Finalement tout est bien qui fini bien. Maintenant que nous sommes à nouveau au complet, je me sens bien plus serein et tout le monde parvient à souffler à nouveau. La blague de Kelly qui m'offre un « snack bio » déride tout le monde -moi y comprit- avant que nous ne continuons notre vogué sur les tumultes de la rivière. Nous arrivons enfin à nous coordonné et la symbiose aurait put être parfaite ...si un passage clandestin n'avait pas décidé de ce joindre à nous.

Et c'est à nouveau la panique. Kelly pousse un hurlement suraiguë, le cri de Ivy est emplie de terreur et Loan ? Loan il dit à Ivy de le pousser ?! Mais quel con. Non mais QUEL CON ! Le pauvre animal est totalement paniqué, il sait pas ce qui lui arrive !  « Stop ! Personne ne quique ce soit !» ordonnais-je alors que Ivy tente de passer derrière moi, me poussant contre Loan. Dans un soupire je me décale pour lui laisser la place et me redresse pour m'approcher du poisson.  « Un Yellow Belly en plus. Ils sont fascinant» et je pourrais sincèrement me lancer dans un discours concernant cette espèce, mais je me doute que ça n'intéresse personne et puis vu la panique et la cohue général, vaut mieux que je lui redonne sa liberté très rapidement pour pas qu'il ne se prenne un coup de pied.

 «Allez vient là » dis-je à l'attention du poisson  « faut pas faire ce genre de chose, tu sais» j'attend quelques instants puis d'un geste vif je referme mes mains autour de l'animal et me redresse pour le mettre rapidement mais délicatement dans l'eau  «eh voilà, y a pas lieu de paniquer, vraiment » j'hausse les épaules puis retourne vers Ivy  «Tu restes à ma place du coup ? Non mais parce que si c'est le cas faut que tu pagaie et que tu guide le raft aussi hein... »

« MARTIIIIIIIIN » Elle hurle si fort Ivy qu’elle nous crève les tympans à tous. J’en sursaute si fort que je manque de glisser vers l’extérieur du bateau. En attendant, Momo semble frétiller comme jamais sur les jambes de la jeune femme. Je sais qu’il est paniqué et c’est bien pour ça que je propose de le pousser vers l’eau. Pas le frapper, pas le tuer, juste le remettre dans son élément, mais vu le regard de Martin, j’ai encore fait une connerie. Ivy elle, continue à hurler comme jamais avant de se précipiter derrière Martin et donc tout juste à côté de moi. Je dois dire que je suis pas vraiment fan de la poiscaille non plus et mes doigts s’enroulent autour du poignet, non abîmé, d’Ivy pour l’attirer vers moi. Au moins, on est sûr que la bête ne pourra pas nous toucher. Ouais reste loin de nous petit poisson. Merci bien.

Mais voilà que Martin prend la situation en main et il lui parle au poisson. Comme si c’était son pote. Je le retrouve bien mon meilleur ami. Soudainement, il devient plus délicat que jamais, il fait bien attention à la petite bête et le remet lentement dans l’eau. Comme si de rien était. Comme si on faisait cela tous les jours après tout. Je ris un peu et lui sourit. « Notre sauveur Martin. » Autant pour nous, que pour le pauvre Momo qui maintenant va pouvoir aller raconter à ses copains qu’une blonde ça fout vraiment la trouille. Je me demande s’il va s’en souvenir le pauvre.

On renégocie un peu les places et je regarde ce qu’il nous reste à franchir. Autrement dit, pratiquement rien. « TERRE EN VUE ! » que je hurle de ma meilleure imitation de pirate. Voilà le rivage et l’équipe de la production qui nous attends. On est premier bordel de merde !

Le poisson fait des siennes, il reste de longues minutes sur mes genoux. Comme s’il adorait cette place, moi je déteste ça. Il est encore plus froid que l’eau. J’étais pas assez gelée comme ça ? Pourquoi tous les éléments sont contre moi aujourd’hui ? C’est épuisant, j’ai l’impression qu’on est sur cette rivière depuis des jours alors que ça ne fait que quelques heures peut-être. Ca passe trop lentement, et j’ai l’impression de ne pas voir la fin des rapide, ne de la forêt. On est loin de la population, de la ville et de la vie en général. Je n’ai jamais été une grande fan de la nature, même si cette aventure m’a aidé à l’apprécier un peu plus. Ou alors c’est Martin qui a eu cet effet ? Je n’en ai aucune idée.

J’emmêle mes cordes à celles de Martin et je m’en fiche. Je veux juste me protéger de cette horreur qui saute encore partout. “Ouais bien sûr.” Fascinant Martin, mais il sera bien plus fascinant dans la rivière. Je me sens bien mieux à être derrière lui alors qu’il parle au poisson. “Arrête de taper la discute et dégage ça de là !” Impatiente ou terrifiée ? Certainement les deux en même temps. S’il veut discuter avec les poissons il n’a qu’à sauter du bateau pour les rejoindre. Je fronce les sourcils, c’était bien de paniquer. “J’ai plus de pagaie.” Je souffle, je ne veux pas avoir trop de responsabilités. “On est emmêlé.” Je bouge les cordes, j’ai l’impression de ne rien arranger et je grogne encore un peu plus.

Le poisson est parti, et je veux retourner à ma place alors que le bateau continue d’avancer. J’ai envie qu’on arrive, je déteste le rafting. Je n’en ferai plus jamais. Terre en vue, mon regard se tourne vers l’endroit que nous devons atteindre. “Finalement pas besoin de changer de place.” Et un sourire en coin, heureuse d’enfin voir le bout du tunnel.

J'ai sauvé un poisson de la suffocation et Ivy d'une mort certaine, nous nous sommes emmêler avec nos cordes, avons finalement retrouver nos places respectives -non sans quelques éclats de rire- Et enfin, ENFIN, on voit le rivage et donc la fin de l'épreuve de rafting. Mais la suite fun, elle, va commencer là, maintenant. Porté par les derniers courants qui nous éloignent des rapides, nous pagayons un peu pour nous diriger vers le bord. Là, nous accostons avec l'aide d'un des hommes qui maintient notre raft le temps que nous en descendons. Je pense que chacun d'entre nous est heureux et soulagé d'avoir à nouveau la terre ferme sous ses pieds alors que nous marchons sur le ponton pour rejoindre la suite de notre aventure. Mais avant de commencer, nous abandonnons nos casques et les pagaient qui nous restent.

Et c'est là que je me retourne vers Loan. Je lui fais face, l'observe quelques instants, puis envoie mon poing dans sa figure. Mes phalanges viennent s'écraser sur son nez et j'espère un instant que je ne l'ai pas casser car j'avoue ne pas avoir totalement retenue ma force.  « ça, c'est pour avoir dit à Ivy ce qui aurait été à moi de lui dire» expliquais-je avant de m'avancer et le prendre dans mes bras en une délicate étreinte emplie d'amour fraternel  «Et ça c'est pour m'avoir prouvé à nouveau que nous formons une équipe de vainqueur » soufflais-je à son oreille. Je me recule ensuite et le relâche avant de me tourner vers l'équipe de prod qui nous fixe d'un air ahuris  « Mettez un peu de glace sur son nez, ça évitera les hématomes sur sa face d'ange» indiquais-je simplement avant de me diriger vers Ivy  « Faut qu'on parle» et je ne lui laisse pas réellement le choix en vrai. J'espère juste qu'elle me suit alors que je m'éloigne un peu du groupe.

Il reprend le rythme bien vite, Loan et Kelly qui semblent tout autant déterminés que lui à avancer. C'est que le rafting leur aura pris un temps qui semble jouer entre quelques secondes à peine et plusieurs heures tant il a perdu le fil et son décompte avec, le canadien. Quand la terre approche et que tout le monde s'en réjouit, c'est un immense soupir qui glisse d'entre ses lèvres. Il est pas blasé Jack, et avec étonnement il réalise qu'il n'est même plus du tout fatigué. Il aurait fort probablement continué à naviguer aussi longtemps qu'il aurait pu et dû. N'empêche que de savoir qu'ils poseront bientôt pied a le don de lui requinquer la vigueur qu'il se redécouvre dans les bras, ramant au mieux qu'il peut jusqu'à ce qu'il entende le doux son du caoutchouc grinçant sur la terre sèche.

Le sable gratte sous ses orteils - parce que ouais, bien sûr qu'il a retiré ses Converse détrempées pour profiter d'un peu d'air pour se sécher les extrémités. « Faut qu'on parle » quelques petits mots à peine et Jack est déjà dédouané de toutes responsabilités tant il ne veut pas être proche ou loin de ce qui suivra. Lui, il les craint ces mots-là, même quand il ne lui sont pas adressés, et c'est comme une piqûre de rappel qu'il se concentre désormais sur sa seule et unique priorité à savoir de trouver de quoi allumer un feu.

Ses yeux balaient la terre ferme, personne d'autre qu'eux ne semble être arrivé et c'est tant mieux, il ne se serait jamais pardonné d'avoir causé d'une façon ou d'une autre un retard à l'équipe de Loan et Kelly. Équipe qui plus la journée avance plus il se trouve fier et comblé d'avoir rejoint pour la grande finale. Ils méritent de gagner et ils le méritent bien plus que lui-même, pense-t-il, se penchant maintenant à hauteur de sol pour ramasser branches sèches et feuilles mortes. Son briquet est probablement noyé dans sa poche, il anticipe donc les ratés en trouvant deux pierres à feu qui seront parfaites pour générer quelques étincelles et autres flammèches.

On a bougé, on s’est démêlé non sans rire de nombreuses fois. J’ai râlé aussi, mais ça qui ça étonne ? Personne bien évidemment. Je ne rame plus, déjà j’ai perdu toutes mes pagaies et en plus de ça on est sur les dernières rapides. Ca ne dure pas longtemps, et on se rapproche du bord et de la terre ferme. Enfin. Je souffle et enlève ce casque affreux et ce gilet. Je n’ai absolument pas envie de porter un truc pareil une nouvelle fois dans ma vie. Je secoue la tête et tente de sécher mes cheveux. Je suis trempée jusqu’aux os, et je n’ai même pas prévu de quoi me changer. Ca aussi ça m’énerve et je lève les yeux au ciel. Il y aura bien quelqu’un pour ramasser tout ce que j’ai foutu au sol. Je me cale au soleil, j’ai dû perdre au moins 10 degrés de température corporelle.

Je n’ai pas le temps de me poser plus de 5 minutes que Martin parle. Il frappe Loan, mais quoi ? Pourquoi son poing fini sur le visage du brun avant qu’il ne le prenne dans ses bras. Mais il est vraiment trop bizarre ce type. Je me demande bien comment on arrive à se supporter tous les deux depuis aussi longtemps. Ca me parait assez étonnant. Il donne des ordres au docteur, comme s’ils en avaient besoin. Ou alors c’est à Jack et Kelly qu’il parlait ? Ca m’étonne qu’ils ne soient pas déjà en train de s’embrasser ou jouer du ukulélé derrière un buisson. Je ne me concentre pas sur ça, je n’ai pas la force de faire un scandale là. Et Martin passe devant moi, il veut parler et je grogne mais je le suis. On est un peu plus loin du groupe. “Tu veux parler de quoi en premier ?” Parce qu’il en a des choses à se reprocher. “Les blagues pourries ? Ou ton fils peut-être ?”

J'avais besoin de faire comprendre à Loan qu'il est allé trop loin. Nous parlerons plus tard, mais pour l'instant j'ai décidé d'agir avant de réfléchir car de toute manière mon attention, elle, est portée sur Ivy. C'est avec elle que je dois avoir une discussion maintenant car je sais que la situation ne peut plus durer. Et si ça continue tout sera définitivement gâcher, ce que je ne souhaite absolument pas.

Alors je me détourne de mon meilleur ami qui est bien trop abasourdi et sonner par mon coup de poing et je me dirige vers Ivy. Celle-ci me suit sans broncher et nous nous éloignons du groupe. Une fois a une distance raisonnable je me tourne vers ma coéquipière et ouvre la bouche pour parler mais elle est trop rapide et me coupe la parole en me demandant de quoi je veux parler. Je grimace à ses deux propositions et baisse le regard.

 « Alors la blague ouais, j'ai aucune excuse. C'était pas cool de ma part et je suis vraiment désolé» dis-je avec sincérité.  «Mais mon fils, je ... » je prend une profonde inspiration et soupire doucement  «J'sais pas par où commencer » avouais-je en relevant mon regard sur la jeune femme  «Je n'ai jamais voulu d'enfants, c'était clair et net depuis mes 18 ans  » je pince les lèvres  «j'ai quitté Brisbane en septembre 2017 et je me suis marié avec Eirean, une irlandase en février 2018. C'était l'ydille parfaite. Mais elle, elle voulait absolument des enfants. Du coup en Avril 2019 nous avons divorcé. Je lui ai permis ainsi de refaire sa vie tranquillement avec un autre homme qui lui souhaite des enfants. Sauf que ... » je secoue la tête  «En avril dernier elle débarque à Brisbane avec son gamin de 4 ans et me le présente comme étant MON fils. Et ça se tient. J'ai quitté l'irlande en Avril l'année dernière et notre dernier rapport sexuel c'était genre la veille de mon départ. » je soupire et hausse les épaules  « Puis il y a eu mon hospitalisation, la sclérose qui s'est greffé là-dessus et ...bref, j'étais sur le point d'accepter la paternité mais là avec ROA je me rends compte que je tiens beaucoup trop à ma liberté et ...bref, j'ai absolument aucune idée de ce que je dois faire...» et ça c'est le pire.

J’aurais pu rester au soleil, ne pas le suivre dans ce coin isolé. J’aurais pu faire comme d’habitude et ne pas suivre ses ordres, il était un peu trop catégorique à mon goût. Mais je ne me suis pas concentrée sur autre chose que lui qui partait. Je n’ai pas vraiment envie d’être au milieu de Jack et Kelly qui vont roucouler autour des fleurs et des algues. Je lève les yeux à cette pensée avant d’aller plus loin. On marche un peu (trop à mon goût) et on est complètement isolé. Je ne vois même plus le reste du groupe. C’est donc seulement lui, moi, et ses explications. Je me demande s’il va être sincère. En même temps, je ne peux pas lui reprocher de ne pas m’avoir parlé de de sa vie privée, cette histoire d’enfant m’aurait fait fuir sur le champs. C’est peut-être ce que c’est en train de faire là d’ailleurs. Je n’aime pas les enfants, et je ne pense pas que ça changera avec les années.

“T’as pas de meilleure excuse que je suis désolée ?” Cette blague était vraiment nulle, et il n’imagine même pas à quel point cette tenue était cher avant de finir trempée. Mais il parle de son fils. Et je n’ai pas envie de le plaindre, ni de lui trouver des excuses. Il a fait une connerie, et je vois qu’apparemment il assume tout maintenant. “Ca nous fait encore un point commun.” Sauf que moi, je n’ai pas d’enfant. Lui il en a un. Je ne lâche pas ses yeux quand il capte mon regard. Il me raconte toute l’histoire et je ne peux rien faire d’autre que hocher la tête. “Je vais pas te plaindre, et j’ai pas de conseil à te donner.” Je ne sais pas gérer ce genre de situation. C’est pour ça que je contrôle toujours tout, pour que ça ne m’arrive jamais. “Je veux pas d’enfant et j’en aurais jamais.” Le message est sûrement assez claire. L’idée me refroidit même si on s’est pas mal rapproché, peut-être qu’il apprend à le gérer mais moi je ne le ferai pas, pour personne. “J’ai besoin de rester libre.” Sur tous les plans possibles.

Et voilà que l’on retrouve la terre ferme. Enfin. La libération. Cette descente m’a semblé durer une éternité ou alors c’est tout simplement les péripéties qui nous ont épuisé. Je sais plus vraiment, mais je crois que je vais bien dormir cette nuit même si on ne trouve pas de logement et que l’on doit camper. Le bateau amarre et tout le monde se précipite pour descendre de l’embarcation. Maintenant, on va se contenter d’observer la rivière de loin. Oui, c’est une bonne idée ça. Enfin, c’est ce que je pensais. Jusqu’à ce que Martin s’approche de moi avec un regard noir que je connais bien trop. Ça sent mauvais pour moi. « Ça, c'est pour avoir dit à Ivy ce qui aurait été à moi de lui dire. » Et la seconde d’après, je me prends un poing en pleine figure. CRAC. C’est mon nez qui vient de faire ce bruit ou ses phalanges. Je retiens un cri en me mordant la lèvre jusqu’au sang avant de reculer quelque peu lorsque mon ami fait de nouveau un pas vers moi. « Et ça c'est pour m'avoir prouvé à nouveau que nous formons une équipe de vainqueur. » Son câlin me surprend, mais par instinct, je renferme mes bras autour de sa silhouette. « Je savais pas que vous aviez… » Parce qu’il a pas besoin de le dire. Je le vois bien. Il ne ferait pas autant attention sinon Martin. Je n’ai pas besoin d’en dire plus. J’ai fait une boulette, je l’assume. Mon nez me fait incroyablement mal par contre… « Tu m’as pas raté… » Je crois que je saigne ? Il s’en fout un peu mon meilleur ami, déjà, il se barre pour rejoindre Ivy et moi j’ai juste un mal de crâne qui se pointe. « C’est cassé ? » Il a abîmé mon visage, je le noie. Je jure. Je me tourne vers Jack et Kelly. « C’est moche ? » Je touche du bout des doigts et grimace un peu. « Outch. »

A quoi m'attendais-je en évoquant tout ça avec Ivy ? Pas de la pitié, non loin de là et encore moins des conseils. Mais peut-être un peu de compassion ou je ne sais quoi. J'avoue juste que je m'attendais pas à ce qu'elle finisse par se montrer égocentrique à ce point et ramenant, à nouveau, tout à elle. Dieu que je déteste ces personnes. Et pourtant je ne dis rien, je la laisse parler et me contente de croiser les bras devant mon torse en la laissant me dire qu'elle non plus ne veut pas d'enfants et que ça ne changera pas.

 « Je vois.» dis-je froidement avant de dévier le regard et soupirer  « enfin bon, désolé de t'emmerder avec ça hein» et j'insiste bien sur le 'emmerder'  « Je pensais juste que tu aurais eu envie d'entendre des explications plus poussées vu comment t'as réagis tout à l'heure mais je vois que je me suis trompé» t'en a absolument rien à foutre de ma vie, on est d'accord ? Voilà ce que j'avais envie de lui dire mais je me retiens avant de souffler à nouveau  «Enfin laisse tomber » et je fais un pas en arrière  «Désolé pour ta fancy tenue et ton brushing. T'étais jolie  » et tu l'es toujours, putain je lance un coup d’œil vers le groupe et j'imagine Loan entrain de chouiner comme un con.  « Heureusement qu'on s'est protégé» dis-je finalement en reportant mon attention sur Ivy, me disant qu'elle ne comprendra sans doute pas pourquoi je me suis tant renfrogné tout à coup.

Je suis froide, mais il devrait le comprendre. Je ne mâche pas mes mots, je ne l’ai jamais fait et ce n’est pas mon but de le faire un jour. On ne se ment pas, et il devrait se sentir favorisé. Je mens beaucoup, et à beaucoup de monde. J’ai l’impression qu’il se vexe, et je ne comprends pas bien pourquoi. Il aurait dû le savoir que ça n’allait pas me plaire comme annonce, je ne sauterai pas de joie à l’idée qu’il ait un enfant. Je grogne, il appuie sur le mot emmerder. Je secoue la tête avant de passer ma main sur mon visage. “J’ai jamais dit ça.” Au contraire, je l’écoute et je l’ai suivi alors que j’aurais pu rester avec le reste du groupe et me moquer de l’état du nez de Loan. “Comment j’ai réagis tout à l’heure ?” Je hausse un sourcil. Je sais comment j’ai réagi, c’était sous le coup de la surprise. C’était seulement ça. Ou peut-être pas. Mais il ne va pas au fond de ce qu’il veut dire le brun.

“Arrête de la jouer comme ça, t’aurais réagi de la même manière si t’avais été à ma place.” Voir même pire. Lui il l’aurait peut-être pris ça comme une trahison, moi j’accepte le fait qu’on a très peu parlé de nos vies respectives. “J’étais ?” Je hausse un sourcil, quelle dramaqueen celui là. Je ne pensais pas que quelqu’un pouvait être pire que moi. Mais il y a Martin qui est plutôt doué dans le domaine. “T’aurais dû le faire avec elle aussi si tu savais que tu voulais pas d’enfants.” Et encore, le risque 0 n’existe pas, c’est ce qu’on m’a toujours appris. Je ne ferai pas cette erreur là, même si j’en fais des tas. “Arrête de la jouer vexé, je vais pas te prendre avec des pincettes.” Ce n’est pas mon genre, c’est ce qu’il aurait voulu ?

Je déteste me prendre la tête. Que ce soit avec les autres ou avec moi-même, c'est une des pires chose qui puisse m'arriver. Et pourtant avec Ivy j'ai l'impression que je commence à devenir pro dans cette discipline si singulière. Nous journées sont teinté de prises de tête et d'engueulade, mais aussi de moment doux, gentillets et mignon, le tout recouvert d'une bonne dose d'humour. Notre dynamique est particulière mais a toujours été efficace. La preuve, si nous avons été éliminé c'est seulement parce que nous avons été séparé pour l'épreuve final de la semaine. Mais alors pourquoi somme nous toujours obligé d'en finir ainsi ? A se renfrogner face à l'autre alors qu'on sait exactement qu'on aura réagit pareil.

Oui, si j'avais apprit par quelqu'un d'autre qu'elle a un enfant je l'aurais sans doute vécu comme une trahison et je pense que je ne serais même resté là, comme elle reste face à moi. Je soupire doucement et décroise mes bras, le regard à nouveau fuyant et les lèvres pincées.  « Désolé» pourquoi m'excusais-je à nouveau ? Pour avoir réagit comme une drama queen alors que c'est exactement le genre de réaction que je ne supporte pas ?  « Ta réaction était ...t'as fait une Ivy quoi» haussais-je les épaules  « Du genre à agir et parler avant de réagir. J'ai même l'impression que t'as tiré des conclusions hâtives sans même attendre que j'ai pu de fournir des explications. Et je ...» je me tais, grimaçant  « Enfin dans tous les cas je crois que c'est la façon dont ça été mit sur le tapis que je n'ai pas supporter. » je secoue la tête  « J'adore Loan, vraiment. Mais parfait je le déteste. Il ne réfléchit pas toujours, agit puis s'excuse derrière comme si … comme si quelques mots pouvaient excuser tout le mal qu'il peut faire et..» je me passe une main sur le visage  «Bref, peu importe »

je relève mon regard sur Ivy  «Voilà. J'ai un garçon. Il s'appelle Elliot, il a 4 mois et je suis totalement perdu en ce qui le concerne » et c'est la pure vérité. Si avant ROA j'étais prêt a assumé ma paternité, l'expérience de la course et de la liberté qui en découle me fait comprendre que ce n'est peut-être pas la meilleure idée que celle de m'officialiser 'père' et d'assumer ce garçon.

“Loan, ton ami parle au poisson.” chuchota Kelly à son binôme, l’air inquiète pour la santé mentale de Martin. Elle observait celui-ci discuter avec leur passager clandestin à écailles le plus naturellement du monde, et si elle devait être honnête, le jeune homme avait l’air d’un hurluberlu. Néanmoins, il fut le seul à réinstaurer le calme dans le canot en remettant le poisson dans l’eau. Kelly, trop fière pour assumer ses cris, se fit discrète et fit mine de replacer son casque sur sa tête.

« Ca, c'est pour avoir dit à Ivy ce qui aurait été à moi de lui dire. » A peine avaient-ils amarré le canot à la terre ferme que soudain, le coup part. Elle n’eut le temps que de cligner des yeux pour manquer l’impact du poing de Martin sur le nez de Loan. Elle sursauta, choquée. La seconde d’après ils s’enlaçaient, et elle n’y comprenait plus rien. Une conversation s’installa entre le défenseur des animaux et la diva. Quelque chose lui disait que rien de tout ceci n’était ses oignons. Oh well.

Loan, lui, pleurait son pauvre nez malmené. « C’est cassé ? C’est moche ? » qu’il demandait, soucieux et visiblement endolori. “Laisse voir” Kelly s’approcha et, délicatement, lui fit ôter ses mais de son visage afin de l’inspecter de plus près. Et elle ne put réprimer l’envie de le faire marcher en affichant une expression stupéfaite au possible, comme si non seulement le nez de Loan était cassé, mais qu’il menaçait en plus de tomber de son visage. “Je suis désolée, tu vas devoir te faire appeler Voldemort désormais.” Son masque de sérieux tomba dans la seconde pour laisser place au rire. Oh, elle était fière d’avoir pu placer une référence pop culture pour une des trop rares fois de sa vie. “T’en fais pas, ça m’a pas l’air cassé.” le rassurait-elle finalement avec une tape sur l’épaule.

A côté d’eux, désintéressé du monde entier, Jack réunissait des feuilles et des branches au sol. Lee leva un sourcil circonspect. “Jack, il est deux heures de l’après-midi.” qu’elle lui souligna. Comptait-il monter le camp pour la sieste post-rafting du doyen ? “La suite des épreuves est par là.” on leur indiqua, côté prod. “Quelle suite ?” La dernière fois qu’il y avait eu une suite, Lee avait mangé un oeuf centenaire et de la cervelle. Non, elle n’aimait pas comment le mot “suite” sonnait dans la bouche de May.

Je me tiens devant lui, les bras croisés sur ma poitrine. Mes yeux sont toujours dans les siens et je l’écoute. Je n’ai pas bougé d’un poil, mais je me méfie de lui. S’il n’a pas parlé de ça qu’est ce qu’il pourrait encore cacher ? “T’as d’autres bombes à lancer comme ça ?” Même si ce n’est pas lui qui l’a vraiment lancé. “Et tu mériterais que Loan te rende le coup.” S’il ne le fait pas peut-être que moi je le ferai en le prenant par surprise. Il s’excuse encore, je sais que je peux être sèche avec lui. Il finit toujours par s’en rendre compte qu’il fait une connerie, même si c’est un peu trop tard. Je lève les yeux au ciel, je n’ai pas envie de m’engueuler avec lui maintenant, et ce n’est pas en criant que j’éliminerai cet enfant de la surface de la Terre.

Donc j’ai fait une Ivy, je ne savais pas qu’il avait donné un nom à mes comportements et je ne sais pas comment je dois le prendre. Je ris légèrement, attendant le reste de ses explications. “Tu me l’as caché volontairement ?” Je pense que oui. “Pourquoi ?” J’aimerais bien avoir une vraie réponse. Pourquoi il n’a pas voulu me parler de ça ? C’est quand même important non ? Et on a passé plus d’un mois ensemble. “C’est bizarre ça me rappelle quelqu’un.” Je hausse un sourcil, j’ai l’impression qu’il vient de me faire sa propre description et ça m’amuse un peu. Je ne sais pas ce qu’il va faire de cette information, ni de cet enfant. Mais est ce que ça me regarde ? Il n’y a rien d’officiel entre nous, personne n’a parlé d’exclusivité, ou d’une quelconque relation qui pourrait tenir au-delà de ROA. Alors je serre les dents. “Certains diraient que je suis horrible de dire ça mais rien ne t’oblige à abandonner ta vie pour un enfant.” Moi je ne l’aurais pas fait, à voir si lui veut abandonner la vie qu’il aime pour celle avec un enfant.

Je lui fais un signe de tête et on retourne avec les autres après un petit moment. Je n’ai pas le temps d’arriver et de sourire un peu à Loan que quelqu’un de la production revient. “Me dites pas qu’on retourne dans l’eau ?” Je commençais tout juste à sécher.

“Jack, il est deux heures de l’après-midi.” et puis qu'est-ce que ça fait? Il a l'air d'un gamin pris en faute le pauvre, lui qui avait anticipé qu'ils pourraient avoir un moment de répit, avoir un petit instant à ne rien faire, rien du tout ici. « T'as pas froid toi? » parce que jour ou non, n'en reste qu'ils sont tous frigorifiés. Celui qui croyait pouvoir ainsi réchauffer les troupes laisse tout de même un immense sourire orner son visage quand la production amène non seulement des nouvelles pour la suite mais également pléthores de couvertures - sèches et chaudes, alleluia - pour tout le monde.

“Quelle suite ?” la suite, donc. “Me dites pas qu’on retourne dans l’eau ?” Ivy revenue à leurs côtés, Jack attend qu'on leur indique à tous par où marcher pour finalement sentir la présence de la blonde à ses côtés. Ils leur distribuent harnais et casques, ils leur expliquent la suite, et lui, il l'entend râler dans sa diagonale à chaque déclic de ceinture, à chaque ajout d'équipement. « Sur 10, à combien t'as envie de faire cette activité-là? » qu'il finit par murmurer, quand elle détourne la tête et qu'il attrape son regard au vol. Il désamorce et il ne lui demande pas comment elle va, il a appris. Se contentant d'essayer de lire son regard pour voir si justement, elle va, après sa conversation avec Martin.

Parce que oui, bien sûr qu'il a entendu les murmures, bien sûr qu'il a vu les regards. Il n'a pas porté attention au point d'écouter la conversation, mais il sait tout de même capter le rictus qui s'est logé sur le visage d'Ivy, sait très bien lire que rien de ce qui s'est dit ne l'a momentanément ravie. Mais c'est pas de ses affaires Jack, et a priori, lui, il veut juste qu'elle apprécie sa journée. Elle l'a eue assez difficile jusqu'à maintenant, qu'elle souffle désormais.