Je ne doute pas une seconde que la vision de notre mariage par Joanne sera des plus fleur bleue. Mais je promets de ne pas me moquer. Je suis certain qu’elle sera bien plus inspirée que moi à ce sujet, pleine d’idées, contrairement à moi. Et puis, nous connaissant, nous serons sûrement d’accord d’office sur de nombreux points. Nous avons beau avoir nos différences, nos goûts s’accordent souvent très bien et nous savons être sur la même longueur d’onde à de nombreux propos. Alors j’écoute ma belle avec attention, visualisant ses paroles en même temps qu’elle les prononce pour me faire une idée de la chose, et peut-être y ajouter des détails. Comme je le pensais, nos imaginations se rejoignent. D’accord, je pouffe un petit peu lorsqu’elle évoque le costume pour Daniel. Pas parce que cela est ridicule, mais parce que je le vois parfaitement là-dedans, et qu’il sera si adorable qu’il pourrait facilement nous voler la vedette. A mes yeux il était évident que nous ne passerions pas par le mariage religieux. Pour des raisons moins romantiques que celles de Joanne ; pour l’Eglise, je suis toujours marié, et je le serais pour toujours. Je pense que ma fiancée n’a pas vraiment besoin de le savoir. Elle finit par me retourner ma question. « Moi ? Vraiment, je ne sais pas… » Je hausse les épaules. Réponse décevante pour la jeune femme s’il en est. Heureusement pour moi, elle change de sujet et évoque sa future robe de mariée. Après l’épisode de la dernière fois, elle pense cette fois avoir trouvé la bonne sur un véritable coup de cœur dans une boutique. Je meurs d’envie de lui demander à quoi elle ressemble, mais je m’abstiens. De toute manière, Joanne ne m’en aurait rien dit. Elle se fera un malin plaisir de tenir la tradition voulant que le marié ne découvre la robe que le jour du mariage jusqu’au bout, surtout en connaissance de mon degré d’impatience. « Tu n’aurais pas dû me dire une chose pareille, maintenant j’ai bien trop hâte de te voir dedans. » Et cette hâte risque bien de me rendre complètement fou. Néanmoins, elle ne doit pas me faire précipiter les choses. Je devine au regard de la jeune femme qu’elle attend toujours que je réponde à la question précédente, que je n’y échapperai pas. Je passe une main nerveuse entre mes cheveux. « Je te l’ai dit, je ne sais pas trop. » Pourtant Dieu sait que je reçois bon nombre de compliments dès que je mets sur pieds un événement tant j’aime en soigner les détails et créer des ambiances immersives. « Je suis plus doué pour organiser des événements pour les autres que pour moi. » Madison en est témoin d’ailleurs puisque je me suis toujours donné du mal pour son anniversaire tous les ans, sans jamais un raté. Je redouble toujours d’imagination. Mais cette fois on parle d’un mariage, de mon mariage, et c’est une pression supplémentaire qui fait fuir toutes les idées. Je reste silencieux une petite minute, et retrouve l’image que j’ai toujours eu de ce jour, la seule manière dont je l’ai vraiment imaginé et que je ne parviens pas à troquer contre quoi que ce soit d’autre. « Je voyais aussi quelque chose en extérieur, en comité réduit. Rien de grandiloquent. En fin d’après-midi pour profiter des couleurs du ciel, ou même le soir, sous une toile de lumières tirée entre les arbres. Juste une arche et des chaises pour la cérémonie. Une seule très grande table pour le dîner, des bougies. Des plats simples, juste assez fins pour être intéressants. » Dans le fond, ce que j’énonce se recoupe avec les paroles de Joanne. « Si nous faisons cela au printemps ou en été, il fera bien assez chaud pour rester dehors la nuit. Ou il suffirait de quelques installations, tout autour d’une sorte de petite estrade en bois faisant office de piste de danse, pour garder l’air chaud. Je dis ça surtout pour éviter les salles des fêtes, je trouve ce genre d’endroits tellement sinistres. » Même décorés, vraiment, ces grosses boîtes me donnent le cafard. A force d’en parler, mon regard s’est de nouveau perdu dans l’immense jardin. « Pourquoi pas ici, d’ailleurs. Il y a largement la place. »
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Joanne était un peu surprise que son fiancé n'ait en premier lieu aucune idée de la manière dont il visualisait son propre mariage. Aucun élément ne lui venait en tête dès qu'elle avait posé la question, pas même un petit détail qui compterait beaucoup pour lui. Mais le visage du bel homme s'illumina dès qu'elle parlait de sa robe de mariée. Elle savait qu'elle allait décupler son impatience qu'il avait déjà naturellement, et que des tas de questions au sujet de cette tenue sur lequel elle avait eu un véritable coup de coeur. Un beau sourire s'était dessiné sur ses lèvres, ravie qu'il ait mordu à l'hameçon. "J'espère qu'elle te plaira, quand même." Il y avait tout de même une légère appréhension à ce sujet. Qu'un détail, que la forme ne lui plaise pas, même s'ils avaient tous les deux des bons goûts en matière d'habillage Joanne l'embrassa tendrement. La robe en question coûtait cher, très cher. Mais avant même qu'elle ne commence à y songer, sa mère et sa grand-mère s'étaient mises à deux pour lui dire qu'elles tenaient à financer ensemble cette tenue. Quelque part, elles devaient se douter que c'était vraiment le mariage de leur fille et petite-fille adorée. Celle-ci cherchait tout de même auprès de son fiancé un élément qui contribuerait à leur mariage. Il comprit rapidement son regard interrogateur et y répondit de lui-même. Jamie restait un moment silencieux, elle le laissait dans sa réflexion, sachant très bien qu'il allait en ressortir quelque chose. Une nouvelle fois, leurs idées se rejoignaient. La jeune femme visualisait parfaitement la scène et c'était exactement ce qu'elle pouvait désirer. "L'idée de prendre une salle ne m'avait même pas effleurée l'esprit." lui dit-elle avec un sourire. "C'est impersonnel, kitsch, voire glauque. Ce n'est pas vraiment ce en quoi j'aspire." Au moins, ils étaient tous les deux d'accord là-dessus. Joanne se mit à lui caresser doucement les cheveux, alors que le regard du bel homme se perdait encore une fois à l'horizon, finissant par exprimer sa pensée. Elle regarda elle-même alors leur jardin. C'était certainement le point fort de cette maison. L'immensité du terrain et la beauté qu'elle inspirait. On devinait aisément que les anciens propriétaires passer beaucoup de temps à jardiner et à bichonner rosiers et buissons. "Tu as raison..." dit-elle tout bas, au bout d'un moment. "Et vu à quel point c'est retiré, nous ne gênerons personne avec la musique. Il y a de la place le long de la route pour garer les voitures. Et ceux qui ont une bonne descente pourront loger ici." Etrangement, tout concordait avec perfection. "Ce serait magique." dit-elle, pensive. Elle visualisait déjà les toits de lumières entre les arbres, une multitude de lanternes et de bougies, la table, la piste de danse. Avec la maison en arrière-plan. Tout dans sa tête était incroyablement beau, parfait. "Je crois que notre mariage commence à prendre forme." finit-elle par dire, l'air plus qu'enthousiaste. Un détail lui vint en tête. "Mais..." Elle avait un regard malicieux. "Si nous hébergeons ceux qui veulent dans la maison, peut-être que nous devrions trouver un beau gîte, ou un bel hôtel dans le coin pour notre nuit de noces..." Elle haussa les épaules, baissant timidement le regard, le sourire gêné. "Pour essayer." Ce serait en soi le moment idéal. C'était la nuit de leurs fiançailles que Daniel avait été conçu, Joanne suivait cette logique de grands événements pour essayer d'avoir un enfant. "Et nous rejoindrions tout le monde le lendemain matin, pour ceux qui sont restés, et nous pourrions faire un brunch. Avec le barbecue d'allumé, toujours dehors. Ce serait jovial, avec les plus proches." Joanne continuait ensuite silencieusement les caresses dans les cheveux, allant parfois même sur son visage. "Ca me donne des papillons dans le ventre, d'en parler, comme ça. Ca semble d'un coup bien plus concret et bien plus près que ça ne l'a jamais été." dit-elle doucement, en admirant les traits de son visage. "Nous allons nous marier dans notre petit coin de paradis." finit-elle par réaliser, des larmes de joie bordant ses iris bleus.
Etrangement, à propos de notre mariage, je n'ai jamais eu d'idée concrète concernant la robe que j'aimerais que Joanne porte ce jour-là. Il y a bien des détails que j'aime ou non et dont j'espère qu'elle a connaissance pour orienter son choix. Mais en soi, ce n'est pas une robe que j'épouse, uniquement la femme qui est dedans. « Je ne doute pas qu'elle me plaira. » je lui réponds avec un sourire rassurant. Elle sera belle quoi qu'elle porte. Je sais que cela lui tient à coeur que je la trouve belle dans cette robe tout particulièrement, pour ce jour spécial. Je fais confiance à ses goûts et au fait que quasiment tout lui va à ravir. Enfin, je lui expose ma vision fort succincte de note mariage. Bizarrement, je ne l'ai toujours imaginé que ainsi. Je n'ai jamais été capable de nous voir vous marier dans un château façon conte de fées, Joanne arrivant dans un carrosse puis longeant un parterre de pétales de roses, ou trop basiquement, juste à la mairie, la signature du papier officiel simplement suivi d'une sauterie dans une de salles lugubres salles au fin fond d'une zone industrielle. Il n'y a rien d'autre qui puisse nous ressemble que ce tableau que nous avons tous les deux dressé. Dehors, entourés de ceux qui comptent, dans une ambiance à la fois raffinée, chaleureuse et familiale. De l'authenticité, du bon goût, et du fondamental. « Ravi de voir que nous sommes encore et toujours sur la même longueur d'onde. » dis-je avec un large sourire quand ma fiancée m'assure qu'il n'était pas question de louer une salle. Dans ce cas, où mettre tout ce beau monde ? Où organiser cet événement qui nous ressemble ? Je me rends compte que lorsque Joanne m'a expliqué sa manière de voir l'événement, et lorsque je lui ai raconté ma vision concordante avec la sienne, je ne pouvais pas m'empêcher d'imaginer la scène, et surtout, de la projeter concrètement sur la grande étendue de verdure qui se trouve devant nous. C'est comme si je pouvais déjà voir où se trouvera chaque élément de la fête, où nous disposerons l'arche, les chaises, la grande table, la piste. Alors c'est tout naturellement que je propose à la jeune femme d'organiser le mariage ici même. La seconde suivante, je me suis dit qu'elle risquait de me prendre pour un radin. Il faut dire que vu l'état de nos finances, même si nous mettons de côté toute l'année, nos ambitions serons limitées par cela. Si la cérémonie et la fête ont lieu ici, cela reviendra à bien moindre coût. Néanmoins, là n'était pas l'intention. Tout le monde sait que nous sommes attachés à notre bulle, que nous aimons notre foyer, notre famille. Cela semble finalement logique d'accueillir toutes les personnes que nous aimons chez nous, et de nous marier dans ce lieu qui nous ressemble plus que n'importe quel autre. A aucun moment je n'aurais cru que Joanne accepterait. Les petites filles rêvent tout de même de mariages plus princiers que cela, personne ne pense à se marier chez soi. Pourtant, la jeune femme me suit, et cela la rend même particulièrement enthousiaste. Je la regarde avec de grands yeux surpris. Un large sourire ravi apparaît finalement sur mes lèvres. Oui, ce serait magique. Soudainement, tout prend forme, tout est quasiment palpable. « Une forme qui me plaît beaucoup. » dis-je. Il y a un ''mais'' qui me fait froncer les sourcils, et un regard qui m'intrigue encore plus. La nuit de noces. Je ris nerveusement. Je n'avais pas songé à ce détail alors qu'il n'a pas échappé à Joanne, c'est le monde à l'envers. Elle a bien raison, nous ne pourrons pas imposer nos ébats à nos invités. Il nous faudra trouver un endroit pour nous. Pour essayer, dit-elle. « Vraiment ? » Mon regard pétille à cette idée, je ne peux pas cacher mon enthousiasme. A quel point il serait parfait de parvenir à concevoir un autre enfant pendant notre nuit de noces. Et puis, qu'il est agréable d'entendre la jeune femme formuler ce souhait en y croyant. « Si tu fais tout pour me rendre de plus en plus impatient, c'est réussi. » Je la serre un peu plus dans mes bras et approche mon visage du sien pour l'embrasser tendrement tandis qu'elle poursuit ses caresses sur mes cheveux bruns. « Je t'aime. » je murmure au bord de ses lèvres, si heureux que ce mariage prenne enfin forme alors qu'il nous semblait encore si lointain il y a quelques jours. Mon regard dans celui de Joanne devine l'émotion qui borde de ses beaux yeux bleus. « Nous l'aurons bien mérité, notre cérémonie. » Je caresse tendrement sa joue. On aura beau nous dire que rien ne presse, à nos yeux, ce mariage a une immense valeur. Nous voulons que ce lien nous unisse l'un à l'autre au plus vite, et que ce moment soit sans fausse notre. « Nous devrions nous fixer une date, comme objectif. » Je réfléchis un instant, essayant de ne pas oublier l'inversement des saisons dans cet hémisphère. L'été débute en décembre, mais les températures devraient être assez bonnes un peu avant. Il ne faudrait pas associer notre mariage aux fêtes de fin d'année, et planifier pour plus tard m'empêcherait de tenir ma promesse d'épouser Joanne cette année. « Disons… novembre ? » Cela me semble être un bon compromis. « Je sens que ça va être l'année la plus longue de ma vie. » Car c'est toujours lorsque l'on attend un événement avec impatience que le temps s'étire sadiquement.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Joanne n'aurait jamais pensé que tout finirait par couler de source et que tout deviendrait une évidence. Il n'y avait pas d'autres mots pour qualifier le mécanisme qui venait de s'activer, en regardant leur immense jardin. Oui, c'était bien là qu'ils devraient se marier. Elle n'avait pas pensé à leurs revenus et au budget que demandera le mariage. Elle y avait songé un peu plus tard, mais ça ne rentrait pas dans les critères premiers. Il fallait d'abord trouver ce qui leur ressemblait le plus. Dire qu'ils se trouvaient à l'endroit même où ils allaient s'échanger les alliances. Les locations de salle et autre grandes pièces pour ce type d'événements coûtaient toujours une fortune, même si la salle était quasiment insalubre. Ils pourraient ainsi concentrer leur budget sur le repas, la décoration avec bien plus d'aisance que d'autres mariages qui se voulaient plus basiques. Jamie semblait tout de même surpris que sa belle accepte sa suggestion aussi rapidement. Mais il devait savoir que sa future épouse avait une vision bien à elle des choses, et qu'elle ne pensait pas forcément aux mariages royaux lorsqu'elle pensait à elle. Elle n'en était pas moins romantique, et elle était beaucoup plus partante de se marier en plein air sous une pluie de lumière mêlée aux feuillages des arbres qui décoraient leur jardin. Une ambiance qu'elle voyait féérique, et c'était ainsi qu'elle imaginait son parfait petit univers. Jamie était tout aussi enjoué que tout devienne plus concret en quelques minutes de conversation. Elle avait hâte de montrer cette maison à ses parents, et à Juliet, elle était sûre qu'ils adoreraient. Le cadre était merveilleux. Les yeux verts de Jamie pétillèrent d'un coup lorsqu'elle mentionna leur nuit de noces - étrange que ce soit elle qui l'évoque la première d'ailleurs. Toute timide et toute renfermée, elle acquiesça discrètement d'un signe de tête avec un sourire tout aussi gêné. "Daniel a été conçu la nuit de nos fiançailles. Simple hasard ou magie du moment, je ne sais pas." Elle rit nerveusement, se grattant la tête avant de reprendre. "Alors je me suis dit que la même magie opérera le soir-là." Parce que elle ne se l'expliqua pas autrement. "Et si cela doit être la plus belle journée de notre vie, j'aimerais que ça soit le cas jusqu'au bout et... ce serait mon cadeau de mariage pour toi." Ses joues rougirent. Elle était plus qu'emballée par cette idée et espérait de tout coeur que ça fonctionne. "Puis Daniel aura grandi d'ici là, je pense que je serai en mesure de le gérer à côté. Au pire, il fera des siestes avec moi toute la journée, je ne pense pas qu'il dirait non." dit-elle en riant. Il adorait dormir dans le lit de ses parents, encore plus lorsqu'il était collé contre l'un deux. "Je ne voulais pas te rendre plus impatient, non." rétorqua-t-elle de suite, un peu paniquée. "Mais j'ai repensé à notre conversation de tout à l'heure, et je préférais t'en parler. Je ne voulais pas que tu penses que ce soit trop tôt par rapport à Daniel." Son avis comptait toujours autant et ce sera toujours le cas. Il l'embrassa tendrement et la jeune femme y répondit avec autant d'amour. "Je t'aime aussi." lui répondit-elle en lui caressant la joue. "Novembre me semble parfait." approuva Joanne. L'avantage de ne pas devoir louer de salle était qu'ils pouvaient choisir la date comme ils le voulaient. Il fallait juste véritablement anticiper leur nuit de noces, mais tout allait pour le reste. Jamie se montrait déjà terriblement impatient, sentant déjà que les prochains mois allaient effroyablement s'étirer en longueur. "La plus belle, aussi." ajouta-t-elle. "Avec l'excitation avec les préparatifs, le jour où nous percherons toutes les lumières dans les arbres. Et Daniel qui grandira à côté. Peut-être qu'il marchera déjà à quatre pattes, peut-être même qu'il commencera à tenir debout sur ses jambes." C'est avec l'évolution de leur petit qu'ils verront le temps passer rapidement. L'air s'était considérablement refroidi, Joanne eut un vif frisson. "Nous devrions rentrer, il commence à faire froid." Heureusement qu'elle avait déjà son gilet sur les épaules. Avant de se lever, elle embrassa longuement Jamie, en se blottissant contre lui. Difficile de se détacher de ces lèvres si douces et si amoureuses. Elle se redressa pour débarrasser la table et ramener le tout à la cuisine. La vaisselle sera faite le lendemain, elle n'avait plus vraiment l'envie de faire des tâches ménagères pour le reste de la soirée. Les quelques lumières allumées dans le salon rendait toute la pièce particulièrement cosy. Il y faisait bon vivre. Jamie prit un peu plus de temps pour rentrer et dès qu'il avait fermé la porte derrière, elle se rapprocha magnétiquement de lui. Après tout, ils ne s'étaient pas vus tant que ça de la semaine, alors la moindre étreinte était la bienvenue.
L'idée d'essayer de concevoir un second enfant le soir de notre nuit de noces est un avoeu qui gêne la belle Joanne pendant un instant. Du moins, cela la rend soudainement timide et réservée, comme si elle en avait un peu honte. Elle doit sûrement se trouver trop débordante de romantisme, alors qu'elle en a bien le droit. L'idée est particulièrement séduisante après tout. Daniel conçu au moment de nos fiançailles, son petit frère ou sa petite sœur lui succédant le soir du mariage. Qui sait s'il y a bien une certaine magie qui opère durant ces moments où l'amour est à son paroxysme, un déclic qui permet à la jeune femme qui a normalement tant de mal à porter un bébé d'en avoir un en pleine santé. L'amour comme remède, cela ferait une belle histoire à leur raconter lorsqu'ils seront grands. « Ca serait un merveilleux cadeau. » dis-je tout bas, un sourire attendri sur les lèvres, le regard tendre posé sur Joanne. Il est bien plus plaisant de la voir enthousiaste et optimiste à ce sujet, plutôt que défaitiste comme elle l'était tout à l'heure. Je suis d'ailleurs agréablement surpris que des mauvais pensées ne viennent pas parasiter son esprit à cet instant, que son regard ne devienne pas lourd de doutes et ses épaules courbées par la peur d'être déçue si jamais ce plan ne fonctionne pas. Elle s'inquiète tout de même de mon avis à ce sujet. « C'est à toi de déterminer quel sera le meilleur moment pour toi d'avoir un autre enfant avec Daniel à côté. Je te fais confiance à ce sujet, c'est toi la maman. » C'est elle qui vivra avec eux tous les jours toute la journée, c'est elle qui portera l'enfant en s'occupant du premier. C'est à elle de gérer ce point. Pour ma part, je serai toujours partant pour agrandir la famille -pour le bonheur d'avoir une nouvelle fois un nouveau né dans les bras, et, avant cela, bien sûr, le plaisir de le concevoir. Joanne approuve novembre comme mois arrêté pour notre mariage. La date précise se déterminera en fonction du reste des préparatifs. Vraiment, c'est si étrange de passer de l'état de projet indéfini et lointain à un objectif concret que nous pouvons enfin commencer à préparer. Et je pense que nous prendrons un vrai plaisir à nous plonger dans les préparatifs. « Ca nous laisse sept mois. » Ce qui semble à la fois long et court. Je ne saurais pas dire si cela signifie que nous avons amplement le temps, ou si le timing sera serré. Mais au moins, nous pouvons compter les jours, et les semaines qui seront rythmées par les accomplissements de notre Daniel. J'ai hâte de le voir gambader partout à quatre pattes. Pour le moment, il se tourne sur le ventre et sait tenir sa tête. Il faudra encore un peu de temps avant qu'il n'ait la force de se mettre à quatre pattes et que nous soyons toujours obligés d'avoir un oeil sur lui pour éviter qu'il se fasse mal. Nous aurons tant à découvrir avec lui chaque jour. « C'est vrai. Finalement, nous risquons d'avoir tant de choses pour nous occuper que nous ne verrons pas le temps passer. » Je souris à cette idée. Tant mieux. Plus vite le temps passera, le mieux ce sera. Un coup de vent frais pousse Joanne à vouloir retourner à l'intérieur. Elle frisonne dans son gros gilet. J'acquiesce d'un signe de tête. Nous réunissions la vaisselle et les restes du dîner que Joanne s'occupe de rapporter en cuisine. Je traîne encore un peu sur la terrasse, continuant de visualiser les détails de la décoration du jardin pour le mariage. Cette fois, mon imagination a trouvé un moteur. Je me décide à rentrer et ferme la porte menant à l'extérieur derrière moi. Ma fiancée s'approche immédiatement. Délicatement, mes mains se posent dans le bas de son dos pour l’étreindre légèrement. Mon regard dans le sien, un peu joueur, surplombe un sourire tout aussi malicieux. « Alors, dites-moi, Miss Prescott... Qu'est-ce que cela vous fait de savoir que vous deviendrez ma Lady Keynes dans quelques mois ? » Pour ma part, ma hâte et ma joie sont palpables. Déjà une partie de moi est en train de rayer un jour en moins à attendre sur le calendrier.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Selon Jamie, c'était à elle et uniquement à elle de décider quand le temps était le plus propice pour envisager d'avoir un deuxième enfant. Certes, elle était la maman, et elle allait être celle qui allait s'occuper de ces bouts de chou à longueur de journée, mais à ses yeux, l'avis du père comptait tout autant, même s'il se ferait un peu plus absent. "Mais c'est aussi toi le papa." lui répliqua-t-elle, avec un sourire tendre. Il devait comprendre par là qu'il avait aussi le droit d'avoir son opinion sur la question, même si c'était elle qui allait porter l'enfant dans son ventre pendant de nombreux mois. Mais il semblait tout aussi enjoué qu'elle à cette idée, ayant certainement hâte d'être au moment de la conception, à n'en pas douter. Elle n'avait pas pu voir sa toute première réaction lorsqu'il avait Daniel pour la première fois dans ses bras. C'était une image que Joanne aurait adoré avoir en souvenir, mais la pauvre était tellement à bout de force, et avec son hémorragie, qu'elle n'avait rien pu voir de tout cela. Le mois du mariage étant fixé, il n'y avait plus qu'à déterminer la date exacte. Jamie commençait déjà à faire un décompte. Sept mois. C'était beaucoup comme c'était bien peu. Joanne savait déjà que le temps allait passer avec folle allure. "Nous n'aurons déjà pas la galère du lieu à trouver, contrairement à la majorité des mariages." Pour elle, c'était déjà une grosse épine enlevée du pied. "Il y aura les cartons d'invitation, le traiteur, quelqu'un pour nous louer le matériel pour la piste de danse, quelqu'un qui ait de bons goûts en matière de musique, la décoration... Connaissant mon père, il voudra s'occuper des vins et du champagne. Il a commencé à prendre des cours d’œnologie il y a quelques années, et depuis, impossible de l'arrêter." Puis les parents de Joanne tiendront particulièrement à contribuer à ce mariage, c'était quelque chose qui leur était cher. "Et à côté, Daniel commencera à gambader, à faire ses dents... Et j'aimerais quand même passer un peu de temps avec mon fiancé... Donc oui, je pense que nous ne verrons pas vraiment le temps passé, jusque là." Jamie était heureux de se dire que le temps allait passer plus vite que ce qu'il aurait pu initialement imaginer. Il était tellement beau, lorsqu'il souriait ainsi, comme étant un homme comblé. Le couple finit par rentrer puisque la jeune femme commençait à avoir froid. Ils ne tardèrent pas à se coller à nouveau l'un à l'autre. Jamie avait un air des plus malicieux tout en reprenant leur fameux jeu du vouvoiement. Elle rit nerveusement et l'embrassa dans le cou. "Eh bien... J'aurai la joie de dire à n'importe quelle femme qui osera vous approche : pas touche à mon mari. Je pourrai être autant possessive que je le veux et personne ne pourra remettre en question l'état de notre relation." Jamie savait que sa douce était loin d'être du genre à montrer les crocs lorsque la gente féminine tentait des approches auprès de lui. Mais elle n'en pensait pas moins, et comme tout le reste de ses pensées, ça la rongeait. Ce mariage lui permettrait certainement de faire une croix les aventures de Jamie avec Hannah et Nyx - du moins, elle l'espérait de tout coeur car elle n'en pouvait plus d'y penser constamment. "Et ce sera le plus grand des honneurs et des bonheurs pour moi lorsque vous direz de moi que je suis votre femme." Il n'y avait rien de plus important à ses yeux. Joanne se mit sur la pointe des pieds pour l'embrasser avec tendresse. "Et tout sera enfin rentré dans l'ordre." Ils appartiendront à l'un l'autre aux yeux de tous, aux yeux de l'univers et plus personne ne pourra venir dire le contraire. "Et vous, qu'est-ce que cela vous fait, de m'avoir en tant qu'épouse d'ici quelques mois ?" Elle se demandait s'il trouverait les mots, ou s'il finirait par le lui faire comprendre autrement. "Une nouvelle flûte de champagne est la bienvenue, il faut fêter le lancement de l'organisation de notre mariage." dit-elle avec des yeux pétillants, trouvant toujours un prétexte pour finir la bouteille - ce serait bien dommage de gâcher. Elle s'éloigna de quelques pas pour remplir les verres et en apporter un Jamie. "A notre mariage."
Souriant, je frisonne légèrement sous le baiser que Joanne dépose sur mon cou. Toutes ces petites attentions tendres font toujours leur effet. Elles font sentir parfaitement bien. La belle explique qu'une fois la bague au doigt, elle se sentira bien plus libre d'exprimer toute cette possessivité qu'elle garde bien pour elle. « Vous pouvez déjà être aussi possessive que vous le voulez, je suis quand même votre fiancé. » Mais non, ce n'est pas pareil. Les fiançailles n'ont pas le caractère définitif du mariage, même si c'est un engagement. Être un mari a visiblement plus de valeur et donne plus de crédit. Plus de fierté aussi. « Et ça le sera aussi pour moi. » Oui, avoir Joanne à mon bras, dire qu'elle est mon épouse, sera vécu comme un honneur. C'est une femme qu'il faut mériter à mes yeux, et Dieu sait que j'ai bataillé au début pour gagner le droit d'être avec elle et obtenir toute sa confiance. Que j'ai toujours tenu bon dans toutes les épreuves pour en arriver à ce moment. Vu depuis le temps que je songe à ce mariage, bien avant d'avoir formulé ma demande à Sydney, je peux presque aisément dire ce que cela me fait à moi de l'épouser. « Ca me comble de joie. » je réponds sans une once d'hésitation. Je ne pourrais pas être plus heureux. Entre ça et la perspective d'essayer de faire un autre enfant, je peux sentir mon coeur battre avec euphorie. « J'ai hâte de voir toutes ces mines déconfites des autres hommes lorsqu'on vous appellera Madame Keynes. » j'avoue avec un sourire amusé. Je ne doute pas qu'il y aura des jaloux, des envieux. Mais elle sera mienne. « Je serai tellement fier de dire à tout le monde que vous êtes... » Je ne sais pas trop pourquoi je m'arrête, alors que je me contente de caresser la joue de Joanne avec un fin sourire, toujours aussi ravi. Sûrement parce que ces mots sont importants et beaux, et que sur le moment, je les colle à ce visage que j'aime tant, et cela me semble absolument parfait. « Ma femme... » Ma femme. Celle que j'ai choisi, celle que j'aime plus que tout, avec qui je souhaite vivre, vieillir, avoir une grande famille. Ma moitié. « Alors je serai parfaitement… complet. » Je me penche pour l'embrasser tendrement, puis prends délicatement sa tête entre mes mains pour prolonger ce baiser aussi longtemps que possible. C'est si proche désormais. Si réel. Joanne file nous resservir en champagne, ce qui n'est pas une mauvaise idée. J'attrape ma coupe et trinque avec elle, un large sourire aux lèvres. « A notre mariage. » Après avoir bu une fine gorgée de bulles, je m'assois sur l’accoudoir du canapé, ce qui me met un peu plus à la hauteur de ma fiancée. Je ne tarde pas à reprendre la parole pour revenir sur un sujet tout autre mais qui nous passionne tout autant et, je pense, nous enthousiasmera également. « Tu as fini de lire les journaux du soldat et de l'infirmière je suppose, non ? » Sûrement, oui, elle a eu tout le temps pour cela, voir même pour les relire, et relire également les lettres. « Parce que la semaine prochaine, j'ai un rendez-vous un peu spécial auquel j'aimerais que tu m'accompagnes. » En rendez-vous, donc, en rapport avec cette histoire pour laquelle nous nous sommes pris d'affection. Un rendez-vous qui l'intéressera forcément, et je doute qu'elle refuse de venir avec moi. « Dan avait envoyé un message à sa famille depuis Darwin après son retour du front, tu vois, et il évoque ce jeune indien qu'il ont aidé. De tout son entourage, il est le seul à avoir quitté Darwin avant l'attaque. Alors j'ai pensé que c'était une piste à suivre. » Car il était évident que les lettres des amoureux avaient quitté la ville avant les explosions. Pour les journaux, c'est encore un mystère. L'indien, Raksha, devait se réfugier au ranch de la famille de Dan qui était prêt à l'accueillir. « J'ai appelé Gareth au ranch, il m'a dit que Raksha n'est jamais arrivé. Sur son itinéraire, il devait effectuer un changement pour aller en direction de Perth, du coup je me suis dit qu'il s'était peut-être trompé de train et avait atterri à Brisbane. » De l'autre côté du continent, à l'opposé de sa destination. Seul et sans le sou. Je ne peux qu'imaginer à quel point ce périple a pu lui faire peur et toutes les difficultés qu'il a connu pour avoir une vie dans cette grande ville. « Peut-être qu'il avait les lettres avec lui. » Cela semble même évident. C'est la seule explication qui permet de retrouver les lettres si loin de Darwin. « Je l'ai retrouvé dans un de ces villages pour retraités dans la banlieue de la ville. » dis-je alors que l'excitation à l'idée de voir celui qui est aujourd'hui un vieillard se lit sur mon visage. Nous pourrons lui poser tant de questions.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Non, la différence était énorme entre être fiancé et être marié. L'un engendrait l'aure, chacun était un engagement non négligeable. Mais ce n'était absolument pas pareil aux yeux de la jeune femme. Il y a tout un monde entre les deux. Le mariage avait une valeur énorme à ses yeux, une promesse à ne jamais rompre, la preuve ultime de l'amour. Ca avait toujours été le cas pour elle, ayant grandi dans une famille aux valeurs encore assez traditionnelles. C'était pour cette raison que son divorce a été particulièrement difficile, même si la raison qui avait poussé Hassan à le faire était tout à fait légitime. Cela restait une promesse dégradée, et détruite. A partir de ce moment-là, faire confiance et acceptée d'être aimée était une épreuve pour la jeune femme. Et Jamie s'y était parfaitement montré à la hauteur. Non sans peine et sans persévérance, mais ça avait marché, puisqu'il allait l'avoir pour femme dans si peu de temps. Il avait conscience de tout cela, il avait durement acquis ne serait-ce qu'un peu de sa confiance, le fait qu'elle accepte de se laisser totalement guider par la personne qui lui plaisait. C'était un renouveau, une redécouverte, pour Joanne. Chacun avait vécu le divorce différemment, les circonstances n'avaient pas été les mêmes et donc, les conséquences avaient été particulièrement opposées. Elle rit nerveusement lorsqu'il mentionnait les hommes jaloux qu'elle croiserait par la suite, et n'y croyait pas vraiment. Mais Jamie repérait mieux qu'elle ce genre de choses et vice-versa, elle se devait de le croire au moins un tout petit peu. Mais lorsqu'il parlait de ce mariage, on voyait qu'il n'aspirait qu'au bonheur, qu'il y avait enfin accès après un début de vie laborieux. Comme si elle était celle qui l'avait sauvé, qui lui permettait de vivre et faire de lui un homme à part entière. Joanne était touchée, jusqu'au plus profond d'elle-même. Emu, il prit un certain temps avant de dire qu'elle deviendrait effectivement sa femme. Ses yeux brillaient. Joanne le regardait d'un air plus qu'amoureux, ne l'interrompant pas à un seul instant. Le bel homme lui offrit un baisers des plus doux et des plus tendres, elle y répondit avec grand plaisir avant de filer récupérer les verres. Elle en but une gorgée avant de redéposer la flûter. Jamie s'était installé sur l'accoudoir en demandant quelque chose à sa belle. Celle-ci acquiesça d'un signe de tête. Elle avait eu tout le temps pour les lire attentivement, noter les détails et les faits qui l'avaient interpellé. Jamie parlait du jeune Indien que Dan avait mentionné à plusieurs reprises dans son journal. Cet homme là l'avait profondément marqué pour de multiples raisons. Et là, Jamie lui dit qu'ils avaient la possibilité de le rencontrer. A peine réalisable. Joanne resta d'abord longuement muette. "Tu l'as retrouvé ?" Une course acharnée à l'information pour en savoir plus sur ce couple décédé sous des bombardements. Ils en savaient déjà tant, et pourtant, ce n'était pas encore assez. Et voilà qu'il avait retrouvé Raksha, et qu'ils avaient l'occasion de s'entretenir avec lui. "C'est incroyable. Je... Je n'ai pas les mots." dit-elle, en riant ensuite doucement de joie. "C'est comme une chasse au trésor, et nous allons peut-être enfin avoir des réponses à nos questions." Joanne était surtout curieuse de voir ce que l'Indien penserait de la théorie de la jeune femme, de cette histoire de réincarnation, d'histoire sans fin. Les Indiens avaient une culture qui leur était propre et qui permettait de sortir un peu des sentiers battus lorsque l'on avait grandi et été entouré par la culture occidentale et le christianisme. Voir les choses sous un autre angle était ce qui la passionnait, dans tout ceci. Elle en était émerveillée. Joanne se plaça entre les jambes de Jamie et l'enlaça. "J'adorerais tellement venir avec toi." s'exclama-t-elle. "C'est une chance inouïe que de pouvoir parler avec quelqu'un qui les a connu. Peut-être que ça n'arrivera qu'une fois. Qu'il y ait un maillon qui relie toutes ces vies et qui lui donne l'opportunité de voir un nouveau chapitre de cette histoire." Joanne y croyait dur comme fer, pour des raisons qu'elle ne s'expliquait pas. Mais tout concordait tellement bien qu'elle avait fini par laisser tomber le hasard et les coïncidences. Au diable les explications raisonnées et cartésienne. Il y avait quelque chose, et ils étaient sur le point de mettre le doigts dessus. Elle avait l'impression d'être une archéologue qui découvre un nouveau tombeau dans la Vallée des Rois en Egypte. Elle rit à nouveau de bonheur en restant collée. "C'est comme si on arrivait à compléter le puzzle, et ce, juste avant notre mariage. C'est curieux, non ?" lui dit-elle, d'un ton plus qu'enthousiaste.
Lorsque je fais comprendre à Joanne que j'ai retrouvé le jeune indien évoqué dans le journal et les lettres de Dan, son visage s'illumine et un grand sourire anime des lèvres. Je confirme d'un signe de tête que j'ai bel et bien mis la main sur ce mystérieux Raksha. Sur le papier, il ne semblait être qu'un personnage secondaire das l'arrière plan de cette histoire. Mais pour nous, il risque bien d'être la clé ouvrant le coffre qui renferme toutes les réponses. C'est une chance qu'une personne ayant connu nos amants soit toujours en vie, et si proche de nous. « Il avait l'air vraiment content que quelqu'un s'intéresse à Dan et Lucy. Il semble se souvenir d'eux comme si c'était hier qu'il partait de Darwin. Pourtant, ce n'est plus un jeune homme. » Je reprends une fine gorgée de champagne et pose ma coupe sur le côté. Ces deux-là ont vraiment marqué le jeune soldat qu'il était à l'époque, je suis bien curieux de savoir pourquoi. « Il sera ravi de nous en parler, je pense. » En tout cas, c'était ce que ses paroles laissaient penser. Je n'ai pas eu besoin de le convaincre d'accepter de nous voir, c'était lui qui nous invitait quasiment à venir le voir chez lui pendant la semaine pour en discuter autour d'un thé. Joanne s'approche et se met entre mes jambes pour enlacer ses bras autour de mon cou. Je dépose mes mains sur ses reins. « Nous pourrions lui apporter les lettres et les journaux pour qu'il puisse les voir, et pourquoi pas lui présenter notre propre petit Daniel. » Il comprendra sûrement immédiatement d'où nous est venu ce prénom. « Peut-être qu'il nous trouvera cinglés. » dis-je avec un petit rire. Après tout, ce n'est pas tous les jours que l'on reçoit chez soi un couple qui est persuadé d'être lié à un autre datant de la Seconde Guerre Mondiale et qui appelle leur fils comme l'amant de celui-ci. Des fanatiques. « Mais j'en doute. Après tout c'est lui qui a parlé de ses croyances à propos des autres vies à Dan. » Disons que nous nous sommes vraiment beaucoup entichés de ce mythe et de ces amoureux que nous avons découvert par hasard, voilà tout. Pour Joanne, il n'y a pas de hasard si nous complétons le puzzle, comme elle le dit, avant notre mariage. « Tu ne te demandes pas ce que nous cherchons à travers cette histoire ? Pourquoi c'est si important ? Moi je peux passer des heures à me le demander. » Après tout, je ne sais même pas quelles questions nous pourrions poser à Raksha. Il nous en dira sûrement plus sur la personnalité de Dan et Lucy, il éclairera peut-être le mystère de ces lettres, mais ça ne me dit pas pourquoi leur histoire est devenue une obsession à la seconde même où je les ai eues entre les mains. « Peut-être que nous ne voulons qu'une preuve que nous sommes liés à eux. Que quelqu'un nous dise dans les yeux que c'est vrai. » Et si ça ne l'est pas, qu'est-ce que cela changera ? Est-ce qu'avoir cette confirmation a la moindre importance au final ? « Et je me demande s'il y a d'autres histoires à découvrir. » Je l'espère, à dire vrai. Car une fois que nous aurons fait le tour de celle-ci, que nous aurons tout reconstitué jusqu'à ce qu'il n'y ai rien de plus à trouver, je pense que cela me laissera un grand sentiment de vide. Il me faudra une nouvelle histoire à décortiquer, et d'ailleurs, j'aimerais tant pouvoir remonter le fil d'Ariane qui s'est tissé de vie en vie à travers le temps, et mettre le doigt sur la romance précédente pour voir toutes les similarités avec la suivante, et avec nous. « J'ai l'impression d'être l’Indiana Jones du bac à sable. » dis-je avec un petit rire, me moquant bien de moi-même. Depuis que je suis tombé sur ces lettres, que cette obsession s'est installée dans un coin de mon esprit, cette soif qui semble impossible à étancher ne me quitte pas. Ce n'est pas une grande aventure, mais c'est exaltant en soi de dépoussiérer le passer et rendre à des individus lambda, des anonymes, leur mémoire dans les temps présents. Qu'ils ne disparaissent pas à jamais, même s'ils n'existent que pour nous. Je dois avoir un vrai problème avec les fantômes. Je dois toujours les déterrer et les faire revivre. Je suis incapable de les laisser tranquilles.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
"Dans son journal, Lucy parle beaucoup de lui, alors qu'elle ne l'a vu que quelques heures même pas. Il avait renforcé en elle cette idée de vie antérieure et qu'elle avait fini par y croire dur comme fer." commenta-t-elle. Peut-être que Joanne cherchait tout autant de réponses que la jeune femme infirmière. Qu'elle avait besoin de quelqu'un d'extérieur à leur couple leur dire qu'il y croyait aussi, et qu'il en avait même les preuves. Jamie suggéra d'emmener avec eux tous les papiers concernant ce beau couple le jour où ils rencontreraient Raksha. Joanne approuva d'un signe de tête, avec un sourire qui ne parvenait pas à se détacher de ses lèvres. Il était évident pour la belle blonde d'emmener Daniel avec eux. Jamie se demandait en permanence ce qu'ils pouvaient bien chercher à travers cette histoire, ce qu'ils pouvaient en retirer après coup. Une question sans fin pour une réponse indéfinie également. Mais elle prit le temps de réfléchir quelques secondes pour lui partager les éléments de réponse qu'elle s'était trouvée. "Pour moi, c'est déjà rien que le plaisir de dépoussiérer des histoires. Même si elles semblent anodines et inintéressantes aux yeux des autres. Ils ont marqué le monde à leur propre façon. Je ne m'intéresse pas toujours aux grands héros de l'Histoire. Mais avoir sous les yeux des objets de tous les jours, qui ont beaucoup de choses à raconter aussi, m'émerveille autant plus. Ca reste des trésors, des choses à chérir. Il y en a qui s'attache à certaines périodes de l'Histoire, comme moi, mais qui ne veulent pas autant creuser. Ceux qui le veulent sont de grands curieux et des éternels insatisfaits." Et c'était bien le cas de Jamie et Joanne. "Et de l'autre côté, je me dis que l'on s'est plongé là-dedans pour expliquer comment ça se fait qu'on ait l'impression de se connaître depuis bien plus longtemps que ça. Pourquoi est-ce qu'un mariage nous semble paraître une évidence alors que nous nous étions rencontrés que quelques mois auparavant. Qu'est-ce qui a fait que tu m'aies demandé de venir vivre avec toi aussi rapidement. Du moins, c'est rapide concernant les normes actuelles d'une vie de couple. Et quand on y pense, attendre des mois avant d'espérer pouvoir passer une nuit avec toi me semblait être une éternité. Rester raisonnable pendant des années avant de songer avoir un enfant." Elle haussa les épaules. "Et à mes yeux, ça devient évident qu'il s'était passé des choses avant que tu ne viennes me sauver dans ce bar. Je ne savais pas quoi, mais je me doutais qu'il y avait un truc pour qu'il y ait ce magnétisme qui opère si fort de manière constante, même lorsque nous étions séparés." Même quand tout allait mal, ils trouvaient toujours moyen de se retrouver. Fausses excuses, prétextes, les fêtes de fin d'année. Joanne ne savait pas si c'était conscient ou pas, mais même là où ils parvenaient à se haïr, ils continuaient à s'aimer éperdument. C'était à en devenir fou. "Et nous avons trouvé leur histoire. Et que si Raksha confirme tout ce que je pense, je serai heureuse de savoir que j'avais raison d'y croire et de m'accrocher à eux. Qu'ils font partie de nous et que nous ayons été une partie d'eux." Jamie espérait qu'il y ait d'autres histoires de ce type à découvrir. Dans d'autres pays, durant d'autres époques. Savoir qu'ils avaient d'autres vies antérieures où leur âme avait pu se croiser. "Et peut-être que pour eux, ce sera salvateur pour eux de savoir, quelque part, que leur amour a su perdurer quelque part." dit-elle plus bas, en caressant les traits de son visage avec attention. Elle rit avec lui. "Un Indiana Jones incroyablement sexy et séduisant, alors." dit-elle en venant ensuite l'embrassant avec un sourire malicieux. "Peut-être que tu te sentiras encore plus complet après notre rencontre avec Raksha." Elle caressait le bout de son nez avec le sien. Elle savait à quel point il s'attachait à ce genre d'histoire, au passé. Il avait eu bien du mal à se séparer du fantôme de son frère, c'était certainement le cas aussi pour Dan et Lucy. Elle l'enlaça, portant ses lèvres à son cou pour l'y embrasser à plusieurs reprises.
Au delà du simple plaisir qui réside dans le fait de dépoussiérer le passé et retourner chaque petite pierre, il y a pour nous, au final, la recherche de légitimité. Le besoin d'être rassurés, de nous dire que nous ne sommes pas si étranges que ça à vouloir nous marier immédiatement et avoir un enfant dans l'année de notre rencontre. Qu'il y a une explication logique que nous serons peut-être les seuls à croire. Les autres nous verront toujours comme des étrangetés. Mais nous, nous saurons qu'il s'agit de la continuité d'une histoire plus ancienne que ce qu'ils peuvent croire. Pour moi, il y a toujours la possibilité que nous n'ayons strictement rien à voir avec Dan et Lucy, et que nous ne faisons que modeler le passé d'une manière qui nous convient pour finalement créer nous-même les réponses aux questions que nous avons. Peut-être que nous nous inventons une chimère. C'est ce que les Hommes font toujours pour expliquer ce qui leur échappe. Ils inventent des mythes. Néanmoins, j'ai tout de même envie de croire en celui-ci. Ce que je redoute, c'est que Raksha nous dise dans les yeux qu'il nous pense fous. Je ne veux pas imaginer la désillusion que cela serait pour Joanne. Et moi… Je ne sais pas trop. Je serais déçu, c'est certain. Mais nous sommes si convaincus, persuadés, qu'il sera quasiment impossible de nous faire changer d'opinion. Si nous ne sommes pas eux, alors nous serons liés à une autre histoire que nous n'aurons plus qu'à trouver. Je souris, attendri, en entendant ma fiancée penser que les fantômes seront ravis de savoir que leur amour vit toujours. « Tu es peut-être plus entichée de ces histoires que moi finalement. » dis-je. « Ma grande romantique... » Oui, c'est un mythe parfait pour une personne aussi fleur bleue qu'elle. Une chasse au trésor qui exalte son imagination. Elle est si adorable lorsque nous en parlons. Je ris nerveusement à ses compliments, secouant la tête négativement en fuyant son regard que je sais plein de malice. « Je ne vais pas à la cheville d'Harrison Ford, voyons. Et je n'ai ni chapeau, ni lasso. » Mais j'en avais quand j'étais petit. La période Indiana Jones avait été ma première et avait eu lieu avant la période Superman. Celle-là a duré bien plus longtemps. Dieu merci je n'ai plus de mère pour sortir l'album de photos de mon enfance au milieu du repas de famille pour montrer à Joanne à quel point j'étais mignon en cape et collants. Je souris à cette pensée, et termine la coupe de champagne. La jeune femme pense que la rencontre avec l'indien aura un effet bénéfique sur moi. « Non, il n'y a que toi pour me faire ressentir ça. » je réponds avant de déposer un baiser sur sa joue. Je la serre un peu plus fort alors qu'elle loge son visage dans mon cou. « Qu'est-ce que tu voudras faire de ce weekend-cadeau d'anniversaire ? » je demande au bout d'un petit moment de silence. « Nous pouvons nous balader pour explorer un peu les environs, découvrir le village. Ce qui nous prendra approximativement trente minutes. » Parce qu'il faut dire qu'une des raisons pour lesquelles nous sommes ici, c'est la distance par rapport à la ville, et le calme de la petite commune à la sortie de laquelle nous nous trouvons. Un hameau minuscule qui ne doit comporter que le strict nécessaire et partager son système de poste avec le village voisin. « Ou nous perdre dans notre immense jardin. » Simplement nous allonger dans l'herbe sur une couverture avec un livre, et Daniel faisant une sieste entre nous deux à l'ombre d'un des arbres en bordure du terrain. Je relève délicatement le visage de Joanne et lui adresse un regard complice et mutin. « Avant ça, il faudrait baptiser la chambre. » Comme nous l'avions évoqué la semaine dernière. Mes lèvres viennent alors chercher celles de ma fiancée pour l'embrasser avec cette pointe d'envie perceptible. Un baiser qui a à peine le temps de gagner en intensité avant que le baby phone se mette à grésiller. « Qu'est-ce que... » On devine les petits hoquets de Daniel au fond de son lit. C'est la seconde fois qu'il se réveille en même pas quelques heures. Joanne et moi allons ensemble à l'étage voir ce qu'il en est, les ardeurs naissantes déjà calmées. « Qu'est-ce qu'il se passe ici ? » je demande au petit en le tirant hors de son lit pour le prendre dans mes bras. Encore une fois, il ne semble pas avoir faim, ni besoin d'être changé. « On ne compte pas laisser maman et papa tranquilles, hein. » D'ailleurs, le caprice reprend dès que je cesse de le bercer. Les petits doigts de Daniel attrapent ma chemise comme pour faire comprendre qu'il n'a aucune envie de me quitter. J'adresse un regard à Joanne, ne sachant pas trop quoi faire, et encore moins pourquoi le petit se manifeste ainsi. Peut-être qu'il faudra le garder près de nous cette nuit.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Joanne se savait être romantique, très fleur bleue. Pas forcément comme une princesse, mais elle avait toujours une vision un peu féérique des choses. Elle ne manquait pas de trouver des raisons dans le magique lorsque la science ne trouvait pas de réponses. C'était bien connu, elle n'était rien d'une personne scientifique, et mathématiques. Elle était cartésienne pour certaines choses, et pour d'autres, beaucoup moins. Jamie ne manquait pas de le constater. Mais il ne s'en était jamais moqué, cela le faisait simplement sourire. Le bon côté de sa naïveté et de son innocence, qui apportait bien plus de légèreté à certaines choses. Il la regardait d'un air tendre jusqu'au bout. "Je te trouve bien plus beau qu'Harrison Ford." lui avoua-t-elle sans hésiter un seul instant. "Et tu n'as pas eu besoin de lasso pour m'attraper dans tes filets."lui lança-t-elle avec un regard très malicieux, en lui volant un baiser juste après. La jeune femme adorait le complimenter, le mettre en avant. Il avait été constamment rabaissé depuis sa plus tendre enfance, il était temps qu'il sache qu'il y avait bien plus d'une personne qui admirait sa beauté et ses goûts en ce bas monde. Il lui assura qu'elle était la seule à pouvoir le faire sentir complet, qu'il n'avait pas forcément besoin des pensées de Raksha pour ça. Ils restaient blottis l'un contre l'autre, tout en silence, pendant quelques minutes. "Je te l'ai déjà dit, pas besoin d'un cadeau d'anniversaire." dit-elle d'une voix douce. Ce n'était vraiment pas quelque chose d'important à ses yeux. "Mais oui, on pourrait se promener pour voir un peu les horizons. Peut-être qu'il y a des animaux dans le coin, qu'on pourrait déjà montrer à Daniel." Mais il était clair que ça n'allait pas leur prendre l'après-midi. "On pourrait faire un barbecue demain, s'il fait aussi beau qu'aujourd'hui. Profiter au maximum de l'extérieur. Réfléchir où nous mettrons les lanternes, les plafonds de lumière et la table." dit-elle avec un large sourire. "S'allonger dans l'herbe et profiter de la sérénité de ces lieux." Des heures à rêvasser à ne pas faire grand chose si ce n'est de profiter de leur jardin. Mais Jamie n'avait pas oublié une chose dont ils avaient parlé la semaine suivante. Disons qu'il comptait bien se familiariser avec les lieux de leur propre manière. Mais il y avait leur petit être qui se manifestait une nouvelle fois. Daniel devait certainement ressentir qu'il n'était pas chez lui. Le couple montait ensemble à l'étage, puis Jamie le prit dans ses bras, dans lesquels il hoqueta encore un peu. Le père de famille semblait un peu perdu face à son comportement, et demandait clairement de l'aide à sa douce. Celle-ci tendit les bras pour prendre son bébé dans ses bras. Il s'agrippa tout autant à ses vêtements. "Je vais quand même lui donner le sein, peut-être que ça le rassurera un petit peu." dit-elle tout bas en s'installant sur un petit fauteuil qu'ils avaient mis dans la chambre. Elle releva son haut pour que le bébé puisse suçoter son mamelon. Même s'il ne semblait pas mourir de faim, il but un peu de lait maternel, et semblait être déjà plus serein. Joanne lui caressait doucement le visage. Parfois, elle craignait que la forte complicité instaurée entre Daniel et elle ne mette mal à l'aise son fiancé. Mais elle se doutait que si ils finissaient par avoir une fille, la situation s'inverserait grandement. Une fois que Daniel avait terminé, Joanne le blottit contre elle, et en lui chuchotant une multitude de mots d'amour tout en le berçant. Elle lui expliquait que c'était sa deuxième maison, qu'il n'avait pas de raison d'avoir peur, que ses parents étaient là, qu'il ne devait pas s'inquiéter. Peut-être qu'il ne comprenait pas grand chose, peut-être que rien le fait d'entendre la voix tout à fait calme de sa maman suffisait. Toujours est-il qu'il commençait à somnoler, que ses doigts se crispaient beaucoup sur les vêtements de sa mère. Elle l'embrassa à plusieurs reprises avant de le déposer dans son berceau, endormi. Doucement, elle prit la main de Jamie pour qu'ils se rendent dans la suite parentale. "Il va juste falloir qu'il s'y habitue. C'est sa première nuit ici, après tout." Une réaction qui n'alarmait pas Joanne pour le moment, même si ses pleurs lui faisaient toujours un petit pincement au coeur. Elle s'approcha de Jamie en l'embrassant au coin de ses lèvres. "Vous disiez, Mr. Keynes ?" lui demanda-t-elle d'un air malicieux.
Joanne prend les choses en main. C'est elle la maman, et je suis forcé de constater qu'elle parle mieux le bébé que moi. Je suppose que c'est mon lot, celui de toute personne qui s'absente toute la journée. Elle, elle a des heures pour tout apprendre de notre garçon. Je suppose que j'en sais bien peu comparé à elle. Je reconnais mon impuissance face au comportement de Daniel et le laisse aux soins de la jeune femme, assez déçu sur le moment de ne rien pouvoir faire de plus. Adossé à l'un des murs de la chambre, je l'observe allaiter le petit qui tète même sans faim. Elle a sûrement raison, cela le rassure d'avoir sa mère avec lui, et d'avoir les mêmes rituels avec elle, même dans cet endroit qu'il ne connaît pas. Il suffit qu'elle le berce un peu pour qu'il se calme, marchant dans la pièce en lui murmurant des mots d'amour et quelques paroles apaisantes. Peut-être que ce nouvel environnement le perturbe encore. J'espère surtout qu'il s'y habituera et trouvera le sommeil dans cet autre lit. Joanne le couche, le voilà qui dort. Même si j'en ai envie, je m'abstiens d'approcher pour juste caresser sa joue, lui donner un baiser, lui souhaiter une bonne nuit, de peur de le réveiller. Que ma présence le trouble. Je suis ma fiancée hors de la chambre jusqu'à la notre. « Tu crois que ça ira mieux demain ? » je demande, un peu soucieux. Le moindre petit pleur de la part de Daniel me fend le coeur. Et si quelque chose ne lui plaisait pas ici, et s'il n'aimait jamais cet endroit ? C'est sûrement idiot, mais je ne peux pas m'empêcher d'y penser. Un bébé, ça n'est pas exigeant, pourtant. Ca dort à peu près n'importe où, n'importe quand, alors il n'y a pas de raison pour qu'il ne s'acclimate pas à cette maison, surtout si nous sommes avec lui. C'est parfois dépitant, d'être père. Et de ne pas avoir le même instinct que la mère. Je devine lorsqu'il a faim, et je pense que c'est à peu près tout. Le reste me laisse désarmé, et c'est à Joanne de prendre les rennes. Elle s'est approchée de moi, l'air malicieux, reprenant le jeu où nous l'avions laissée. Sauf que l'envie est passée, et que sur le moment, elle ne revient pas dans un claquement de doigts. « Je... » C'est assez rare pour que trouver les mots afin de le lui dire soit assez difficile. Mon regard fuit un peu pour ne pas avoir à voir la mine déçue de ma belle. « Je suis désolé, nous n'inaugurerons peut-être pas la chambre ce soir. » dis-je finalement, un rictus attristé au coin de la bouche. Non, pas cette fois. « J'ai un sacré coup de barre. Je pense que la route m'a un peu cassé. » C'est qu'il y a pas mal d'heures de route entre ici et Brisbane, autant de route à faire juste après une longue journée de travail. Je ne dirais pas que je suis exténué, je tiens très bien sur mes jambes et je pourrais veiller peut-être une heure supplémentaire. Mais pas ce genre de veillée. Je passe une main sur ma nuque, gêné. Il est si peu dans mes habitudes de refuser les avances de Joanne que je ne voudrais pas qu'elle le prenne mal. « Ca n'est que partie remise. » dis-je avant de déposer un baiser sur le front de Joanne, en espérant qu'elle ne m'en veuille pas trop de changer d'avis si rapidement. Puis je me détache d'elle pour m'approcher du lit, retirant ma chemise au passage. Toutes nos affaires sont encore dans la valise que nous avons apporté avec nous, alors je l'ouvre et en tire un pantalon de pyjama. Nous déballerons tout cela demain, me dis-je, et rangerons les vêtements que nous souhaitons laisser ici dans l'armoire et les tiroirs qui sont bien plus modestes que le dressing de Brisbane. De toute manière, nous n'avons pas besoin de plus. Assis sur le bord du lit, je retire mon pantalon et mon dessous pour enfiler l'autre, silencieux.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Daniel avait juste besoin de s'habituer un peu à cette nouvelle maison, sa mère ne se faisait pas trop de soucis. Elle pouvait le comprendre, d'avoir un peu peur de dormir dans un endroit qu'il ne connaissait pas. Elle était certaine que les jours suivants iront beaucoup mieux, tant qu'il sait que ses parents ne seront jamais bien loin et qu'ils seront sereins. "Laisse-lui le temps de s'adapter. Il y a plein de trucs nouveau qu'il ne connait pas et qu'il doit encore découvrir." dit-elle avec un sourire rassurante. Et maintenant que ce petit contre-temps était réglé, Joanne se sentait prête à reprendre là où ils avaient du s'arrêter un peu plus tôt. Sauf que le bel homme n'entrait absolument pas dans son jeu, et Joanne ne comprit pas tout de suite ce qui était en train de se passer. Il ne comptait pas reprendre quoi que ce soit, mettant tout sous le compte de la fatigue cumulée, ce qu'elle pouvait comprendre. Mais ça ne voulait pas dire qu'elle n'était pas déçue. Joanne restait parfaitement silencieuse. Après lui avoir garanti que ça ne pouvait qu'être reporté, Jamie s'éloigna d'elle pour ouvrir la valise et y dénicher son pantalon de pyjama. Elle l'observa faire quelques secondes, encore un peu déroutée de ce qu'il venait de se passer. C'était bien la première fois qu'il n'avait pas envie d'elle lorsqu'elle en demandait un peu. Et forcément, l'esprit de la jeune femme était si tordu que ça soulevait subitement des dizaines de questions. Joanne jouait un peu avec ses doigts, mais ce n'était pas aussi nerveux que ce qu'elle pouvait faire d'habitude. Elle finit par s'approcher de la valise pour y récupérer sa nuisette, son kimono, ainsi qu'un drap de bain. "Je vais prendre une douche." dit-elle tout bas avant de filer à toute vitesse vers leur salle de bain. Une fois déshabillée, la belle blonde laissait longuement l'eau couler sur ses cheveux. Ca arrivait à tout le monde, se disait-elle, c'était le coup classique dans un couple. Mais elle restait Joanne, et elle pensait beaucoup. Elle se demandait si c'était à cause de sa relation fusionnelle avec Daniel. Sa réflexion la poussait même à se demander si c'était le début d'un quelconque désintérêt. Le fait que leur mariage se concrétise, qu'ils aient eu une enfant, Jamie avait eu tout ce qu'il pouvait attendre d'elle. C'était extrême comme vision mais ça lui traversait l'esprit, comme beaucoup d'autres choses. Elle prit son temps pour se laver et pour se rincer, murée dans son silence. Une fois qu'elle était séchée et qu'elle avait enfilé sa nuisette et son kimono, elle fit un passage près de la chambre de Daniel pour voir s'il dormait toujours. Elle s'approcha du berceau, où le bébé dormait paisiblement. Joanne pasa délicatement une main sur son petit visage. "Je t'aime, mon trésor." lui dit-elle tout bas. Elle le regardait dormir quelques secondes avant de quitter la chambre et de fermer la porte derrière elle. La jeune femme rejoignit la suite parentale, un peu à reculons. Elle maudissait ses idées quasi paranoïaques. C'en était parfois handicapant, de se poser autant de questions qui remettaient absolument tout en doute. Jamie s'était également allongé, mais sur le côté, elle ne voyait pas si elle dormait ou non. Elle fit de même, également tournée sur le côté extérieur du lit. Joanne était certainement fatiguée, d'avoir tout préparé toute la journée pour ce weekend tant attendu. Et rien qu'en une soirée, il y avait déjà eu deux notes négatives. Elle espérait que ça se passe un peu mieux le reste du weekend, mais elle n'allait certainement plus venir lui réclamer quoi que ce soit dès qu'elle aurait envie de lui. Elle vivait très mal le fait de se faire ainsi refouler et elle ne voulait pas réitérer l'expérience. Alors elle restait allongée, comme ça, le kimono sur les épaules car le fond de l'air était un peu trop frais pour elle, les cheveux humides et les yeux grand ouverts. A la fois sur le qui-vive si jamais Daniel se réveillait à nouveau, et à la fois travaillée par un flot de pensées qu'elle espérait, encore une fois, ne jamais songer un jour. Elle n'allait pas s'endormir avant plusieurs heures - si elle allait s'endormir. Elle maudissait son imagination, qui parvenait à la persuader de certaines choses avec trois fois rien.
Une envie qui s'en va, c'est un peu comme une nuée de papillons qui s'envolent. En une seconde, il n'y a plus rien. C'est étrange, mais c'est ainsi. Un petit vide s'installe, et il n'y a rien à faire contre cela. Se forcer ? Ca n'aurait pas de sens. Pas chez nous. Joanne le sentirait dans la seconde, et je ne pense pas qu'elle ne prendrait mieux qu'un simple refus -ou plutôt un report- en bonne et due forme. L'envie est partie, voilà tout, cela arrive à tout le monde. Pas besoin de regarder la jeune femme pour comprendre qu'elle est déçue, son silence est bien assez éloquent. Tant pis. Qu'y puis-je ? Je suis désolé de sentir une pointe de tension dans l'air après l'avoir déboutée, mais c'est ainsi. Elle file sous la douche, je devine qu'elle fuit la pièce dans un sens. Je passe une main par mes cheveux, sur mon visage, massant mes traits tirés par la fatigue qui s'installe de plus en plus. Je n'ai même pas envie de penser aux moyens qu'à Joanne de se monter la tête pour si peu, cela ne pourrait que m'énerver. Oh, maintenant que j'y pense, j'ai oublié mes cachets à Brisbane. Je suppose qu'un weekend sans ne me fera pas de mal. A chaque oubli, pendant deux ou trois jours d'affilée, je ne ressens pas vraiment de différence. En revanche, c'est lorsque je reprends le rythme normal des prises que mon cerveau me semble un peu plus engourdi. Je ne peux m'en prendre qu'à moi pour le coup. Glissé sous le draps, j'attends que ma fiancée me rejoigne après sa douche. Mais une fois le jet d'eau éteint, tout ce que j'entends, ce sont des pas dans le couloir et une porte qui s'ouvre qui n'est pas celle de notre chambre. Elle est retournée auprès de Daniel. Je soupire et me tourne sur le côté. Tant pis. Comme toujours, une poignée de secondes suffisent pour que je m'endorme. A partir de là, plus rien n'a d'importance, tout n'est qu'obscurité et néant. Je suis réveillé par les premiers rayons du soleil qui traversent la fenêtre aux volets qui n'ont pas été fermés. Un petit oubli de notre part. Dans cela n'est pas désagréable, de pouvoir admirer un instant le ciel encore un peu doré, à peine les yeux ouverts. Néanmoins, je ne tarde pas à me lever pour tirer les rideaux et replonger la chambre dans la pénombre. Joanne dort encore, et si c'est le cas, c'est qu'elle en a besoin. Pour ma part, je me dirige vers la chambre de Daniel. Le petit est également réveillé au fond du berceau. Bien plus serein que la veille, il est en pleine découverte de ses doigts qu'il porte à sa bouche et semble essayer de mordiller à l'aide de ses gencives édentées. Il secoue ses petites jambes dans sa grenouillère. Et lorsqu'il se rend compte de ma présence, il m'adresse un sourire et tape un peu plus fort des pieds. « Salut bonhomme, bien dormi ? » dis-je en le prenant délicatement dans mes bras. Sa tête est calée sur mon épaule, ses mains se posent sur mon torse pour en étreindre la chaleur. Le week-end, je me charge toujours de le changer, et c'est quasiment la première chose à faire le matin. Monsieur est installé sur la table à langer, et une nouvelle couche propre lui est prodiguée pour sa plus grande aise. Pourtant, il est tenté de couiner un peu pour rappeler son papa à l'ordre. « Oui, oui, le doudou, je sais. » J'avais lu quelque part que les enfants n'ont vraiment besoin d'un doudou qu'à partir de six mois, mais Daniel semble particulièrement attaché à la peluche que lui a offerte Ezra -laissant la mienne pour compte. « Shh, on ne voudrait pas réveiller maman. » je murmure en calant le lapin entre mon fils et moi. A se demander auquel des deux il préfère faire un câlin. Berçant tranquillement mon fils, je l'amène dans le couloir d'om nous pouvons voir Joanne qui dort toujours dans notre lit. « Regarde comme elle est belle quand elle dort. » dis-je à Daniel avant de déposer un petit baiser sur son front. « Est-ce que je ne t'avais pas dit à quel point elle allait te plaire ? » Il ne risque pas de s'en souvenir, ni maintenant, ni jamais, puisque ce sont des paroles que je lui disais lorsqu'il n'était pas encore né, à travers le ventre de sa mère. Quoi qu'il en soit, je ne pense pas m'être trompé. « Allons lui tenir compagnie. » Sans un bruit, nous approchons du lit et allons du côté que j'ai occupé toute la nuit. Je m'allonge sur le drap, Daniel tout contre moi. Sur le ventre, il replie ses petites jambes et laisse tomber s tête sur mon buste et ne lâche qu'un soupir d'aise. Je n'ai plus besoin de le tenir pour qu'il reste en parfait équilibre sur mon torse -je garde tout de même une main sur le bas de son pour qu'il ne soit as tenté de rouler sur le côté. Le voilà confortablement installé, somnolant déjà, prêt à faire une sieste sur son père. « Je t'aime, petit ange. » je souffle tout bas avant de l'embrasser sur le front. Ainsi impeccablement calé, je ferme les yeux à mon tour pour me reposer encore un peu en attendant que Joanne s'éveille à son tour, profitant de la chaleur du minuscule corps de mon fils près de moi.