Primrose se démène tous les jours pour que chaque heure, chaque minute puisse être plus respirable que la précédente. La force est dans ses gènes, pourtant, mais elle n’arrive pas à l’atteindre et l’utiliser à bon escient. Comme maintenant, où elle se recroqueville de nouveau sur elle-même et qu’elle devient acerbe avec Tim parce que tout est absolument de trop. S’il lui propose gentiment l’idée qu’il ne viendra pas entraver sa relation avec son frère, elle entend là qu’un camouflage de quelqu’un qui ne veut plus d’elle. C’est ainsi que fonctionne Primrose ; toujours s’imaginer le pire, et c’est sûrement encore pire avec Tim. Les sentiments se développent, les sentiments sont forts, les sentiments sont intenses dont tout est multiplié et exacerbé. Elle l’a démontré tellement de fois, jugeant que le français va bien finir par flancher lui-même et l’abandonner à son triste sort parce qu’elle n’est juste pas aussi agréable et joyeuse qu’elle aimerait être. Non, elle a les pires défauts du monde, sans aucune capacité de pouvoir les gérer, les contrôler, ou alors que pendant un temps limité. Tim insistant sur un point qui fait mal et qu’elle réfute intensément a un mauvais son à ses oreilles ; au moins, cela leur prouve à tous les deux qu’elle ne compte pas arrêter ce qu’il se passe entre eux. Elle n’en prendra ni la responsabilité ni la décision. Primrose n’a pas conscience de beaucoup de choses dans sa vie, elle se mélange les pinceaux entre ses fictions, ses aprioris et la réalité mais elle a la certitude d’une autre chose ; Tim doit rester dans son existence. Il est un point important, il se transforme doucement en repère et son estomac qui se détend sous des milliers de papillons est une sensation bien trop agréable pour s’en débarrasser. Dans un sens, elle fait preuve de courage. D’ambition, aussi. C’est elle qui met le poing sur la table en se disant qu’elle y a le droit, elle aussi. On ne viendra pas le lui voler, clairement non. Tim et elle ont encore tellement de choses à faire, à explorer, à apprendre ; on ne peut pas leur faire ça. L’univers serait cruel.

Même si ce qui abat Primrose, c’est le nouveau combat qui risque de se profiler une fois que les concernés seront mis en courant. Déjà que le premier est déroutant et ne s’est jamais vraiment fini, elle ignore si elle va avoir les reins assez solides pour ce deuxième round. Oui mais cette fois, elle peut peut-être espérer le soutien de Tim, non ? Le même Tim qui se lève et vient récupérer ses mains dans les siennes, la tournant vers lui alors qu’elle garde la tête baissée parce qu’elle est faible et lâche, la gamine, et anxieuse, toujours. Mais les mots qu’il prononce vont dans la direction positive ; il a envie d’eux et ça lui suffirait presque à Primrose pour se sentir soulagée. Presque parce que mine de rien, il y a toujours le danger Clarke qui rôde autour d’eux, même si cette dernière n’est au courant de rien. Tim le lui rappelle, lui qui ne comprend toujours pas et elle qui serre les dents car elle n’est pas certaine qu’il puisse entendre la vérité. La morbide, la moche, la dégueulasse. Qui va sûrement le briser autant que ça a brisé Caleb. Mon dieu, elles sont affreuses avec eux, elles ne les méritent pas, l’univers est vraiment cruel avec eux. “On ne s’aiment pas vraiment, Alex et moi. J’essaie de faire des efforts pour la tolérer parce qu’elle va devenir ma belle-sœur, qu’elle est la mère de mes nièces, qu’elle rend Caleb heureux mais je… Elle va me faire vivre un enfer si elle sait.” Ses larmes se sont apaisées, certainement grâce aux paroles et aux douces caresses de Tim contre ses mains, ce qui lui donnent un peu plus de courage temporaire. “On doit rien leur dire.” Oh que ça va être dur d’avance. Oh que ça lui brise d’ores et déjà le cœur de ne pas pouvoir aller enfin dire à Caleb à quel point elle est heureuse avec quelqu’un. Si jusqu’à présent, Primrose est restée discrète sur ce pan de sa vie, c’était par pudeur. Mais là, ça va devenir presque une obligation ; à quel point ça va être viable ? “Tant qu’on n’est pas sûrs où ça va réellement. Tant qu’on n’est pas prêts, on doit le leur cacher. Je peux pas affronter Alex, pas encore, pas maintenant, c’est...” c’est l’enfer. Elle finit dans un soupir tout en fermant les yeux, hochant la tête avec énergie face aux questions de Tim. “C’est même une obligation.” De la prendre dans ses bras. Primrose lui facilite un peu la tâche en se collant à lui, les bras autour de sa taille et la tête lovée contre son épaule, le nez dans son cou. “On va leur cacher et tout ira bien.” qu’elle essaie de se convaincre autant que de convaincre Tim. Promets-moi que tout ira bien, Tim. “Tout ira bien si on reste ensemble, même en secret, n’est-ce pas ?” demande-t-elle en levant son visage vers le sien. Est-ce que ça ne va pas être trop dur ? Trop compliqué ? La réaction des concernés ne sera-t-elle pas pire s’ils jouent les prolongations avant de le dire ? Tant pis. Ni Primrose ni Tim ne se sentent de pouvoir les affronter pour l’instant. Leur unique ambition, la prioritaire et la plus importante est d’être ensemble. C’est déjà assez énorme pour eux. Ils font vraiment tout travers mais au moins, la jolie brune ne se sent pas seule. Elle n’est plus seule. Elle a Tim maintenant. Et ça, même Alex ne le lui enlèvera pas.

La réalité des faits est clairement difficile à assumer, tout est allé si vite soudainement. Juste là, pourtant, les deux jeunes gens s'étaient accordés sur un rythme de croisière qui leur seyait particulièrement bien. Ils ont eu quelques rendez-vous, n'allant pas au delà du stade du baiser et les paroles échangées restaient de l'ordre de la sérénité. En l'espace d'une fraction de seconde, tout cela a basculé vers quelque chose de bien plus intense et par conséquent, de beaucoup plus effrayant. Tim est d'ailleurs toujours en état de choc face à la douloureuse révélation que Primrose est la soeur de Caleb, que tout ce petit monde s'est côtoyé pendant des années sans même se croiser ni entendre parler de l'autre. Le destin a décidé de faire les choses autrement, de manière bien plus drôle pour lui mais pas pour les protagonistes de l'histoire. A l'heure actuelle, eux doivent subir les affres de l'angoisse car il y a un choix à faire aujourd'hui. Arrêter ou continuer? La question a l'air si simple quand on l'entend, il s'agit juste de tourner soit à gauche soit à droite tout en sachant que les conséquences ne seront pas les mêmes, quoiqu'il arrive. Tim est forcément perturbé car il n'a pas l'habitude de faire des choix aussi importants: il a plutôt subi jusqu'ici et au final, c'est peut être la position la plus enviable, que celle de ne pas avoir le choix, de voir les autres décider pour lui de son sort. Néanmoins, il est largement temps de faire cesser le pot aux roses et de faire ouvrir les yeux au jeune Decastel qu'il est question de sa vie et pas celle des autres. Ils n'ont pas à décider pour lui, ni pour Primrose d'ailleurs. C'est sûrement pour cette raison qu'il ne semble pas se démonter tout d'un coup alors qu'il était effondré cinq minutes auparavant à peine. Les raisons sont évidentes: on parle tout de même de sa relation privilégiée avec Alex et Caleb, les amis qu'il a conservés depuis le plus longtemps et qui lui font en tout cas sincèrement confiance pour la garde de leur fille.

Rien ne sera donc sans conséquence après ce soir-là, après la manière dont son regard force celui de la belle Anderson à s'y attacher parce que c'est important à partir de maintenant, la route qu'ils vont prendre, la route qui peut tout rendre beau ou tout briser, au choix. Tout ce que Tim sait pour le moment, c'est qu'il n'est pas prêt le moins du monde à tirer un trait sur Primrose, il est bien trop tôt pour considérer ce genre d'actes quand il a tout le temps envie de passer un peu de temps avec elle afin de voir où l'aventure peut bien les mener. A priori, la petite brune a l'air de partager ses sentiments sur la question et Timothy peut en sourire malgré la panique qui l'assaille encore à l'intérieur. Cette fois, il lutte contre elle, il ne veut pas la laisser gagner puisqu'il ne s'agit plus uniquement de lui mais du bien être de Primrose. Elle qui décrit une Alex tyrannique avec elle. Tim est pour le moins surpris à nouveau de capter cet élan de chagrin chez la petite brune quand elle mentionne la meilleure amie du brun, l'affaire a l'air encore plus compliqué que ce que Tim pouvait jusque là envisager. Tout cela va bien au delà de Caleb qui doit accepter qu'un ami partage une relation intime avec sa soeur et Decastel capte bien vite que tout cela rend leur aventure d'autant plus complexe. "Et il y a une raison à autant de haine entre vous? Enfin... Je sais pas ce qui s'est passé et t'es pas obligé de me raconter, ça vous regarde toutes les deux après tout." Bien sûr, tout cela l'attriste par avance car Alex reste une personne très importante pour lui. Sans elle, il aurait chuté au cours des deux années qui venaient de s'écouler et il ne pourra jamais faire quoique ce soit sans qu'elle soit une ombre dans son existence. Pour le moment, il n'est question de rien, juste de Primrose qui vient se caler entre ses bras et Timothy qui l'entoure instinctivement, posant sa tête contre celle de Primrose, la berçant de droite à gauche pour qu'ils oublient leur peine momentané. "D'accord, Prim'. On peut attendre avant de le dire à qui que ce soit, faire à notre rythme comme on a dit et quand on sera prêts à... Affronter Alex et Caleb, on verra. J'espère ne pas avoir à mentir, je suis très nul pour ça." Il laisse un sourire timide traîner sur ses traits, la brune doit bien se douter qu'il n'excelle pas dans l'art du mensonge, il est beaucoup trop pur et naïf pour oser blesser les autres de son plein gré. Il le fera pourtant, là, car il voit bien que tout cela compte pour Primrose et puis, lui aussi, maintenant, il a peur des réactions de ses amis. Attendre, c'est mieux, oui, pour gérer ses angoisses et envisager la suite. Pas maintenant. Là, il veut juste être avec Primrose et dissocier tout le reste, ils n'ont pas besoin de s'ajouter un fardeau inutile sur le dos. "Bien sûr, Prim', ça ira. On sera un beau secret joyeux pour le moment." Il lui fait un clin d'oeil avant de prendre le temps d'observer ses jolis traits, ils doivent s'apaiser, respirer plus convenablement maintenant que le choc est passé, que la décision est prise. Ils verront pour le reste. "Il faut vraiment qu'on nourrisse et qu'on couche les enfants, hein? Après, on pourra passer la soirée ensemble devant la télé ou je ne sais pas si t'as pas envie de rentrer chez toi après toutes ces émotions bien sûr." Il caresse ses joues, passe une main dans ses cheveux et il sent qu'un poids s'est incrusté contre son coeur, signe qu'il va stresser beaucoup de la situation à l'avenir dès qu'il devra voir Alex ou Caleb mais il va faire ce qu'il faut. Pour elle. Non, pour eux deux, ensemble et heureux.

C’est le moment de grandir un peu, de solidifier les murs et redresser les épaules. Ce n’est pas pour Alex et Caleb que Primrose fait ça ; c’est pour Tim et elle. Egoïste comme elle peut l’être, elle ne voit que sa petite personne qui va déjà se faire surmener et détruire par une anglaise aux dents de scie, qui va avoir une raison de se retrouver avec les rôles inversés pour une fois. Si jusqu’à présent, Alex veillait à ses moindres faits et gestes, ça risque d’être encore pire si elle apprend que Primrose sort avec son meilleur ami. Mon dieu, comment est-ce que Tim peut la mettre à ce rang ? Pourquoi est-ce qu’il faut que l’univers tout entier s’amuse d’elle comme ça de nouveau ? Primrose pensait avoir sa bulle magique et solitaire et réconfortante avec Tim, il a suffi d’un enfant et de vingt minutes pour absolument tout briser. Mais au moins, cela lui fait prendre une réalisation certaine ; la brunette ne souhaite pas s’éloigner du français. Continuer à graviter autour de lui est encore plus attrayant, étrangement, alors que le danger rôde. Avoir envie de quelque chose qu’elle n’a pas le droit est un don particulier qu’elle a développé au fil des années ; seulement là, on ne parle pas d’une valeur tarifaire mais d’une valeur plus profonde et humaine. Elle tient à Tim. Devoir tout arrêter, devoir se priver de son être, de sa présence toute entière lui briserait le cœur, sans aucun doute. Elle s’y attache, elle s’en émeut qu’il veuille toujours d’elle, qu’il n’est toujours pas fui, qu’il ne soit pas déjà las ou fatigué. Pour lui, pour ses regards, pour ses sourires, pour ses baisers, Primrose affrontera de devoir mentir et cacher - d’autres dons qu’on ne lui soupçonnerait pas et pourtant qui sont bien présents en elle. Même si là, on ne parle pas de choses honteuses mais d’une relation qui la comble et d’un être qui ne mériterait pas d’être caché. Mais il va falloir, pour leur bien en premier lieu parce qu’il est certain que personne ne se sent en état d’affronter le couple de Brisbane à l’heure actuelle. Non pas qu’ils ont de compte à leur rendre, mais il est certain qu’avoir les yeux d’Alex sur son dos qui la surveillent n’est pas non plus quelque chose dont Primrose a besoin.

Calée dans ses bras, la jolie brune sourit tristement contre le torse de Tim. Il n’était pas au courant à l’époque ? Il n’a pas pu manquer l’information, pourtant. Caleb et Alex ensemble, puis Caleb et Alex plus ensemble, tout ça en un claquement de doigts. Elle se laisse bercer dans le silence le temps de trois battements avant de répondre le plus calmement qu’elle puisse le faire même si les mots sont hasardeux et peu rassurés vu la proximité de Tim avec l’anglaise. “Tu ne dois pas ignorer qu’elle a abandonné Caleb comme un malpropre. Il a été au bout du rouleau à cause d’elle. Puis elle revient comme une fleur et tout redevient comme avant. Ou presque. Je n’arrive pas à lui faire confiance. Et… Elle n’est pas non plus très tendre. Ce qui n’aide pas.” Elle n’aide en rien, Alex. Primrose essaie de faire des efforts mais il semblerait que cela ne soit qu’à sens unique. Mais dans les bras de Tim qui la berce doucement, la brunette se sent en sécurité et hors d’atteinte ; on ne doit même pas la voir de toute façon tellement qu’elle est frêle et petite, encore pire contre lui. Son odeur, sa présence, son rythme cardique la rassurent et il est certain qu’elle tombe un peu plus amoureuse à cet instant là - oh, Anderson qui se réveille enfin, est-ce que ce n’est pas magnifique. “Ne vois pas ça comme un mensonge. Vois ça comme une omission pour le bien de tous. C’est une sorte de service public.” Est-ce que Primrose lui donne la recette pour ne pas avoir la boule au ventre quand on met ? Peut-être bien. Cela fonctionne plutôt bien avec elle, de penser que c’est pour le bien d’autrui qu’elle ne raconte pas certaines choses. A Tim, par exemple. Parlant d’omissions, elle se retrouve à avoir envie de sa poudre, là, de suite. Elle aurait au moins eu un peu plus de courage et de force. Stupide idiote enfant. Comment tu peux penser ça alors que t’as Tim ? Comment tu peux songer un seul instant que la drogue peut remplacer le réconfort physique et mental d’un être de chair et d’os ? Alors elle cale un peu plus ses doigts contre son dos, pour mieux le sentir contre elle, entre elle. Elle hoche légèrement la tête même si elle n’est que peu convaincue du fait que ce soit un joyeux secret. Elle ignore si le français est ironique mais s’il est sincère, autant le laisser le croire.

Leurs regards se croisent, elle sourit malgré elle légèrement face à son clin d’oeil, à ses mains qui prennent toute la place sur son visage, à ses phalanges qui glissent contre ses cheveux. Primrose relève le menton pour atteindre ses lèvres, l’embrasser tendrement pour sceller ce foutu pacte sordide dont ils ne risquent de pas sortir vivants dans tous les cas. Toutes les options ne sont pas en leur faveur et il est clair que ni l’autre ni l’autre ne songe à ce que les choses pourraient bien se passer - non, pas s’ils parlent. “J’ai ramené Titanic.” Signe qu’il n’y échappera pas. Ses propres mains filent sur les flancs de Tim alors que ses lèvres ne sont toujours qu’à quelques centimètres des siennes. “J’aimerai bien passer la soirée avec toi, Tim. Et même la nuit, si tu le veux bien aussi.” Autant dire qu’entre les enfants et maintenant ça, la vitesse s’accélère un petit peu. Mais autant en profiter le temps que ça dure et que c’est réel, non ? Et puis, ils ne vont pas si vite que cela, n’est-ce pas ? Deux mois se sont écoulés depuis leurs retrouvailles, Primrose n’a pas l’impression qu’ils ont fauté quoique ce soit. C’est bien pour cela qu’elle s’en va attraper les lippes de Tim de nouveau pour un baiser un peu plus passionné ; lui prouver qu’elle restera aussi longtemps qu’il le lui autorisera. Contre vents et marées.

Tim est bien souvent hors des conflits, il est sûrement trop tendre pour s'envisager en vouloir à quelqu'un sur la durée. En dehors de la mère de ses enfants, le français doit avouer qu'il n'a jamais eu ce genre de ressentiments pour quelqu'un plus de quelques heures. Même lorsque Alex, justement, l'a quitté durant des années, il lui a pardonné à la vitesse de la lumière dès son retour. Oh, bien évidemment, il est trop gentil pour son propre bien et certainement qu'un tas de personnes en avaient profité en toute impunité, de sa bonté d'âme, de sa capacité à vouloir bien s'entendre avec les gens autour de lui. En réalité, Timothy tâche de rattraper le temps perdu, de tous ces instants qu'il a perdu à se faire mépriser par des individus qui le trouvaient trop bizarre pour considérer une petite seconde de lui adresser la parole. Le brun a toujours été en dehors de tout, sauf des ragots car il y en a eu des mots durs prononcés à son encontre, de ceux qui blessent plus qu'ils n'auraient dû assurément et Timothy avait toujours fait en sorte de les mettre de côté. Par contre, il les avait entendus et bien malgré lui, les discours mauvais sont restés au fond de lui et voilà qu'ils ont un impact encore actuel sur sa manière d'agir dans l'univers. Tim, la pureté incarnée. Avoir Primrose contre lui est tout ce qui compte néanmoins, même s'il essaie de comprendre tout cette histoire entre Alex et la jeune femme. Ce n'est apparemment pas quelque chose de très simple: du moins, ce que le libraire capte, c'est que Primrose a dû gérer l'état de Caleb plus fréquemment que le français et la rancoeur était alors restée gravée. Cela, Decastel peut tout à fait le saisir: si quelqu'un avait fait autant de mal à Noé, il aurait eu bien du mal à pardonner ou être agréable, à moins que l'être en question trouve des excuses imparables pour justifier son comportement. Certes, Alex avait des choses à gérer à cette époque, elle était la belle anglaise enceinte et apparemment incapable de vivre avec ce fait là, trop jeune, loin d'être prête pour cette aventure et sûrement qu'elle a eu peur que Caleb la convainc de garder cet enfant. Le temps a passé depuis bien évidemment, mais la jeune Anderson n'a pas tout oublié, Tim hochant la tête face à ce discours là précisément. "Effectivement, je vois clairement de quoi tu parles et je peux tout à fait concevoir que tu lui en veuilles pour ça. Elle n'est pas tendre avec toi, non plus? C'est dommage, je suis désolé pour toi, Prim'." Il ne lui demande pas les raisons parce qu'il ne veut pas gêner Primrose avec des faits de son passé qui la blesseraient. Ils ont déjà trop souffert pour une semaine entière en l'espace de juste quelques minutes. Tim garde l'information en tête cependant car Alex ne se comporte pas ainsi gratuitement, du moins il l'espère car le français ne désire pas douter de sa meilleure amie.

Autant oublier toute cette affaire pour le moment, les deux jeunes gens ont plutôt besoin d'un peu de calme et d'apaisement après toutes les émotions qu'ils ont traversé. De toute manière, Timothy n'a plus l'énergie nécessaire pour avoir une discussion aussi sérieuse, il sent les courbatures dans la plupart de ses muscles à cause de la crise passée et pour ne pas inquiéter Primrose, il n'expose rien. Non, il a plutôt des gestes tendres envers elle, gardant son regard profondément ancré dans le sien. Il la trouve belle, voilà un fait qui ne change pas alors que leur situation vient de se compliquer sévèrement. Tim essaie de ne pas penser à cela, aux prochaines fois où il devra "omettre" des informations comme le dit la petite brune face à Alex ou Caleb. Il ne sait clairement pas comment il va bien pouvoir se débrouiller avec toute cette histoire mais il a envie de croire qu'il sera l'homme de la situation, hors de question de trahir la confiance grandissante de la danseuse. Ils sont ensemble, voilà la condition principale du contrat et c'est tout ce qui peut bien importer à l'heure actuelle car Timothy a envie de cette affection de la part d'Anderson, il le sait, il le sent. "Je vais essayer d'être à la hauteur du service public dans ce cas." Il espère vraiment pouvoir tenir le coup, même si Tim a forcément bon nombre de doutes sur la question. Non, ne pas y penser tout de suite, plutôt se réconforter dans les plans que Primrose propose, de quoi le réjouir dans les grandes largeurs par ailleurs. "Titanic? Je dois prévoir combien de boîtes de mouchoirs alors?" De ce qu'il a compris, ce n'est pas une histoire très joyeuse et Primrose n'a probablement pas oublié qu'il est plutôt sensible comme garçon. Il lui sourit néanmoins, ses yeux brillant d'un brin de bonheur des plus vitaux au moment où elle lui indique qu'elle compte rester pour la soirée et même la nuit. Timothy n'a pas le temps de lui indiquer que ce fait le rend très heureux qu'il reçoit le baiser légèrement passionné de la part de la brune, ses mains gardant son visage entre ses doigts alors qu'il revigore son énergie vitale dans cette étreinte. "Tu veux donner le biberon à Lucy? Après tout, tu la connais... Je vais m'occuper de la purée des deux terreurs en voiture là." Il quitte ses lèvres clairement à contrecœur avant d'attraper la main de la jeune femme pour qu'ils se rendent vers la chambre, ils ont du travail devant eux. Timothy indique délicatement aux enfants que l'heure du dîner va sonner et qu'ils vont devoir ranger les jouets dans la grande caisse, le temps qu'il aille réchauffer le repas. En coin, cela dit, Decastel conserve un oeil empli de tendresse vers Primrose. C'est tout ce qui le rend heureux pour le moment, il en oublie ce qui adviendra d'eux hors de cette bulle de tendresse.

Tim ne peut pas comprendre, lui qui se retrouve à présent entre les deux feux. Primrose n’aurait jamais pensé qu’ils se trouveraient dans cette situation tous les deux. Tim est supposé être tout ce qui a de bon dans sa vie en ce moment. Il est le rayon qui réchauffe son existence, les yeux et les sourires qui la poursuivent partout où elle va parce qu’elle s’attache malgré qu’elle n’arrive pas à voir que c’est plus que de la simple attachement qui se profile. Est-ce que le lien en ressort plus fort parce qu’il a justement un goût d’interdit ? Est-ce qu’elle ne va pas finir par vouloir être avec lui juste par souci de contradiction ? Est-ce que cela va être pour les bonnes raisons qu’elle souhaitera avoir ses bras autour d’elle ? Tu te poses trop de questions, Anderson, en plus d’être les mauvaises. La jolie brune ne doit pas se laisser happer par une vague noire, par le nuage brumeux. Parce que pour l’instant, c’est eux contre le monde. Il n’y a rien à craindre, pas dans la sécurité de l’appartement de Tim et encore moins contre sa silhouette réconfortante et solide. D’ici, rien ne peut se voir, ni s’entendre, il n’y a que les enfants qui peuvent venir perturber ce joli cocon. Autant ne pas commencer à se mettre la tête à l’envers quand il n’y a pas de raison.

C’est pour cela que la brunette ne réplique pas concernant le sujet Clarke. La seule chose qu’elle peut dire pour le rassurer du mieux qu’elle peut ; “tu n’as pas à t’excuser. Ce n’est pas de ta faute.” Non, ça sera de sa faute à elle, encore. C’est Primrose qui portera les fardeaux des reproches parce qu’Alex va forcément la tuer avec ; non, vraiment, ce n’est pas Caleb qu’elle craint dans l’immédiat. Même si le mensonge risque d’absolument tout accentuer, qu’ils ne prennent peut-être pas la meilleure décision, qu’ils ne font qu’empirer le problème en voulant le camoufler. Mais ils ne peuvent pas non plus prendre de risques inutiles. Ils se ressemblent tellement. Même si Tim est plus bienveillant et honorable que Primrose sur tellement de sujets. Cependant, il n’y a pas l’un ou l’autre pour se dire que l’idée est mauvaise. Non parce qu’ils vont doucement. Parce qu’elle vient à peine de connaître la bouille de ses jumeaux. Parce qu’ils viennent de subir un choc, une annonce bien trop terrible pour eux pour pouvoir songer à gérer cette pression. A deux, ils devraient y arriver bien plus facilement, non ? C’est le but d’être ensemble, de se sentir plus forts ?

Il est certain que ça doit fonctionner comme ça parce que Primrose n’a jamais été aussi sûre dans son choix qu’à ce moment-là. Repousser la tempête le plus loin possible pour pouvoir l’affronter quand ils seront d’accord de le faire. Les prunelles claires de Tim lui promettent qu’elle n’est pas toute seule et c’est tout ce qui compte à ce moment-là. La crainte à ce qu’il lui échappe a été réelle alors le soulagement qui parcourt ses veines d’avoir conscience qu’il la garde près d’elle ne finit jamais de la surprendre. Même si le français lui dit qu’il va “essayer” et que ça l’inquiète déjà ; mais la brunette lui fait confiance. Elle en a assez de se tracasser pour l’instant. Elle a eu son lot d’émotions pour la soirée voire plus et c’est un répit qu’elle aimerait voir apparaître. Ses lippes sourient légèrement quand il évite les mouchoirs. “Au moins le double de ce que tu prends d’habitude.” Pour lui et pour elle. Primrose a beau connaître la fin par cœur, cela ne finit jamais de la faire craquer parce que c’est beaucoup trop d’émotions pour son cœur fragile. Elle est un public terrible quand il faut pleurer, à n'en pas douter.

La brune râle légèrement quand Tim s’éloigne ; même ses mains sur son visage ne suffisent pas là maintenant tout de suite. Mais il lui rappelle leurs responsabilités immédiates - les enfants qui risquent d’hurler à la faim dans les prochaines minutes si rien n’est fait - et elle hoche la tête. “Je trouve que pour deux terreurs, ils se portent plutôt bien.” Après tout, ils leur ont offert dix minutes de répit, ce n’est pas négligeable. Dans la chambre, Primrose se mord la lèvre devant le visage endormi de Lucy. “T’es vraiment sûr qu’on doit la réveiller pour la faire manger ? Il ne faut pas attendre qu’elle se réveille ou- En faites, j’en sais rien. J’imagine qu’il vaut mieux qu’elle ait l’estomac rempli pour dormir.” Elle a gardé ses nièces quelques fois mais elle a toujours le doute pour de simples gestes. Pourtant, elle n’a pas à avoir peur, pas de Lucy. Sa main se dirige doucement vers le visage du poupon même si elle l’aurait bien laissé dans le sommeil profond dans lequel elle était. “Hey princesse.” Primrose a naturellement le sourire qui s’accroche aux lèvres alors que Lucy soulève ses paupières tout en levant ses petites mains contre ses yeux. Sa tante la prend dans ses bras de la plus douce des manières - la gamine la regarde avant d’attraper son nez et Primrose fait mine de lui manger les doigts tout en sortant de la chambre. “Regarde parrain Tim qui n’a même pas encore pris soin de ses blessures de guerre.” La jolie brune a le sourire malicieux mais le sous-entendu est bien là ; il faudra quand même s’occuper de son poignet et de son arcade. Elle berce gentiment Lucy dans un bras tout en prenant le biberon de sa main libre tout en se dirigeant vers le canapé. Donnant son lait à la fillette, ses grands yeux qui la regardent par-dessus, Primrose ne peut pas empêcher les siens qui s’attendrissent gentiment avant de se lever vers Tim. Elle a le coeur qui se gonfle agréablement alors qu’il s’active pour ses deux petits monstres ; ils vont y arriver. Ce soir et les autres jours d’après. Même si dans l’immédiat, seul maintenant compte. L’adoration dans ses prunelles ne pouvait être niée ni dissimulée de toute façon.

Ils verront bien ce qui les attendra au tournant, des moments fort peu reluisants a priori vu les mensonges qu'ils s'apprêtent à mettre en place. Timothy n'a jamais été de ceux qui cachent des faits aussi gros mais il suit la direction de Primrose car il ne peut pas le cacher, maintenant il a plus peur que jamais de la réaction de ses amis. Il y a apparemment un passif plutôt agressif entre les deux femmes d'ailleurs et le jeune français a la certitude qu'Alex va tenter de le convaincre par tous les moyens de laisser la petite brune sur le bas côté. Les frictions seront réels, Tim le sait d'ores et déjà et il n'a clairement pas envie pour le moment d'être pris entre mille feux et se retrouver avec le cerveau à l'agonie de ce qu'on lui dit de part et d'autre. De toute façon, les deux jeunes gens ont une excuse idéale pour l'heure, ils prennent leur temps et cela, c'est un stratagème qui peut fonctionner encore bien quelques semaines. Ils peuvent aussi parfaitement envisager d'annoncer qu'ils n'étaient franchement pas au courant des liens entre tout ce beau monde, cela aussi, c'est quelque chose qui pourrait marcher si tant est qu'ils jouent leur rôle à la perfection. Autant dire que ce n'est pas gagné avec une personne aussi pure que Timothy. Mentir n'est pas un trait de sa personnalité, il n'a jamais aimé ne pas être sincère, c'est quelque chose qui l'a toujours beaucoup atteint, qu'on lui mente parce qu'il croit toujours le moindre mot. Il y a cru tant de fois par le passé, des histoires qu'on lui a vendues, des promesses qu'on lui a faites que la mission à venir semble devenir une sacrée montagne. Néanmoins, Tim s'est promis dès le premier instant de ne pas trop y penser, de se concentrer avant tout sur le présent et lui est bien plus beau depuis quelques minutes. Il peut regarder Primrose et constater que les larmes ont arrêté de couler peu à peu, celles de la brune autant que les siennes et c'est un signe que les choses vont aller mieux, qu'ils n'ont qu'à ignorer les orages. Fini de parler d'Alex et de Caleb, ils conçoivent la suite de leur soirée, Tim souriant face à la perspective du nombre de mouchoirs qui seront utilisés au cours d'un visionnage de film. Avant cela cependant, il faut s'occuper des enfants et ceux-là ont encore suffisamment d'énergie pour empêcher ce bonheur de se construire en toute sérénité.

Primrose réveille Lucy en douceur alors que Tim attend que les jumeaux rangent tous leurs jouets pour les amener vers la cuisine afin de consommer le dernier repas de la journée. "Je suis les directives d'Alex." Lui aussi l'aurait franchement laissé dormir mais apparemment, la petite est capable de dormir de longues heures et comme elle n'a pas mangé depuis déjà un petit moment, autant éviter d'entraîner des carences, même si l'enfant a l'air si paisible à l'heure actuelle. Tout ce beau petit monde se dirige finalement vers la pièce de vie, Tim entendant la remarque de la belle Anderson, oups il avait totalement oublié qu'il avait des petits soucis physiques. "Tu fais bien de me le dire, j'avais totalement omis cela, tiens." Sa peau est encore rougie et il sent effectivement son coeur qui bat contre sa tempe, signe qu'il va falloir un peu plus de glaçon pour calmer cette douleur. Il est vraiment tout cassé, à croire qu'on ne sait plus qui d'eux est vraiment le plus maladroit. Cela dit, Timothy n'a pas tellement le temps de creuser la question qu'il doit gérer le repas des jumeaux, un moment toujours sportif pour qu'aucune ration de purée ne se retrouve contre les murs. Ils ont faim néanmoins et ils avalent leur dîner en étant sages comme des images, sûrement qu'ils essaient d'impressionner de Primrose pour la faire rester. Il ne peut pas leur en vouloir, leur père, ils ont relativement vu des départs des femmes qui traînent par ici et Gabriel a probablement adoré son petit moment en compagnie de la danseuse. "Ca va aller avec Lucy? Je vais les coucher..." Il fait un sourire timide au duo sur le canapé alors qu'il entraîne les deux petits vers leur salle de bain pour un nettoyage express, pyjama mis et au lit. C'est là le moment le plus difficile car l'énergie semble encore bien présente, surtout chez Willow bizarrement. Alors, vient le moment merveilleux du récit et celui-ci est parsemé de nombreux souvenirs du Lone Pine Sanctuary, des koalas traînant au travers de chaque allée, le tout semble apaiser les petits amours qui s'assoupissent au fur et à mesure même si le combat semble âpre. Tim disparaît tout en douceur pour ne pas les réveiller, allant s'étaler sur le canapé, clairement épuisé. "Ah mince, je dois me relever pour les mouchoirs. Par contre, je suis pas sûr qu'y ait pas des pleurs dans cinq minutes, Willow a pas l'air très encline à dormir ce soir." Il a la preuve qu'être parent n'est pas un plan aisé, si seulement cela avait été un plan pour lui. Le français sourit en se positionnant dans un coin du canapé, attendant Primrose sagement, se perdant dans ses pensées, il n'y peut rien apparemment.

Tim a oublié qu’il s’est blessé et c’est un comble ; Primrose ne peut que s’en rappeler parce qu’à chaque fois qu’elle pose les yeux sur lui, elle voit l’arcade qui a empiré et elle a des remords absolument affreux. Si elle n’avait pas fui, si elle avait discuté au lieu de s’engouffrer dans sa lâcheté légendaire provoquée par une réalisation cinglante et puissante, Tim ne se serait pas retrouvé assez longtemps dans la cuisine pour se brûler et se blesser de nouveau. Cependant, elle essaie tout de même de repousser l’historique des dernières minutes loin dans son esprit parce qu’elle a Lucy dans les bras qui tire joyeusement sur la tétine du biberon et que les deux petites têtes blondes de Tim débarquent rapidement, Willow voulant même aider son père à mettre sa serviette et ses couverts et c’est absolument attendrissant. Etrange, bizarre, inédit, imprévu mais attendrissant. Il réussit à oublier la douleur en s’occupant de ses terreurs qu’il aime visiblement plus que tout au monde et Primrose culpabilise de nouveau la seconde qui suit la pensée qu’elle ne sera toujours qu’en seconde position. Elle n’a vraiment pas le droit. Elle est au courant depuis le début. Oui mais tout leur est tombé sur la figure si rapidement. Et les voir maintenant avec leur géniteur, c’est différent. Les jumeaux se tiennent incroyablement bien malgré leur raffut qu’ils semblaient provoquer quand elle est arrivée. Ce sont eux qui comblent le silence, en répétant ce qu’ils mangent avec insistance, en montrant leurs couverts tout en les nommant.

Primrose regarde Lucy qui arrive à la fin de son biberon mais qui ne le finit pas pour autant. Visiblement, elle n’est pas aussi affamée que ça. Elle relève la tête en l’hôchant à Tim. “Oui oui, t’inquiètes pas.” Elle a déjà gardé les jumelles ; c’est assez étrange qu’Alex les ait séparées d’ailleurs. Ils ont de la chance, Lucy n’est pas celle qui crie le plus. Pourtant, Caleb lui a bien dit dernièrement qu’elles sont assez bruyantes à cause de leurs dents qui commencent à pousser. Sûrement qu’ils vont être embêtés par la bambine ; Primrose espère simplement qu’elle ne va pas faire de fièvre parce qu’il est clair que ça, elle ne sait pas gérer. Elle lève le corps de Lucy pour la caler contre elle afin de la faire digérer comme on lui a montré ; au moins, elle aura un peu d’expérience si un jour elle a des enfants. Chose qu’elle ne peut ni ne veut penser pour le moment. Il y a déjà assez de bambins autour de la brune comme ça. Primrose chantonne gentiment contre le crâne de Lucy tout en se levant pour aller poser le biberon dans le lavabo de la cuisine, caressant doucement son dos alors que ses prunelles voient par la porte entrabaillée de la chambre des jumeaux Tim qui semble en plein milieu d’une histoire et Primrose a un léger sourire ; sa voix est trop basse pour qu’elle puisse l’entendre mais même sa fille a l’air happé. Lucy fait sa digestion, Primrose trouve de quoi lui changer sa couche et elle file la mettre au lit avant que Tim ne ferme la porte.

Ce dernier s’en va s’affaler sur le canapé et Primrose sourit un peu plus en entendant ses mots. “Je peux aller les chercher, si tu me dis où c’est.” Vu qu’elle est debout au milieu de la cuisine pour tâter le pack de glaçons et vérifier que c’est toujours frais et que ça n’a pas trop fondu. “Elle ne veut pas que je lui vole son papa.” Il est bien trop tôt pour dire si les enfants ont déjà développé des sentiments envers la brunette mais il est certain que la fillette est moins encline à vouloir laisser Primrose sur le terrain que Gabriel. Ce n’est pas quelque chose que la petite brune peut lui reprocher ; elle-même a tenté de se soustraire à l’attention et l’environnement de son père mais cela semble être une peine perdue. “Finalement, ça c’est bien plutôt passé. Est-ce que le sos n’était qu’une excuse pour me voir, M. Decastel ?” L’expression amusée au visage, elle s’assoit près de lui, la glace qu’elle applique délicatement sur son arcade parce qu’elle est bien décidée à ne pas le laisser comme ça, certainement pas sous sa surveillance en tout cas. Ses jambes repliées contre la cuisse de Tim, Primrose a son menton posé sur son épaule alors qu’elle observe ses traits. “T’en as pas besoin, j’espère que tu le sais.” qu’elle dit à voix basse de façon plus sérieuse. Parce qu’elle viendra quoi qu’il arrive, qu’importe l’heure et le jour. Se relevant légèrement, elle embrasse l’endroit délicat sous la mâchoire, profitant du calme du moment, sans enfant, sans film, sans pleurs. Ils l’ont bien mérité.

Tim a clairement l'impression de ne pas avoir été à la hauteur de l'événement et c'est d'ores et déjà quelque chose qui le hante. Pourquoi n'est-il pas comme tout le monde, toujours en mesure de faire face à tout sans le moindre accroc? Il n'y arrive pas, lui, il se laisse doucement emporter par le flot de ses émotions et le désastre est par conséquent toujours assuré. Il est nettement arrivé ce soir-là vu les crises en série des enfants qui avaient alors entraîné les siennes et après coup, Timothy ne peut que se sentir honteux de son attitude. Aurait-il pu l'empêcher cela dit? Ce n'est pas comme si c'était un trait de lui-même qu'il peut franchement cacher sur la durée. Au moins, Primrose sait ce qu'il en est désormais: elle doit se rendre compte qu'il est probablement plus fragile qu'il ne lui est apparu depuis leurs retrouvailles. Certes, elle avait déjà eu vent de l'affaire en le croisant au club, lui qui était suffisamment mal en point pour vouloir bouleverser la moindre de ses habitudes. Ce soir-là, le français aurait pu faire une crise. Si la danseuse n'avait pas été là pour le sauver des moqueries d'un client de la boîte, il est probable que le misérable garçon aurait fini à terre et que personne n'aurait pu l'aider à se relever. Primrose sous l'alias de Poppy avait réussi à l'apaiser ce jour-là, tout comme elle l'a fait à nouveau ce soir-là, dans un registre parfaitement différent. Aujourd'hui, tout est sensible entre eux, il y a les sentiments et il y a le regard que Timothy lui lance au moment où la porte se referme tout en délicatesse pour qu'aucun enfant ne se mette à brailler à peine la berceuse terminée. Decastel se sent si chanceux d'être aux côtés de la petite brune, il ne lui a peut être pas encore dit clairement mais c'est certainement un fait qu'elle a pu lire dans ses prunelles bleutées. En tout cas, Tim espère qu'elle sait qu'il ne joue pas avec elle, que tout cela compte pour lui parce qu'il n'est franchement pas le genre de garçons à s'amuser avec qui que ce soit. Il s'engage toujours, trop romantique et sensible qu'il est, et en règle générale, il le paie ultérieurement lorsqu'on se lasse de sa personne. Il prie intérieurement que Primrose ne soit pas de celles-là parce qu'il ressent tout plus intensément de la voir là, de la savoir chez lui sans avoir l'envie de s'enfuir loin de lui.

Il ne peut que l'observer, la chérir du coin de l'oeil alors qu'elle est si serviable pour proposer d'aller chercher les mouchoirs dans le placard de la cuisine. Timothy lui montre l'endroit où elle peut trouver les coupables, sachant fort bien qu'il risque d'être utilisés avant la fin de la soirée. Eux deux, les âmes sensibles. Eux deux, qui ont déjà passé la majorité de leur soirée à tarir leur corps de larmes tant tout leur tient à coeur. Timothy n'a pas l'impression d'en avoir encore en stock, contrairement à une dose de tendresse. Cela, il en a toujours énormément à revendre, sûrement une conséquence de toutes les années où Tim n'avait rien pu partager avec quiconque. Lui, seul au monde, loin du monde entier. Lui, seul au monde à souffrir jusqu'à ne plus être rien d'autre qu'un corps décharné, une âme en peine. Il ne veut plus ressentir ce genre de choses, il se complait donc à vivre cet instant présent, Primrose se présentant de nouveau dans son champ de vision, pas seulement avec des mouchoirs dans la main mais aussi la fameuse glace qui est censée s'occuper de son arcade endolorie. "C'est marrant, c'est plus Gabriel le jaloux d'habitude... Mais là, il est vraiment sous le charme." Il ressemble sûrement trop à son père pour ne pas apprécier Anderson, elle a tout de même joué aux petites voitures avec lui, de quoi le faire s'enticher de cette nouvelle figure parentale sortie de nulle part. Les pauvres enfants, Tim y pense souvent, à cette instabilité émotionnelle qu'ils doivent éprouver depuis le départ de leur mère et Decastel essaie toujours de faire attention à tout cela, ne pas les entourer de relations qui ne durent pas. En soi, c'est donc un gage de confiance qu'il fait à Primrose, même si elle ne peut que s'en douter rien de plus. Il la laisse agir, son paquet glacial contre son arcade, Timothy laissant échapper un gémissement plaintif parce qu'il sent que son os est à l'agonie. Il aurait vraiment dû faire ce genre de choses tout de suite, avant que le tout ne finisse enflé pire qu'un oeuf. Il va être beau comme cela, la honte à son apogée. Timothy peut cela dit observer la brune du coin de l'oeil, sentant qu'elle se pose sur son épaule, lui qui sourit avec une certaine timidité face à la question de la jeune femme. Peut-il avouer aussi simplement ce qui drape son coeur? "Je peux pas nier que... J'avais envie de te voir. Que tu me manquais... Un peu. Mais j'étais vraiment en crise, du moins mon arcade l'était." Il a un rire gêné, les lèvres de Primrose se perdant contre sa mâchoire alors que son bras indemne vient entourer la silhouette de la jeune femme, un besoin des plus vifs après la teneur de leur soirée. "Je tiens à m'excuser si j'ai été ridicule. Je suis trop sensible, souvent, et... Je fais des crises de panique depuis que je suis tout petit à cause de... Enfin, tu sais. Mais on va regarder Titanic et tout va aller à merveille. Avec ces merveilleux mouchoirs." Il tient la boîte avec fierté, calant plus affectueusement la silhouette fine de Primrose contre lui. Il hume son parfum et Tim se permet même de fermer les yeux, profitant ainsi une bonne minute du silence entre eux, se saisissant de la télécommande par la suite pour allumer sa télévision flambant neuve. "J'espère que t'as déjà préparé le film sinon c'est l'enfer, je vais devoir me séparer de mon koala et j'avais pas tellement envie de me faire subir ça." Il relève des sourcils amusés vers la brune avant de déposer un baiser contre sa joue, ne cherchant strictement rien de plus, juste la simplicité du moment, cette affection qui revient spontanément entre eux maintenant qu'ils retournent doucement dans leur bulle. L'endroit qui rend le plus heureux Timothy depuis quelques semaines.

Un léger rire sort de la bouche de Primrose quand Tim évoque le petit Gabriel sous le charme. Les doigts de sa main libre s’en vont caresser doucement son cou alors que ses lippes rôdent autour par-dessus, frôlant sans toucher pour autant. “La gente féminine a souvent plus de mal avec moi, étrangement.” Même Willow n’est pas la gente féminine ; Willow est une enfant, non, c’est une bambine et elle porte la vérité de l’innocence dans ses rétines. Elle n’a pas la haine de la gente féminine, elle n’est pas encore atteinte par tous les maux et les défauts du monde. Ce qui est encore pire. Primrose sourit mais elle a toujours l’image de la fillette qui s’accroche à son père en la regardant alors que ce dernier s’effrondrait incrustée en tête. Tim l’ignore, Tim n’a pas vu, Tim subissait mais la petite brune ne peut que s’en émouvoir en se détester profondément. Willow n’est pas non plus une enfant comme les autres, elle est celle de Tim. Il est normal que la pression soit plus forte alors que l’on parle d’un être humain pas plus haut que trois pommes. Mais elle est du sang Decastel et ça, ça change absolument tout. Au moins, savoir qu’elle aurait Gabriel le jaloux dans la poche est une petite victoire en soi. La pression n’a pas vraiment eu le temps de se faire vu l’urgence de la situation mais il est certain que les futures scènes impliquant les enfants seront toujours source de stress pour la petite brune, qui a l’air de respirer un peu mieux ce soir. Peut-être parce qu’il y a Lucy et qu’au final, c’est presque un soulagement de connaître la troisième tête blonde qu’il y a dans le coin.

Primrose arque un sourcil, faussement froissée, son sourire de coin soutenant que ses paroles ne vont être qu’un ramassis de bêtises et qu’il ne doit pas les prendre au premier degré. “Un peu seulement ? Donc je suis là que pour jouer les infirmières, c’est ça ?” Même s’il est certain que la petite brune jouera tous les rôles que Tim lui demandera ; il n’y a pas meilleur endroit, meilleure sensation que d’être près de lui, contre sa silhouette, où elle peut quasiment compter ses tâches de rousseurs, voir sa barbe naissante et contempler chaque nuance de bleu de ses yeux. Il la serre un peu plus contre elle et Primrose autorise même une de ses jambes à monter à moitié sur la cuisse du jeune homme, son nez complètement contre son cou alors que les vibrations de son rire se font entendre et sentir. Cependant, quand Tim commence à parler de ridicule, de s’excuser d’être trop sensible et de faire des crises de panique, la jeune femme relève la tête vers lui tout en fronçant des sourcils. “Hey, t’as pas à t’excuser d’être toi-même, d’accord ? Je veux la vraie version de toi, pas une fausse. Et puis, vu le nombre de fois que je me suis montrée bien trop sensible, ce n’est pas moi qui vais te juger là-dessus.” Sa main libre est remontée contre sa joue alors que ses lèvres jouent avec le coin des siennes. “Titanic n’est pas un film très joyeux donc j’ignore si tout va aller à merveille. J’aurai peut-être dû choisir autre chose.” Voilà qu’elle se retrouve incertaine de son choix parce qu’après ce qu’ils viennent de vivre et de faire subir à leurs esprits décidément bien trop émotifs pour cet univers et le suivant, la jolie brune se demande si c’est vraiment une bonne idée.

Mais visiblement Tim a l’air de vouloir tenter l’aventure malgré tout. Primrose se mord la lèvre avec un sentiment désolé qui se propage jusqu’aux traits de son visage. “Désolé de te décevoir mais non, j’ai pensé à ta guérison d’abord. Ca me semblait plus important.” Elle n’a pris le dvd ni les cupcakes qui traînent toujours sur l’espace de travail, là-bas, loin, hors des bras de Tim et Primrose s’en désole de même d’avance. La jolie brune se redresse pour se détacher, lui laissant le soin de retenir la glace contre son arcade, avant de se tourner de nouveau vers lui pour planter ses lippes contre les siennes parce que la joue, la mâchoire, le cou, ce n’est pas suffisant. Les tambours dans les reins jusqu’à son cœur se font entendre et elle se force à se lever en même temps qu’elle se détache de lui, délicatement. “Tu me manques aussi, Tim.” Debout mais baissée vers lui, ses doigts caressent doucement la joue du français alors qu’elle embrasse furtivement de nouveau ses lèvres. Il est temps d’aller chercher de quoi regarder et manger et profiter et pleurer aussi, encore, pour des raisons tout autre cette fois-ci et indépendamment d’eux-mêmes. Primrose va mettre le disque dans le lecteur et la boîte de cupcakes sur la table basse avant de s’avacher quasiment dans le canapé près de Tim. “L’enfer n’aura pas duré trop longtemps j’espère. J’ai fait aussi vite que j’ai pu!” La petite brune est presque fière alors qu’elle se cale contre l’épaule du jeune homme, un bras autour de lui. “Je suis prête quand tu l’es. J’ai hâte d’admirer Leonardo dans ses meilleures années.” Après tout, qui n’a pas eu un coup de coeur pour l’acteur durant cette période-là ? Par contre, il est clair qu’elle a moins hâte de pleurer. Mais c’est un classique et il est clair que Tim ne peut pas ne pas continuer son existence sans l’avoir vu.

Tim en est navré bien sûr, que d'autres femmes puissent autant mépriser Primrose. Lui ne comprend pas comment une telle réalité est possible, il la voit comme la douceur incarnée, cette jolie petite brune réservée et maladroite. Elle est beaucoup plus attendrissante que dangereuse mais apparemment, ce ne serait pas ce genre de discours qu'auraient Alex envers elle. Timothy n'ose pas imaginer tout ce qui a pu se dérouler jusque là, il préfère en tout cas ne pas concevoir ce qui arrivera si jamais le secret se doit d'être étalé à un moment donné. Parler de ses enfants est quelque chose de plus joyeux et moins effrayant, du point de vue de Timothy pour sûr. Cela ne doit pas être la même réalité au fond du crâne de Primrose parce qu'il est question de se faire une place au milieu d'un trio qui existe depuis désormais plus d'une année. Les Decastel ont trouvé leurs petites habitudes et puis, ils ont vécu leurs tragédies, de quoi rendre Willow suffisamment possessive pour coller son père. En réalité, il n'est probablement pas question de jalousie mais plutôt d'un instinct protecteur car la petite fille est terriblement empathique, autant que Tim à coup sûr, et elle a vu quelques femmes blesser son cher père. C'est en tout cas ainsi que Timothy peut le voir mais il ne peut pas franchement deviner ce qui se passe dans la tête de ses enfants. Tout ce dont il a conscience à l'heure actuelle, c'est que Gabriel est juste fan de Primrose, que Willow reste dans la méfiance mais le brun n'a pas peur une seule seconde que sa nouvelle compagne ne se fasse pas accepter dans cette bien jolie famille. Après tout, il n'a besoin que de cela, que de sentir les doigts de la danseuse contre sa peau, ses lèvres qui le frôlent sans jamais atteindre son épiderme. Il rêve, c'est juste cela, l'idéal est là, à portée de main et Timothy n'est pas enclin à se réveiller pour le moment. "Sache que ça changera avec ma fille." Il ne doute pas une seule seconde que Primrose saura ravir les grands yeux bleus de la petite Willow, parce qu'elle a réussi à le faire avec lui assez facilement, Timothy doit se l'avouer.

Ils ont de toute manière le temps de voir. Cette soirée n'est qu'une première rencontre et Timothy est persuadé que le tout se construira au fur et à mesure, en toute discrétion, cela, il ne l'oublie pas du tout. Une chance, les enfants ne parlent pas encore beaucoup et ils sont toujours beaucoup trop concentrés sur l'apprentissage de milliards de mots pour aller raconter tous les secrets de leur père au premier venu. Oh, bien entendu, Decastel se doute que les faits ne seront pas toujours en sa faveur, notamment lorsque l'adolescence viendra creuser son nez mais il ne veut décidément pas se rappeler à quel point le temps passe vite. Surtout pas alors qu'il sent Primrose aussi proche de lui qu'elle peut l'être, jouant avec ses nerfs en toute subtilité, pétillante et charmante qu'elle l'est, les yeux bleutés de Tim se voulant rieurs et taquins en retour. "Disons que je minimise le un peu..." Bien sûr qu'il réduit la portée du discours parce qu'il ne veut pas souffrir trop fort et surtout trop vite. Alors, Timothy sort la carte de la prudence, même si celle-ci apparaît bien obsolète quand Primrose se colle à lui, qu'il perd son souffle contre sa chevelure foncée. Il se sent bien, même s'il se doit de faire part de sa honte à l'idée de tout ce qu'il y a de négatif chez lui et qu'elle a désormais vu ce soir. Il ne veut pas paraître aussi vulnérable, même si Anderson le rassure parce qu'elle lui ressemble pas mal sur ce point, c'est une certitude. "D'accord, soyons nous-mêmes alors." Il sait qu'il en est capable, Tim, ce qui aussi présage bien souvent sa chute par ailleurs puisqu'il donne tout, qu'il sacrifie la moindre parcelle de son être dans toute son honnêteté et toute sa sensibilité. Il le fera aussi auprès de Primrose, lui qui laisse balader une main joueuse entre des mèches de ses cheveux, lui narrant par les yeux qu'au fond, il s'en fiche pas mal du choix du film. Tim n'en regarde que très peu, il préfère être dehors et il fait totalement confiance à la jeune femme sur le sujet.

Celle-ci semble néanmoins regretter d'avoir choisi le drame au lieu de la comédie, ce que Timothy ne peut pas comprendre en termes de cinéma. Par contre, il peut le saisir au moment de la réalisation que l'un d'eux va devoir se relever dans les secondes à venir pour s'occuper du DVD. Autant dire que Tim peste à l'intérieur, surtout quand il comprend que Primrose va se sacrifier pour la cause. Il n'a clairement pas envie qu'elle se déloge d'entre ses bras, elle qui, peu à peu, prend le pas pour se retrouver presque assise sur lui. Il aime cette tendresse qui se montre, qui se côtoie entre deux êtres qui en ont surtout terriblement manqué jusque là. Timothy n'a pas toujours su comment montrer ce qu'il peut ressentir mais maintenant, le tout devient naturel avec Primrose, elle qui l'embrasse avant de se relever. Decastel n'est pas très heureux de l'affaire mais elle lui dit qu'il lui manque alors, il accepte ce départ inopiné, gardant sa main dans la sienne, cherchant certainement à la faire rester deux secondes de plus. Finalement, il gagne deux baisers de plus avant qu'elle ne disparaisse quelques secondes pour s'occuper du film. Tim la regarde faire, se préparant psychologiquement à un visionnage relativement long. D'habitude, il ne tient pas assez en place pour rester assis longtemps, il est un homme d'extérieur après tout. Anderson revient quelques secondes plus tard sur le canapé, rayonnante alors que l'écran titre défile et que Timothy attrape la brune pour la caler contre lui un peu plus efficacement. "C'était une véritable torture madame. Pour la peine, je vais goûter ces délicieux cupcakes parce que j'ai beaucoup trop souffert, je mérite, tu comprends." Il lui en tend un, dégustant le talent pâtissier de la jeune femme, montrant très clairement qu'il saisit l'ampleur de ses capacités en la matière. Elle a probablement trouvé le meilleur client avec quelqu'un comme le français. "Hum. Entre Leonardo et moi, tu choisis Leonardo du coup, c'est ça?" Qu'il lance en plaisantant, se doutant bien qu'il n'y là aucun choix à faire. Tim appuie sur le bouton lecture sans crier gare, terminant son gâteau au même moment. "Je te promets pas de rester éveillé tout le long cela dit." Il a probablement décidé de ne rien promettre du tout, simplement de caler sa tête contre celle de Primrose, déposant un court baiser dans son cou en se concentrant vaguement sur l'écran, pas sûr qu'il suive l'affaire jusqu'au bout. Et puis, il y a sûrement un ou deux bébés qui vont choisir de se réveiller avant le générique de fin, Timothy les connait bien, ceux-là. "Après, je te fais confiance pour me donner de bons coups de coude. Surtout si un petit pleure. Je m'en occuperai." Oh, bien sûr, Tim s'occupera de tout, c'est ce qu'il croit tout le temps alors qu'il est à genoux de fatigue mais il attrape la main de Primrose et il la caresse, là dessus au moins, il n'a pas besoin de faire d'efforts irréels. Il est à l'aise, avant le naufrage du bateau, évidemment.

Le père parle, le père rassure que sa fille sera différente des autres et qu’elle laissera à la danseuse de quoi venir creuser sa propre place auprès de son géniteur. Primrose n’a pas à rétorquer quoi que ce soit, elle a juste à croire que le père connaît mieux son enfant qu’elle, qu’il possède ce regard vers un futur probable avec la confiance envers sa petite que la brune ne peut qu’espérer sans pouvoir en être certaine. Si elle angoisse déjà que Willow soit un problème, cela démontre à quel point elle prend la chose à cœur. Et si cela lui tient à cœur, c’est que c’est important. C’est même primordial. Il faut toujours que Primrose fasse ses preuves, partout et tout le temps, à devoir faire preuve d’une force qu’elle ne peut jouer et assumer que pendant un certain laps de temps. Tim l’a vu, elle ne l’est pas tant que ça, elle n’est pas de celles qui assument vaillement leurs positions, qui résistent contre vents et marées à la tempête en stagnant sur la lourdeur de leurs jambes. Elle se courbe et elle se brise à chaque fois, cela l’agaçant autant que ça l’afflige. La brune pourrait se laisser dominer par les craintes et le regard suspicieux d’une gamine d’un an à peine, parce que ladite gamine a plus de pouvoirs et d’impacts qu’elle n’en aura jamais. Et si ce n’est pas Willow, Primrose est certaine qu’Alex se fera une joie de mettre des mots et des formes pour démontrer à quel point le choix de Tim n’est pas le meilleur, qu’il continue à se brûler les doigts avec des femmes qu’il ne mérite pas ; pour ce discours, elle ne pourrait pas la contrer. Alors que le français lui offre ses prunelles fatiguées mais brillantes d’une lueur amusée, la jolie brune ne peut que constater qu’elle ne sera jamais à sa hauteur quoiqu’il arrive. Il peut lui murmurer toutes les excuses du monde d’être faible, d’être fragile, d’être sensible, Primrose ne voit en lui qu’un être touchant, réel et fort dans ce qu’il est, prêt à assumer jusqu’au bout, qu’importe ce les autres peuvent en dire. Si tu pouvais voir comment je te vois ; la douce voix du français qui revient en tête, ironiquement, à ce moment précis, et elle serait bien cohérente encore maintenant, prononcée par la jeune femme respirant son parfum et appréciant la chaleur de son contact qu’il offre et qu’il lui autorise.

Primrose effleure son épiderme pour y lâcher un baiser rieur, bien rassurée de savoir que le “un peu” n’a été là que pour la forme et non pour le fond. Elle pourrait se laisser perdre contre lui, d’autant que Tim navigue ses longs doigts contre ses mèches brunes et que c’est le geste le plus réconfortant et le plus apaisant qu’elle puisse avoir. S’il continue comme ça, il va se retrouver avec une masse légère contre lui s’endormant de la plus sordide des façons. Mais il y a le film à mettre et il faut se déloger de là et c’est la pire torture du monde - même avant celle d’être eux-mêmes. Tim n’aide en rien, il lui donne l’impression de la plus déchirure de l’histoire alors qu’elle ne s’envole que pour l’espace de quelques minutes et qu’elle ne quitte même pas son champ de vision. Ils en ont à ce stade-là, visiblement, où chaque micro seconde loin de l’autre, hors de leur bulle, est un manque de souffle supplémentaire, comme des étrangers dans un univers qu’ils ne comprennent pas. Primrose s’en émeut, son cœur qui s’emballe un peu plus à chaque réalisation de la sorte. D’autant que maintenant que la rencontre avec les enfants a été faite, il n’y a plus grand chose qui les empêche de se voir, en tout cas dans l’intimité.

Les cupcakes en guise d’offrande de pardon pour ne pas avoir su prendre les devants tantôt, Primrose a les lippes qui s’étirent avec joie malgré tout quand elle voit Tim pioché dans la boîte avec une excuse aussi bidon qu’un poil dramatique. Dans toute la générosité et l’altruisme dont le français est doté, il lui en tend un qu’elle attrape entre ses doigts avant de se caler contre lui. “Bien sûr, il faut apaiser toute cette souffrance, je comprends. Quoi de mieux qu’un cupcake en forme d’ours, dans ce cas-là ?” Le teint rieur alors qu’elle n’a pas une once de scrupule à détruire sa propre création, elle se dit qu’elle pourrait le torturer ou même faire compenser de cette torture d’une manière bien plus agréable. Cependant, vu la rougeur que ça lui fait monter aux joues rien qu’à l’idée, il est clair que cela ne reste que dans sa cabosse sans franchir ses lèvres, les mots aux sous-entendus salaces restant coincés dans sa gorge. A la place, Primrose fronce son nez face à la question de Tim, qui n’est sûrement que pour l’image de toute façon. “C’est un choix compliqué… Parce que lui meurt, tu vois, donc ça attire la sympathie. Et qu’il est vraiment adorable.” Elle se mord la joue, consciente qu’elle joue sur des nerfs qui n’ont peut-être pas besoin d’entendre un discours de la sorte, quand bien même elle lève son minois rassurant et souriant vers celui du jeune homme. “Mais toi, je peux t’embrasser et t’avoir dans mes bras donc…” donc même si je choisis Leonardo, c’est toi qui hante mon être. Même si Tim ne voit pas le film jusqu’au bout, elle s’en fiche. “Je le verrai pour deux.” Tant qu’il reste coincé contre elle. Primrose lève les yeux au ciel avec le sourire de coin qui promet que non, elle ne lui donnera aucun coup de coude. Il est déjà assez amoché comme ça et s’il a besoin de dormir, alors elle ne s’y opposera pas. Et les enfants, elle peut gérer, n’est-ce pas ?

L’univers a décidé qu’il serait amusant sûrement de tester cette théorie. Une demi-heure après le début du film, leurs mains toujours liées que Primrose continue de caresser en continu, il y a une porte qui s’ouvre dans la pénombre illuminée par les images du film qui montrent Jack se prendre pour le roi du monde. La petite brune ne s’en rend pas compte avant qu’elle entend un faible “pa-pa” ; la tête qui se tourne à gauche pour voir effectivement la petite Willow qui s’accroche à son doudou puis qui se tourne à droite pour y voir ledit papa complètement assommé de fatigue, les paupières closes et nullement dérangé ni par sa fille qui se vient de se réveiller ni par le film en lui-même. L’australienne ne réfléchit pas vraiment quand elle se détache de lui le plus délicatement que possible pour aller s’accroupir au niveau de l’enfant. “Qu’est-ce que tu fais debout, petite Willow ?” Cette dernière tripote son doudou avec un intérêt soudain avant de se dandiner sur ses deux petites jambes vers la cuisine pour montrer le placard. “T’as soif ?” Elle hoche la tête avec énergie - trop d’énergie, comment font les enfants pour avoir autant d’énergie ? - alors Primrose s’occupe de lui servir un verre d’eau et de l’aider à le boire. “Il va falloir retourner au lit, princesse. Pour être en forme demain.” Elle sourit légèrement, espérant atteindre le cœur de l’enfant avec douceur et patience, alors que Willow redemande son père de sa voix enfantine. “Papa dort. Comme Lucy et Gabriel. Il ne faut pas les réveiller. Tu penses pouvoir faire ça, Willow ? Ils sont fatigués et je suis sûre que toi aussi.” Mais tu n’as simplement pas envie de me voir traîner dans les pattes de ton père, n’est-ce pas Willow ? Primrose se pince les lèvres avec appréhension ; on ne sait jamais comment les enfants vont réagir. Est-ce qu’elle va criser, pleurer, faire un scandale et réveiller tout le monde, pour prouver que non, ce n’est pas la brune qu’elle veut, mais son père ? Est-ce qu’elle va l’écouter, être mignonne ?

Non. Absolument pas. Parce qu’y a son visage à la gamine qui commence à se transformer en terrain à larmes, qu’elle serre un peu plus son doudou contre elle et que les octaves commencent à être bien trop fortes, quand bien même il y a toujours le bruit du film en fond. “Non non non non, Willow, s’il te plait, ne pleure pas, s’il te plait.” Ne me fais pas sentir misérable et incapable, s’il te plait s’il te plait s’il te plait. Mais ce n’est pas toi qu’elle veut, petite idiote. Tu n’es rien pour elle. Tu n’es qu’une étrangère qui vient s’immiscer dans leurs vies de famille. Elle ne veut pas de toi. Et elle le prouve de la plus magistrale des façons en se mettant à pleurer avec des cris tout en courant vers le salon pour aller déranger son père endormi, Primrose à sa suite. “Je suis désolée, je voulais pas qu’elle te réveille, j’ai essayé de la faire retourner dormir mais je-” je ne suis pas sa mère. Elle n’est absolument rien donc forcément, pourquoi une gamine l’écouterait ? La jolie brune a les traits déformés par la culpabilité, les doigts qui jouent entre eux alors qu’elle observe la fillette réclamer les bras de Tim. Elle ne peut que la comprendre ; elle aussi, elle aimerait bien y retourner, dans les bras du Decastel. Mais il est certain qu’à ce rythme, le naufrage du Titanic arrivera bien avant que cela. Tellement pitoyable et incapable qu’elle est.

La journée a été des plus difficiles pour le jeune Decastel. Il n'a pas besoin de tergiverser cent ans pour réaliser qu'il ne tiendra pas les trois heures du film si tout cela ne comporte pas d'action à chaque scène. Le pauvre Timothy n'a jamais été un très grand friand d'oeuvres cinématographiques et télévisuelles, non pas que ce n'est pas intéressant bien sûr mais son cerveau n'a surtout jamais l'air enclin à tenir le coup sur la durée. Il a les yeux qui piquent depuis déjà une bonne heure, le tout sûrement sublimé par les diverses crises des enfants tout au long de la journée. Timothy espère en tout cas que les parents de Lucy auront bien profité de leur pause car de son côté, il est évident qu'il l'a senti passer. Le pauvre français a dû faire appel aux talents de Primrose, autant dire qu'il a plus stressé qu'autre chose de se dire que tant pouvait se passer entre elle et les enfants. Et si la rencontre se passait atrocement mal? A priori, Gabriel a été l'ange de l'année aux côtés de la brune mais c'est Willow qui fait sa difficile, ils ne peuvent jamais être raccord ces deux-là. Tim sait pertinemment que ce n'est qu'une phase, que sa petite fille a un côté protecteur assez justifié parce qu'elle est celle qui capte le plus souvent quand il pleure. Oh, bien entendu, le brun essaie de le cacher du mieux qu'il peut mais l'intelligence pratique de Willow n'est pas aisée à duper. L'enfant a souvent conscience qu'il est triste, qu'il est aussi épuisé et dans ces moments-là, la petite est bien incapable de rester trop loin de son père. Il est évident qu'il y a là des traumatismes de l'abandon de la maman et Tim se trouve le plus souvent décontenancé face à la réalité. Il n'y a pas la moindre solution puisque celle-ci ne reviendra pas et que jamais elle ne pourra être réellement remplacée dans le coeur des deux enfants. De toute évidence, Timothy n'en demande pas tant, il croit encore qu'il sera assez pour les jumeaux mais il a aussi tous les doutes qui le hantent quand il voit l'état de son compte en banque, de toutes les dettes qui vont vite s'accumuler s'il ne trouve pas d'alternatives durables.

Oui, le jeune brun a tout de même tout un tas de soucis à gérer mais il ne va pas le montrer à Primrose. Pas ce soir-là. Pas après tout ce qu'ils ont déjà enduré. A la place, il préfère amplement se caler contre elle, profiter de ses caresses et ses baisers, la tendresse remplaçant toutes les peines qui les ont mis à mal avant la mise en marche du film. Timothy sourit en écoutant les mots de la petite brune, il n'y a probablement qu'elle qui peut rougir en parlant de manger ces merveilleux cupcakes. Il ne se doute pas une seconde de la pensée qui est passée par là, dans le crâne de la danseuse, non, il se contente de sourire car la nourriture est suffisamment bonne pour qu'il en oublie tout le reste. Il avale le tout avant de se caler bien confortablement contre la belle Anderson, elle qui expose des arguments en la faveur de Leonardo, il devra probablement se contenter des restes. "Je retiens que pour avoir ma chance, il faut que je meure..." Il lui fait un clin d'oeil car il y a un léger problème dans cette perspective: comment Primrose pourra t-elle obtenir ses bras et ses lippes s'il n'est plus de ce monde? Pour sûr qu'elle ne devrait pas être d'accord avec le concept et puis, de toute manière, Timothy n'a pas le temps d'argumenter plus avant puisque le film débute et qu'il essaie un maximum de se concentrer.

L'échec est flagrant pour sûr puisqu'il ferme les yeux après le premier quart d'heure: pourtant, le film est a priori intéressant mais Tim sent les caresses de Primrose contre sa main, son odeur qui le hante et il est définitivement bercé dans un cocon douillet. Comment lutter contre le sommeil dans ces conditions? Le jeune homme n'en a pas forcément envie, surtout qu'il a l'assurance que la brune soit encore là au réveil. Pendant quelques temps, plus la moindre pensée ne passe par son cerveau et il flotte dans les airs sans se rendre compte de rien. Le libraire aurait probablement aimé que le moment dure un poil plus longtemps puisque ses yeux s'ouvrent à l'instant où des pleurs résonnent à ses oreilles, suivis d'une petite silhouette qui vient se caler contre lui. Willow est réveillée et elle est apparemment inconsolable. Tim l'amène jusque sur ses genoux et la berce tout en douceur, tant de tristesse dans un si petit corps. "Tu as encore fait un cauchemar, Wiwi?" Il sait que tout cela la hante, que le départ de sa mère a provoqué en elle une véritable tempête que Tim ne maîtrise pas toujours. Ses yeux toujours endormis se relèvent vers Primrose qui porte sur elle un regard profondément désolé. "Eh, c'est rien. Elle fait ça toutes les nuits en ce moment, tu n'es pas responsable, Prim'." Il lui fait un beau sourire parce que c'est une réalité, Anderson ne doit pas prendre ce genre de crises pour elle, pas quand il s'agit d'enfants qui ont déjà tant vécu et qui ont récolté de l'instabilité émotionnelle de leur père. Tim murmure des mots rassurants à la petite fille, la berçant de longues minutes, priant aussi pour qu'elle se rendorme, ce qu'elle termine apparemment par faire puisque sa respiration s'égalise. Il tente de se relever le plus doucement au monde pour aller la porter vers son lit, le français reste le plus discret possible sur le chemin du retour également car il sait que rien n'est jamais gagné avec la petite fille. "Ne stresse pas, elle fait des cauchemars depuis que sa génitrice a disparu. Elle est convaincue que sa propre mère la détestait et que c'est pour ça qu'elle est partie... La pauvre Willow a récolté des pensées douteuses de son père, va." Il s'approche de Primrose, les boucles en bataille et les cernes plus grands qu'une valise sous ses yeux. Il attrape ses mains quelques instants, la regarde et lui indique ainsi à quel point elle a de l'importance à ses yeux, que rien de ce qui arrive n'est de sa faute par la même occasion. "Désolé pour le film, je crois que la journée a été longue mais je veux toujours le voir, bien sûr, quand l'énergie sera plus présente. Oh et j'ai pas pensé à ça mais... Tu veux aller te coucher, toi? Je peux rester dormir sur le canapé hein." De toute façon, Tim s'endormirait sur le sol, il n'a jamais été très difficile sur la question du confort durant ses heures de sommeil. Il dépose un léger baiser sur le front de Primrose, sentant qu'elle paraît vulnérable après ce problème avec Willow alors il la réconforte comme il peut, caressant le creux de son dos et sa chevelure sombre. Elle ne doit pas se flageller pour ce qu'elle ne contrôle pas et du moment qu'ils sont ensemble, Tim est comblé.

“Je te l’interdis.” De mourir. Quelle idée saugrenue, idiote, stupide, Decastel, vraiment. Le regard a beau être amusé, les traits rieurs qui se veulent moqueurs des propres de la brune, il est certain que cette dernière ne veut pas penser à un monde sans Tim Decastel dedans. Il y manquerait quelque chose à ne pas en douter. Primrose manquerait plein d’autres choses. Une petite pile de besoins devenus nécessaires au fil du temps, dans la progression de leurs rencontres, de toutes ses nouveautés qu’ils se découvrent et qu’ils partagent avec une délicatesse fragile mais assurée. Pour appuyer ses propos que sa main vient se crisper contre la sienne, que ses phalanges s’emmêlent un peu plus et que si lui a le courage de faire un clin d’oeil, Primrose ne peut que voir comme une prophétie sordide ; non, il ne va pas mourir, calme-toi, détends-toi, il est bien vivant, tu entends son pouls contre toi, tu n’as pas à t’inquiéter pour rien, Anderson, bon sang. Que la stupidité règne en maîtresse dans ce petit gabarit, elle n’est même pas fichue de prendre la chose au dixième degré comme il se doit ; la faute à la peur qu’il lui a foutu tantôt et aux émotions cumulées des minutes précédentes. Il est fort mais pas non plus un surhomme, Tim. Il est fort dans sa fragilité, dans sa sensibilité et Primrose a peur, elle a peur qu’il a eu au moins une fois dans sa vie les mêmes pensées qui ont été les siennes pendant autant de temps. Alors non, elle ne peut pas rire sur ce sujet ; elle ne peut que se prouver qu’il ne va nulle part et lui prouver que non, sa chance est avec elle, près d’elle, vivant et vibrant. Ses lippes froides et ses prunelles sans âme derrière n’auraient aucun intérêt pour la jolie brune.

Debout, comme l’étrangère qu’elle se sent, Primrose joint les mains, elle torture ses doigts entre eux avant de finir par croiser les bras pour reprendre un peu le contrôle de son corps à la poussée de stress bien trop fulgurante tout d’un coup. Personne ne s’y attendait, pas plus son corps que sa tête, alors que ses yeux observent la scène du père et de la fille en toute discrétion, se contentant de les baisser brièvement quand Tim la rassure en lui ôtant toute responsabilité. Evidemment qu’elle n’est pas responsable, la brunette. La gamine ne la connaît même pas. Et elle ne la connaît non plus pas assez pour pouvoir la consoler ou, au moins, la faire retourner se coucher tranquillement. Ne pas prendre cette impasse comme un stop. Ne pas voir un signe quelconque parce que ça n’existe pas, les signes. Il n’y a pas de mauvaise ou bonne direction, il n’y a que celle qu’elle a choisie. Et c’est celle qui l’amène vers Tim. Si Primrose peut céder de garder sa bouche close face à Caleb et Alex, elle peut bien tenter de survivre une enfant qui a l’habitude de faire des cauchemars sans pour autant le prendre pour son grade, n’est-ce pas ? Elle finit par s’asseoir sur l’accoudoir du canapé alors que Tim la retourne dans sa chambre et soupire tout en passant une main dans sa nuque. S’enticher d’un père de deux enfants, quelle idée, aussi. Mais qu’est-ce qu’elle est supposée faire ? Eteindre tous ses sentiments qui naîssent, qui fleurissent, qui lui donnent un peu de bonheur parce qu’elle a peur, qu’elle se sent impuissante ? Face à des enfants, face à un couple a priori parfait ? C’est idiot et ce n’est pas ce qu’elle veut.

Au moins, tout ceci à le mérite de montrer qu’une fois la présence de Tim se refait près d’elle, Primrose est toujours aussi certaine de ce qu’elle veut ; lui, tout simplement. Il lui explique un peu plus le fonctionnement de sa fille et la jolie brune fronce son nez tout en mordant sa langue. “C’est triste que les enfants doivent payer pour les erreurs de leurs parents.” En l’occurrence, de l’absence de leur mère qui est normalement une aiguille vitale dans la vie d’un enfant. Elle espère sincèrement que Willow saura grandir en pensant mieux, en pensant avec moins de négativité et plus de sagesse ; un mal peut être parfois un bien. Si la mère est partie, c’était un signe qu’elle n’était pas à la hauteur ? Elle n’en sait rien, Primrose, elle ne peut que faire des suppositions, les yeux dans le vague, avant que Tim la ramène vers lui en lui attrapant les mains. La voix aussi douce alors que son teint est fatigué, les lèvres qui frôlent l’espace de son front et sa main qui vogue contre elle dans un bercement qui fait doucement flancher ses paupières. “Ne sois pas idiot. Tu n’as pas de koala géant dans ton lit, à part si tu me caches des choses.” Primrose enfouit son visage contre lui, les bras s’enroulant autour de lui. Il y a aussi la fébrilité intérieure qui prend la relève, qui accentue son rythme cardiaque et elle tente de contrôler le tout en faisant mine que ce n’est rien ce qui est en train de se profiler, là. No big deal. Vraiment ? “On peut dormir ensemble. Je pense qu’on a atteint ce stade, non ?” La jolie brune détache son minois de lui pour examiner la figure de Tim et les expressions qui peuvent y passer malgré ses airs endormis. Normalement, les stades ont été tous dépassés quand on voit à quoi a ressemblé leur première rencontre mais la saveur n’est pas pareille ; et c’est bien pour cela que si, c’est un big deal que de penser à pouvoir simplement s’endormir contre lui. Avoir le visage de Tim au réveil lui paraît assez séduisante comme une idée, alors que ses doigts s’en vont caresser sa joue. “Enfin, si tu le veux bien.” Primrose ne veut pas le brusquer. Pas plus qu’ils ne l’ont déjà fait ce soir.

Il n'a clairement pas l'intention de disparaître de sitôt, même si ce fait n'a pas toujours été avéré. Timothy a si longtemps été misérable, prêt à se laisser emporter par les tourments de l'au delà, simplement pour ne plus avoir à souffrir autant. Il n'a plus ce genre de pensées maintenant qu'il a les enfants, qu'il s'est trouvé de nouveaux objectifs et qu'il peut faire preuve d'un optimisme beaucoup mieux placé. Ce cher Decastel se sent beaucoup mieux dans sa peau, même s'il connaît encore quelques difficultés à vivre avec sa sensibilité. Il l'a montré un peu plus tôt et franchement, le français ne peut que le regretter. Il a toujours la sensation d'inquiéter les individus autour de lui quand il se perd dans des cirses qu'il n'est pas en mesure de maîtriser. Il a tout mis en oeuvre pour s'acquitter de ce genre de soucis mais malheureusement, Tim n'est pas encore l'homme parfait. Il ne le sera potentiellement jamais mais est-ce si grave que cela, Ses défauts font aussi partie de ses charmes, non qu'il s'en trouve énormément. Le libraire n'a jamais eu une véritable estime de lui-même, il est toujours en meilleure forme lorsqu'on ne parle pas de lui. Il ne voit le plus souvent que ses failles et ses défauts, mettant de côté tout ce qu'il a de merveilleux au fond de lui. Il n'y a qu'à voir la manière dont il se comporte en souriant à Primrose, une fois qu'elle a osé dire qu'il n'a pas intérêt à mourir. Elle changera peut être d'avis un jour ou l'autre: de toute évidence, Tim ne s'est jamais vu comme une personne importante pour autrui et si Primrose lui offre cette place, il sait qu'il sera l'homme le plus chanceux de cette planète. Pour le moment, le brun n'ose pas rêver ni trop haut ni trop loin car le futur peut encore lui réserver des surprises, il a bien eu l'occasion de s'en rendre compte avec tout ce qu'il a traversé pour en arriver jusque là.

Le français n'a pas le temps de partir dans de jolis songes néanmoins car Willow fait son entrée fracassante au beau milieu de la nuit noire et Timothy sacrifie le peu de sommeil qu'il a eu le temps d'avoir pour apaiser les douleurs de sa petite fille. Il a bien évidemment le coeur brisé de la voir dans cet état chaque nuit depuis des mois et malgré ses visites chez le médecin, aucune solution n'a été trouvée pour vaincre le traumatisme de l'abandon dont la jeune enfant fait preuve. Tim doit simplement être patient, même s'il ne peut plus se permettre d'envisager des grasses matinées, voire même des simples siestes de plus de quinze minutes. Il prend ce qu'il peut, sans trop en demander, profitant tout bonnement de l'instant présent qu'on lui offre, celui-là même qui vient faire taire tous les drames une fois que Willow est de nouveau dans son lit. Au milieu du salon, il n'y a plus que Primrose et lui, leur affection prenant le pas sur tout le reste, Tim la gardant contre lui car il ne veut pas qu'elle se sente en détresse après avoir été témoin de l'événement avec sa fille. Personne n'y est peut rien, du moins personne de présent dans cette pièce car il y a bien un être sur cette terre qui a causé tout cet enfer. "C'est toujours comme ça, malheureusement." Les enfants ont toujours à subir les malédictions de leurs géniteurs, se retrouvant au milieu de tragédies qui ne les concernent pas le moins du monde. C'est ce qui est arrivé aux jumeaux mais ils ne sont certainement pas les seuls dans cette délicate situation. Tim n'a pas l'intention de se remettre à pleurer pour ce soir alors il se concentre plutôt sur la silhouette de la brune, sur la manière dont elle vient se caler confortablement contre lui alors qu'il lance son idée ridicule. Enfin, pour Timothy, c'est important de connaître les convictions de la jeune femme, lui qui ne sait jamais trop où se placer, ce qu'il a le droit de dire ou de faire. Apparemment, Primrose suggère que le temps est venu de mettre un peu moins de distance entre eux, tout en douceur parce qu'elle ne compte pas le forcer non plus. Comme s'il y avait une quelconque possibilité d'en arriver là en réalité. "Promis, aucun koala sous les draps. Tu sais, les stades avec nous, c'est pas tout à fait dans l'ordre de base mais je préférais savoir ce que tu en pensais." Il pense toujours à autrui et maintenant, à elle en particulier car il s'agit de Primrose, qu'elle compte, qu'il veut prendre soin d'elle avant tout le reste du monde. "Je serais ravi de te faire une petite place dans mon lit, Prim'." Il lui sourit avec cet air spontané et cette douce joie à l'idée de ne pas se réveiller tout seul. Mine de rien, les dernières semaines n'ont pas été faciles et le besoin d'affection de Tim n'a pas franchement pu s'exprimer au milieu de cette fatigue qui le suit partout. "T'as emmené tes affaires? Je veux dire ta brosse à dents, ton pyjama tout ça... Enfin, je peux te prêter des trucs si tu as besoin." Il a toujours tout ce qu'il faut, Timothy, parce qu'il est prévoyant pour des bêtises. Ne jamais manquer de rien, c'est capital, lui qui garde Anderson contre lui alors qu'il ouvre la porte de la chambre pour qu'elle puisse voir l'endroit dans lequel elle va pouvoir se reposer pour la nuit. "J'espère que les fleurs te dérangent pas, sinon je peux les mettre dans le salon." Il y a quelques semis dans un coin parce que Tim teste différentes températures et que c'est le seul endroit de son lieu de vie où les petits ne peuvent pas venir fouiner. "Enfin, voilà, c'est modeste et aucun koala en vue." Tim n'en a pas tellement besoin si Primrose est là, il n'y a pas de substitut qui existe à la belle brune qu'il regarde avec chaleur. Il est vraiment heureux qu'elle soit là, avec lui.

C'est toujours comme ça, malheureusement. Primrose aimerait dire oui. Elle aimerait pouvoir rejeter la faute sur ses géniteurs, sur sa famille, sur ses parents pour ce qu’elle est, pour ses angoisses, pour ses pensées. Cela serait plus simple. Mais Primrose sait qu’elle n’a pas une histoire larmoyante. Elle n’a rien pour justifier ce qui lui passe par la tête. Elle n’a pas vécu d’enfance singulière. Elle n’a pas connu de violence, elle n’a pas grandi au milieu du désarroi, de l’abandon, d’un manque d’amour. Non, la jolie brune n’a pas à se plaindre et pourtant. Il est triste de constater qu’à la moindre occasion de pouvoir se débarrasser de son nom de famille, elle le fera. Parce que c’est un poids malgré tout. Que ses parents, quand bien même ils ont toujours eu toutes les meilleures intentions au monde pour leurs enfants, n’ont jamais été franchement très justes. Primrose a le syndrome de l’enfant du milieu, si celui-là existe ailleurs que dans sa tête. Mi-cadette, mi-aînée, une position jamais assumée et un amour compliqué envers ses sœurs qu’elle a toujours connu sans jamais pouvoir comprendre. Sûrement la jalousie, encore et toujours, jusqu’à s’en laisser étouffer. Mais tout ceci, ce n’est pas à Tim qu’elle le confiera. Pas maintenant en tout cas. Parce que ses enfants souffrent véritablement d’un manque et qu’il serait indélicat de se comparer à elle, qui a grandi et vécu et connu ses deux parents, ensemble et amoureux depuis toujours.

Alors elle préfère se distraire - et le distraire aussi de la souffrance tangible de ses enfants - en se rapprochant de lui. C’est vrai que les règles n’ont pas été vraiment très respectées quand on regarde leur parcours, Primrose en émet même un sourire presque amusé quand Tim évoque leur première rencontre - alors qu’il n’y a pas franchement de quoi en être fière. Mais pour une fois, et sûrement parce que son cœur et ses nerfs sont un peu plus légers, elle se plaît à croire qu’il y avait une raison précise pour qu’elle rencontre le jeune homme de cette façon. Jamais elle ne pourra renier que ce fut une des rencontres les plus belles - sûrement la plus belle - surtout quand elle voit où ils en sont à l’heure actuelle. Au chevet de chambre, avec la voix prévoyante qui lui demande si elle a ce qu’il faut - absolument rien, Tim. Primrose en rougit de surcroît. “J’avoue que j’ai pensé à la soirée mais pas à la nuit donc… Je n’ai rien.” Elle a juste eu le temps de ramener ce qui pouvait leur être agréable pour supporter la soirée mais sa réflexion a été engloutie par la détresse palpable de Tim. La jolie brune se sent profondément idiote sur le coup et aussi gênée parce que les solutions pour ses vêtements de nuit le sont au possible. Ce qui est encore plus stupide car il l’a déjà vu avec absolument rien. Non, il a vu Poppy sans vêtement. La nuance reste là.

Cependant, voir Tim qui a l'air véritablement soucieux que quelque chose puisse déplaire, Primrose s’en émeut doucement, comme si elle ne méritait pas une telle effusion de bienveillance à son égard. La brunette est touchée, elle a les prunelles qui brillent un peu plus sous la lumière tamisée de la chambre alors qu'elle passe ses bras autour du cou de Tim. "Il ne pourrait y avoir que de la paille au sol que ça me suffirait parce que t'es là." Ça vaut tous les lits, tout le confort du monde tant qu'il continue de l'honorer de sa présence et de la choyer comme elle ne peut penser qu'elle y a le droit. Tim est si touchant, si adorable, si prévenant, elle ne peut pas mettre autant de qualités chez elle en avant - elle n'a jamais su le faire, il faut dire. "Non pas que je me fiche de ton environnement, hein." Qu'elle recalibre automatiquement pour ne pas le laisser penser qu'elle s'en fiche de ses fleurs ou de l'espace modeste - alors que c'est tout simplement secondaire. Primrose a les doigts qui vont doucement caresser la racine de ses cheveux à la frontière de sa nuque, se mordillant la lèvre. "Mais c'est près de toi que je veux dormir, pas de tes plantes ou du reste." La pointe de ses pieds qui relèvent sa hauteur pour que ses iris soutenant les siens alors qu'elle l'incite gentiment à se baisser contre elle, ses lippes viennent frôler la lisière des siennes, ses veines temporisant un rythme bien trop soutenu pour son propre bien. "J'aurai juste un problème avec l'univers entier s'il empêche que tu sois la première chose que je vois en me réveillant demain." Les mots sont sincères, les prunelles bien trop occupées à caresser les siennes pour laisser ses lèvres assouvir son envie de l’embrasser. Primrose veut le voir au réveil, au coucher, en mangeant, en riant, en souriant - son sourire, à tout jamais, qu’il perle et qu’elle en soit la raison, c’est un bel objectif, ça aussi. Oh qu’elle flanche de plus en plus pour lui, la jolie rose, capable pour une fois d’assumer ses paroles. Presque sans rougir. Sûrement bien trop occupée à admirer ses traits délicats. “J’ai très envie de t’embrasser.” Alors c’est quoi qui t’en empêche ? Sûrement de provoquer une apocalypse quelque part. Comme si confier à Tim cette tâche-là est plus prudent. Clairement, oui.