« Il faut bien que ça sorte, à un moment. » je réponds en haussant les épaules. Toute cette énergie générée par ces tempêtes d’émotions, bonnes ou mauvaises, positives ou négatives. Ca se condense, ça se densifie, et puis ça explose. Ca peut se contenir longtemps, très longtemps, s’amoindrir parfois, mais, oui, il faut que ça sorte. Nous avons trouvé comment le retarder, mais pas encore comment désamorcer ce cycle. Un jour peut-être. Mais le mécanisme sera sûrement difficile et long à trouver. Pour ça, il faudrait aller tout au fond des choses, savoir ce qui ne va pas, régler chaque problème un par un, chaque conflit intérieur, mettre fin à toute la culpabilité, aux doutes, aux remises en question de soi. Au fond, les problèmes de Joanne et les miens ont les mêmes racines ; nous ne savons pas qui nous sommes, nous n’avons jamais été nous-mêmes. Elle surprotégée, et moi abandonné. Quel beau désastre, si touchant, ces deux champs de ruines qui pensent pouvoir se reconstruire ensemble malgré la vie qui continue de bombarder incessamment. Et les mauvais choix, et les failles de chacun. Peut-être que c’est vrai, je dévore Joanne. Je l’assimile et la fait mienne de l’intérieur. Je fais en sorte qu’elle ne puisse plus jamais m’échapper. Le pire, c’est que je ne comprends pas comment j’en suis arrivé là. Je suis comme Edward, je suis pire, je suis monstrueux. J’avais raison, c’est dans l’essence, c’est dans le sang. Je n’ai même pas besoin de le faire exprès. « J’ai… j’ai… » Je serre les dents, mon corps m’ordonne de me taire. Elle va comprendre sinon, elle va fuir, elle va m’abandonner. « Je te l’ai dit, je détruis tout. » dis-je la gorge serrée. « Je te casse, je te répare, encore et encore. » Mais à chaque fois, j’enfonce un peu plus mes griffes. Je lui donne une maison, je la demande en mariage, je lui fais un enfant. C’est l’envers du décor, après que Cendrillon ait épousé le prince. Elle passe d’une prison à l’autre. « Et tout ce que tu vois, tout ce que Molly voit aussi, c’est que j’arrive à te réparer. On dirait que vous oubliez que c’est moi qui détruis aussi. » Comme si ça n’importait plus. Une fois le chapitre tourné, l’ardoise est effacée, et on recommence. Et je m’en sors toujours. Toujours. Je pouffe nerveusement quand Joanne admet que l’histoire avec Hannah était de sa faute. Ca oui, mais pas le reste. Le reste, ce n’est que moi. Mais j’ai impeccablement implanté l’idée dans son crâne. « Non, c’est moi qui t’as laissé penser que tu étais bonne à rien. » Et l’idée a germé, l’a dévorée, et fait atterrir ici, parce que mes propres dégâts étaient trop gros pour moi. Mais encore et toujours, c’est pour moi qu’elle se relève. Pourquoi ? Pourquoi ? Je suis persuadé d’asséner un coup de grâce au travail de Molly en avouant à Joanne que j’ai revu Hannah. Mais la jeune femme reste sans réagir. L’expression sur son visage me brise le cœur, ses questions aussi. J’aurais presque préféré une baffe et une scène. A cet instant, elle ne fait que démontrer ce que je lui ai dit. Elle est conditionnée. Mon cœur s’emballe, je me sens presque nauséeux. « Ca l’était, oui. » Purement professionnel. A la base. C’était l’idée. J’acquiesce encore ; les photos, c’est toujours un peu de la comédie, c’est vrai. Ce n’est ni mentir, ni dire la vérité. Mais la vérité, c’est que je ne sais pas quoi dire. Je n’ai aucun courage à cet instant. Joanne propose que nous rentrions plus tôt, quitte à laisser sa grand-mère avec la déception d’avoir fait fuir sa petite-fille bien avant l’heure prévue. « Non, je ne veux pas tout gâcher… » Mais est-ce que ça n’est pas déjà fait depuis longtemps ? Je déglutis difficilement. Je caresse délicatement la joue de ma belle du dos de la main. Je lui souris un peu, pour la rassurer. « Il ne s’est rien passé. » je lui assure. Rien d’amoureux, rien de sexuel. Je ne l’ai pas trompée là-bas après tout. « Nous avons bu un verre après la séance, nous avons un peu discuté, c’est tout. » Pour Hannah et moi, notre histoire est passée et enterrée. Elle fait partie de notre relation, car nous ne pouvons pas la nier, mais nous souhaitons aller de l’avant. Nous donner une autre chance de construire autre chose. Nous ne pouvons pas tirer une croix l’un sur l’autre. « J’avais peur que tu… » Non, chut. Elle va se rendre compte de comment elle aurait dû réagir à la base, et elle fera machine arrière. Non, je n’ai rien à me reprocher. J’ai fait un boulot avec la comédienne, nous avons passé un moment en toute amitié. Rien qui puisse être réprimandé. Délicatement, je prends le visage de Joanne entre mes mains. Je l’embrasse avec une extrême douceur. « Tu sais que je t’aime, hein ? Tu sais que je t’aime plus que tout. » Je réparerai, me dis-je. Je réparerai tout, c’est promis. Cette relation est malade à cause de moi. Joanne est une poupée cassée à cause de moi. Mais je peux réparer. « Et c’est vrai. Tout ça est vrai. Toi, moi, Daniel. C’est tout ce qui compte à mes yeux. Vous êtes tout pour moi. Je ferais n���importe quoi pour vous, tu le sais ? » Toutes les mauvaises décisions, tous les mauvais choix, tout ce que j’ai toujours fait était pour eux, pour qu’elle soit heureuse, pour que Daniel ait un bon père. Je ne fais rien de bien, mais ce n’est pas de ma faute. J’en suis juste incapable.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Joanne ne voulait plus que toute cette colère sorte de son fiancé. Elle ne voulait plus le voir se faire souffrir à penser que ce n'était que ce qu'il méritait. Les seules blessures qu'elle voulait encore panser était celles qui étaient accidentelles, inattendues. Elle ne voulait guérir des automutilations, ça la faisait souffrir tout autant. Elle voulait que ses colères s'évaporent, elle s'était longtemps fixée comme objectif de trouver ce mécanisme là. Elle savait qu'il existait, qu'il était là, quelque part, mais qu'il fallait encore beaucoup creusé. "Mais tu arrives à réparer à chaque fois." lui dit-elle doucement, avec un sourire encourageant. "Tu y arrives à chaque fois, tu sais comment il faut faire." Et pour elle, c'était une très belle chose, de savoir qu'il en avait les moyens. "Je crois que toutes les relations ont leur lot de complexités. Nous savons tous les deux que nos tensions sont proportionnels à la manière dont nous nous aimons. Alors oui, je préfère ne voir que le fait que tu veuilles réparer. Ca prouve que tu tiens à moi, que tu tiens à ce que notre histoire fonctionne continue, qu'on se relève à chaque fois, pour reprendre là où le temps s'était arrêté." Joanne caressait tendrement sa joue. "Je n'oublie pas, mais je t'ai pardonné à chaque fois. C'est quand même important ça, non ?" lui demanda-t-elle avec un faible sourire. Enfin, il se mit à mentionner un nom que Joanne ne pensait plus jamais entendre. Tout un mécanisme s'était mis en place dans son esprit pour éviter la chute, qui aurait inévitablement fatale. Il lui avouait même qu'il l'avait laissé délibérément pensé que tout était de sa faute, laissé croire qu'elle ne valait rien. Rien d'autre qu'une enveloppe de chair pour protéger leur enfant. C'était très dur à entendre pour Joanne, ne s'étant jamais douté qu'il ait pu être si cruel avec elle. Elle finit par se résoudre que, encore une fois, ce n'était que parce qu'elle le méritait. Il répondait aux questions de la jeune femme parce qu'il devait certainement savoir que c'était ce qu'elle voulait entendre. Qu'il n'y avait rien, que ce n'était que pour le travail. Il lui assura que rien ne s'était passé, bien qu'il reconnut quelques secondes plus tard qu'ils étaient allés boire un verre ensemble autour duquel ils avaient discuté. Ca effrayait un peu Joanne quand même, qu'ils aient pu renoué ensemble. Elle baissa les yeux, remarquant que ses doigts jouaient nerveusement entre eux. "Tu m'avais dit que... tout était fini." s'hésita-t-elle à dire. Et ce n'était donc vrai. Joanne ne saurait dire si ça relevait du mensonge ou de l'imprévu. "Tu... Tu ne l'aimes plus, n'est-ce pas ?" demanda-t-elle en relevant les yeux, espérant voir dans le regard de son fiancé toute sa sincérité lorsqu'il lui répondrait. Qu'importe la réponse, Jamie était sûr qu'elle resterait auprès de lui - à se demander s'il n'avait pas juste calculé son coup en lui demandant de lui promettre de ne jamais l'abandonner. "Tu avais peur que quoi ?" Elle voulait savoir, au point où ils en étaient. Autant mettre toutes les cartes sur table. Le bel homme prit délicatement le visage de sa fiancée et l'embrassa. Comme s'il cherchait à se rattraper, à se faire pardonner. Joanne le savait maladroit, il ne savait pas sur quel pied danser avec son rôle de fiancé, de père de famille. Sans qu'elle ne comprenne pourquoi, Joanne sentit des larmes couler le long de ses joues. Elle acquiesça d'un signe de tête à ce qu'il disait, ses yeux étaient plein d'amour lorsqu'elle le regardait. Mais malgré ses erreurs, la jeune femme savait que tout ce qu'il voulait faire, c'était pour sa famille. Même si parfois ses décisions étaient incompréhensibles, c'était toujours pour elle et Daniel. Le mur fondé en Joanne ne s'était pas effondré, ce sera certainement le cas lorsqu'elle aura les clichés devant les yeux. Lorsque la presse, une nouvelle fois, concluront que Jamie et Hannah forment le couple parfait, le couple dont tout le monde rêve de voir, que Joanne n'avait aucunement sa place dans ce monde là. Elle n'allait pas y échapper, et ça la blesserait profondément, comme à chaque fois. Elle avait terriblement envie de lui faire promettre qu'il ne l'abandonnera jamais pour la belle brune. Elle était même tentée de lui demander de ne pas le revoir. C'était peut-être amical, mais tout pouvait déraper si vite. Un peu trop d'alcool, un jeu de circonstances... Qui sait. Son coeur lui faisait entièrement confiance. Mais, son esprit, désormais scindé en deux, ne savait pas choisir, c'était très flou. Alors elle n'écoutait que les sentiments qu'il avait pour lui. Subitement, Joanne se blottit contre lui, pendant de longues minutes silencieuses, à ne rien dire. Par manque d'affection, par peur de ce qu'elle pouvait voir dans son regard, elle ne savait pas trop. Au bout d'un moment, elle lui demanda. "J'aimerais beaucoup que tu en parles à Nanny, que tu parles de toi. Je sais qu'elle t'écoutera, qu'elle fera de son mieux pour te comprendre et comprendre tes choix. Je sais qu'elle le fera pour moi." Il fallait passer par là, crever l'abcès avant qu'un véritable malaise ne s'installe. "Je sais que ça ne te plaît pas, mais je pense que vous en avez tous les deux besoin." Elle préférait même que seule sa grand-mère soit au courant de la vie de Jamie. Molly faisait des liens, elle tentait de décrypter les réactions de chacun. Elle ne jugeait jamais avant de connaître. Et elle n'attendait qu'à connaître Jamie. "Tu veux bien ?" Joanne était passée à autre chose surtout parce qu'elle ne voulait pas entendre parler d'Hannah, surtout pas. Il ne fallait pas que le mur s'effondre.
Toutes les relations sont imparfaites, plus ou moins complexe. La notre bat certainement des records. Honnêtement, je ne comprend pas comment Joanne fait pour me pardonner à chaque fois. Elle ne voit que mon intention de réparer mes erreurs, et pas le reste. A mon avis, elle se voile la face, et n'accepte de voir que ce qui ne met pas son monde en danger. Comme lorsque je lui avoue pou Hannah. C'est son mécanisme de défense. Elle n'ose quasiment rien dire. Et même à peine demander si j'aime toujours la comédienne. “J'ai de l'affection pour elle. C'est mon amie.” je réponds d'une voix parfaitement neutre. Elle y interprétera ce qu'elle veut interpréter. Je sais que mes paroles actuelles n'auront plus d'importance quand la jeune femme verra les clichés en question. Ca sera à ce moment là, la vraie bataille. “J'avais peur que tu le prennes bien plus mal que ça, et que tu ne me croies pas quand je dis qu'il ne s'est rien passé.” Mais ça peut toujours arriver, alors je suis loin de crier victoire. Pourtant, je sais que je m'en sortirai encore. Je m'en sors toujours. La preuve ; Joanne se blottit contre moi, à la recherche de tout l'amour que j'ai à lui donner. Elle reste là un long moment sans rien dire, et je la serre autant qu'elle le veut, la protégeant du vent et du monde extérieur -même si ce n'est pas de ça dont je devrais la protéger. Finalement, ma fiancée reprend la parole. Elle me demande de m'ouvrir à la vieille femme qui est si importante dans sa vie, exposer mes erreurs et ce passé honteux, tout mettre sur la place et attendre son jugement. “Je le ferai.” dis-je tout bas. Tout ce qu'elle voudra. Et je ne compte pas attendre. Il n'y aura jamais de bon moment, je ne me sentirai jamais vraiment prêt Alors, une fois rentrés chez Molly, à peine nos chaussures retirées pour ne pas disperser du sable dans les pièces de la maison et nos gilets retirés de nos épaules, je me rends dans le salon où la vieille femme joue encore avec Daniel. Le petit m'accueille avec un petit cri et tend les bras pour avoir un câlin. Je le prends délicatement et l'embrasse sur la joue. Le regard de Molly est toujours profondément désolé. Je vois bien que c'est une personne qui n'aspire qu'à l'harmonie sous son toit. “Je ne voulais pas que vous vous sentiez mal, Molly. Vous n’êtes coupable de rien.” je lui assure en toute sincérité. Il y a des éléments qu'elle n'a pas, ce n'est pas de sa faute. Alors, déterminé, je m'assois devant elle, Daniel sur mes genoux. “Est-ce que nous pouvons parler?” Elle acquiesce d'un signe de tête, toute ouïe. Joanne sera tentée d'éloigner notre fils, de le mettre dans sa chambre pour qu'il y joue seul le temps que nous discutions, mais je me tourne vers elle avant qu'elle n'y songe. “Daniel reste.” De toute manière, il ne comprendra rien. Et il ne devrait pas y avoir de tension dans l'air ou de raison de hausser le ton tant que je n'aurai pas terminé de parler. “S'il vous plaît, ne m’interrompez sous aucun prétexte.” Sinon, une fois ma bouche fermée, elle ne se rouvrira sûrement plus. Je n'y parviendrai plus. Je ne veux ni commentaires, ni jugements en cours de route. J'ai juste assez de courage pour tout déballer d'une traite, et même regarder Molly et Joanne dans les yeux en parlant. Daniel s'est blotti contre moi. Il réclame juste sa peluche avant que je ne débute, devinant peut-être qu'il devra être sage pour les prochaines minutes. “Je pense que Joanne vous en a parlé, l’année dernière on m’a diagnostiqué un trouble qui me rend particulièrement versatile. Il résulte beaucoup de violence de toutes mes émotions, elles sont toutes très extrêmes. Ce jour-là, j’avais levé la main sur elle.” Tout le monde connaît cet épisode de notre relation. La jeune femme a coupé les ponts tout un mois, puis j'ai rencontré Hannah, le même soir où Joanne a accepté de me parler à nouveau. C'est surtout à partir de ce moment là que j'ai décidé de me faire aider, après des années à chercher les ennuis dans les bars pour canaliser une colère que je n'arrivais pas à identifier. Au moins, le traitement m'a permis de mettre le doigt sur plusieurs choses. “Je ne sais pas gérer l’amour que je porte à Joanne. Je n’ai jamais aimé avant. Et encore moins aussi fort. Je ne comptais pas tomber amoureux un jour, ni avoir de famille. Je pense que je suis un compagnon aussi toxique que je suis un père minable, et je prie pour que Daniel ne me ressemble en rien.” Autant être franc. J'adresse un regard désolé à ma fiancée, mais c'est ce que je pense, malgré tout le mal qu'elle se donne pour me rassurer, me raisonner. Mon regard retombe sur son aînée. “Ma famille est malade, Molly. Nous sommes une brochette de pervers, de manipulateurs, de sociopathes, de sadiques. Mon père a tenté de violer Joanne, ma mère a kidnappé notre fils, mon frère était un junkie à dix-sept ans. Il y a quelque chose qui cloche, et je ne fais pas exception.” Je me traîne des tares immenses dont je ne pourrai peut-être jamais guérir. Et je ne me rend même pas compte de ce que je fais. C'est naturel. Pire, c'est en essayant de faire le bien que je tombe dans ces travers. Je suis sûrement le cas le plus désespéré de tous. Et qu'on ne me dise pas que c'est l'intention qui compte, que je ne veuille pas faire de mal ou quand je cherche à me faire pardonner. Je n'ai pas d'excuse. C'est comme ça, je porte le nom que je porte. “Ça a commencé à la mort de mon frère, Oliver. Je suppose que aujourd’hui il suffit d'une recherche sur internet pour savoir qu'il s'est suicidé. Je l'ai retrouvé pendu un soir. On m’a toujours dit qu'il était mort à cause de moi. Et c'est vrai.” En tout cas, on a réussi à m'en persuader. Il faut dire qu'à force de se le faire répéter pendant vingt ans, difficile de croire autre chose. Et puis, c'est évident. Qu'on dise que c'est à cause de moi, ou pour moi, la finalité est la même. Je suis au centre de ce geste. Mais Molly ne sait pas pourquoi. “Mes parents ne voulaient pas de moi. Un enfant unique parfait leur convenait. Mais ils ne sont pas d'un parti ni d'une religion qui accepte qu'on mette intentionnellement fin à une grossesse, alors me voilà. J'ai été le pire enfant qui soit. J'hurlais, j'étais indiscipliné, capricieux, mauvais. Ils me détestaient. Tous les jours ils m'ont fait comprendre qu'ils auraient été plus heureux si je n’existais pas. Ils trouvaient du réconfort dans les humiliations que je subissais. Et Oliver était érigé en divinité.” J'imagine bien mes parents se réunir dans la chapelle du domaine pour demander ma mort. Leurs mains trembler et hésiter lors de mon baptême, alors qu'il serait si facile de me noyer dans cette foutue eau bénite. Mon existence leur donnait des boutons. “Oliver était foncièrement le genre de personne pour qui la vie n'est pas faite, et encore moins la seule qui lui était proposée.” C'est un point de vue qui n'est pas forcément rependu, mais je pense qu'il existe des âmes trop fatiguées ou trop faibles pour le monde des vivants, qui s'incarnent par erreur, voient que le monde est laid, difficile, cruel, et nous quittent aussi vite que possible. Je mets mon frère parmi eux. “Il faisait quand même de son mieux. Il me protégeait de tous. Il était tout ce que j'avais. Il était la seule personne que j'ai jamais aimé.” dis-je en essayant de faire continuer de résonner ma voix malgré ma gorge qui se serre de plus en plus, envahi par une vive vague d'émotion qui se lit dans mes yeux brillants. “Il est mort parce qu'il n'y avait pas d'autre issue pour s’échapper, et parce que c'était le seul moyen pour moi d'avoir une chance.” Sans lui, il ne restait que moi comment enfant. Mes parents étaient obligés de l'accepter, ils ne pouvaient plus m'ignorer ou me malmener. J'étais devenu l'héritier. Pourtant, en aucun cas cela ne m'a donné la place ou les privilèges d'Oliver. Au contraire. Après tout, rappelons-le, il est mort à cause de moi. En plus d'être né, j'ai tué le seul bon fils de mes parents. Leur haine grossissant, mon statut avait évolué, mais ma situation s'était dégradée. “J'ai nié sa mort pendant dix ans, même si je l'avais vue moi-même. Le mentionner suffisait à me rendre souffrant.” Peu de gens comprennent à quel point le mental peut avoir de l'influence sur le corps. Si l'esprit ne veut pas, le corps ne peut pas. Je prends une grande inspiration. Partie délicate de l'histoire. Cette fois, je baisse le regard, le laisse dans le vague. Hors de question que je ne vois Molly ou Joanne me regarder comme un déséquilibré. “Mais la raison pour laquelle il ne pouvait pas être mort, c'est parce que je l'entendais. Il me guidait. Il m’aidait à être lui, et même mieux qu'il ne l'aurait jamais été de son vivant.” Ca sonne toujours aussi absurde et fou dit à voix haute. A se demander comment ce cirque a pu durer aussi longtemps. Je suppose que la souffrance mène à des cheminements plus ou moins malsains pour survivre. Et du malsain, j'en ai connu. “S'il faut tous les détails sordides, sachez que j'ai entretenu une liaison avec ma psychologue depuis mes vingt ans jusqu'à mon départ de Londres il y a cinq ans. Et sachez que je me suis marié une première fois à une fille uniquement parce qu'elle aurait pu plaire à Oliver et que je m'entendais bien avec elle.” Autrement dit, ma vie sentimentale a toujours été le chaos. Si on peut parler de sentiments. Je cherchais surtout à pomper de l'affection, et ne pas être seul. Je me fichais de tout ce qu'il fallait faire pour arriver à mes fins. Leur mentir, les tromper, être trompé, leur offrir des cadeaux hors de prix. J'avais besoin de leur amour, de leur présence la nuit. Je respire un coup. Ce chapitre passé, je peux relever le regard. Je dois passer pour quelqu'un qui n'assume pas ses actes, à fuir leurs yeux bleus sur les sujets sensibles, et c'est peut-être le cas. J'ai bien le droit d'en avoir honte, il y a de quoi. “J'ai décidé de mettre fin à tout ça et de m'installer en Australie sans regarder derrière moi afin de reprendre ma vie en main. D’enfin vivre pour moi.” Sauf que cela a été bien plus compliqué que prévu. Exilé, seul, sans repères. Je devais tout recommencer à zéro, tout rebâtir. Et surtout, je devais savoir qui j'avais envie d'être, maintenant que je n'étais plus le fils de, le mari de, l'ombre de mon frère. Comment est-ce qu'on gère pareille crise d'identité à trente ans ? Comment apprendre à gérer sa vie et ses émotions après quinze ans sans rien ressentir de vrai ? Comment ne pas devenir complètement instable ? “Je pense que tout ça explique plutôt bien pourquoi je suis comme je suis. Et c'est ça qui va épouser votre petite-fille dans trois mois. Si elle n'a pas changé d'avis d'ici là...” Sait-on jamais si le récit mit bout à bout aura réussi à la dégoûter. Le bagage est énorme. Lourd. C'est ce que contiennent toutes mes crises. A chaque fois qu'elle essaye de m'empêcher d'exploser, c'est un peu de tout ça qu'elle m'aide à ravaler. Il suffit qu'une toute petite portion se mêle à une situation présente, et me voilà à deux doigts de perdre les pédales. C'est pour ça que je démolis tout, que j'ai besoin de contrôler, que j'ai peur de l'abandon, et qu'il n'y a qu'en lui faisant l'amour que je peux lui exprimer tout ce que je ressens ; parce que c'est aussi brut et intense que tout ce qui bout en moi. Elle se trompe si elle pense pouvoir me guérir de tout ça. On ne guérit pas de la haine injectée dans une vie dès les premières secondes. “J'étais sous traitement pour ces troubles jusqu'à il y a quelques semaines. J'ai décidé d'arrêter. Joanne me soutient là-dedans, mais je vois bien que c'est difficile. J'enchaîne les crises depuis le début de nos vacances. Je suis vraiment désolé.” Même si elle savait à quoi s'attendre, j'ai le sentiment de tout gâcher. Absolument tout. Tout le temps. Je regarde enfin que mes joues sont mouillées par quelques sillons salés. Je ne sais absolument pas à quel moment les larmes ont commencé à m'échapper. Sûrement dès le début, mais j'étais trop absorbé par mon récit. J'essuie mes joues du revers de la main. Daniel s'en inquiète. Il s'agite un peu, tend son doudou, le secoue ; s'il joue avec son papa, alors il ne sera plus triste, pas vrai ? Je le serre dans mes bras et l'embrasse sur le front, me demandant encore et toujours comment j'ai pu participer à la conception d'un petit ange pareil. “J'ai été violent avec Joanne, j'ai été égoïste, j'ai été cruel. Mais ce n'était pas ce que je voulais. Je l'aime plus que tout au monde. J'aime notre garçon. Mais vous auriez toutes les raisons du monde de me demander de m’éloigner d'eux et de partir de chez vous maintenant que vous savez tout.”
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Jamie admettait qu’il avait de l’affection pour Hannah, c’était une bonne chose. Cependant, il n’avait pas répondu négativement à sa question. Il n’a pas dit non, je ne l’aime pas. Joanne ne savait pas si c’était volontaire de sa part ou non de détourner la question, de ne pas y répondre clairement. Cela instaurait un doute, une incertitude, quelque chose dont elle n’aura jamais la réponse. C’était le genre de sentiment qui prenait énormément de temps à mourir, il ne suffisait que de petits riens pour le raviver comme il se doit. Il ne cachait qu’il craignait sa réaction en lui annonçant la nouvelle, que tout volerait en éclats. Qu’elle ne le croirait pas en lui certifiant que rien ne s’était passé. Mais le psychologique de Joanne empêchait toujours ce flot de pensées négatives et quasi paranoïaques d’atteindre son conscient, évitant ainsi bien des dégâts. Mais tout le monde savait que cela n’allait pas durer, que tout allait exploser avec un élément déclencheur qui était plus qu’évident. Ce n’était pas du déni, non. La jeune femme se colla à son fiancé, et il l’encercla de ses bras pour l’étreindre tout contre lui. Elle fut surprise que Jamie accepte de s’ouvrir à Molly. Il lui certifia même que ce sera fait. D’ailleurs, il comptait le faire dans les suites, ils reprirent donc le chemin pour la maison, où la vieille dame s’amusait beaucoup avec son arrière-petit-fils. Jamie le prit dans ses bras, Daniel se blottit tout de suite contre lui. Il aimait tellement son père. Celui-ci demanda à parler à Molly, qui acquiesça d’un signe de tête. Il précisa également à Joanne que le petit allait rester ; ce qui signifiait en soi qu’il ne comptait pas faire élever les voix. C’était déjà un bon début.Molly accepta également sa demande de ne pas être interrompu. Elle l’écouta avec énormément d’attention jusqu’au bout de son discours. Joanne était juste à côté de lui. Elle lui aurait bien caressé les cheveux, tenu la main, mais elle ne voulait pas que son contact ne le perturbe. Jamie s’était rapidement mis à verser des larmes. Daniel prit un moment avant de s’en rendre compte, mais lorsque ce fut le cas, il s’en inquiéta, et regarda d’un air soucieux son père. Jamie expliquait qu’il aimait bien trop Joanne pour que ça puisse être contrôlé, géré normalement.Joanne se rappelait alors de toutes leurs conversations. Les tensions créées lorsqu’ils avaient réalisé qu’ils n’envisageaient par le futur de la même façon. Elle voulait avoir une famille, lui non. Il mentionnait ensuite le suicide d’Oliver, l’histoire de sa famille, comme quoi il était le vilain petit canard, que personne ne voulait de lui. Il lui racontait même le fait qu’il entendait pendant longtemps la voix de son frère, sa relation étrange avec Kelya. Joanne était on ne peut plus navré d'entendre qu'il se considérait comme un mauvais père, comme un fiancé qu'il qualifiait de toxique. Molly l'écoutait jusqu'au bout, sans dire un seul mot. Ses yeux bleus ne laissaient transparaître aucun jugement, aucune de ses pensées. Elle restait longuement silencieuse à le regarder après qu'il ait terminé son long récit. Son regard s'attendrit lorsque le petit se souciait de son père, celui-ci le serra fort dans ses bras. La vieille dame finit par s'éclaircir. "Sachez que je peux comprendre votre peine, concernant votre frère." dit-elle avec un petit sourire triste. "J'avais une petite soeur, nous avions à peine une année d'écart, et elle est décédé d'une méningite quand elle avait sept ans. A cette époque, personne ne savait quoi faire." Elle haussa les épaules. "Ce n'est pas si horrible que ce que vous avez vécu avec Oliver, mais je sais de quoi vous me parlez lorsque vous me ditez que vous tentiez de remplir le vide qu'il a laissé derrière lui, de le faire vivre encore un peu à travers vous." Sa voix était vraiment calme, douce, posée. "Vous vous considérez comme menaçant, avec tous vos soucis, votre passif. Moi, je vois surtout une personne qui a besoin de se décharger de toute cete peine au fil des années. La vie ne vous a pas souri, nous ne pouvons rien faire pour cela, et je sais que c'est le genre de choses qui peuvent énormément frustrer Joanne. Mais vous ne trouvez pas que vous avez eu une belle revanche avec tout ce qu'il vous est arrivé ?" Elle avait un sourire encourageant. "Vous ne voyez que le plus mauvais de vous-même, qu'en est-il du bon ? Du père qui prend son fils tendrement dans ses bras, du fiancé qui regarde amoureusement ma petite-fille ou qui sourit dès qu'elle ait dans la même pièce que lui ? Vous ne m'avez pas parlé de tout ça." Ca ne sonnait absolument pas comme un reproche. "Tout est de cause à effet. Votre milieu, vos parents... Tout le monde a voulu vous persuader que ne valiez rien, et au fil des années, cela sonnait comme une réalité. Si vous n'étiez pas si soucieux, si vous n'aviez pas peur de perdre Joanne en me racontant tout ceci, vous n'auriez pas baissé les yeux, vous n'auriez pas pleuré en vous disant que vous étiez condamné. Et vu la manière dont Joanne vous regarde maintenant, je ne pense pas qu'elle ait l'intention d'aller où que ce soit sans vous." La jeune femme avait les yeux rivés sur Jamie, majoritairement. Elle était si fière de lui qu'il ait pu s'ouvrir ainsi à sa grand-mère, cela signifiait tant pour elle. "Mon mari n'a pas toujours été des plus tendres, la guerre l'a profondément marqué, et il a malheureusement levé la main sur moi quelques rares fois lorsqu'il se lançait dans des furies tant il se haïssait. Il se traitait de monstres, avec tout ce qu'il avait fait sur le front. C'est un traumatisme. Vous, vos parents ne vous ont pas aimé, ils ne sont pas sains d'esprit ; et puis, de nos jours, qui peut l'être vraiment ? C'est aussi un traumatisme, au long cours. Et pourtant, vous avez su vous y décrocher. Ce n'est pas donné à tout le monde d'arriver à le faire, à aller de l'autre côté du monde pour redémarrer à zéro, même si le bagage est particulièrement lourd. On veut souvent rester accroché à son passé par peur de voir ce qu'il y avait si on lâchait, que ce soit de belles années ou non. Il faut énormément de courage et de volonté pour ça, Jamie. Et pourtant, vous l'avez fait, et je trouve ça vraiment admirable." Elle était sincère dans la moindre de ses paroles. "Vous aimez Joanne, vous l'aimez plus que tout, et je le vois, Jamie. Je le sais. Je le sais par tout ce dont Joanne me raconte de vous. L'amour est un sentiment si complexe. Je peux comprendre qu'avec autant d'intensité, les choses deviennent difficilement contrôlables. Il y a des erreurs, mais les erreurs se corrigent. Il suffit de voir la manière dont vous la regarder pour tout comprendre, pour voir tous vos bons côtés. Le genre de regard qui dit que vous seriez prêt à absolument tout faire pour elle, que vous réaliseriez le moindre de ses rêves, que vous répondriez à la moindre de ses demandes. Ne vous considérez pas comme quelqu'un de menaçant, de toxique. Si je sentais que Joanne était en danger, vous ne seriez pas là en train de me parler, j'aurais refusé que vous rentriez chez moi." Elle lui sourit avec tendresse. "A l'occasion, j'aimerais que vous me parliez de tout ce que vous savez faire, de vos atouts. Mettez-vous en avant. Comme dirait les plus jeunes ; je crois; envoyez-moi du rêve. Joanne m'a dit que vous dessiniez merveilleusement bien, que vous adoriez peindre, et que vous jouiez du piano. J'aimerais aussi connaître ces détails là de vous. Je suis une personne très curieuse." Ses yeux pétillèrent l'espace d'une seconde, avant qu'elle ne reprenne. "Mais je vous en prie, Jamie, épousez ma petite-fille, ne l'abandonnez pas. Il y a des choses qui resteront un peu compliquées, mais je suis convaincue que vous trouverez des clés, des solutions. Vous voulez vivre votre vie pour vous, allez au bout de vos accomplissements, allez au bout de vos rêves. Je sais que vous y parviendrez, je le sais. Parce que vous feriez n'importe quoi pour elle, et vous feriez n'importe quoi pour le petit trésor que vous gardez précieusement dans vos bras. Et je peux vous assurer qu'il ne sera pas comme vous, si cela pèse tant sur votre confiance. Vous lui donnez déjà tant d'amour, Jamie. Il suffit de ça pour être un bon père. Ca fait partie de vos bons côtés, j'ai hâte de savoir que vous me montriez les autres. Joanne est assez douée pour les repérer, je pense que vous le savez déjà." conclut-elle avec un sourire complice.
A mes yeux, il y a bien trop peu de bon en moi pour qu’il puisse être décelé et exploité. Ce n’est pas parce que je dessine bien et je joue du piano que je suis quelqu’un de bien. Ce n’est pas parce que j’aime Joanne et Daniel que je suis une bonne personne. Ce n’est pas parce que je veux faire bien et réparer ce que je fais mal que toutes mes erreurs sont pardonnables ou compréhensibles. Je suis ce qu’on a fait de moi, et personne n’y peut quoi que ce soit. Je peux essayer de changer, m’améliorer, avec plus ou moins de succès. Pourtant j’ai toujours l’impression de pourrir de l’intérieur. Je peux faire de bonnes choses, des belles choses, j’en ferai encore, mais ça ne change pas ça. Je ferai toujours de mon mieux, mais cette sensation persistera. Du moins, pour le moment, c’est le cas. Je souris un peu, de temps en temps, aux paroles de Molly. Elle est compréhensive, ouverte d’esprit, elle ne me condamne pas. Elle est sûrement aussi idéaliste que Joanne. Ses mots ne sont pas sans effets, mais le plus gros de mon soulagement vient du fait qu’elle ne me jette ni hors de sa maison, ni hors de la vie de Joanne. Elle veut ce mariage, elle l’encourage, malgré tout. « Mais elle mérite mieux. » dis-je tout bas, le regard posé sur Daniel qui continue de m’agiter dans l’espoir de me voir sourire et montrer que je ne suis plus triste. « Ils méritent bien mieux. Et je ne mérite pas autant. » Ou alors, il faudrait me prouver le contraire de manière irréfutable. A mes yeux, tout ce que j’ai pu vivre par le passé n’est pas un argument valable. On mérite ce que l’on a par rapport à la personne que l’on est, et je n’estime pas avoir fait quoi que ce soit pour obtenir tout ça. « Mais merci. » dis-je quand même avec un léger sourire à Molly. Qu’elle ne pense pas que toutes ses paroles ont été vaines. Que l’on croit en moi est important à mes yeux. Si j’ai peu d’espoir à mon sujet, celui des autres m’aide à faire au mieux. Je ne veux pas décevoir. « J’espère que vous avez raison à mon sujet. » « Je n’affirme pas être la voix de la sagesse, vous savez, mais j’estime qu’à mon âge, je sais ce que je dis. » Sûrement, oui. Je dépose un baiser sur l’épaule de Joanne, assise près de moi. Il n’y a rien d’autre à dire sur tout cela, sans quoi nous tournerions en rond un long moment. « Allons, est-ce qu’un thé vous ferait du bien ? » propose Molly qui se lève pour que la vie reprenne dans le salon. « Volontiers. » C’est avec un sourire qu’elle disparaît dans la cuisine. Entre temps, Daniel est devenu bien calme, et même un peu tendu. Il lève ses grands yeux sur moi et fait la moue en se tortillant, prêt à pleurer si le message n’est pas assez clair. « Je vais le changer. » dis-je avant de voler un baiser à Joanne. Cela me permet de m’isoler un court instant avec le petit, de penser à autre chose, même s’il y a plus glorieux qu’une couche pleine pour se changer les idées. Tout de suite après, Daniel est de nouveau d’attaque pour jouer pendant des heures. Je le câline quelques minutes, dépose plusieurs bisous sur ses bonnes joues. « C’est qui le plus adorable des petits bonhommes, hm ? C’est toi, mon coeur. » Nous retournons au rez-de-chaussée. Il fait encore beau, malgré une petite brise caractéristique du bord de mer. Pour que Daniel en profite, je lui installe une petite couverture sur l’herbe du jardin avec quelques jouets. Sur le ventre, il fait le planeur, bas des bras et des jambes avec quelques petits cris pour toujours bien garder notre attention. Je reste assis à côté de lui un petit moment, et quand il me semble bien occupé et absorbé par son jeu, je le laisse un peu seul et vais m’asseoir dans l’une des chaises du jardin. Je profite d’un peu de calme et de solitude, mon thé entre mes doigts, observant Daniel. C’est un bébé heureux. J’ai un fils heureux, en pleine santé, plein de joie et d’amour. Je ne me refais pas le film de tout ce qui s’est dit depuis le début des vacances en boucle. Au lieu de ça, je préfère essayer de vider un peu mon esprit trop plein. Ne ressentir que la fierté d’avoir un garçon pareil. Plus tard, alors que j’ai quasiment vidé ma tasse, je fais signe à Joanne de me rejoindre et l’installe sur mes genoux, adossée à mon torse. Mes bras cerclent sa taille, mon visage s’est un peu enfoui près de son cou. Je me sens mieux. Je ne sais pas pour combien de temps, mais à cet instant, je me sens tout simplement paisible, et je profite de cette quiétude intérieure pour accepter un peu du bonheur que la vie me donne.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Joanne était restée bien silencieuse durant leur échange. Comme elle s'y attendait, sa grand-mère avait été particulièrement ouverte et compréhensive. Elle comprit que c'était difficile de lui faire voir le verre à moitié plein, mais il semblait plus apaisé à l'idée de savoir que sa grand-mère voulait de ce mariage. Elle voulait tant y assister. La vieille dame souhaitant passer à autre chose, proposa de préparer un peu de thé, histoire de se désaltérer. Jamie fila à l'étage changer Daniel. La jeune femme se doutait qu'il avait besoin d'être un peu seul après de telles révélations. Elle espérait qu'il allait bien tout de même. Se trouvant désormais seule dans le salon, elle finit par rejoindre Molly dans la cuisine. "C'est un homme bien." dit-elle en mettant la casserole sur le feu. "Une histoire compliquée, mais ça ne fait pas de lui une mauvaise personne." "Il ne veut pas vraiment l'entendre." dit la jeune femme en croisant les bras, l'air triste et désolé. Joanne se sentait régulièrement démunie face à tout ceci, il n'y avait rien qu'elle pouvait faire. "Tu ne pourras jamais changer ce qu'il est, ce qu'il a vécu. Son histoire de vie est particulièrement, je sais que ça te fait mal au coeur, ma chérie. Je sais que tu l'acceptes tel qu'il est, mais ne t'acharne pas, ne te torture pas à cause de ça. Il faut qu'il apprenne à vivre avec le moment présent, accepter qu'il a le droit d'être heureux comme tout le monde. Contrairement à ce qu'il dit, il le mérite." Joanne regardait sa grand-mère, les yeux légèrement bordés de larmes. "C'est dur pour toi, je le sais bien. C'est dur à accepter. Je ne sais pas si tu te rends compte qu'il dépend énormément de toi. Il a besoin, et je ne me fais pas plus de soucis, tu as tant d'amour à donner. Alors donne-le-lui, rappelle lui tous les jours que tu l'aimes. C'est ce que tu sais faire de mieux, et c'est ce qui l'aidera le plus." Joanne acquiesça d'un signe de tête et la vieille dame sécha ses larmes à l'aide de ses pouces. "Merci, Nanny. C'était tellement important pour lui de te rencontrer et de te parler. Ce n'est vraiment pas facile pour lui. Maman et Papa ne savent rien de tout ça." Molly l'enlaça et lui caressa doucement le dos, le temps qu'elle se calme. Puis elle apporta le thé à Jamie, il était allé dans le jardin, avec Daniel qui jouait par terre. Au bout de plusieurs minutes, il fit signe à sa fiancée d'approcher, afin qu'elle s'installe sur ses genoux. Il dissimula son visage dans son cou et profita de sa chaleur, silencieux. Joanne avait ses yeux rivés sur son fils, qui s'amusait tout seul, faisant régulièrement le beau parce qu'il savait que sa mère le regardait. "Tu as vu comme il est heureux ?" dit-elle à Jamie, tout bas. Il avait le sourire aux lèvres presque toute la journée, il aspirait tant au bonheur. Joanne faisait de plus en plus preuve d'impatience à l'idée de tomber enceinte. Elle se disait qu'il y avait le mariage avant tout, qu'elle puisse toujours mettre sa robe. Mais de voir son premier enfant en bonne santé, si heureux, et procurant un bonheur contagieux à ses parents, ça ne donnait qu'envie d'en avoir un deuxième, qu'importent les aléas de la grossesse. C'était bien le cadet de ses soucis. Elle glissa délicatement sa main dans ses cheveux et lui caressa pendant plusieurs minutes. "C'est bon, tu as l'autorisation de Nanny, tu peux m'épouser." finit-elle par dire avec un petit rire. Joanne savait qu'elle ne dirait pas non. Ils restaient là une bonne heure. Molly avait disparu dans la cuisine pour préparer le dîner, elle voulait expérimenter les lasagnes végétarienne - mais ne put s'empêcher d'en faire avec de la viande dans un petit plat juste pour Joanne. Et elle ne voulait l'aide de personne, elle voulait faire les choses au bien. Au bout d'un moment, Daniel en avait assez d'être seul sur le tapis et il réclama les bras de l'un de ses parents. Joanne se leva pour aller le récupérer puis elle retrouva sa place sur les genoux de Jamie. "Papa a besoin de beaucoup de câlin, alors on en fait un gros ensemble, d'accord ?" dit-elle à Daniel, qui lui ne se faisait pas prier pour se blottir contre elle, alors que sa petite main attrapait le t-shirt de Jamie. Il lui faisait de larges sourires, peut-être qu'il était soulagé de voir que la mine triste s'était effacé du visage de son père. Le dîner fut des plus paisibles, Daniel avait même eu droit de goûter un peu de lasagnes. Ils ne se couchèrent pas trop tard. Après que Joanne soit allée voir une dernière fois Daniel, qui dormait paisiblement, elle ferma la porte de sa chambre derrière et s'approcha de Jamie pour l'embrasser amoureusement, le visage entre ses mains. Elle caressait délicatement son visage avec le sien, et reprit de plus belle son baiser. En même temps, elle fit glisser la fermeture éclaire de sa robe et la laissa tomber par terre. Elle avait besoin de ses mots d'amour, et lui, certainement aussi.
La présence de Joanne, sa chaleur, sont comme un voile de protection qui m’enveloppe. Je sais que je n’ai rien à craindre, que je suis tranquille, à la maison. Nous veillons tous les deux sur la prunelle de nos yeux, le bambin qui s’amuse dans le jardin et ne manque pas que nous sourire ou de babiller pour attirer notre attention –même s’il l’a déjà entièrement. Il rit toujours, un rien l’amuse. Tantôt aventurier, tantôt rêveur. « Il est magnifique. » je murmure en serrant plus fort Joanne dans mes bras. C’est notre trésor, notre petit miracle. Et il est parfait. Il est ce qu’il y a de plus beau et de pus précieux au monde. La preuve de notre amour. Et son sourire, la preuve que nous sommes de bons parents, qu’il s’épanouit, qu’il est aimé. Oui, c’est un bébé heureux, et le genre de spectacle que nous pouvons admirer pendant des heures. Je ferme néanmoins les yeux, un court instant, pour profiter des caresses de Joanne dans mes cheveux. Je ne saurais pas dire si je me sens si calme parce que je suis soulagé d’avoir tout dit, de m’être libéré de ce poids, ou parce que ce fleuve de paroles m’a vidé. Sûrement un peu des deux. C’est toujours épuisant, émotionnellement, les moments pareils. Alors je reprends mes forces auprès de mes deux petits anges. « Je t’aurais épousé même sans autorisation. » dis-je avec un petit rire –même si ce n’est pas forcément vrai, j’aime croire que j’en aurai eu l’audace. « Je t’aurais kidnappée, et nous serions allés loin, et personne ne nous aurait séparés. » La vérité, c’est plutôt que je me serais avoué vaincu, que j’aurai pensé que de toute manière c’est ainsi que les choses sont pour le mieux, et j’aurais baissé les bras plutôt que de couper Joanne de sa famille, car s’ils me désapprouvent tous sans exception, c’est qu’ils ont raison. Je ne me serais accroché qu’à Daniel. Au bout d’un moment, le petit souhaite aussi faire partie du câlin. La jeune maman va le chercher, et une fois réinstallés sur mes genoux, avec ces petits kilos d’amour en plus, ils se blottissent contre moi pour me donner un peu de leur affection. « Ça se sont les meilleurs câlins du monde. » je murmure, puis dépose un baiser sur la joue de chacun. Je suppose que, à sa manière, Molly a aussi participé à l’effort commun visant à me faire comprendre que j’ai bien le droit de goûter à un peu de bonheur en préparant mon plat préféré. « Vous me faites sérieusement concurrence. » lui ai-je dit, car ses lasagnes sont vraiment délicieuses, et égalent facilement les miennes. Une ambiance légère revient peu à peu, quoi qu’étrange, mais les restes de nos paroles flotteront dans l’air de la maison encore cette nuit, et disparaitront demain matin. Alors la vie reprendra vraiment normalement. Daniel est couché tôt après cette journée de jeu, Molly se rend dans sa chambre peu après, et nous dans celle de Joanne. J’interromps le baiser, sentant bien l’intention de la jeune femme. Cela se lit dans sa manière de m’embrasser, de plus en plus langoureuse. Cela se devine toujours facilement quand l’un a envie de l’autre. Les yeux fermés, ayant peur d’affronter son regard, je baisse la tête, visiblement désolé. « Je ne pense pas pouvoir ce soir, je… » Au même moment, j’entends le bruit du tissu qui tombe par terre. J’ouvre les yeux pour tomber sur le corps quasiment nu de ma fiancée. Comme pris par surprise, je ne dis plus rien. Encore très troublé par ma discussion avec Molly, je pensais qu’il serait vraiment impossible pour moi de ressentir la moindre envie de quoi que ce soit, et qu’il serait d’ailleurs mieux que je reste encore dans cet état de calme plutôt que de recommencer à secouer mes émotions. Joanne balaye toutes ces pensées instantanément en me procurant une douce vague de chaleur par cette simple vue. Mon cœur s’accélère sensiblement. Elle est suspendue à mes lèvres, se demandant sûrement ce que j���attends pour finir de couper court à cet élan. Et moi je suis juste absorbé par ma courte contemplation de cette silhouette parfaite, un doigt la longeant du haut de son buste jusqu’au bas de son ventre. Finalement, j’attrape délicatement son visage et l’embrasse à mon tour. L’envie d’elle se faufile en moi, et très vite, le baiser se fait plus passionné alors que je fais reculer Joanne jusqu’au lit. Une fois allongée, mon corps se colle au sien, aimanté, et mes baisers glissent dans son cou, envoûté par ma belle.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Jamie plaisantait en disant qu'il aurait quand même épousé si Molly ne l'avait pas approuvé. La jeune femme espérait quelque part que ce soit le cas, qu'il l'aurait effectivement emmené avec lui pour échapper au courroux des parents de Joanne. Dit comme ça, c'était particulièrement romantique, mais la vérité aurait été bien différente. Elle s'en fichait. Après tout, ce scénario là n'était plus à envisager, étant donné que Molly se réjouissait beaucoup de ce mariage. Plus que trois petits mois. Après ce câlin en famille dont Daniel voulait absolument faire partie, il était l'heure de dîner. Le bel homme avait particulièrement adoré les lasagnes de Molly, qui étaient une véritable réussite. Une fois dans leur chambre, ils avaient un peu de temps pour eux, pour leur couple. Joanne avait envie de lui, elle avait envie de lui faire partager son amour. Son coeur se serra fort lorsqu'elle devinait le début d'une phrase qui annonçait que ce ne serait pas possible pour lui le soir-là. Mais il en ravala la fin lorsque sa fiancée se présenta devant ses yeux en sous-vêtement. Bien qu'il devait être épuisé mentalement par cette grosse journée, il semblait qu'une pointe d'envie se manifestait malgré tout lorsque sa belle se met à nu. Au bord de ses lèvres, elle attendait une quelconque réaction. Mais ses yeux verts regardaient avec délice sa silhouette, ses doigts effleuraient la peau de son torse. Il l'embrassa alors en prenant son visage entre ses deux mains, vaincu par l'amour qu'il portait pour elle. Non, il n'arrivait à rien lui refuser. Joanne devait juste faire resortir ses atouts pour qu'il se plie à sa volonté, mais ce n'était pas ainsi qu'elle pensait les choses ce soir-là. Pas de jeu, pas de volonté à être au-dessus de l'autre, à tirer satisfaction de cette supériorité transitoire. Non, juste les sentiments de deux âme-soeurs. Jamie finit par la faire reculer afin qu'elle s'allonge sur le lit. Il l'embrassait de plus en plus passionnant, les soupirs se mêlaient à leur respiration décadente. Logé entre ses jambes, Joanne pouvait le chérir. Elle lui caressait les cheveux ou faisait délicatement glisser ses mains sous son t-shirt pour effleurer sa peau. Elle finit par le lui retirer, le plus rapidement possible afin de pouvoir retrouver ses lèvres. Elle voulait tout lui transmettre, tous les sentiments qu'elle avait pour lui. Son dos se courba volontairement afin qu'il puisse retirer son soutien-gorge. Il n'y avait que de la tendresse, de la délicatesse dans leur geste. Joanne l'embrassait en collant son torse contre le sien. Les mots n'avaient pas leur place, tout se disait en un regard une caresse, ou par la simple chaleur de leur corps. Joanne retira d'elle-même le dernier sous-vêtement qui la couvrait encore et elle déboutonna le jean de son fiancé. Elle n'avait pas vraiment envie de longs préliminaires, ce soir-là. L'une de ses mains guidait sa virilité en elle, puis elle le serrait tout contre elle en enfermant sa taille autour de ses jambes. Joanne soupira longuement en fermant les yeux. C'était toujours un plaisir de le retrouver ainsi. Les mouvements de rein de Jamie étaient doux, délicats. La cadence était assez lente, ils pouvaient sentir le moindre des contacts, ils pouvaient se regarder ou s'embrasser. Elle caressait délicatement du bout de ses doigts la peau de son dos ou sa nuque. Elle lui souriait même parfois, avec plein de tendresse. Jamie ne se fatiguait pas trop avec ce rythme, il pouvait tenir longtemps, et attendre que l'orgasme ne se manifeste de lui-même. Joanne le serrait tout contre elle, elle l'embrassait aussi dans le cou. Joanne murmurait son nom lorsqu'elle sentait la vague de plaisir arriver tout doucement. Plongée dans son regard, au bord de ses lèvres, elle se laissait complètement happer, sa respiration se saccadait, se coupait par moment. Jusqu'à ce que son petit corps se crispe totalement et finisse par se relâcher grâce à un long soupir de plaisir, légèrement sonore.
Ce n'est pas raisonnable, me dis-je. Et puis je me rappelle que ces mots ne veulent rien dire. J'attrape les lèvres de Joanne, et je me fiche du reste. Comme quoi, elle fait vraiment ce qu'elle veut de moi. Elle demande, elle a. C'est un sortilège qui marche à tout moment. Je suis magnétisé à elle. Chaque seconde me donne envie de plus pour la seconde suivante. Les vêtements forment une couche déjà trop épaisse entre nous. Je la veux tout contre moi, sentir toute la douceur de sa peau qui glisse sur la mienne, échanger cette chaleur qui augmente petit à petit. Les baisers se font de plus en plus ardents, les langues se cherchent, se frôlent, les dents mordillent pour mieux dire sois à moi. L'envie s'impose avec fulgurance, plus question de réfléchir à quoi que ce soit. La jeune femme veut me donner tout son amour, et elle aura tout le mien en échange. Entre ses jambes, alors que nos bouches ne se quittent plus, on devine quelques mouvements de bassin des deux côtés qui trahissent le désir d'être au plus poche l'un de l'autre le plus vite possible. Rapidement, Joanne me déleste de mon t-shirt. L'instant suivant, je dégrafe son soutien-gorge et libère sa poitrine. Puis le contact de son torse collé au mien me fait soupirer. Les battements de nos coeurs se répondent à travers nos corps. Par automatisme, une de mes mains remonte le long de la silhouette de ma belle pour se poser sur son sein, écrasé contre moi. C'est comme sous hypnose que j'observe la jeune femme faire glisser son dessous le long de ses jambes et se mettre à nu. C'est avec le même regard vitreux que je la regarde déboutonner mon pantalon et le baisser afin que je le retire à mon tour. C'est aussi nu qu'elle que mon corps épouse celui de ma fiancée, après qu'elle nous ait uni sans attente supplémentaire, ayant uniquement besoin de ce moment où nous sommes au plus proche l'un de l'autre. Je la laisse me serrer tout contre elle autant qu'elle le veut, me faire prisonnier de ses jambes, de ses bras, de ses lèvres et de son regard bleu. Je la laisse tout prendre de moi, si c'est ce qu'elle souhaite. Dans notre besoin de tendresse, la passion n'interfère que dans nos regards et nos baisers. Du reste, chaque mouvement est lent, maîtrisé, appliqué. La douceur est le maître mot de chaque caresse, alors que les va-et-vient amples lient et délient nos corps d'une manière exquise. C'est tout de même un peu étrange, de faire l'amour ici. Daniel est dans la pièce juste à côté, Molly dans celle juste après, et les murs ne sont pas bien épais chez la vieille femme. Cette chambre est celle de Joanne depuis toujours. Elle a été une petite fille ici, puis une jeune fille, et une jeune femme. C'est une pièce remplie de souvenirs précieux. Par moments, alors que nous veillons à ne pas trop faire de bruit, à n'échanger que des soupirs et des regards, dans un sourire, je m'amuse de cette impression d'être un adolescent qui couche avec sa petite amie en toute discrétion afin que les parents n'entendent pas -alors qu'ils ne sont pas dupes. Il y a cette même tendresse d'ailleurs. La cadence change peu, du moins, elle accélère à peine et s'intensifie subtilement. C'est déjà assez pour que le plaisir grimpe peu à peu. Une montée lente qui nous permet de profiter de chacune des longues minutes qui s'écoulent. C'est quand mon nom traverse les lèvres de Joanne que je comprend qu'elle craquera bientôt. Et c'est peu après, à un moment où je me trouve au fond d'elle, qu'elle laisse le plaisir l'envahir et faire résonner un long soupir dans sa gorge. Elle est venue bien avant moi. Et d'ailleurs, je n'en suis toujours pas à ce stade. Mais je laisse à la jeune femme le temps de retrouver un peu ses esprits, l'embrassant parfois dans le cou, parfois sur le front. Je me retire d'elle, mais je réponds à son regard un peu inquiet que je n'ai pas également satisfaction que je ne compte pas en avoir fini si vite avec elle. Je me surélève et me permets juste de l'inciter à se retourner, allongée sur le ventre. Après quelques baisers sur son dos, entre ses omoplates, je loge mon visage au creux de son cou. Et je nous unis à nouveau, collé à elle ; ainsi, elle n'a rien besoin de faire, et elle ne peut rien faire, à part profiter de chaque sensation et de la houle toujours aussi tendre, de chaque caresse et de chaque mouvement qui n'existe que pour lui plaire, que pour son plaisir.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Ca ne dérangeait pas Joanne de faire l'amour dans une pièce qui l'avait vu grandir. Jamie en faisait également partie, il faisait partie des souvenirs qui y régnaient. Tous les deux nus, ils faisaient l'amour, avec beaucoup de tendresse. Ils ne se cherchaient pas, il n'y avait pas d'autre objectif que de s'aimer. La jeune femme eut ces vagues de chaleur bien rapidement malgré la houle lente et délicate. Les sensations étaient différentes. Elle oubliait le monde qui l'entourait, l'endroit où elle était. Parce que ce qui comptait le plus, c'est qu'elle était avec son fiancé, l'homme qu'elle aimait éperdument. Lorsque la jeune femme atteignit le point de non-retour, il s'arrêta de tout mouvement, ne se concentrant que sur les baisers qu'il posait dans son cou, ou sur son front. Chaque contact lui procura un frisson, agréable, saisissant. En revanche, elle avait senti que Jamie n'était pas parvenu à ce stade de bien-être. Alors, elle se demandait si elle ne lui donnait plus envie de coucher avec elle, ou s'il était trop fatigué et remué par cette journée qu'il n'y arrivait pas. Ou peut-être qu'il s'était éxecuté juste pour la satisfaire et répondre à sa demande. Mais ce n'était pas comme ça que ça marchait. Ce plaisir là, il se partageait. Elle le regarda avec inquiétude, mais les yeux de Jamie lui dirent qu'il n'en avait pas terminé, loin de là. En se redressant, il l'invita à se mettre sur le ventre. Un peu perplexe, elle se retourna, mettant ses mains au niveau de son visage. Les lèvres de Jamie parcourirent son dos, la chute de ses reins. Un léger contact qui provoquait une agréable chair de poule. Joanne souriait en sentant ses baisers. Il ne s'attardait pas tant que ça à embrasser son dos. Elle profitait donc de chaque fois qu'il le faisait. Il se maintenait en s'appuyant sur ses mains, mais s'assura d'être collé à elle, afin de pouvoir sentir sa chaleur. La tête logé au niveau de son cou, il s'introduit une nouvelle fois en elle, arrachant un long soupir à la jeune femme. Ses yeux étaient fermés, préférant se concentre sur les caresses entre leurs intimités, l'air chaud qu'expirait Jamie qui glissait le long de son échine, les baisers qu'il déposait au niveau de sa nuque. Il était toujours aussi tendre et lent dans ses mouvements de rein. Pendant de longues minutes, ils restaient ainsi, on ne les entendait que soupirer. Un moment, elle sentit qu'il accélérait légèrement, ne pouvant certainement plus maintenir cette cadence lente. Joanne parvint à se mobiliser légèrement, gardant leur corps unis l'un à l'autre. Transitoirement à quatre pattes, elle se redressa, ils se retrouvaient désormais à genoux, il était toujours elle. Avec un peu de contorsion, elle arrivait à tourner sa tête pour l'embrasser et lui avait tout le loisir de laisser ses mains parcourir le torse de sa belle. Parfois saisissant l'un de ses seins, parfois se glissant jusqu'à son intimité. Ses doigts traçaient les lignes de ses côtes et se déposaient parfois sur son ventre. Joanne se demandait, si, dans ces moments là durant leurs ébats, il espérait autant qu'elle. A chaque fois qu'il déposait un baiser à ce niveau là, ou sa main, elle se posait la question. A quoi pensait-il, à ce moment là ? Joanne déposa sa main baguée sur la sienne, alors qu'elle continuait de l'embrasser. Il pouvait avaler ainsi chacun de ses soupirs, chacun de ses gémissements que lui seul pouvait entendre. Parfois, elle pencha sa tête en arrière et l'appuyait contre l'épaule de Jamie. Elle commençait à avoir très chaud, elle était prise de vives bouffées de chaleur. Mais il continue, accentuant très progressivement sa houle. Elle espérait qu'elle serait un peu plus endurant cette fois-ci, elle ne voulait absolument pas écourter ce moments. Jamie la serrait tout contre lui, comme si elle avait peur qu'elle ne lui échappe, d'une manière ou d'une autre. Il soupirait de plaisir tout près de l'oreille de sa belle, sa respiration devenait de plus en plus rapide, et irrégulière. Savoir qu'elle contribuait à ce plaisir là était particulièrement délicieux pour la jeune femme. Elle levait parfois la main pour s'agripper au niveau de sa nuque, ou pour lui caresser les cheveux. Sa peau était tellement plus ardente que la sienne, elle adorait se coller à lui, se laisser enrober par cette chaleur vive si agréable et apaisante.
C'est si bon, si doux. Uniquement de l'amour, transitant d'un corps à l'autre. Une force tranquille, qui est d'habitude si violente, est cette fois d'une tendresse sans égale, transmise avec une dévotion infinie. Ce n'est qu'elle et moi. Dans ces moments-là, il n'y a aucun doute possible, aucune question à se poser. C'est une telle évidence. Nous deux, ensemble. Cela forme quelque chose de si beau. Les mouvements se poursuivent avec une synchronisation, une symbiose absolument parfaite. Elle lit mes pensées et je lis les siennes. Elle touche mon coeur du bout des doigts, et je peux frôler le sien, brillant et précieux comme un diamant brut. Elle me complète, elle me fait sentir plein, entier. Elle est tout ce dont j'ai besoin, et tout ce qui donne une raison à… tout. Il n'y a plus rien de logique, de cohérent, il n'y a plus de lois, de formules, de faits. Sa présence noie tout ce qui a du sens ; parce que cet amour là n'en a pas, et n'en a pas besoin. Il est au delà de la raison, destructeur, bâtisseur, gracieux et passionné. C'est une émotion indéfinissable qui m'envahit, quelque chose qui fait légèrement trembler mon corps, qui gorge mon coeur et sublime le plaisir. Tout ce que je sais, c'est que c'est une sensation des plus agréables, comme une goutte de bonheur qui se mêle à mon sang. Cette sensation là grandit jusqu'à m'envahir complètement. J'ai chaud, je manque d'air, je fatigue, mais ce ne sont que des détails qui s'effacent. Non, ce moment, quand Joanne bascule sa tête en arrière, sur mon épaule, et que sa main attrape mon cou ; quand j'admire son corps nu collé au mien, magnifiquement cambré par les vagues de plaisir, et que je serre de toutes mes forces ; quand je suis en elle, tout à elle, et qu'elle est toute à moi ; ce moment est parfait, et beau, autant esthétiquement que dans les messages transmis d'un être à l'autre. C'est pendant un de ces moments, alors qu'elle atteint le summum de la volupté, que je me laisse aller, que je m'abandonne complètement à elle. Au bord de ses lèvres, j'expire et gémis tout bas ce plaisir pourtant immense qui me traverse, et elle peut en avaler chaque sonorité. Mes lèvres se collent un court aux siennes, le temps que je me libère en elle en profitant de chaque seconde de cet instant particulier. Cette sensation incroyablement agréable et toujours sans nom se fraye un chemin de mon coeur à me paupières et se libère aussi par une larme qui s'échappe furtivement sur ma joue. Je ne la remarque même pas. Ma tête tombe, le front posé sur l'épaule de Joanne. Je reprends mon souffle et cesse de trembler. Machinalement, ma main s'est posée sur le ventre de la jeune femme et en caresse la peau du bout du pouce. Je me dis, sûrement bêtement, qu'en injectant à chaque fois à cet endroit de l'espoir et de l'amour avec quelques caresses, quelques baisers, le corps de ma fiancée sera bel et bien prêt un jour à nous donner un second petit être. Nous finissons par nous défaire l'un de l'autre, et nous allonger. Je replie une jambe et un bras, et passe ma main derrière mon crâne. L'autre cercle les épaules de ma belle, toute blottie contre moi. Je dépose un baiser sur son front. Tout est si tranquille. C'est encore le calme plat dans mon esprit. Tout est apaisé. Aucune bourrasque, aucune tempête. C'est un moment de flottement, où je ne songe qu'à la magnifique femme avec qui je dormirai cette nuit après avoir fait l'amour, et à l'adorable garçon qui dort paisiblement dans la chambre d'à côté. Je ne pourrais pas aller mieux. Je somnole ainsi un long moment, sans rien dire, car les mots sont toujours inutiles. Je m'endors finalement, et ne suis réveillé que le matin suivant que par l'odeur des toast.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Quelque chose avait changé, chez Jamie. Elle le reconnaissait toujours, bien sûr, mais il y avait un détail différent. Joanne ne savait pas si c'était du au fait qu'il avait pu s'ouvrir à quelqu'un, ou si c'était les paroles de Molly qui l'avaient touché au point de reconsidérer certaines choses. Mais il semblait serein, libéré. Il n'y avait pas en lui cette boule de nerfs, cette pression étouffante qui pouvait justement l'inciter à accélérer l'allure et avoir un tempérament un peu plus bestial. Non là, il n'avait rien besoin d'évacuer. Il voulait tout simplement donner tout l'amour qu'il avait pour elle, de la manière la plus belle et la plus tendre qui soit. Il était évident que le résultat était beau, autant pour leurs âmes que pour leur corps. Il l'embarqua alors dans cette phase de volupté qu'il atteignit également, laissant Joanne s'imprégner de chacun de ses gémissements, chacun de ses soupirs alors qu'il se libérait en elle. Epuisé par l'effort, il appuya sa tête contre l'épaule de sa belle le temps de reprendre un peu d'air. Elle continuait de lui caresser les cheveux pendant ce temps là, alors que la main de Jamie chérissait la peau de son ventre. Ils le voulaient tout les deux, cet enfant. Remis de leurs émotions, ils finirent par s'allonger. Comme d'habitude, Joanne se blottit contre lui. Le bras de Jamie encerclait ses épaules et il caressait du pouce sa peau. Ce geste répétitif berçait Joanne, et elle sombra assez rapidement. Vers six heures du matin, elle entendit Daniel chouiner. Jamie dormait toujours bien profondément. En toute discrétion, elle s'extirpa du lit et se vêtit de sa nuisette et de son kimono avant d'aller le voir. Il commençait à avoir un gros chagrin. "Qu'est-ce qu'il se passe, mon trésor ?" lui demanda-t-elle tout bas, en le laissant dans sa turbulette. Il hoquetait longuement, bien blotti contre sa mère. "Tu as fait un mauvais rêve ? C'est ça qui t'a réveillée, mh ?" Elle le berçait doucement, en déposant de temps en temps un baiser sur sa petite tête. Dès qu'elle tentait de le détacher pour le réallonger, il recommençait à sangloter. "Je ne t'abandonne pas, Daniel, je suis là. Maman est là." Joanne continuait de le bercer, et finit par comprendre que la nuit était bien terminé pour lui. Il devait avoir faim. Elle se dit qu'une sieste serait de rigueur durant la matinée. Elle finit par descendre au rez-de-chaussée, afin de ne pas risquer de réveiller Jamie si Daniel venait à sangloter à nouveau. Même Molly n'était pas debout. Joanne préparait son biberon, et s'installa sur le canapé et lui nourrit. Quand c'était elle qui lui donnait le biberon, il avait de temps en temps encore le réflexe de chercher le sein. Ca devenait de plus en plus rare. La vieille dame descendit quelques minutes plus tard, surprise de voir sa petite-fille déjà debout. "Il s'est mal réveillé ce matin, il ne voulait pas se décoller de moi. Peut-être qu'il a fait un mauvais rêve." expliqua-t-elle à Molly, qui regardait d'un air attendri le petit. Daniel somnolait, il était repu. Joanne le maintenait en position allongé. Au bout d'une demi-heure, il s'assoupit. Jamie descendit à ce moment là, à peine réveillé. "Bonjour, mon amour." dit-elle tout bas en lui souriant avec tendresse. "Je ne l'ai pas emmené avec nous au lit ce matin, quelque chose n'allait pas." lui expliqua-t-elle. "Je ne voulais pas qu'il te réveille, tu dormais si paisiblement." Et il avait besoin de sa nuit complète après la journée qu'il avait eu la veille. Molly terminait de garnir la table du petit déjeuner. "Installez-vous, j'arrive. Je vais essayez d'aller le recoucher." Joanne se leva délicatement, faisant bien attention à ne pas trop le brusquer, afin qu'il ne se réveille pas. Elle parvint à l'allonger sans encombre dans son petit lit. "Alors, quoi de prévu pour aujourd'hui ?" demanda Molly alors qu'elle servait le thé à Jamie. "J'ai pensé que tu pourrais aller en ville avec Daniel aujourd'hui, comme nous en avions parlé, la dernière fois." suggéra Joanne alors qu'elle s'installait à table. "Il faut qu'ils trouvent leur tenue pour le mariage." expliqua-t-elle ensuite à Molly, qui ne semblait pas comprendre pourquoi les deux hommes devraient se rendre à Perth. "Et que vas-tu faire, pendant ce temps ?" Joanne haussa les épaules. "Aucune idée ne lui était véritablement venu en tête depuis. "Je ne sais pas, je verrai bien à ce moment là." Les jours passaient bien vite et elle craignait qu'ils ne trouvent pas le temps de placer ce petit programme -la seule chose qu'ils avaient véritablement planifié pour leur semaine du côté de Perth.
La place à côté de moi dans le lit est vide. Je plisse mes yeux fatigués ; où est-ce que Joanne s���est encore cachée ? Je grogne, mécontent ; ce n’est jamais très plaisant de se réveiller seul un matin où nous pourrions traîner au lit tous les deux. Je me force à me tirer du lit, puisant la motivation nécessaire dans l’odeur des toasts. Je m’habille un peu à l’aveugle. En passant dans la chambre de Daniel, je constate que le petit n’y est pas. Mais sur le moment, mon cerveau engourdi ne fait pas le lien. Ce n’est qu’une fois en bas, essayant de définitivement me réveiller en passant une main sur mon visage et ma nuque, que je vois Joanne avec notre fils dans les bras venant visiblement de terminer un biberon que je comprends qu’il a écourté son sommeil avant l’heure. J’acquiesce d’un signe de tête pour dire que j’ai compris. Je crois que je ne vais servir à rien tant que je n’ai pas eu un thé chaud. Avant que la jeune femme n’aille recoucher Daniel, je les embrasse sur le front, puis je m’installe à table. « A cet âge-là, tous les bébés ont des petites angoisses comme ça, ce n’est rien. » m’assure Molly qui me sert une grande tasse à la hauteur de ma difficulté à émerger, le sourire amusé par mes petits yeux au réveil. « C’est quand on croit pouvoir refaire des nuits complètes qu’on repart pour un tour, hein ? » dis-je avec un petit rire. Je lis beaucoup pour essayer d’y comprendre quelque chose en matière de bébé, moi qui ne m’étais jamais penché sur la question avant l’année dernière. Mois après mois, j’essaye de voir ce qu’il m’attend. Je sais que Daniel va encore plus jouer au koala avec sa mère. « C’est un peu ça. » Molly s’assoit à son tour. « Retournez dormir un peu si vous voulez vous reposer. » Je le pourrais, je me rendors fort facilement. Mais l’heure est raisonnable pour être debout, ce n’est pas la peine. « Ca ira, l’odeur m’a bien trop ouvert l’appétit. » Je me sers en pain frais, croustillant à souhait, et applique du beurre salé qui fond immédiatement. Avec le thé, c’est délicieux –mais pas pour tous, je le conçois. Joanne revient et nous rejoins pour le petit-déjeuner, suggérant au passage que nous profitions de la journée pour aller nous trouver des costumes pour le mariage, Daniel et moi. Tâche qui sera loin d’être aisée et nous demandera facilement l’après-midi entier. « Bien vu, nous pourrions faire ça quand il sera réveillé, après le déjeuner. » Et Joanne, elle, fera ce que bon lui semble, même si cela consiste à ne rien faire. C’est toujours important d’avoir du temps pour soi, juste avec soi-même. Molly passe le petit-déjeuner à me conseiller de bonnes adresses pour trouver un costume, ou juste des endroits à voir à Perth avec le petit et où, éventuellement, prendre le goûter. C’est assez exceptionnel pour moi d’être complètement seul avec mon fils tout un après-midi, et j’ai plutôt hâte. J’aide Joanne à débarrasser la table, et pour une fois, nous ne laissons pas Molly faire quoi que ce soit. Je profite que nous soyons un instant seuls dans la cuisine pour me glisser derrière ma fiancée ; mes bras autour de sa taille, je l’embrasse dans le cou tendrement. « J’ai oublié de te dire à quel point tu as été parfaite hier soir. » je lui murmure tout bas. Je n’étais pas bavard, sur le moment, et bien fatigué. Je tiens quand même à le lui dire, histoire de la faire un peu rougir au passage. « Je compte courir un peu le temps que Daniel dorme, je suppose qu’il n’y a personne pour m’accompagner ? » je demande une fois de retour dans le salon. « Molly peut-être ? » j’ajoute pour plaisanter. Mais je me doute qu’à son âge, la course à pied est une activité révolue. Je fais donc un aller-retour rapide dans la chambre pour me changer. « A tout de suite. » Je vole un baiser à ma fiancée et quitte la maison de la vieille femme, puis prend la direction de la plage. Je n’ai jamais vraiment aimé courir, et je ne pense pas que ce jogging durera bien longtemps, mais n’ayant pas vraiment eu l’occasion de me dépenser depuis des jours je pense que cela ne me fera pas de mal. Le seul cadre m’ayant toujours plu pour courir, c’est la plage. C’est une sensation particulièrement agréable de remplir ses poumons d’air iodé. Le sable rend l’effort un peu plus difficile. Je n’écoute pas de musique, cela me semble idiot de vouloir couvrir le bruit des vagues. Au contraire, il m’aide à me vider l’esprit. Je cours une demi-heure, prend une pause, et reprend le rythme sur le chemin du retour. Ce qui mérite un grand litre d’eau, et une douche tiède.
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A table, Joanne prenait son petit-déjeuner avec appétit. Elle adorait les confitures faites par sa grand-mère, elle se dit qu'elle faudra qu'elle pense à lui demander si elle pouvait ramener certains pots pour la maison. La vieille dame faisait parfois de savants mélanges de fruits et d'épices, rendant la confiture particulièrement succulente. D'autant plus qu'elles étaient toujours faites avec amour. Le courant semblait tout aussi bien passé entre Molly et Jamie, pour ne pas dire encore plus que les premières heures. La grand-mère indiquait de nombreuses adresses au bel homme, précisant ce qu'il y avait à voir aux alentours, et où il pourrait se rendre avec Daniel. Ca va lui faire bizarre, de passer autant de temps avec son fils, c'était certainement la première fois. Il devrait certainement s'en réjouir, quelque part, d'être seul avec lui. Dieu sait de quoi ils pourraient parler ensemble. Le repas fini, tout le monde se hâtait à débarrasser la table. Molly râlait toujours un peu lorsqu'ils aidaient ainsi, même si ce n'était que pour ramener un couvert ou une assiette. Durant un bref moments seuls, Jamie se plaça derrière sa belle en déposant ses mains la soie qui la recouvrait - elle n'avait pas encore pris le temps de s'habiller. La bouche près de son oreille, il lui susurra quelques mots qui firent immédiatement rougir la petite blonde, qui dissimula ensuite son visage entre ses mains en lâchant un rire nerveux. "N'importe quoi. Si je suis un tant soit peu parfaite, ce n'est que grâce à toi." finit-elle par lui répondre, les joues toujours un peu roses. Jamie comptait ensuite se défouler un peu en allant courir. Il ne pouvait pas demander ça à Joanne, elle était très loin d'être une grande sportive et il ne ferait que la ralentir. Molly et ses vieux os l'empêchaient de bouger comme elle le voudrait. Ca allait certainement tout autant lui convenir, de courir un peu seul. Molly riait tout de même à sa proposition. "A moins que vous ne voulez me porter..." répondit-elle joyeusement. Il se changea et vola un baiser à sa fiancée avant de partir. Celle-ci profita de la sieste de Daniel pour prendre le temps de se doucher et de se pomponner un peu. Elle se vêtit de l'une de ses robes, toujours avec son gilet en laine sur les épaules. "Je viens de finir ce livre là. C'est un policier, je suis certaine que tu vas aimer." dit Molly en lui tendant un bouquin une fois qu'elle était descendue au rez-de-chaussée. La vieille dame savait que la petite blonde aimait beaucoup lire. Elle supposait que c'était surtout le calme qu'elle aimait, et le fait que tous ces mots ne laissent pas de place à toutes ses idées qui peuvent la travailler. Joanne l'accepta volontiers et la remercia, puis alla s'installer sur le canapé pour en lire les premières pages. Une vingtaine de minutes plus tard, Daniel se réveillait. "Ca y est, tu as terminé ta nuit ?" lui demanda-t-elle doucement en allant dans sa chambre. Elle le débarrassa de sa turbulette et le prit dans ses bras pour l'embrasser et le câliner. "On va prendre un bain, tu sors avec Papa cet après-midi. Toute une après-midi rien qu'avec lui, tu te rends compte ?" lui raconta-t-elle en préparant tout ce dont elle avait besoin pour le laver et l'habiller. Joanne prit un peu plus de temps que d'habitude pour lui faire prendre le bain. Le bébé aimait beaucoup l'eau, il agitait constamment ses petits pieds pour faire des éclaboussures, ce qui le faisait rire à chaque fois. Une fois propre comme un sou neuf, et bien vêtu, Daniel avait envie de faire un câlin. Il déposa longuement la tête sur l'épaule de sa mère, silencieux, profitant simplement de ses baisers et de ses mots doux. "Tu sais que je t'aime fort Daniel, hein ?" lui dit-elle tout bas. "Maman et Papa t'aiment tous les deux très très fort." Quand elle descendit les escaliers avec lui, Jamie venait tout juste de rentrer. "Ca t'a fait du bien ?" lui demanda-t-elle en lui volant un baiser. Daniel fit un large sourire lorsqu'il vit son père. "Tu vois, lui aussi il faut qu'il aille se laver. Il va aussi se faire tout beau comme toi pour cet après-midi." expliqua-t-elle à Daniel. "Papa va te montrer comment on fait du shopping. Il va te trouver un beau costume pour le mariage." Elle lançait un regard complice. "Je vais jouer un peu avec lui au jardin, tu nous rejoins après ?"
Sorti de son petit bout de sommeil complémentaire, Daniel semble maintenant en pleine forme et prêt �� attaquer la journée. Il sent bon le bébé propre, c’est toujours un petit plaisir de le sentir lorsque je l’embrasse sur le haut du crâne. « Salut toi ! » Il me fait un grand sourire, ses minuscules trois dents dehors –mais reste quand même bien accroché à sa maman. Il ne risque pas de comprendre grand-chose à ce qu’il se passera pendant l’après-midi. Peut-être que changer de vêtements l’amusera. Chatouilleux, il gigote toujours un peu quand on lui enfile des habits. Et il est toujours aussi incapable de garder des chaussettes aux pieds plus d’une heure. J’embrasse rapidement Joanne, je dois sûrement avoir les lèvres un peu salées et pas sûr que cela soit très agréable en dehors d’un certain contexte. « J’arrive tout de suite. » dis-je avant de filer à l’étage pour prendre une douche. Cela ne prend que quelques minutes. J’en profite quand même pour rafraîchir mon rasage, histoire d’avoir l’air un peu plus propre sur moi –ce qui peut être utile lors des essayages afin d’avoir une meilleure idée du rendu d’une tenue. Quand j’arrive dans le jardin, Daniel est installé sur sa couverture, dans l’herbe, et fait toujours marcher ses abdos en levant les bras et les pieds comme un parachutiste. Parfois, il se dresse sur ses bras, et lorsqu’il est fatigué d’être sur le ventre, il reproduit son petit exploit de l’autre jour en trouvant le moyen de s’asseoir tout seul. Quand il veut un jouet, il se donne les moyens de l’attraper, se penche en avant et étirer ses doigts potelés. Il couine de temps en temps de contrariété s’il n’y arrive pas tout de suite, nous demande de l’assistance du regard –qu’il n’obtiendra pas, même si Joanne est toujours tentée de lui donner un coup de pouce- et recommence. Entre les parties de cache-cache avec son doudou et quelques dizaines de jeu du coucou, Daniel est largement occupé tout le reste de la matinée jusqu’au déjeuner. C’est encore de la purée d’haricots verts. Il en a déjà l’air lassé, curieux de goûter d’autres choses, mais c’est ainsi et pas autrement. Monsieur a droit à tout un tas de bisous de la part de sa mère avant que nous quittions la maison. Et moi, un seul baiser amoureux. Molly nous prête sa voiture pour l’après-midi. « J’en prendrai soin, merci. » dis-je en attrapant les clés. Loin de l’Audi ou de l’Aston Martin, les quatre roues de la petite auto feront l’affaire à partir du moment où elles roulent et que le coffre est assez grand pour la poussette. « C’est parti, bonhomme, juste toi et moi ! » Le petit est rapidement bercé par le mouvement de la voiture. Il somnole lorsque je le place dans la poussette. Le temps de sa petite sieste digestive, tant qu’il faut bien chaud, je me concentre sur ma propre chasse au costume. Dans chaque boutique que je visite, malgré mes petites instructions sur ce qu’il me plairait de porter à mon mariage –mais précisant être ouvert à toutes les suggestions- le véritable mot d’ordre est « tout sauf du noir ». C’est un mariage, pas un enterrement, pas une soirée officielle, et de toute manière, je n’affectionne pas vraiment les costumes noirs classiques s’ils n’ont aucune particularité à présenter. Ce n’est pas la peine de m’en mettre sous le nez. Forcément, je me tourne vers des boutiques proposant du sur-mesure, il ne peut pas en être autrement. Je ne pensais pas qu’il puisse être possible d’être encore plus pointilleux et capricieux en matière de costume que je ne peux l’être habituellement, et pourtant pour celui-ci, je constate bien que je frôle le cauchemardesque malgré un meilleur tempérament que d’usage. Disons, en résumé, que je ne suis jamais pleinement satisfait, si bien que je finis par abandonner. J’appliquerai mon plan B. Pour Daniel, qui a eu le temps de bien se réveiller et assister à quelques essayages de son papa, c’est tout aussi compliqué. Les costumes pour petits ne courent pas les rues, encore moins de qualité, et il ne faut pas oublier qu’il aura encore largement le temps de grandir d’ici le mariage. La sortie entre père et fils fait toujours son effet auprès des vendeuses qui craquent soit pour l’un, soit pour l’autre, voire pour les deux. D’ailleurs, je surprends Daniel à faire les yeux doux à plus d’une. « Si c’est ta mère qui t’as appris à papillonner des yeux pour avoir des ristournes, je te préviens que tu ferais mieux d’arrêter ça tout de suite mon garçon. » Joanne et ses réductions. Non, même pour un costume qu’il ne portera qu’une fois, je ne me préoccupe pas vraiment des étiquettes. Beaucoup de choses lui vont, il faut dire qu’il n’a besoin de rien pour être adorable. Mais je le trouve particulièrement mignon et élégant dans un ensemble Burberry. Auquel s’ajoutent trois autres ensembles Ralph Lauren dont, non, il ne pouvait définitivement pas se passer. Nous avons terminé nos achats avant le goûter, mais pour prolonger un peu l’après-midi, je prends quand même un jus d’orange pressé au Starbucks du coin à siroter dans un parc. L’activité principale consiste à faire tenir Daniel sur ses jambes, et le laisser sautiller de joie, gigoter, et rire. Le grand drame de l’après-midi arrive plus tard, quand la fatigue se fait ressentir, que sa tétine tombe par terre et que je refuse de la lui rendre ainsi salie. Il se console avec un long câlin. Néanmoins, l’incident marque la fin de la sortie. Nous prenons le chemin du retour et rentrons chez Molly –pile à l’heure pour l’apéritif. Portant Daniel dont tous les membres sont aussi mou que de la guimauve, je fais signe aux dames de ne pas faire de bruit le temps que j’aille le coucher. « Shh… Il s’est endormi dans la voiture, il est épuisé. Ca a été riche en émotions. » Je vole un baiser à Joanne et monte déposer le petit dans son lit. Les verres et les boissons sont déjà prêts sur la table du jardin, il n’y a plus qu’à se servir. Je me prends un peu du vin dont nous avions ouvert la bouteille lors du dîner de la veille et qui m’avait bien plu. « Je vous ai pris quelques photos des essayages de Daniel. » dis-je en tendant mon téléphone à la maman et son ainée. « Ton après-midi s’est bien passé ? » je demande ensuite, curieux de savoir si Joanne s’est finalement trouvé un programme.