle alors que ses paroles viennent faire écho à celles d’Eliane. Pour tout dire elle n’a jamais rencontré la Penelope dont il est question, mais elle a envie de savoir qu’il n’y a pas plus de morts à déplorer, même si personne ne leur a donné de chiffre. « Oh, c’est douloureux mais je crois que je vais attendre que Milena soit revenue pour aller voir les médecins. » Elle hausse les épaules, n’ayant aucune idée du temps que peut prendre une telle procédure. Mais pour tout dire elle n’a pas envie qu’on la gave de médicaments et qu’elle finisse par s’endormir sur cette chaise si peu confortable. Quelques secondes elle laisse Eliane et Nissrin parler. Quelques secondes, le temps de sortir son téléphone pour voir qu’elle a finalement du réseau. Elle essaie d’appeler Xavi, en vain. Elle soupire, elle ne sait pas qui appeler dans un moment pareil. « Vous avez vu Arthur d’ailleurs ? » Il lui semble l’avoir aperçu après qu’il l’ait aidé, mais elle a besoin de s’assurer qu’il aille bien.

@Eliane Samuels @Nissrin Bashir

« Elle s’en sortira » assurai-je à Lydia, il n’y avait aucune raison pour que ce ne fût pas le cas, le pronostic était engagé mais pas alarmant, le timing avait été le bon. « Ils sont arrivés à temps » cette confirmation était pour Eliane qui s’inquiétait de façon importante pour son amie, je posai d’ailleurs une main réconfortante sur son épaule. « Tout va bien se passer » J’y croyais, aussi n’eues-je aucun mal à me montrer convaincante, de toute façon, il ne nous restait que l’espoir et dans mon cas, un passé de médecin. Et en tant qu’ancien médecin, je m’interrogeais sur la blessure de Lydia qui devra également être pris en charge à un moment ou à un autre, même je doutais que ce soit dans l’immédiat, elle n’était pas aux portes de l’agonie après tout. « Je pense qu’il faudra que tu te présentes à l’accueil, comme ça les infirmières auront connaissance de ton cas et t’appelleront quand ce sera ton tour » J’ignorais si le système était le même en Australie, depuis mon installation à Brisbane, je n’avais jamais eu l’occasion de finir à l’hôpital, heureusement d’ailleurs. En tout cas, les urgences étaient bondées, tout le monde devait avoir fort à faire aussi les bobos minuscules n’auraient aucune priorité, surtout si la personne semblait si bien tenir le coup que Lydia à cet instant. « Arthur ? » demandai-je, n’ayant aucune idée de qui il pouvait s’agir et je me tournai vers Eliane qui pourrait peut-être avoir réponse à cette question « d’ailleurs, Eli, tu as retrouvé ton ami que tu cherchais ? » j’avais à peine posé la question que les portes battantes crachèrent une nouvelle victime dont le corps était véritablement ensanglanté, dans un sale état à tous les coups, un des ambulanciers expliqua la situation à une infirmière et je pus lire le mot train sur ses lèvres, confirmant mes craintes « il a été sorti de notre train » soufflai-je alors aux filles. Nous avions eu beaucoup de chance.