I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
La maison de campagne était encore plus belle que ce qu'elle avait pu imaginer. Les rénovations lui avaient donné un coup de jeune, sans pour autant lui avoir retiré son âme. Joanne avait tellement hâte de s'y rendre. Cette semaine avait été affreusement longue. Son fiancé ne faisait que rentrer plus tard, tentant de grapiller des heures supplémentaires dans l'espoir de gagner un peu plus. Il rentrait épuisé, et tard le soir. Il n'avait malheureusement pas beaucoup vu son petit garçon de la semaine. Daniel faisait désormais ses nuits. Rares étaient les fois où elle devait se réveiller pour le nourrir. Parfois, ce n'était que parce qu'il avait fait un mauvais rêve. Leur fils s'émerveillait et s'épanouissait de jour en jour. Il adorait tenir en main et suçoter des petits hochets, et les agiter pour que les grelots se trouvant à l'intérieur émette quelques sons. La jeune femme avait même eu droit à quelque rires aux éclats de sa part lorsqu'elle jouait avec lui. Elle l'aimait tellement. Cette paire d'yeux bleus qui pétillait sans cesse, ce si beau visage qui souriait tout le temps. La relation qui s'était instaurée depuis sa naissance entre eux était plus que fusionnel, plus que symbiotique. Bien sûr, il adorait être dans les bras de son père. L'étreinte n'était pas la même, ni les mots, mais l'amour était au moins tout aussi grand. Ils allaient pouvoir rattraper tout ce temps perdu l'espace de ce weekend là. Jamie avait pu quitté le travail plus tôt le vendredi pour qu'ils puissent prendre la route en début de soirée. La jeune femme s'était chargée de préparer toutes les affaires dont ils auraient besoin, et de quoi commencer à personnaliser leur seconde maison. Daniel s'était assoupi pendant la route, mais ses grands yeux se rouvrient dès que la voiture s'arrêta devant leur havre de paix. Le soleil commençait à peine à se coucher, le ciel était jaune et orangé, le fond de l'air était encore très agréable. Dès que Jame avait éteind le moteur du véhicule, Joanne lui caressa tendrement les cheveux. "On y est." lui dit-elle tout bas en lui souriant. Elle l'embrassa avant de sortir de la voiture et de récupérer leur fils, pour pouvoir entrer tous ensemble dans la maison. Ils s'occuperont des bagages plus tard. L'émerveillement était là, tout était parfait aux yeux de la jeune femme. Ils prirent le temps de se familiariser avec l'endroit avant de se décider à rentrer tous leurs bagages, et s'installer au plus vite. Daniel retrouva rapidement sa place dans le transat, où il se laissait bercer par la voix de ses parents jusqu'à ce qu'il s'endorme. Joanne avait déjà préparé leur dîner à Brisbane, il n'y avait plus qu'à réchauffer le tout au moment où ils voudront dîner. Le père de famille emmena leur fils dans sa chambre, car il dormait déjà profondément. La nuit avait déjà bien commencé pour lui. Pendant ce temps, elle sortir deux flûtes à champagne et quelques biscuits apéritifs. Lorsque Jamie revint, elle lui tendit l'un des deux verres tout en l'embrassant une nouvelle fois. "Nous devrions trinquer à notre second chez nous." dit-elle tout bas. Elle s'y sentait vraiment bien. Un feu de cheminée serait la bienvenue, mais l'air était tellement plus léger, agréable, avec ce parfum de campagne qui lui avait beaucoup manqué depuis qu'ils avaient visité la bâtisse pour la première fois. La belle blonde devint soudainement bien plus gênée. "Et si tu pouvais dire aussi à mes parents que ça fait aussi office de célébration pour mon anniversaire, ça m'arrangerait." Oh non, ce n'était pas le jour même de son anniversaire, il était déjà passé. Mais Joanne ne faisait pas partie de celle qui aimait célébrer un événement. Non pas qu'elle le vivait mal, mais elle avait toujours appréhender quelque part le passage de la trentaine. Elle n'avait jamais véritablement voulu le fêter, même si bien des gens se seraient déplacés pour ceci. Elle n'y voyait pas vraiment d'intérêt, et elle ne se serait pas sentie à l'aise. Les seuls qui l'obligeaient à le fêter un minimum était ses collègues, qui l'emmenaient chaque année dans un restaurant réputé. Ses parents le lui reprochent chaque année, qu'elle ne veuille rien organiser.
C’est avec grand plaisir que j’attrape la coupe de champagne que me tend Joanne. En effet, nous pouvons célébrer notre installation et notre premier week-end dans notre second chez nous. Ce cocon à la campagne qui a su se faire attendre. Les rénovations ont su éveiller tout le charme endormi de chaque pièce. Les sols et les murs ont retrouvé tout leur éclat, ainsi que les quelques meubles que nous avons gardé des anciens propriétaires –ceux qui faisaient décidément trop partie intégrante des lieux pour que nous ayons à cœur de les en arracher. L’endroit correspond bien à cette volonté que nous avons de tendre à plus de simplicité par moments –ce qui n’est pas bien difficile en ce moment. Daniel est déjà endormi dans sa chambre, à l’étage, qu’il découvrira plus en détail dès demain, après une bonne nuit de sommeil. C’est un lève-tôt, mais au moins, il ne réveille plus sa mère pendant la nuit. J’avoue être un peu déçu de ne pas pouvoir plus profiter de lui ce soir, moi qui espérais passer un petit bout de notre première soirée ici avec mon fils. Mais nous aurons tout le temps de nous voir pendant le reste du week-end je suppose. Joanne et moi avons donc droit à un tête-à-tête, ce qui s’est fait tout aussi rare cette semaine dans la mesure où même en étant à la maison, mon esprit se trouve déjà dans mon lit lorsque je suis rentré du travail. Parfois je me dis que les heures supplémentaires ne sont pas si utiles que cela, que je me donne trop de mal et d’énergie pour rien. Pour de l’argent. Je pense couper court à ce nouveau rythme dès lundi, et reprendre mes efforts dans le sens inverse pour être rentré tôt auprès de Joanne et de Daniel. Rien ne sert de vouloir récolter des dollars supplémentaires pour eux si je ne peux pas profiter de leur présence. Il n’est pas question de vivre avec ce genre de regrets. Quoi qu’il en soit, le tir sera rectifié. Je m’attends à ce que la jeune femme approche sa coupe de la mienne pour trinquer, mais elle reprend la parole pour me demander d’informer ses parents que cette soirée fera office de fête d’anniversaire. « Ton anni… » Ma mâchoire se décolle quelques secondes avant que je me sente comme le plus grand idiot que la Terre ait jamais porté. « J’ai oublié ton anniversaire. » Le plus juste serait de dire que je n’en ai jamais su la date, ce qui est sûrement pire. Mon regard dans celui de Joanne passe d’un iris à l’autre pour essayer de déterminer à quel point elle m’en veut, mais je n’y vois que le reflet de ma propre culpabilité. Penaud, dépité, je ne sais pas quoi faire de mes dix doigts à part les passer nerveusement sur mon menton et ma nuque. Comment est-ce que je n’ai jamais pu penser à lui demander la date de son anniversaire ? Comment ce détail a pu ne jamais me traverser l’esprit ? Est-ce que c’est une nouvelle preuve d’égocentrisme, ou juste de stupidité ? « Je suis tellement désolé. » dis-je finalement, mais je me trouve impardonnable. Je n’ai aucune excuse valable, elle le sait très bien. Quoi qu’elle soit capable de m’en trouver –le travail, le stress, le fait que je sois un homme fort occupé, et toutes ces choses qui donnent des justifications pour tout vraiment trop faciles. « Je n’ai pas de cadeau pour toi… » je murmure, le regard bas, et quand je réalise que je n’ai d’ailleurs plus les finances pour lui offrir quelque chose qui soit à la hauteur de l’événement –après tout, ma fiancée passe le cap des trente ans, ce n’est pas n’importe quoi- je me sens encore un peu plus petit. Je pense que de cela elle se formalisera moins que du fait que je ne me sois jamais intéressé à sa date de naissance. Mais quel abruti. Je fais quelques pas dans le salon. Je n’ai pas l’impression que ma fiancée soit prête à me sauter à la jugulaire pour cette histoire, néanmoins, je m’en veux énormément. « Je dois être le pire fiancé qui existe. » je lâche avec un bon gros soupir, me laissant tomber dans le canapé du salon. Je pose ma coupe sur la table basse et passe mes mains à travers mes cheveux, toujours aussi dépité. Je ne sais pas trop comment me rattraper. Je ne peux même pas lui proposer de lui faire à dîner puisque la jeune femme a déjà tout préparé.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Joanne s'attendait à voir cette mine déconfite sur le visage de son fiancé. C'est le genre de choses qu'il n'avait pas pensé à demander, mais elle avait aussi toujours fait en sorte que ça ne lui vienne jamais à l'esprit. Elle se doutait bien qu'il allait mourir de honte et de culpabilité. Décomposé, il en perdait ses mots, cherchant quoi faire de ses mots. "Tu ne l'as pas oublié." dit-elle d'un ton calme, en lui souriant tendrement. "Tu ne le savais pas." Et les parents de la jeune femme aurait bien fini par en parler à leur gendre à un moment ou à un autre. Joanne avait préféré prendre les devants avant qu'ils n'organisent quoi que ce soit. Un silence alourdit l'ambiance de la pièce. Elle se sentait désolée de le faire autant culpabiliser , mais c'était un passage obligatoire. "Tu n'as pas à t'excuser, mon amour. Il n'y a rien à pardonner." lui dit-elle tout bas. Mais il ne voulait rien entendre, s'en voulant encore plus que de ne pas avoir pu lui acheter un cadeau. Ce n'était pas ce que Joanne voulait, être couverte de cadeaux. Elle n'avait jamais empêche Jamie jusque là, parce qu'elle savait qu'il ne pouvait pas s'en empêcher. Le bel homme se laissa tomber sur le canapé, tout en posant sa flûte de champagne sur la petite table. La belle blonde le rejoignit, et s'installant juste à côté de lui. Son verre fut posé juste à côté du sien. Du dos de ses doigts, elle lui caressa tendrement la joue. "Tu es le plus merveilleux fiancé qui soit." lui assura-t-elle, en l'embrassant au coin de bouche. Elle voyait bien que ça le travaillait encore, qu'il s'en voulait toujours autant. "Je n'ai pas besoin de cadeaux, tu sais." Elle haussa les épaules. "J'ai déjà tout ce dont je désirais le plus au monde, ce ne serait pas correct de recevoir encore plus." La jeune femme s'approcha un peu plus de lui, et, du bout de ses doigts, fit pivoter la tête de son fiancé pour qu'il la regarde. Il n'y avait que de la tendresse et de l'amour dans ses iris bleus, rien de plus. Alors elle l'embrassa tendrement. "Fêter un anniversaire de cette façon là me convient très bien. Je n'ai jamais été du genre à le fêter avec tout mon entourage." Même lorsqu'elle était plus petite, les amis qu'elle invitait se comptaient sur les doigts d'une seule main. Avoir un événement où elle serait reine l'espace de quelques heures n'était pas ce qui l'attirait, loin de là. Elle préférait largement célébrer une vie simple. Joanne continuait ses caresses pendant qu'elle parlait. "Passer ce weekend avec Daniel et toi est pour moi le plus beau des cadeaux. En dehors de tout, là où nous pouvons uniquement nous focaliser sur nous, sans interférence." Quelques jours paisibles, dans le calme de la nature, ne se prêtant qu'à l'insouciance. "Et puis, je n'ai pas vraiment envie de fêter cet anniversaire là. Ce n'est pas une bonne chose, dans changer de dizaines." dit-elle d'un ton un peu plus grave, en baissant les yeux. Ce n'était pas les rides qui lui faisait peur. Quoi que. Maintenant qu'elle y pensait, elle se demandait s'il y aurait un quelconque désintérêt de la part de Jamie, s'il tenait rigueur du passage à la trentaine. "Mes parents m'ont dit que c'est un peu l'âge où on fait le point sur sa vie. Ce qui a été réalisé, ou non. S'il y avait des regrets, des choses que l'on aurait aimé changer..." Elle soupira. "J'ai des journées entières pour penser à ça." dit-elle en s'efforçant de sourire. "Et je me suis dit que, en un an, j'ai vécu bien plus de choses que les années précédentes. Et que j'aurai espérer que je fasse ta connaissance plus tôt." Joanne récupéra sa flûte et but une gorgée de champagne. "Et avoir trente ans, ce n'est que se rapprocher des trente-cinq. Et à partir de trente-cinq, c'est risqué de concevoir un enfant. Autant dire qu'à partir de cet âge-là, je serai considérée comme stérile." C'était sa manière de voir les choses. Très défaitiste, certes, mais Joanne avait bien du mal à voir de la lumière dans toute cette histoire. Jamie finirait certainement par en avoir assez de la voir rabâcher à ce sujet, mais il était mieux placée que personne pour savoir que c'était l'une des choses qui comptait le plus pour elle. "Et je veux que Daniel ait un petit frère ou une petite soeur. Je veux être capable de t'offrir ce bonheur là." Elle sourit tristement. "Et voilà qu'il y a désormais un ultimatum." La jeune femme finit par se blottir contre lui, restant silencieuse quelques secondes. "Donc non, pas de soirée, ni de cadeau d'anniversaire. C'est déjà passé de toute façon, c'était il y a trois jours. Je te veux juste toi et Daniel dans cette si belle maison."
Entre l'oubli et l'ignorance, il n'y a pas une excuse qui soit plus valable que l'autre. « Ce n'est pas forcément mieux. » dis-je d'ailleurs à Joanne qui tente de calmer ma culpabilité -en vain. A mes yeux, ce n'est tout bonnement pas pardonnable. Je trouve qu'il y a bien trop d'importance dans le fait de célébrer le jour de la venue au monde d'une personne que l'on aime pour se permettre de faire l'impasse dessus. Pourtant, la jeune femme m'assure que mon oubli n'est pas grave. « Bien sûr que si, j'ai tellement honte. » Nous sommes ensemble depuis un an. Un an, et j'ai réussi à ne jamais connaître sa date d'anniversaire. Cela me sidère complètement. Toujours dépité, mort de culpabilité, je laisse lourdement ma tête tourner à la demande tacite de la belle. Elle ne m'en veut absolument pas, je ne sais pas comment cela est possible. Et puis je comprend que c'est le chiffre qui devrait être écrit sur le gâteau qui lui fait fuir cette célébration plus que l'habitude. « Je ne pensais pas que tu faisais partie des angoissés par la trentaine. » dis-je en serrant Joanne qui s'est blottie contre moi. « C'est vrai que c'est un âge qui fait beaucoup réfléchir. » C'est peu de le dire. Même pour ceux qui le vivent sans problème, cela reste un cap à passer. Il y a tout de même ce petit choc, lorsque ce fameux trois et ce zéro débarquent pour signifier que cette fois le temps de la parfaite insouciance a pris fin. « Pour ma part, ça a été un vrai déclic. Ca a marqué la fin de mon premier mariage, mon départ de Londres. » J'avais fraîchement trente ans lorsque je me suis installé à Brisbane pour tourner la page Oliver, Enora, et fuir ma famille. « C'est à ce moment-là que j'ai décidé de prendre ma vie en main. » J'avais enfin compris qu'il était temps de me réveiller. Que ma vie n'appartenait qu'à moi, et que personne ne peut ni ne doit la vivre à ma place. Que moi aussi, j'ai le droit d'exister tel que je suis. « D'ailleurs, je pense que ça a vraiment marqué le début de ma vie. » j'ajoute, un brin pensif en songeant à ceci, plus de quatre ans en arrière. Néanmoins, c'est l'arrivée de Joanne dans ma vie qui m'a donné un nouveau souffle. « Ca ne sert pas à grand-chose de faire le point sur tout ce qui n'a pas été fait, je pense. Il faut plutôt voir toutes les opportunités qui sont toujours là. » Cela me semble évident, mais je sais que ce n'est pas forcément le cas pour ma fiancée qui a fort tendance à voir le verre à moitié vide. J'ai toujours de la ressource pour essayer de lui faire voir le bon côté des choses. « Dis-toi que l'année de tes trente ans sera celle de notre mariage. » dis-je avec un sourire un peu plus grand. C'est aussi le début d'un nouveau chapitre, un grand pas en avant, et surtout, quelque chose de particulièrement positif pour tout le monde. Un événement que nous aurons bien assez attendu elle et moi. J'espère qu'y songer la fera un peu sourire elle aussi. Néanmoins, je pense que ce qui travaille le plus Joanne n'est pas tant le regard rétrospectif qu'elle peut avoir sur les années déjà vécues, mais le peu qu'il lui reste avant d’hypothétiquement ne plus être en mesure de porter un bébé. « Et ne pense pas à cette prétendue course contre la montre pour avoir un autre enfant. Cinq ans, c'est bien assez long pour réussir à en faire un. Sans oublier qu'il y a bien des femmes qui vivent une grossesse après cet âge, voir à un âge très avancé, malgré les risques, et pour qui tout se déroule bien. » Bien sûr, ce ne sont pas des mois faciles pour ces femmes en question, je ne vais pas lui mentir en disant que cela n'a rien de compliqué -de toute manière, elle doit très bien le savoir. Néanmoins, c'est possible. Tant que cela est possible, nous pouvons garder de l'espoir. Et nous savons tous deux que les miracles de ce genre existent. « Je pense que plus tu angoisseras, plus tu verras tes peurs se réaliser. N'oublie pas que Daniel est arrivé au moment où nous nous y attendions le moins. » Un moment où Joanne avait baissé les bras, persuadée qu'elle était tout bonnement incapable de concevoir un enfant, et où nous venions tout juste de nous fiancer. Nous étions bien plus faits à l'idée de devoir nous plonger dans les préparatifs de la cérémonie plutôt que de vivre l'arrivée d'un enfant.
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Joanne ne savait pas vraiment pourquoi elle essayait de lui faire changer d'avis. Il était obstiné et il s'en voudra pendant beaucoup de temps, même s'il savait que sa douce ne lui en tiendrait pas rigueur. A moins qu'il ne trouve quelque chose pour se faire pardonner et pour soulager sa conscience. Mais Joanne ne demandait rien. Un simple baiser amoureux lui suffirait largement, cependant, ce ne serait jamais assez pour son fiancé. Elle n'insista pas, ça ne servait à rien. La jeune femme se blottit contre lui, lui confiant qu'elle n'appréciait pas vraiment changé de dizaine. Il ne pensait pas qu'elle ferait partie de ces gens là, elle haussa les épaules. Jamie commença à raconter son propre vécu du passage à la trentaine, et à ses yeux, cette nouvelle période de vie a été salvatrice. Il avait pu mettre fin à des années de mariage sans amour et à l'oppression parental. Tourner la page du suicide de son frère. Cette révélation l'avait sauvé quelque part. Joanne avait relevé la tête pour le regarder parler avec attention, un discret sourire se dessinant sur ses lèvres roses. "Ca t'a plutôt bien réussi." Il décrivait même cette étape que le véritable début de sa vie, où il ne pensait qu'à lui et où il était vraiment lui. Ca devait être si étrange à vivre, au début, se dit-elle. "Tu me connais, moi et mon éternel optimisme." dit-elle en baissant les yeux, s'efforçant de sourire même si elle savait qu'il devinerait que celui-ci n'était pas naturel. Pour le moment, la seule opportunité qu'elle avait en vue était professionnelle et elle ne lui en avait pas encore parlé d'ailleurs. Peut-être que c'était l'occasion. Jamie mentionna alors leur mariage. Cet événement si attendu qui avait finalement terminé aux oubliettes suite à tout ce qui s'était passé. La naissance de Daniel, s'habituer à cette nouvelle vie, son enlèvement. Il y avait toujours quelque chose ou quelqu'un pour leur mettre des bâtons dans les roues et Joanne n'avait alors pas encore réalisé qu'ils pouvaient enfin commencer à y songer plus sérieusement. "On y arrivera, tu crois ?" demanda-t-elle avec les yeux tendres, dans l'attente d'une réponse positive provenant de son fiancé. "Avec tout ce qui s'est passé, avec le budget..." Car, pett ou pas, un mariage coûtait cher et elle connaissait suffisamment Jame pour savoir qu'il ne voudrait certainement pas faire les choses à moitié et combler sa future femme au possible et même au-delà pour faire de ce jour le plus beau de sa vie. Encore plus beau que son premier mariage. "J'ai hâte." dit-elle tout bas, en lui déposant un léger baiser sur la joue. L'une de ses mains s'était placée sur le côté de son cou, juste sous l'oreille, y caressant doucement sa peau. "Hâte d'être nommée Joanne Keynes." Et tout ce qui signifiait derrière, Jamie était mieux placé que personne pour le savoir. Il se montrait tout aussi optimiste quant à l'idée de concevoir un enfant. Il ne parlait que d'un seul, et pas des quatre dont ils rêvaient. Ce n'était peut-être qu'un détail ou une erreur de sa part, mais Joanne le remarqua tout de même. Elle pouvait très bien tomber enceinte après ses trente-cinq ans, il n'avait pas tort. Mais elle savait que ça allait être encore moins rose que lorsqu'elle avait porté Daniel - et ils savaient tous les deux que ce n'était déjà pas très facile. Elle avait aussi toujours les suites de l'accouchement. Elle avait toutes ses raisons d'avoir peur. "La joie des cercles vicieux." soupira-t-elle. "Je suis devenue experte en la matière." Son année passée après le divorce ne s'était résumé qu'à ça. A tourner en rond, à décupler ses idées noires et les répercussions. Il n'y avait que Jamie qui avait véritablement su l'en sortir. "Même si ça ne se voyait pas forcément, c'était un véritable bonheur d'être enceinte. De porter l'enfant de la personne que l'on aime le plus au monde. Il y en a qui dise que c'est ce qui rend une femme féminine au possible. Ce n'est pas vraiment comme ça que je l'ai ressenti. J'étais heureuse parce que... c'était comme un accomplissement. Juste un signe qui m'a montrée que je suis capable de faire des choses. De belles choses quand on voit à quel point Daniel est beau." dit-elle en finissant sa phrase par un sourire qu'elle ne pouvait s'empêcher d'afficher. "Parfois, j'ai du mal à le réaliser. Quand je le regarde grandir et s'épanouir, je reste étonnée et comblée en me disant que c'est notre fils à nous, le fruit de notre amour, et qu'il est bien là." Joanne avait une dévotion démesurée pour son fiancé et pour son fils, elle les aimait tellement. "Et quand je le revois, je me rappelle ce que c'était d'être enceinte. Et je me fiche bien des nausées, de la fatigue ou des maux de dos. C'est un moindre mal, comparé à ce que ça nous a donné. Et ça ne me donne qu'envie d'essayer, de réessayer, vraiment." Joanne avait fini par le regarder droit dans les yeux, ses iris bleus étant brillants au possible. "Mais il y a toujours ça qui refait surface et qui me prend au dépourvu. Je veux continuer d'espérer, de croire que nous en sommes encore capable, encore et encore. Mais parfois, c'est dur." Elle souriait, vraiment, mais Jamie pouvait aisément remarquer cette très légère note de tristesse dans sa voix. Ce n'était que l'émotion. Même si Daniel était bien là, elle avait toujours sa fausse-couche et son avortement qui la rattrapaient et qui lui rappelaient qu'il y avait plus de chances de concevoir un embryon non viable qu'un bébé comme son fils. C'était un combat permanent dans sa petite tête blonde. Comme pour tout le reste, il y avait des jours où ça allait, et des jours où c'était un peu moins le cas. Mais l'appréhension de refaire une fausse-couche était bien présente, pas seulement à cause du traumatisme que cela provoquait, mais aussi de la douleur ressentie et du risque de refaire une détresse respiratoire par dessus. "Et puis, je sais à quel point tu voudrais avoir une fille." dit-elle avec un ton bien plus enjoué.
Certes, Joanne n’est pas la championne en matière d’optimisme. Laissée en proie à ses pensées, elle est surtout douée pour les laisser l’entraîner vers le fond comme si elle avait été lestée et jetée dans l’océan. Il n’est pas toujours aisé de lui faire garder la tête hors de l’eau, mais je suppose que c’est mon rôle, tout comme elle me soutient chaque jour, même si cela ne consiste qu’à lui répéter encore et encore les mêmes phrases pour la rassurer. Je ne sais pas si cela est toujours très efficace, mais j’avoue que je ne sais pas quoi faire d’autre. Je me dis qu’elle a besoin de s’appuyer et prendre exemple sur quelqu’un qui garde toujours un peu d’espoir dans un coin pour les mauvais jours. « Bien sûr qu’on y arrivera. » je lui assure au sujet du mariage. Absolument tout a été prévu par le destin pour retarder l’événement autant que possible, des multiples séparations à la grossesse de Joanne. Et désormais, nouvel obstacle, ces finances qui ne sont plus au beau fixe et ce compte en banque atrocement moins fourni qu’avant. Mais je ne veux pas vraiment y penser. « Dans le pire des cas, nous ferons ce que les gens normaux font : prendre un crédit. » j’ajoute en haussant les épaules avec un sourire amusé. Un petit rire, nerveux et ironique, m’échappe également. Contracter un prêt, s’endetter. C’est la meilleure, un vrai comble. Des mots que je n’aurais jamais pensé prononcer un jour. Il faudra se contenter de ce que nous pouvons nous offrir désormais, et oublier le grandiose. Quoi que je ne m’imaginais pas louer un château en Espagne pour nos noces non plus, nous imaginant plutôt donner une cérémonie qui nous ressemble. Quelque chose de plus authentique, simplement entouré de nos plus proches amis et de la famille. Un bout de plage ferait l’affaire. « Cette année. C’est promis. » Promesse scellée par un baiser déposé sur la joue de Joanne et un sourire confiant. Hors de question d’attendre plus longtemps de toute manière, tous ces délais me rendraient aussi fou qu’un hamster dans sa roue. Je tente également de rassurer ma fiancée à propos des autres enfants que nous souhaitons avoir. Un à la fois, me dis-je, il n’est pas nécessaire de mettre plus de pression que cela n’est déjà le cas sur les épaules de la jeune femme en évoquant immédiatement l’envie pressante d’agrandir la famille de trois autres membres. Après tout, nous voulons surtout que Daniel ne termine pas fils unique. Du reste, les rêves ne restent parfois que des rêves, ce n’est pas grave. J’écoute attentivement Joanne m’expliquer à quel point les désagréments liés à la grossesse en valaient vraiment la peine lorsque l’on voit quel beau bébé nous avons. Ce petit miracle dont nous avons encore un peu de mal à réaliser la venue au monde. Mon regard plongé dans les iris bleus de ma belle, je souris tendrement en l’entendant dire qu’elle souhaite vraiment tout tenter pour vivre tout ceci encore une fois, mais parfois un certain fatalisme fait surface. « Tu m’autoriseras toujours à l’appeler Louise ? » je demande pour dédramatiser un peu. Mais je vois bien que le sourire de ma fiancée est fragile. Le dos de ma main vient caresser sa joue tendrement. « Mon ange… » Je n’aime pas la voir si angoissée, même si elle trouve toujours le moindre petit détail pour s’inquiéter. Cela me donne l’impression de ne jamais être capable d’en faire assez. « Nous verrons tout cela le moment venu, quand nous aurons décidé de donner ce petit frère ou cette petite sœur à Daniel. » lui dis-je avec un sourire bienveillant. « En attendant, n’y penses pas et profites de notre beau garçon. » Après tout, nous avons le temps, nous n’avons pas décidé d’aller vite et d’enchaîner coup sur coup. Je continue de caresser légèrement le visage de Joanne. « Je te trouve plus épanouie et heureuse depuis qu’il est là. Plus belle. » Un compliment des plus sincères. Elle n’a pas trouvé que devenir mère influait sur sa féminité, mais pour moi, cela a été un peu le cas. Sûrement parce que je sais que c’était son rêve. « Et la trentaine te va à ravir. » j’ajoute avec un sourire en coin pour la taquiner. J’approche un peu mon visage du sien pour tapoter le bout de son nez avec le mien, puis je lui vole un baiser. La connaissant, elle n’en croira pas un mot. Pourtant, plus le temps passe, plus Joanne s’assimile à une fleur en pleine éclosion, allant d’un accomplissement à l’autre pour s’épanouir.
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Prendre crédit. C'était certainement la dernière à laquelle Jamie aurait pensé faire un jour. Lui qui baignait dans l'argent, voilà qu'il était réduit au commun des mortels. Les premiers jours, il était quelques peu mauvais, mais Joanne s'attendait à pire que cela. Il avait les épaules solides, et il encaissait les choses bien plus facilement que sa belle. Toujours dans cet éternel optimisme, il était sûr de lui en disant que leur mariage se déroulerait bien dans l'année. C'était si loin, et si proche à la fois. Elle peinait à réaliser. La jeune femme le regarda avec de grands yeux lorsqu'il en fit même une promesse. On ne connaît Jamie Keynes si l'on ne savait pas l'importance qu'il accordait aux promesses. Il l'embrassa sur le joue, elle pivota la tête pour lui rendre un baiser tout aussi tendre sur ses lèvres. Elle l'aimait tellement. Tout en racontant le fond de ses pensées concernant sa maternité, elle avait pris la main de Jamie, qu'elle caressait aléatoirement avec tous ses doigts. Le bel homme tentait d'alléger le poids de la conversation, mais elle prit sa question plus au sérieux qu'il n'aurait pu le croire. "C'était une évidence, pour moi." lui dit-elle tout bas, en regardant sa main. "La question ne se pose pas vraiment, à mes yeux." Même si elle avait une multitude de prénoms féminins que la jeune femme adorait, elle savait que celui-ci était cher au coeur de son futur époux. Ce prénom n'était certes pas de dernière jeunesse, mais il n'en était pas moins beau, et doux. C'était certainement ce qu'ils recherchaient le plus dans les prénoms pour leurs enfants. La douceur que cela aspirait. Pas de prénoms durs avec des syllabes rêches et irritantes. Tout dans la prononciation restait paisible, agréable, délicat. Louise et Daniel faisaient partie de ces prénoms-là, et il y en avait plein d'autres qui correspondaient à ces critères là. Joanne restait tout de même longuement songeuse, noyée dans ses propres pensées, et Jamie tenta de l'en extirper en l'interpellant avec un surnom qui lui était propre. La belle blonde se demanda quel était le moment venu pour lui. Quand était l'instant le plus propice à songer à essayre d'avoir un second enfant, connaissant la situation de la jeune femme ? Parce qu'elle, elle ne savait pas. Elle reposa sa tête alourdie par tous ses songes sur l'épaule de Jamie, acquiesçant simplement d'un signe de tête, ne sachant pas trop quoi dire. Ses doigts caressaient sa joue porcelaine. Elle la redressa dès qu'il la complimentait, ne sachant pas par le ton s'il cherchait à la faire rougir ou s'il le pensait vraiment. Et en croisant son regard, elle sut que ces paroles venaient tout droit de son coeur. Joanne en fut si touchée qu'elle en perdait les mots. Ses joues rosirent, et elle baissa quelques instants ses yeux. Elle rit, gênée, puis ajouta. "Et tu n'es pas jaloux que tu saches qu'il y ait un autre homme dans le coin qui me rende plus belle, comme tu dis ?" Bien sûr, elle le taquinait. Tout comme il enchaînait à son tour en mentionnant la trentaine. Elle aurait du le sentir venir à des kilomètres, et pourtant. La belle blonde se doutait qu'elle allait encore y avoir droit pendant un moment. Elle le tapota légèrement. "Arrête." dit-elle en faisant la moue. Pas la peine de remuer le couteau dans la plaie, même par amusement et pour tenter de dédramatiser ce nombre qui faisait si peur. Elle l'embrassa une nouvelle fois. "Je t'aime." lui murmura-t-elle au bord de ses lèvres. Elle se blottit davantage contre lui et profita quelques minutes de son étreinte. Elle était si bien installée qu'elle ne bougerait pour rien au monde. "Il faut que je te parle d'autre chose." dit-elle en rompant le silence qui régnait. "C'est le projet professionnel dont je t'avais parlé. Au début, je voulais attendre qu'il y ait plus de concret et de certitudes, mais je me suis dit que ce serait trop tard à ce moment-là, et ce ne serait pas une bonne chose si tu n'étais pas d'accord avec ça." Avoir son avis importait beaucoup. Ce ne serait pas la première fois qu'un non de sa part ferait définitivement taire un projet, ni la dernière, d'ailleurs. L'influence qu'avait Jamie sur elle était plus que considérable, à ce sujet. "Depuis que j'ai du démissionner, je ne peux pas m'empêcher de retourner de temps en temps au musée. Ne serait-ce que pour montrer Daniel aux collègues. Et je n'entends pas vraiment du bien concernant le conservateur qui m'a remplacée. Le directeur lui-même m'en a parlé." Souvent, le calme des lieux endormait le petit dans sa poussette, et il restait totalement imperturbable. "Et au fur et à mesure de nos conversations, j'ai cru comprendre qu'il avait une idée derrière la tête me concernant. Avant que je ne tombe enceinte et même avant que je ne fasse ta connaissance. Mais la naissance de Daniel et ma condition l'ont pris un peu de court, du coup il a quand même voulu chercher autrement, ayant bien connaissance de mes principes, on va dire." Mettre sa famille en avant, plus que toute autre chose. "Disons qu'il est extrêmement prévoyant, et qu'il pense déjà à sa retraite. Le sous-directeur prendrait logiquement sa place mais il lui aurait apparemment dit qu'il aurait besoin d'un coup de pouces quant aux décisions des expositions, leur organisation, etc. Je tourne autant autour du pot que lui ne l'avait fait pour moi." dit-elle en riant. "Tout ça pour dire qu'il est en train d'évaluer le budget pour créer un poste de consultante pour les aider par rapport aux décision prises vis-à-vis des expositions et événements, ça allégera leur boulot et ils pourront se focaliser sur l'administratif pur et dur. Mon poste se résumerait à quelques réunions par mois pour commencer et..." Rien que l'idée là l'emballait énormément. Elle pourrait tout de même avoir Daniel avec elle, ou, certains auront un malin plaisir à le garder pour une poignée d'heures par semaine. "... et je pense qu'il a voulu me faire comprendre qu'à plus long terme, il me ferait faire des formations en administration et management pour me faire grimper au titre de co-directrice, en m'occupant des mêmes choses. Après, ça dépendrait bien évidemment de la manière dont ça se passera pour notre famille et nous, mais il ne cessait de me répéter qu'il restait très flexible." Elle n'avait aucune idée de ce que pourrait penser Jamie de tout ça. "Comme s'il savait mes priorités et qu'il voulait tout faire pour que ça se passe comme il peut l'espérer. Après, peut-être que je n'ai pas tout compris, tu sais que je ne suis pas très douée avec les messages subliminaux. Mais selon, avoir deux personnes à la tête du musée allégerait le travail de l'un l'autre, ça permet d'aménager le planning comme on le pense. Et il y a le salaire qui va avec." Chose qu'il fallait tout de même considérer. Joanne était un peu paniquée sur le coup, son coeur battait à toute allure, n'ayant strictement aucune idée de ce que pourrait penser Jamie des plans du directeur du musée.
Au moins, je suis assuré que si nous avons une fille, un jour, elle aura ce prénom qui me tient à cœur. Non pas que je n’aurais pas su me montrer flexible s’il ne plaisait pas à Joanne, il n’est pas question de lui imposer quelque chose qui ne lui corresponde pas pour ses propres enfants. Mais c’est tout de même un nom auquel je tiens, je pense qu’elle le sait bien. C’est un peu mon rêve égoïste, d’avoir une fille, ma petite Louise. Connaissant ma fiancée, elle fait mon souhait sien et tient vraiment à ce que cela se réalise. Je l’espère vraiment. Mon ange reste toujours dans ses pensées un peu trop sombres dont je tente de l’extirper. Pour moi, une femme belle est une femme heureuse, comblée, et Joanne s’approche un peu plus de cela depuis qu’elle a donné naissance à Daniel. Je ris bouche fermée en jetant un faux regard mauvais à la jeune femme qui cherche à me taquiner. Ayant activement participé à la conception de cet autre homme qui sait si bien rendre ma belle plus heureuse, je me dis que je ne démérite pas face à ce petit bout. « Non, au contraire. Je suis heureux qu’il soit là. » dis-je finalement. Daniel est là pour faire sourire sa mère quand je ne suis pas là. Il prend soin d’elle dans un sens. Ma taquinerie ne semble pas beaucoup l’amuser. Comme quoi, la trentaine angoisse vraiment ma petite fiancée. A se demander ce qui ne l’angoisse pas. Je lui adresse un sourire innocent, l’air d’un enfant qui sait qu’il a fait une bêtise mais à qui on ne peut pas le reprocher. Puis je réponds à son baiser et souffle un « je t’aime aussi » en retour du sien. Je laisse Joanne s’installer tout contre moi, la tête sur mon épaule, alors que mon bras l’entoure délicatement. Elle ne tarde pas à reprendre la parole pour me parler de ce fameux projet top secret dont elle ne veut finalement plus garder tout le mystère jusqu’au dernier moment –ce qui n’est pas une mauvaise idée lorsque l’on sait mon amour des surprises. La mise en contexte dure un long moment, si bien que je repose ma tête sur le haut du dossier du canapé en attendant que Joanne en vienne au but. Je ris légèrement quand elle avoue me faire patienter autant que le directeur l’avait fait pour elle. « C’est du sadisme. » dis-je avec un sourire amusé. Je suppose que c’est mon métier qui forme des gens qui ne tournent pas autour du pot, contrairement aux nostalgiques amoureux de l’Histoire qui se perdent dans leurs grandes phrases. Enfin, la jeune femme crache le morceau et m’explique en quoi consisterait le poste qui lui est proposé par le musée. Consultante, sorte de conseillère intervenant si besoin. Quelque chose d’assez flexible qui correspondrait parfaitement à l’envie de Joanne d’être utile à son foyer tout en restant complètement disponible pour sa famille. S’il n’est pas question d’un emploi de bureau qui laisse notre fils aux mains d’une autre femme toute la journée, alors je n’ai rien à redire à ce sujet. Elle poursuit sur ce poste de co-directrice qui me fait immédiatement froncer les sourcils. Est-ce que c’est vraiment ce qu’elle voudrait, ce qui lui plairait, de finir le nez dans l’administratif, dans cette paperasse ? Personnellement, je l’abhorre tant qu’il s’agit à chaque fois d’une séance de torture. J’ai bien du mal à voir Joanne s’épanouir ailleurs qu’au contact direct des œuvres. Sans oublier que cette fois, même flexible, on parle ici d’un travail aux grosses responsabilités, et d’un exil dans un bureau. On parle d’un poste qui n’est pas forcément compatible avec l’envie qu’elle formulait plus tôt d’agrandir notre famille –surtout lorsque l’on sait qu’une grossesse met la jeune femme en arrêt dès le premier jour. A mes yeux, le salaire n’entre toujours pas en compte une seule seconde. Mon esprit reste dans la perspective que nous n’avons pas besoin d’argent supplémentaire. Mais c’est oublier que sans réserves, mon salaire et mes rentes ne suffisent qu’à peine. « Eh bien… » Sur le moment, je ne sais pas trop quoi dire. Et à vrai dire, je pèse le moindre de mes mots. Je ne veux pas froisser Joanne de moindre manière que ce soit ou lui faire croire que je ne suis pas enthousiaste pour elle –même si à première vue, cela ne saute pas aux yeux. « Je pense que ça peut-être bien pour toi de reprendre un poste au musée. Faire ce que tu aimes. » C’est le principal. Qu’elle soit là pour sa famille, et qu’elle fasse quelque chose qui lui plaise. « Ce poste de consultante m’a l’air d’être une bonne aubaine. Si le directeur a conscience de tes priorités et semble si prêt à se plier en quatre pour les respecter, autant sauter sur l’occasion. » D’autant que cette idée semble vraiment lui plaire, alors je ne peux que l’encourager à foncer. « Co-directrice, ça serait une sacré promotion à terme. » j’ajoute en me gardant bien de montrer ou évoquer la moindre réserve à ce sujet. Après tout, nous n’y sommes pas encore, et à ce stade il est surtout très flatteur pour Joanne de savoir que le directeur la pense à la hauteur de ce rôle. J’adresse un petit sourire à ma fiancée et l’embrasse tendrement sur le front. « Ils ont bien raison de te vouloir de retour. »
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Jamie restait tout de même silencieux un moment après que sa fiancée lui ai fait un tableau complet de ce que l'on comptait lui proposer. Joanne était bien plus douée pour repérer lorsque les choses n'allaient pas que le contraire. Et là, c'était le cas. Son long moment de réflexion, son manque d'enthousiasme sur le moment, était largement suffisant pour elle pour qu'elle interprète à sa propre sauce le moindre mot qui sortait de sa bouche. Et dieu sait combien il faisait attention avec ceux-ci. Son côté journaliste l'y aidait beaucoup, et il savait qu'il fallait marcher sur des oeufs lorsque l'on parlait à sa belle. Un seul mot pourrait la froisser, il ne lui fallait pas grand chose. Jamie n'avait certainement pas conscience de l'impact de mots durs qu'il avait pu lui lancer lors d'une dispute quelconque, ou de l'attitude qu'il pouvait avoir envers elle. Il était le mieux placé pour savoir comment se comporter avec elle, et encore, il y avait ces petites failles qui le trahissaient parfois. Ce manque d'enthousiasme et d'élan était loin de la rassurer, et ça ne la poussait pas vraiment à progresser dans cette voie. Joanne savait bien que Jamie est plus pour le fait qu'elle reste à la maison, qu'elle s'occupe de leur vie de famille comme elle savait si bien le faire. Et elle continuerait avec plaisir sauf que les moyens ne sont plus là, et qu'elle se sentait tout simplement inutile face à cela. Elle avait abandonné l'idée d'être l'égérie d'une marque de luxe ou dans la même idée, et ses études réduisaient largement l'éventail de métiers qu'elle pouvait exercer. En soi, elle était née pour être conservatrice, ou travailler dans un musée. Elle ne se voyait nulle part ailleurs. "Après, c'est toujours à titre de projet, rien ne dit que ça aboutira un jour." dit Joanne, s'avouant un peu découragée. Peut-être qu'il n'y avait même pas besoin d'approfondir le sujet dans la mesure où tout mourrait dans l'oeuf. Il n'y aurait donc pas de raison de débattre pour un projet déjà avorté. L'interprétation de Joanne était excessive, et très souvent, péjorative. Elle ne décryptera jamais une phrase dans un bon sens. "Nous verrons bien." Les places de conservateur, à côté, étaient précieuses et on ne les laissait pas si facilement derrière soi. Jamie n'émit aucun avis concernant l'éventuelle montée en grade de sa belle. Juste un commentaire, une constatation, rien de plus. La jeune femme se passa de dire quoi que ce soit et se redressa pour s'asseoir plus droitement sur le canapé. Tout en prenant sa flûte de champagne en main, elle ajouta. "Encore une fois, ce n'est qu'une idée, un projet." Et elle but cul-sec ce qui lui restait d'alcool. "Je vais aller réchauffer le dîner." Elle se leva et quitta le salon pour rejoindre la cuisine. Le fait d'avoir cassé la moitié d'un des murs avait véritablement permis à la pièce de s'agrandir et d'être plus aérée, plus ouvertes. C'était moins oppressant qu'avant. Elle sortit de la glacière les divers boîtes dans lesquelles elle avait mis une poêlée de nombreux légumes, de la polenta, de la sauce, et un peu de viande pour elle. Elle sortait des placard tout ce dont elle avait besoin pour recuire le tout. Ca n'allait que prendre quelques minutes. Silencieuse, elle pensait, comme toujours. Elle se demandait si il allait être un jour véritablement enthousiaste lorsqu'elle lui parlera d'un quelconque projet, de quelque chose qu'elle pourrait faire en plus d'être maman. Jusqu'ici, c'était loin d'être un succès, et elle se le demandait si ça allait l'être un jour. Si elle n'avait que de mauvaises idées, autant qu'il le lui dise, qu'il dise qu'elle arrête. Et elle s'arrêterait. Ce ne serait pas une solution pour elle, mais elle s'exécuterait. C'était difficile pour elle de trouver sa voie alors que bien des portes s'étaient fermées à cause de ses problèmes de santé. Elle n'avait pas grand monde à qui parler quand elle était à la maison, et elle ne se focalisait que sur Daniel. Elle prenait ce qu'elle pouvait trouver pour se construire et recréer son identité, mais c'était la croix et la bannière. Peut-être qu'elle portait trop d'espoir à ce sujet. Comme elle le lui avait dit, ce n'était qu'une idée, une amorce de projets. Il n'y avait aucune garantie de tout cela. Et si ça n'aboutissait, que pourrait-elle envisager de faire. Bien sûr, l'idée lui avait déjà effleuré l'esprit, elle avait tout le temps pour ça. Et là, elle réalisait qu'elle n'avait plus rien, qu'elle était tout simplement à court d'idées. Joanne tentait de penser à autre chose, en mettant silencieusement la table, en remuant les légumes. L'idée de passer le weekend ici avec sa famille lui plaisait beaucoup, elle pensait que c'était une opportunité pour dire à Jamie qu'elle pouvait se trouver sur un tremplin, mais tout ceci lui semblait bien dérisoire. "Tu voudras boire un peu de vin, ou pas ?" finit-elle par lui demander, même si la grande majorité de sa personne était enfouie dans ses pensées.
« Joanne… » Et la voilà qui file hors du canapé. A partir du moment où elle s’est redressée plutôt que de rester blottie contre moi, il était clair comme de l’eau de roche que quelque chose n’allait pas. A croire que même en choisissant mes mots avec parcimonie, je ne parviens qu’à la braquer, la frusquer, la vexer. Mais pour cette fois, je ne comprends absolument pas ce nouveau ton et cette attitude qu’elle arbore en claquant des doigts. Pendant un instant elle semble prête à se mettre debout en sautant sur le canapé tant elle est excitée par le projet qu’elle me décrit, et la seconde suivante elle est complètement déconfite, et tout cela ne semble plus avoir tant d’importance. Le grand projet professionnel n’est finalement plus qu’un embryon qui ne verra peut-être jamais le jour. Enfant ou ambition professionnelle, même combat. Tenter de la faire rester là est vain, je pense qu’à cet instant elle ne souhaite pas vraiment se trouver si près de moi, raison pour laquelle elle file dans la cuisine. Je soupire et loge mon visage entre mes mains, désespéré à l’idée de faire quoi que ce soit de bien pendant cette soirée qui commence pour le moment bien mal pour un moment supposé servir d’anniversaire à la jeune femme. Je ne peux même pas me dire que la prochaine fois je ne dirai rien, me contenterai d’un sourire ou d’un banal « c’est bien, ma chérie », car elle le prendra mal dans tous les cas. Je peux comprendre la désillusion de la dernière fois lorsqu’elle m’a annoncé avoir autorisé une marque à utiliser l’occasion de notre mariage pour faire sa promotion, mais celle-ci, vraiment pas. Je prends le temps de respirer pour calmer mon manque de patience que la jeune femme met parfois à rude épreuve avec cette manie qu’elle a de noircir tous les tableaux. Personne n’est parfait, et cela est un de ses défauts. Les nerfs relativement sereins, je quitte à mon tour le canapé et m’approche de la cuisine où Joanne s’active pour préparer le dîner comme elle l’a dit. Elle est noyée dans ses pensées et tente d’agir normalement en proposant à boire, question que j’ignore complètement. « Qu’est-ce qu’il y a ? » je demande en croisant les bras. Mon visage n’est pas trop dur ou froid. Je suis surtout plongé dans l’incompréhension, et même si parfois je laisse couler cette attitude de la part de ma fiancée, je préfère crever le moindre début d’abcès cette fois-ci. « Qu’est-ce que j’ai dit ? » Il faudra bien qu’un jour je comprenne ce qu’il se passe dans sa tête lorsqu’elle se mure de la sorte. Ou qu’elle parvienne à interpréter mes paroles dans le bon sens et cesse de lire des messages sombres qui n’existent pas entre des lignes invisibles. « Je te dis de foncer et de prendre l’opportunité qu’on te donne, et tu passes de l’enthousiasme à cette mine dépitée. » Et cela me dépasse complètement. Peut-être que cela n’est pas contre moi, peut-être que moi aussi j’interprète mal son comportement, je n’en sais rien. Mais justement, il faut que je le sache. Nous avons déjà pu voir à quel point les non-dits sont capables de nous bouffer de l’intérieur comme des plaies qui se nécrosent, il ne faudrait pas que ce genre de gangrène reprenne. J’essaye de ne pas me montrer trop sévère, mais cela ne m’étonnerait pas que je le sois malgré moi. Et que cela aussi, elle le prenne mal, et se braque un peu plus jusqu’à rendre le dialogue impossible. Elle préférera toujours éviter la confrontation, elle est ainsi. Même si j’approche pour mettre les choses à plat, elle fuira. J’espère que ça ne sera pas le cas cette fois, mais sans grande conviction. Joanne est comme elle est après tout, personne ne la changera. « Alors dis-moi, qu’est-ce qui cloche ? » je redemande, insistant. De toute manière, je suis devant la seule entrée et sortie de la cuisine, le seul moyen qu’elle aurait de fuir la conversation serait de tout bonnement m’ignorer.
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Joanne s'exaspérait elle-même. La plupart du temps, elle était encore colère contre elle-même. Et au lieu de se mutiler physiquement comme d'autres le feraient, elle préférait déchiqueter son esprit pour trois fois rien. C'était un exemple parmi tant d'autres. Mais constamment, elle se rejetait la faute. Que s'il y avait des choses qui ne marchaient pas, qui dérapaient complètement, ce n'était qu'à cause d'elle. Que le peu de projets qu'elle était prête à entreprendre n'étaient qu'un fond de mauvaises idées. Alors elle s'était demandée si cette fois-ci, ce n'était pas aussi le cas. Ses gestes étaient nerveux, loin d'être naturels. Elle se damnait d'avoir l'esprit aussi tordu et controversé, elle savait qu'elle avait déjà exaspéré son fiancé plus d'une fois. Elle se demandait d'ailleurs comment il parvenait à la supporter, elle et ses pensées. Jamie finit par se manifester dans la cuisine, en quête de réponse. Il n'avait pas le visage sévère, mais avait toujours une figure forte. Il ne comprenait pas sa réaction, il cherchait à comprendre ce qui faisait tant ternir le tableau. "Rien, il n'y a rien." dit-elle tout bas, d'une voix à peine audible en remuant nerveusement les légumes dans la poêle. Sa gestuelle était saccadée, alors que Jamie continuait de s'expliquer et de chercher à comprendre. Ses larges épaules ne comptaient certainement pas la laisser sortir de la cuisine tant qu'il n'avait pas de réponses claires et précises. Pas de divagations inutiles pour faire croire que tout allait bien. Non, il voulait de vraies explications, histoire de cerner un peu plus toutes les idées qui pouvaient trotter férocement dans la tête de sa fiancée. Ce n'était certainement pas voulu, mais il y avait une certaine fermeté dans sa voix contre laquelle Joanne n'aimait pas se frotter. "C'est moi. C'est juste moi." admit-elle en marmonnant dans sa barbe. "C'est juste moi qui cloche, qui ne tourne pas rond, qui..." Elle soupira, exaspérée, surtout en colère contre elle-même. La cuisine ne l'aidait pas vraiment à se calmer, ça ne servait qu'à occuper ses dix petits doigts bien nerveux. "Peut-être que j'ai mal compris ce qu'il disait, ce n'était que des messages subliminaux. Peut-être qu'il en demandera bien que ce que j'aurais pu comprendre." Elle ne faisait qu'énumérer tout ce qui se baladait dans son crâne. "Peut-être que ce n'est qu'un tiret supplémentaire à cette immense liste d'erreurs et d'horribles idées que j'aurai pu avoir en pensant bien faire, mais que ça ne fera que ruiner tout ce qu'on a." Sa voix tremblait par l'énervement. Elle ne faisait que le listing de toutes les erreurs qu'elle avait commises depuis qu'ils sortaient ensemble, et, bon dieu, ça n'en finissait pas. "Peut-être que je m'y accroche de trop, et que lundi, on m'appellera pour me dire que ce ne sera pas possible parce qu'ils n'ont pas pu débloqué le budget. Et alors quoi ? Je préfère presque être pessimiste à ce sujet, parce que si je me fixe trop d'espoir sur ce poste..." Elle soupira, la mine triste. "La chute sera difficile." C'était un peu le cas pour Daniel, il était apparu lorsqu'ils s'y attendaient le moins. "Et quand bien même, si ça ne fonctionne pas, je ferai quoi ? Qu'est-ce que je peux bien faire qui puisse apporter quelque chose de bien à notre famille ?" Elle ne regardait que très rarement Jamie, elle ne faisait que balancer les premières choses qui lui venaient à l'esprit, qu'importe si ça n'avait aucun sens. "Le secteur culturel est bien fermé, trouver quelque chose qui me plaise dans ce domaine est impossible, alors que c'était le centre même de mes études. Je ne suis ni douée pour diriger quoi que ce soit, ni pour être modèle, ou égérie, ou je ne sais quoi... Et... Ah!!" La tirade de Joanne l'avait rendue inattentive, et elle s'était bien brûlée l'une de ses mains, au niveau de la paume, à cause de la poêle. C'était incroyablement douloureux, mais elle n'émit pas un seul bruit. Elle se dirigea tout de même précipitamment jusqu'à l'évier pour faire couler de l'eau glacée sur sa main blessée, ne faisant pas vraiment attention à l'étendue des dégâts. "Je fais ce que je peux pour que tu n'aies pas trop à faire quand tu rentres à la maison, pour que Daniel grandisse et s'épanouisse au mieux, pour que vous soyez bien et en bonne santé. Mais ce n'est jamais assez." En fin de compte, Joanne se décevait énormément. C'était un sentiment constant qu'elle ressentait depuis longtemps. La seule fois où elle avait su l'oublier, c'était lorsque Jamie avait dit à quel point il était fier d'elle, après l'accouchement. "Jamais assez." répéta-t-elle, plus songeuse. "Tout ce que je fais, c'est d'avoir d'horribles idées en pensant bien faire, et ça nous met à chaque fois dans le pétrin, ou empirer les choses. Je nous ai jamais apporté quelque chose de bon pour nous tous."
« Tu nous a apporté Daniel. » je réplique à la fin de la tirade de Joanne, contrarié de constater que cela ne lui apporte pas plus de fierté que cela alors que la grossesse et l'accouchement ont nécessité des efforts considérables pour elle, et pour un résultat des plus parfaits. Je me suis approché d'elle après avoir dégagé la poêle du feu et ai pris sa main dans les miennes pour constater l'état de sa brûlure, mais ce n'est rien de grave. Quoi qu'il en soit, tant que je la tiens, je ne la lâche pas. Je me demande par quel miracle la jeune femme ne tombe pas dans une profonde dépression à force d'elle même s'attaquer à coups de pensées plus sombres et dégradantes les unes que les autres. Dans ces moments-là, je me demande si elle est vraiment capable d'être simplement heureuse, satisfaite, ou si ce combat est pour moi ce que les moulins à vent étaient pour Don Quichotte. « Tu nous apportes tous les deux plus d'amour et d'attention qu'on ne pourrait en rêver. Tu t'occupes de la maison, de notre fils, tu prends soin de moi. Tu es une mère et une fiancée exemplaire. » Et je le pense sincèrement. Je n'aurais jamais penser tomber sur pareille perle rare qui prenne tant à coeur à bichonner toute âme vivante sous son toit. Quand je rentre le soir et que la table est déjà mise, le dîner déjà prêt, je me dis toujours qu'elle en fait bien trop, bien plus que nécessaire. Daniel a l'air comblé d'avoir sa maman pour lui. Joanne crée à elle seule toute une harmonie dans le foyer sans jamais se plaindre, me permettant d'avoir toujours ce cocon où me ressourcer le soir, et offrant à notre fils le cadre idéal pour grandir. « Je peux comprendre que de nos jours une femme aspire à plus que ce genre de choses, mais tu ne peux pas dire que ce que tu fais n'est jamais assez. Après tout, est-ce que lui ou moi avons l'air malheureux ? Est-ce que nous avons l'air de manquer de quoi que ce soit ? Sûrement pas, parce que tu es là. Alors qui a dit que ce n'était pas assez, hein ? Qui d'autre pense une chose pareille à part toi ? » Personne. Personne n'oserait critiquer son dévouement, bien au contraire. Je sais que sa générosité et sa douceur inspirent plutôt de l'admiration. Elle est la future épouse parfaite. Peut-être pas dans ce siècle, mais elle l'est pour moi. « Cesses donc de te rabaisser constamment, Joanne. Prends ça comme une bonne résolution des trente ans. » dis-je un peu plus sèchement. Puisqu'elle veut se lancer dans une mise au point de sa vie en changeant de dizaine, alors il serait peut-être temps pour cela d'ouvrir les yeux sur sa vraie valeur plutôt que de continuer de se considérer comme une vulgaire ombre. « Parce que tu es une femme belle, douce, inspirante et loin d'être idiote. Tu es capable de bien des choses. » Pourtant, la jeune femme se voit comme une incapable, et cela est si difficilement supportable. Oui, parfois, le manque d'amour propre de Joanne m'exaspère au plus haut point. « Tu étais une conservatrice adorée. La directrice de Vogue Australie te trouve du talent. Tu m'as l'air de bien prendre tes marques avec la fondation. » Cela ne fait qu'une semaine qu'il faut désormais composer avec cette nouvelle responsabilité léguée par mon père et dont ma fiancée ne voulait absolument pas, pourtant je n'ai pas l'impression que cette tâche soit en train de la noyer. « Tu peux être douée pour tout ce que tu veux entreprendre si tu essayes et que tu crois un peu en toi. Ou au moins, que tu fasses confiance à ceux qui croient en toi. » Mais le mieux reste qu'elle se découvre enfin un peu de confiance en elle. Avoir un fils lui a inspiré l'envie de se battre pour sa famille, et son souhait d'avoir une activité professionnelle découle d'ailleurs de cela. Désormais, elle doit apprendre à se battre pour elle-même, et finalement, contre elle-même et ses idées noires. « Peut-être que le musée appellera lundi pour dire que ce projet ne se fera pas, et ce n'est pas grave, tu trouveras autre chose. Ca ne sera pas la fin du monde. Ou peut-être que ce poste sera fait pour toi, que tu seras encore un peu plus épanouie, et nous en serons tous heureux. » Seul l'avenir le dira, et même si cela est angoissant, je crois qu'il faut toujours avoir confiance en le destin qui sait nous donner ce dont nous avons besoin quand nous en avons besoin. « Je t'aime et je suis fier de toi quoi que tu fasses. Et je ne compte pas laisser qui que ce soit te traîner dans la boue, à commencer par toi-même. »
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
La brûlure n'était peut-être que superficielle, mais elle n'en était pas moins douloureuse. L'eau froide permettait de la soulager un peu, mais Jamie vint lui saisir la main pour regarder de lui-même l'ampleur des dégâts. Il n'avait pas tort, elle leur avait apporté Daniel, mais son fiancé avait aussi un grand contributeur de leur petit miracle. La jeune femme ne prenait pas en compte ces neufs mois qui n'avaient pas été de tout repos. Ca faisait partie du lot, elle ne le considirait pas comme un labeur particulier, quelque chose dont elle devait se plaindre. Jamie gardait sa main dans la sienne, et comptait certainement la maintenir tant que cette conversation n'avait pas été mise correctement à plat. Il énumérait tout ce qu'elle faisait pour eux, pour leur famille, qu'elle était finalement indispensable pour son harmonie. Elle osait à peine le regarder dans les yeux. Il était certainement plus ferme qu'il ne l'aurait voulu l'être. Le bel homme balançait des questions pour lesquelles elle ne pouvait que répondre négativement, mais elle n'en fit rien. Le dévouement qu'elle avait suffisait largement à Jamie, peut-être était-ce même un peu trop. Joanne finit par se demander si retrouver une situation professionnelle était vraiment la solution à son soucis. Elle cherchait longuement toute seule ce qu'elle devrait faire de plus pour qu'elle soit enfin entièrement satisfaite de tout ce qu'elle fait, pour lui ouvrir les yeux et lui faire comprendre qu'elle fait bien plus que ce que l'on pourrait espérer. Jamie dit d'un ton plus sec qu'il serait temps qu'elle arrête de se rabaisser. Bien plus facile à dire qu' à faire. Comment faire le tri dans ses pensées et supprimer ce qui la travaillait tant ? Comment basculer, du jour au lendemain, du pessimisme à l'optimisme ? Ce serait finalement changer une partie de la personnalité de la jeune femme. Ce côté éternellement insatisfait, un penchant défaitiste, parfois même paranoïaque. Il y avait un travail sur soi à faire, et pas des moindre. Cette épreuve était bien plus haute qu'une montagne à ses yeux, insurmontable. Mais c'était ce que Jamie voulait, c'était ce qu'il attendait d'elle désormais. Il tenta de lui donner une piste en faisant une liste de tout ce qu'il voyai t de bon en elle. Il était vrai qu'elle s'était tout de même penchée sérieusement sur la fondation créée par Edward. Elle n'avait rien fait de particulier pour le moment si ce n'est de comprendre son fonctionnement et ce qui avait été mis en place. Elle cherchait la petite bête parce qu'elle se doutait bien que tout ne serait pas tout blanc lorsqu'Edward Keynes met ses mains dessus. Elle avait cerné quelques anomalies qu'elle comptait bien supprimer. L'argent de Jamie injecté dans cet organisme lui restait toujours bien au travers de la gorge et elle avait encore ce sentiment de malaise. Mais elle avait repensé à ce que Jamie avait dit une fois. C'était qu'ils pouvaient récupérer cet argent en bonne et due forme. Car Joanne faisait partie des employés de cette fondation, et elle avait donc droit à des revenus qui n'étaient tout de même pas négligeable. Peut-être qu'il y avait finalement un peu de justice quelque part, se disait-elle. Mais, contre toute attente, elle commençait tout de même à s'attacher à la fondation, il y avait même quelques idées dans le but de l'améliorer qui lui était venues en tête depuis. Si le musée ne pouvait pas mettre en place ce poste, Joanne ne saurait plus vraiment où chercher. Et elle ne voulait pas que Jamie abuse de son statut pour permettre à sa fiancée d'avoir un poste qu'elle convoite. La belle blonde restait longuement silencieuse, songeuse. Elle porta la main baguée de Jamie à sa bouche afin de l'embrasser au niveau du bijou, et d'y coller ensuite sa joue dessus pendant quelques secondes. "Ca doit être insupportable d'avoir une fiancée si pessimiste." dit-elle pour ironiser un peu, bien qu'elle se doutait qu'il y avait une part de vérité dans ce qu'elle disait. Elle se rapprocha de lui et logea son visage dans son cou, pouvant ainsi humer son odeur et profiter de sa chaleur. "Je vais y arriver." dit-elle après un instant. "Il faut juste que je trouve... comment faire." Faire le tri dans ses idées, avoir confiance en elle. Elle ne savait pas quels outils utiliser. Elle ne pouvait pas prétendre, étant donné qu'elle était incapable de dissimuler ses émotions. Joanne se blottit contre lui. "Pardon."souffla-t-elle. Elle restait quelques minutes ainsi dans ses bras, ne sachant pas trop quoi dire. "Je devrais finir de réchauffer tout ça, sinon on ne mangera jamais." dit-elle en se détachant de lui et en revenant auprès des poëles. C'était un peu difficile de reprendre une conversation après ce genre de tension, et Joanne avait horreur de ça.
Un long silence s’installe après que je me sois évertué à secouer Joanne un tant soit peu. Son regard est bas comme celui d’une enfant que l’on gronde pour avoir fait une bêtise. Je sais qu’avec elle, je n’ai pas besoin de faire quoi que ce soit pour sembler sévère. La jeune femme finit par déposer un baiser sur ma main, près de ma bague de fiançailles. J’esquisse un fin sourire, légèrement attristé. Je le suis toujours lorsque je la vois se torturer de la sorte. Je suppose que nous sommes l’un et l’autres impuissants face aux tares de l’être aimé, elle pour mes crises de colère, moi pour ses idées noires, et cela n’est pas facile à accepter. L’on voudrait être le remède à tous les maux de la personne que l’on aime, et cela semble impossible. « Tu es comme tu es, et je t’aime ainsi. » lui dis-je d’une voix douce. Je sais qu’elle ne changera pas, ou du moins, même si elle effectue un petit travail sur elle-même pour améliorer cette facette empoisonnée de sa propre personnalité, cela ne sera jamais parfait –et ce n’est pas grave, personne ne lui demande d’être parfaite. Je sais généralement être optimiste pour deux. « Et puis, ce n’est pas vraiment ça… » j’ajoute en cherchant des mots justes sur ce que je souhaite lui faire comprendre. « J’aimerais juste que tu cesses d’être aussi exigeante envers toi-même. » Elle en fait déjà bien assez, plus que le nécessaire, et elle continue de s’en demander toujours plus. Je ne sais pas pourquoi, je ne le comprends pas. Peut-être que cela est lié à son premier mariage. J’imagine qu’elle était tout aussi dévouée avec Hassan, et cela n’a pas suffi à le garder près d’elle. Il serait naturel qu’elle ait peur que l’histoire se répète et qu’elle se dise que même donner tout son amour n’est pas assez pour nourrir un foyer. Qu’il faut plus. Joanne s’approche et je la prends instinctivement dans mes bras, penché de manière à ce qu’elle loge son visage au creux de mon cou. Je l’étreins tendrement d’une main, caresse ses cheveux de l’autre. « Allons, ce n’est rien. » je murmure en attendant que la jeune femme se remette d’aplomb. Ce qui prend quand même quelques minutes. Lorsqu’elle se sent de nouveau d’attaque à reprendre la soirée où elle a été laissée, je la laisse se détacher de moi et retourner aux fourneaux. Malheureusement, nous sommes trop fraîchement installés pour avoir de la pommade pour sa brûlure quelque part, sinon je me serais d’abord occupé de soulager sa main. Je glisse un léger baiser dans le cou de ma belle avant de la laisser dans la cuisine. En avançant dans le salon, j’arrive près du baby phone qui laisse entendre le début d’un gros chagrin à l’étage. « Daniel s’est réveillé, je vais m’en occuper. » dis-je à Joanne avant de monter les escaliers. Même rénovés, ceux-là grincent comme ceux d’une vieille maison. Un bruit auquel je suis peu habitué et qui m’amuse assez. Le petit s’agite au fond de son lit lorsque j’entre dans sa chambre. Il secoue vivement ses membres potelés, et couine un peu plus fort qu’à l’accoutumée –sûrement parce que Joanne et moi étions trop occupés à parler pour entendre ses premiers petits hoquets. « Alors mon bonhomme, qu’est-ce que c’est que ces larmes de crocodile ? » Je me penche pour le prendre dans mes bras et caler sa tête contre moi. Je le berce tout doucement. « Un mauvais rêve ? » La couche ne semble pas pleine, l’air ambiant n’est ni trop chaud, ni trop froid. Peut-être qu’inconsciemment il sait qu’il ne se trouve pas dans sa chambre habituelle, et que cela le perturbe un peu. Je fais quelques pas dans la chambre en le câlinant tendrement, ce qui finit par calmer ses pleurs. Pour l’endormir, je lui chante tout bas The Sound of Silence, faute de connaître la moindre berceuse –mais cela semble parfaitement lui convenir puisqu’il sombre avant la fin. Alors je le redépose délicatement sur son drap, prenant garde à ne pas faire de bruit, et ferme la porte derrière moi. Quand je redescends, Joanne termine la cuisson de son plat. Pour me rendre utile, j’installe les assiettes, couverts et verres sur la table qui se trouve à l’extérieur. L’air est un peu frais, mais il fait bon, et les quelques sons nocturnes à cette heure du soir sont des plus agréables. Ma fiancée ne tarde pas à apporter le dîner et nous servir. « Merci. » je lui glisse avec un baiser sur la joue. Je m’installe face à elle, mais légèrement tourné vers le jardin immense qui s’étend devant nous. Il y a une grande tondeuse autoportée dans la dépendance pour entretenir tout ce terrain, je pense qu’il sera des plus amusants de conduire cette machine. « On se croirait coupés du monde… » dis-je tout bas, pensif. Je me rends compte après coup que mon assiette est déjà vide et que le repas s’est déroulé dans le silence complet alors que j’étais absorbé dans ma contemplation. Je suppose que cela veut dire que je me repose bel et bien. « La prochaine fois il faudrait quand même amener Ben et Milo avec nous. » Nous les avons confiés à Gaby pour ce week-end, nous disant qu’il était assez compliqué d’avoir Daniel et les deux chiens dans la voiture en même temps. Nous trouverons un moyen. Mon esprit se décide à revenir sur terre et auprès de ma fiancée pour de bon. Je lui adresse un regard complice et un sourire malicieux, puis lui fait signe d’approcher. « Viens-là. Il faut qu’on parle affaires. » J’installe la jeune femme sur mes genoux et l’entoure avec mes bras, et lui vole un baiser par la même occasion. « Si nous voulons que ce mariage ait lieu dans l’année, il serait temps d’en discuter. » Après tout, ce genre d’événement ne se prépare pas le jour pour le lendemain, et nous n’avons jamais vraiment, concrètement, abordé le sujet. « Si ça ne tenait qu’à toi, et si l’on met de côté le fait que nous sommes fauchés comme les blés, comment est-ce que tu l’imagines ? »
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Même s'il espérait d'elle qu'elle efface ce côté sombre et autodestructeur de sa personnalité, Jamie devait bien se douter qu'il en restera toujours une grand partie. On ne s'en débarrasse pas si facilement que ça, tout comme lui ne se débarrassera jamais véritablement de ses colères noires. Pourtant, l'un comme l'autre vivait avec, et ils continuaient de s'aimer tout autant. Mais il y aura toujours cette part de frustration à cause de l'incapacité de pouvoir remédier à ces vices. Autant pour Jamie que pour Joanne. "Je t'aime aussi." lui dit-elle tout bas, la voix tremblante. Son fiancé corrigea ses mots, et précisa ce qu'il attendait d'elle, et cela semblait être beaucoup plus réalisable que le reste. Peut-être qu'un jour, la jeune femme le comprendra d'elle-même, et bien des choses iraient mieux à partir de ce moment là. Il la berçait en caressant doucement ses cheveux, la gardant bien contre lui, le temps que cette mauvaise passe soit derrière elle, ce qui requiert tout de même un certain temps. Joanne reprit alors là où elle en était alors que son futur époux entendait quelques grésillements provenant du baby phone. Elle avait toujours un petit pincement au coeur lorsqu'elle entendant Daniel pleurer. Mais le père de famille s'en chargea en quelques minutes, le temps que leur fils retrouve les bras de Morphée en toute sérénité. Suite à cela, ils dînèrent à l'extérieur. Joanne avait du sortir de la valise son gros gilet en laine beige parce qu'il faisait trop frais pour la frileuse qu'elle était. Il n'y avait aucune pollution sonore, ni lumineuse. Que les bruits de la nature, ce qui était des plus agréables. Ils mangèrent tranquillement, sans dire mot. Joanne avait vu qu'il était dans ses songes et elle n'osait pas l'en extirper. De toute façon, elle n'avait pas véritablement matière à parler, alors elle se concentrait sur son assiette. "Je pense que Ben serait tranquille dans la voiture, ce sera plutôt Milo à tenir en laisse." Il était infernal, inépuisable. Surtout que là Daniel serait à portée de griffes pour lui, il était donc évident qu'il fallait le tenir tranquille. Ben s'installera certainement dans un coin, toujours un oeil sur le bébé, mais pataud. Jamie prit un certain temps avant de redescendre sur terre et porter attention à sa fiancée, à qui il demanda de s'approcher. Joanne le regarda d'un air interrogateur mais se leva tout de même, se laissant entraîner et installer sur ses genoux. Il voulait parler mariage. Son coeur s'embellit alors immédiatement, ses yeux pétillèrent. Tout semblait si concret, d'un coup. Joanne se prit le temps de réfléchir. "Si ça ne tenait qu'à moi..." Elle rit un peu nerveusement. "C'est très fleur bleu et romantique, tu vas finir par te moquer." lui dit-elle avec un sourire embarrassée. Mais Jamie semblait tout à fait enclin à écouter la manière dont elle imaginait leur mariage. "Si ça ne tenait qu'à moi, j'aimerais bien que ça se fasse en majeure partie à l'extérieur. Si nous choisissons la bonne période, il fera bon même en fin de soirée. Enfin au moins pour la cérémonie et l'apéritif. Dans un jardin, avec des lanternes, de petits luminaires. Pas trop de monde, non plus. Je ne me vois pas accueillir des dizaines et des dizaines de personnes que je ne connais pas." Parce que certains le faisaient. Les cousins plus qu'éloignés, et autres personnes de ce genre. "Quelque chose qui nous corresponde, qui ne soit pas comme un fichier type où on change juste les noms sur les cartons d'invitation. Un adorable petit costume pour Daniel." Un large sourire s'afficha sur son visage. Ce n'était qu'une tenue éphémère, mais au moins, personne ne pourra dire que ce bébé n'a pas la classe. "Je ne me vois pas proposer un buffet pour le repas, peut-être juste pour l'apéritif. Et pas forcément de la cuisine trop recherchée ou sophistiquée. Pas de cuisine moléculaire par exemple." Elle réfléchit entre chaque phrase qu'elle disait. Tout était décousu, elle disait les premières choses qui lui sortaient par la tête. "Une cérémonie qui nous ressemble aussi. Pas de mariage religieux, parce que..." Elle prit un moment pour trouver les mots. "Parce que c'est bien plus que ça pour nous. Ca va bien au-delà de la religion ou des lois. Certes, il faudra signer le papier que je m'appelle enfin Madame Keynes, mais c'est plus que ça." Joanne savait qu'il comprendrait parfaitement ce qu'elle voulait dire. "Et toi ? Tu le vois comment ?" lui demanda-t-elle. D'autres choses lui viendront en tête par la suite, mais elle avait peur de faire fausse route dès le début. "A vrai dire, je crois que j'ai trouvé ma robe." finit-elle par lui avouer, à vois basse. "Ma robe de mariée." lui précisa-t-elle. "Je me suis promenée en ville l'autre jour avec Daniel, et il y avait cette boutique. Je dois avouer que dire que je serai la future Madame Keynes a largement motiver les vendeurs pour être aux petits soins avec moi, et ils m'en ont fait essayer quelques unes. Et il y en avait une. Un coup de coeur, et tout le monde était unanime là-dessus. Ils me l'ont mises de côté, et j'aimerais la montrer à ma mère dès que nous trouverons du temps toutes les deux." Elle tentait de dissimuler son sourire, parce que l'émotion était vive ce jour-là. "Il fallait bien que je me rattrape de ce côté-là." Avec sa bourde concernant la robe de mariée. Au début, ça l'avait clairement découragé, et pendant un moment. Mais lorsqu'elle était passée devant cette vitrine, c'était un style qui lui avait tout de suite beaucoup plus, et elle s'était laissée tout simplement tenter par la curiosité. Qu'elle trouve la robe était complètement inattendu.