Cela me change de d’habitude, d’être d’humeur aussi légère. Je ne sais pas vraiment pourquoi cette envie de danser avec Joanne m’a soudainement prise, mais cela n’a absolument pas d’importance. Je suppose que je voulais simplement l’avoir près de moi, avoir un petit moment de tendresse avec elle, en tête-à-tête, de ceux qui viennent à manquer depuis la naissance de Daniel. Nous ne pouvons plus sortir autant qu’avant, même si ce ne sont pas les volontaires pour garder notre fils qui manquent. Nous nous accordons peu de soirées sans lui, juste pour profiter l’un de l’autre, de notre couple. Ce n’est pas en semaine que nous en avons l’occasion, et les week-ends, nous préférons passer le temps en famille pour rattraper le temps perdu les autres jours. Il n’y a pas que les ébats qui manquent, il y a un peu de tout. C’est l’inconvénient d’une vie chargée. Alors oui, en entendant ce petit morceau de jazz résonner dans le salon, je me suis dit qu’il n’y a pas besoin d’autre raison pour avoir envie de danser un peu. Ce n’est pourtant pas grand-chose. J’ai une main dans le bas du dos de la jeune femme, l’autre tenant ses doigts. Elle a déposé la sienne sur mon épaule, et s’est assez approchée pour que nos corps se frôlent dans ce lent mouvement de balancier. Nous gardons nos regards l’un dans l’autre, les visages à quelques millimètres de distance. Nous déposons parfois, juste au bord des lèvres de l’autre, l’esquisse d’un baiser aérien. Cela ne dure qu’une ou deux chansons, mais cela suffit à faire régner une ambiance légère et apaisée, un cocon tendre qui nous enrobe le temps que la musique s’arrête. « Les occasions de danser manquent un peu en ce moment. » je réponds avec un petit sourire désolé. Il y a toujours mille et une soirées mondaines et moins guindées où se rendre tous les soirs, mais je ne veux pas y aller sans ma fiancée. Pas en ce moment. Mais à choisir, je préfère être ici, avec elle et Daniel, plutôt qu’à faire mine de m’intéresser à des conversations qui me passent par-dessus la tête tenues par des personnes souvent indignes d’intérêt. Il y a bien des événements agréables, mais là encore, actuellement, je ne veux que profiter de ma petite famille et de mes deux amours. Je souris face à l’imagination de Joanne qui la projette le soir de notre mariage, je me doute qu’elle visualise les choses de la plus romantique des manières qui soient. « J’ai hâte. » dis-je tout bas. Même si ça fait un peu peur, la première danse devant tout le monde. J’espère que tout sera comme elle l’imagine, ou du moins, à la hauteur de ses espérances. Qu’elle aura le mariage dont elle rêve, et qu’elle pourra qualifier sans hésiter de plus beau jour de sa vie. Je réponds tendrement à son baiser, et laisse mes bras glisser autour de sa taille pour l’étreindre délicatement. « Tu vas tous les éblouir, j’en suis certain. » Joanne sera une mariée magnifique, toujours aussi gracieuse. Je ne doute pas que tous les regards admireront ce petit ange. Elle a plutôt intérêt à se faire à cette idée avant le jour J d’ailleurs. « Je t’aime. » je murmure, mon front apposé au sien, caressant tendrement son visage du bout des doigts. Doucement, je reprends sa main pour faire tourner la jeune femme sur elle-même, jusqu’à ce qu’elle finisse adossée à moi, mon bras cerclant sa taille, et mon visage logé au creux de son cou pour y déposer un petit baiser. « Comment est-ce qu’il vous plairait d’allonger cette journée, ma Lady ? » je demande tout bas. Je n’ai pas sommeil, pas de fatigue. Elle peut proposer ce qu’elle veut, tant que la soirée ne prend pas fin tout de suite. J’ai envie qu’elle dure indéfiniment.

Une Joanne qui a peur, moi, ça m’angoisse. Alors autant dire que mon cœur se met soudainement à galoper à toute allure, paniqué, et que je redouble d’efforts pour que la jeune femme ne décèle rien. Pourquoi ? Parce que la dernière fois que ma fiancée a eu peur, ce genre de peur, quelques temps plus tard, elle n’était plus ma fiancée. Je n’y peux rien, cela me hante et me prend par la gorge au moindre doute. Je ne sais pas vraiment à quoi m’attendre jusqu’au mariage, alors je m’attends à tout, et surtout, j’appréhende le pire à chaque fois. Un discours pareil a de quoi faire peur, à mes yeux. Même si Joanne me présente la situation de manière plutôt positive, disant que la rapidité des journées témoigne de leur bon déroulement, je retiens surtout sa crainte de passer à côté de certaines choses qu’elle n’explicite pas. Et parfois, ceux qui ont peur de perdre le contrôle de leur vie, qu’elle aille trop vite pour eux, décident de tout laisser tomber pour retrouver quelque chose qui leur correspond mieux. Scénario qui sent le déjà-vu et dont la moindre évocation serre mon cœur et me donne l’impression de suffoquer. « Qu’est-ce que tu penses pouvoir manquer ? » je demande, espérant comprendre un peu mieux ce qu’elle veut dire, et surtout pouvoir me rassurer. Ou simplement avoir l’information pour m’assurer qu’elle ne rate rien de ces moments, et ainsi éviter le scénario catastrophe. Qu’elle parle du mariage calme un peu mon rythme cardiaque. Mieux, pour poursuivre la soirée, Joanne propose même de commencer à planifier notre voyage de noces. On ne s’y prend jamais trop en avance pour ce genre de choses, entre les hôtels à réserver, les lieux à voir à sélectionner, tout ce repérage au préalable pour être certains de ne rien manquer et voir un maximum de choses. Même si nous sommes du genre à faire nos propres découvertes au gré de nos balades, nous laissant surprendre par le dédale des rues des villes, il est bon de dresser la liste des endroits que nous ne voudrions pas manquer. « Faisons ça alors. » Je vole un baiser à Joanne et vais chercher mon ordinateur portable. Nous prenons place dans le petit coin salon, notre cocon. Pendant que l’ordinateur démarre, j’effectue un petit crochet par la cuisine pour me chauffer rapidement de l’eau et me servir un thé –ainsi que pour ma fiancée si elle en désire un également. Quand je reviens, je m’assois dans le canapé, couvre nos jambes avec le plaid, et pose l’appareil sur mes cuisses. Cosy. « A la base, je pensais qu’il pourrait être intéressant de longer une bonne partie de la botte, en passant quelques jours dans chaque étape. » dis-je en affichant une carte de l’Italie sur l’écran afin que Joanne puisse mieux visualiser l’idée. Je lui indique le chemin du bout de l’index. « Commencer par Florence, ensuite aller à Rome, et finir par visiter la Campanie pour satisfaire ma passionnée d’Histoire. » Pompéi, Herculanum, ce sont des sites qui pourraient lui plaire, non ? A moins que cela ne soit un peu trop glauque pour l’occasion, je ne saurais pas le dire. De toute manière, je laisse Joanne en juger. « Et nous serions libres de nous arrêter dans tous les patelins qui nous plaisent en chemin. » j’ajoute. Je ne doute pas qu’il doit y avoir une multitude de villes et de villages bourrés de charme sur la route qui sépare chaque étape. Et les spécialités culinaires qui vont avec, bien sûr, et auxquelles il faudra faire honneur, n’est-ce pas. « Sur deux semaines, ça ne devrait pas faire trop de route, et ni trop de fatigue. Qu’est-ce que tu en penses ? » Nous aurons tout le temps de faire toutes les pauses qui nous plaisent, et de profiter des superbes paysages sur la route. J’attends son avis, ouvert à toutes les propositions. Elle a peut-être une vision complètement différente de la mienne, mais nous trouverons sûrement un compromis.

Partis pour débuter la planification de notre voyage de noces, nous voilà confortablement installés sous le plaid, un thé à la main, et l’ordinateur sur les genoux. L’écran a la vicieuse capacité de faire passer le temps à une vitesse folle ; je suis certain qu’en nous y mettant à cette heure, nous pourrions terminer au beau milieu de la nuit, posant enfin les yeux sur l’heure pour découvrir que nous nous sommes complètement laissé absorber. C’est quelque chose que j’aime beaucoup faire, planifier un voyage, un week-end. Trouver l’endroit idéal, les lieux à voir. Je peux chercher l’hôtel parfait pendant des heures, et les bonnes adresses dans chaque ville afin d’être sûr qu’il n’y aura pas la moindre fausse note. C’est d’autant plus important pour une occasion pareille, un séjour qui se doit d’être mémorable. Puisque nous comptons nous offrir deux semaines de lune de miel, autant dire que nous aurons largement le temps de faire mille et une activités dans de nombreuses villes. Notre dévolu s’est jeté sur l’Italie, et plus particulièrement Florence, mais pourquoi se contenter d’une seule ville ? La botte n’est pas bien grande, contrairement à l’Australie, les trajets sont plutôt courts d’une étape à l’autre. Autant s’offrir l’occasion de voir un maximum de choses, d’où cette idée de petit road trip à travers les paysages italiens. Une idée qui semble tout particulièrement emballer Joanne. « Je nous vois bien louer une voiture typiquement italienne pour ce voyage, même si cela frôle le cliché. Autant se faire plaisir jusqu’au bout. » je lui réponds en haussant les épaules. Et cela nous permettra d’être complètement libres de nos déplacements, sans la moindre contrainte. Nous irons où nous le voulons, quand nous le voulons. Oui, on s’imagine facilement traverser de superbes paysages, des plaines et des montagnes, entendre les sons et sentir les odeurs propres à l’Italie. La jeune femme s’y voit déjà, cela me fait sourire. « Bien sûr, les étapes les plus importantes seront Florence et Rome. Nous y resterions quatre ou cinq jours, histoire de voir un maximum de choses. » Ce qui nous laissera tout de même largement le temps de flâner sur le chemin d’une ville à l’autre, laissant ainsi une partie part d’improvisation à ce voyage. Néanmoins, à Florence et Rome, nous veillerons à trouver le meilleur hôtel qui soit. « Maintenant, oui, nous pouvons nous le permettre, et on ne va pas se gêner. » Ca ne sera pas de l’argent gâché. C’est un investissement dans de beaux souvenirs. Des souvenirs qui feront partie du ciment de notre couple. C’est des expériences, des choses à vivre absolument, et qui resteront pour toujours dans un coin de nos têtes. Cela mérite d’y mettre le prix. Joanne me fait rire avec son faux air d��confit à l’idée que nous tombions sur des lasagnes qui battent les siennes à plate couture. « Ne dis pas de sottises, les tiennes sont faites avec amour, elles sont forcément meilleures. » L’ingrédient secret, dirons-nous. Ma petite rêveuse terriblement romantique se lance dans la narration de toutes les images parfaites qui défilent dans son esprit, et je dois avouer qu’en l’écoutant, je peux moi-même les imaginer dans le détail avec un sourire attendri. J’ai hâte d’y être, j’ai le pressentiment que ce voyage nous fera vraiment un bien fou, et qu’il sera le parfait moyen de complètement souder notre mariage tout frais. Nous ferons le plein de souvenirs sur papier glacé, pour sûr, et en tapisseront nos rêves pendant bien des semaines après. « En tout cas, ça fait tourner ton imagination à plein régime. » dis-je avec un petit rire. Mais il est particulièrement agréable de l’entendre, constater son enthousiasme. J’embrasse ma fiancée sur le front, tendrement. Puis, sur le moteur de recherche, je pars en quête des bons hôtels à Florence –il faut bien commencer quelque part. Je sais comment trouver vite et bien l’endroit qu’il nous faut. Le seul détail qui me chagrine, c’est que Joanne en verra le prix. Et tout ce qui défile sous ses yeux atteint facilement les deux mille euros la nuit. Mais c’est le prix pour avoir une suite digne de ce nom et un jacuzzi sur le toit pour admirer la vue de tout Florence. « Hm, j’hésite. Un avis ? » dis-je en passant d’une page à l’autre entre deux hôtels, le premier à la suite plus épurée mais proposant le fameux balcon à faire tourner n’importe quelle tête, et un autre proposant un design plus typique et coloré avec une vue tout aussi prenante mais avec bien plus d’espace à l’intérieur qu’à l’extérieur. « Il faudrait aussi déterminer à quelle période de l’année nous irons. N’oublies pas qu’en fin d’année, c’est l’hiver, là-bas. L’Italie a tendance à être relativement pluvieuse à ce moment-là, à moins que nous ayons de la chance. Peut-être qu’il y aura plutôt de la neige. Mais dans tous les cas, il fera frais. Du coup, je ne sais pas si tu veux faire ce voyage, disons, plutôt au printemps, en avril par exemple. » Ce qui nous ferait attendre quasiment un an à partir d’aujourd’hui.

Rapidement, bon nombre de magnifiques hôtels défilent sous nos yeux sur l'écran. En quelques clics, la recherche est affinée à ceux se trouvant le plus proche possible du monument que Joanne souhaite voir avec tant d'enthousiasme, et, bien sûr, à ceux proposant les meilleurs services. A la fin, même s'ils sont nombreux à être tentants, deux se dégagent du lot, notamment pour la vue. Très différents l'un de l'autre, il est assez difficile de choisir, même (surtout) pour Joanne. “Hm, le premier a deux suites avec ce grand balcon, la seconde est tout de suite bien plus traditionnelle, ça peut être un bon compromis. Sinon, il y a toujours la gamme au-dessus.” Une suite encore plus grande, d'une taille équivalente à celle de l'autre hôtel. Mais est-ce que nous avons vraiment besoin de 200 mètres carrés pour deux sachant que nous passerons le plus clair du temps dehors? “J’aime aussi beaucoup les couleurs du second hôtel, mais franchement, tu ne te vois pas avec ta coupe de champagne, dans un jacuzzi, sur le toit, à admirer tout Florence de nuit?” En tirant sur la corde romantique de ma fiancée, je suis assez certain d'avoir gain de cause. Elle ne peut que aimer l'idée de se blottir contre moi dans l'eau chaude face à un cadre pareil. Elle dira sûrement que ma voix compte double, puisqu'il s'agit de mon argent. Je ris en la voyant surprise d'apprendre qu'il peut y avoir de la neige en Italie. “L’hiver en Europe est bien plus rude qu’en Australie, mon coeur! Je peux me balader en simple veste dans Brisbane alors que vous autres avez sorti les manteaux.” Surtout la frileuse jeune femme qui se couvre dès un degré en dessous des normales de saison. En hiver sur l'autre hémisphère, elle finirait emmitouflée dans trois pulls. Un temps plus léger serait sûrement plus agréable pour notre programme, même si je ne doute pas que l'Italie soit aussi belle en hiver. “Eh bien, en été, le temps peut devenir très suffoquant et lourd, alors que le printemps est plus doux, je pense que tu préféreras.”Je me souviens d'un court séjour à Rome pour accompagner mon père il y a quelques années, où le soleil tapant sans un souffle de vent nous avaient persuadés de ne pas sortir de la chambre d'hôtel avant la fin de l'après-midi. Or Joanne et moi ne comptons pas perdre autant de temps. Elle acquiesce pour avril, même si cela mettra encore une fois notre patience à rude épreuve. Je l'embrasse à mon tour. “Nous nous ferons un petit voyage juste tous les deux entre temps, promis.” Juste un week-end, quelques jours, pendant lesquels nous confierons Daniel à la famille et nous pourrons être un peu en tête-à-tête. Pas question d'attendre un an avant de s'offrir ce luxe. Joanne semble déborder d'idées, et il est vrai que Florence et Rome ne manquent pas de sites à visiter absolument. Je n'ai jamais été à Florence et ne me suis jamais vraiment penché sur cette ville, je n'en connais que quelques endroits quasiment légendaires qui ne manquent pas de me rendre enthousiaste. “Mince, je pensais que c’était la seule activité prévue !” dis-je pour plaisanter à propos de nos futurs ébats en Italie pendant cette lune de miel. Je réalise que si jamais Joanne tombe enceinte avant, par exemple pendant notre nuit de noces comme elle le souhaite, le voyage sera sûrement reporté. Un mal pour un bien. Je réfléchis un instant à ce que j'aimerais faire pendant ce séjour de manière plus sérieuse, entre deux gorgées de thé. “J’adorerais visiter le forum romain de nuit, je n’ai jamais pu profiter de leurs nocturnes, et il paraît que les ruines illuminées sont magnifiques.” Dans mon imagination, en tout cas, ça l'est. Et à ce moment là nous pourrons profiter de la magie pour nous projeter dans cette vie que nous avons peut-être vécu là-bas il y a bien longtemps. “Et nous devons absolument prendre toute une journée pour voir toute la galerie des Offices à Florence.” Absolument tous les grands maîtres y sont réunis, il est impossible de passer à côté de cela.

Comme prévu, le côté fleur bleue de ma fiancée fait son effet et joue en ma faveur. Je suis certain que son imagination si romantique lui avait déjà fait visualiser la scène ; elle, moi, dans l’eau tiède, massés par les bulles, les coupes de champagne sur le côté, sûrement des bougies –la connaissant-, et tout le centre historique de Florence illuminé dans la nuit. Comment résister à une offre pareille lorsque l’on s’appelle Joanne Prescott ? Bien sûr, songer au prix constitue un frein efficace pour elle. Jamais de la vie elle n’aurait un jour songé à mettre plus de deux mille livres dans une suite d’hôtel, encore moins pour plusieurs nuits. C’est un peu irréaliste. Pour elle, ce sont d’immenses chiffres. Pour moi, ce n’est qu’un clic. Quoi que ces dernières semaines ont eu l’avantage de me faire apprendre quelques leçons vis-à-vis de l’argent, et en voyant les nombres, j’ai bien plus conscience de ce qu’ils représentent désormais. Mais on retrouve bien vite l’habitude d’avoir trop d’argent plutôt que pas assez, n’est-ce pas ? L’avantage d’en savoir un petit rayon sur tout ce qui est produits coûtant quatre chiffres et plus, c’est que l’on sait que pour avoir la qualité nécessaire, il y a un prix à mettre, et qu’il est souvent justifié. On se rend vite compte que toutes les gammes en dessous ne valent pas le coup, et de la pauvreté des produits proposés au commun des mortels pour presque trop cher –mais il faut bien abuser de ceux qui ne savent pas. « Ca vaux son prix, en général. » dis-je simplement avec un petit sourire et un léger haussement d’épaules alors que Joanne tourne l’ordinateur vers moi. Elle a déjà vu les prix, cela ne change pas grand-chose en réalité, mais si elle insiste. Le jacuzzi remporte finalement son suffrage. « Prenons celui-ci, alors. » En quelques clics, je crée une dossier dédié à notre voyage de noces dans mes favoris et enregistre le lien de l’hôtel à l’intérieur afin de ne pas le perdre. Nous devons d’abord décider les dates de ce voyage, tout ce qui est certain c’est qu’il aura lieu dans un peu moins d’un an, au printemps prochain. J’enregistre également les liens vers le site du forum romain, pour m’informer plus tard sur les nocturnes, et celui de la Galerie des Offices dont la réservation des billets avec autant d’avance nous épargnera les quatre heures de queue sur place. Je ris légèrement quand Joanne précise que nous pourrions prendre deux jours entiers pour la visiter en entier. « J’aime quand nous sommes sur la même longueur d’onde ainsi ! » Ce n’est pourtant pas si rare que ça, mais il est toujours particulièrement plaisant de constater que certains de nos goûts et de nos avis convergent avec ceux de l’être aimé. Ce n’est pas grand-chose souvent, mais cela conforte toujours notre choix de partenaire. L’on se dit que, oui, c’est bien cette personne qu’il nous faut. Notre plus grand point commun, à Joanne et moi, c’est notre passion pour l’art et l’Histoire. Nous sommes tous les deux des personnages sortis d’un autre temps, nés dans une époque qui ne leur correspond pas vraiment. Il ne faut pas s’étonner que nous soyons si attirés par des villes aussi anciennes que Florence et Rome. « Nous trouverons un bel endroit disponible aux bonnes dates, je n’en doute pas. » je lui assure à propos de l’hôtel dans la capitale italienne. Ce n’est pas comme si n’importe qui avait les moyens de s’offrir ce genre de suites, ni comme s’il n’en existait pas un bon nombre dans une ville pareille. Mais cela attendra. La jeune femme a décidé que nous nous pencherons sur le sujet demain –ou peut-être un autre jour, si nous n’y pensons pas. Elle rabat l’écran de l’ordinateur, me faisant sourire, amusé. « Et il se fait tard. » je renchéris avant de réceptionner son baiser. Un peu maladroitement, je tente de poser l’appareil sur la table basse du petit salon pour me libérer les jambes, souriant devant mes gestes bancals entre deux caresses de nos lèvres. Mais au moins, cela fait, je peux passer mes bras autour de ma belle pour prolonger ce baiser encore un peu. « Nous devrions aller au lit. » dis-je tout bas, le regard malicieux. L’idée n’est pas d’aller dormir. La prenant par surprise, je dégage le plaid qui nous couvre, me lève et jette la petite silhouette de Joanne sur mon épaule pour la transporter ainsi jusqu’à l’étage. En chemin, je fais mine de lui mordre la cuisse pour en grignoter un bout. Une fois dans notre chambre, je la dépose sur le lit, toute décoiffée, et la surplombe à quatre pattes sur le matelas. « Tu avais évoqué un massage aujourd’hui, si je ne me trompe pas ? » je demande avant de lui voler un baiser, certain d’avoir entendu cela quelque part à un moment de la journée.

A voir l’obscurité du ciel de l’autre côté de la fenêtre de la chambre, la nuit est bien avancée. Nous avons passé un long moment à commencer à songer à ce voyage de noces qui nous rend si impatients, mais je n’ai pas la moindre idée de l’heure qu’il est actuellement. Pas que cela ait de l’importance, nous n’avons pas d’autres engagements pendant ce week-end que celui de nous reposer et prendre soin de notre petite famille. Nous pourrons traîner au lit aussi longtemps que Daniel nous l’autorisera demain. Alors nous pouvons veiller encore un moment si le cœur nous en dit, et ni Joanne ni moi n’avons oublié certaines paroles prononcées pendant la journée –comme la promesse d’un massage ou celui d’autres ébats. Deux promesses en passe d’être tenues dans les prochaines minutes, une pensée plutôt excitante. C’est tout aussi malicieuse que Joanne se redresse, s’échappant de la cage formée par mes membres appuyés de part et d’autre de son corps. A genoux devant elle, je me laisse faire par la jeune femme qui prépare son terrain en déboutonnant doucement ma chemise ainsi que mon pantalon. « C’est toi l’experte. » je murmure avec ce rictus joueur qui ne quitte pas le coin de mes lèvres. Mon regard envieux reste planté dans le sien, et tombe de temps en temps sur ses lèvres frôlant les miennes. Torse nu, je m’installe, allongé sur le lit, les bras le long du corps. Selon son ordre, je garde les paupières closes, ne bouge pas d’un pouce, et, de bonne foi, je ne cherche pas à tricher. J’entends les adorables petits pas de Joanne qui filent jusqu’à la salle de bain, quelques bruits par-ci par-là. Je l’imagine freinant ses envies de romantisme en prenant les bougies parfumées avant de les reposer, et n’apporter finalement que l’huile de massage. Elle revient, remonte sur le lit, et s’installe assise sur le bas de mon dos. Je sens le toucher délicat de ses lèvres sur mon omoplate. Elle l’avait dit qu’elle s’attarderait plus volontiers sur cette petite parcelle de peau une fois que la date de naissance de notre fils y sera inscrite, et elle n’y manque pas. Je ne réponds pas à son murmure, nos possibilités d’ajouter des lignes à ce tatouage n’est pas un débat dans lequel j’ai envie de m’engager à ce moment. Je me contente de frôler tendrement son visage avec le mien. Finalement, l’huile se déverse doucement sur mon dos, l’odeur atteint immédiatement mes narines, aussi apaisante que l’est son contact sur ma peau. Les petits doigts fins de Joanne l’étalent en effectuant les premières pressions sur mes muscles. Ses pouces tracent des ronds tantôt grands ou petits, plus ou moins appuyés, le long de ma colonne vertébrale vers l’extérieur, trouvant une bonne dose de nervosité que leur passage répétitif soulage doucement. Les épaules, les bras, les mains ne sont pas sans reste et ont aussi droit à leur lot de caresses fermes. Par endroits, je lâche parfois un soupir d’aise, parfois un râle de soulagement. Ma belle finit par me déshabiller complètement, ce qui lui permet de mieux s’attarder sur mes reins. Au fil des minutes, je sens tout mon dos qui se détend, et une fois les muscles relâchés, ils se laissent volontiers traverser par quelques frissons. A la fin de son œuvre sur mon dos, je suis le mouvement de Joanne qui m’invite à me retourner. Il faut que mes yeux restent bien clos. « Yes, my Lady. » j’acquiesce avec un rictus amusé. Sans la distraction de la vue, je peux me concentrer uniquement sur le massage. L’huile qui m’enduit pénètre ma peau légèrement chaude. Je ne me lasse pas du contact du bout des doigts de ma fiancée, son toucher délicat sur mon corps. Me laissant toujours faire, je lui confie mes mains qu’elle pose sur ses cuisses. Là, je devine le léger voile qui couvre ses jambes. D’abord intrigué, mes sourcils se froncent. En remontant, mes mains passent sur le dessous de Joanne, puis, longeant sa silhouette, je comprends très vite ce qu’elle a sur le dos. Alors un sourire étire de plus en plus mes lèvres. D’excitation, mes dents passent légèrement dessus. Mon cœur, lui, bat un peu plus fort lorsque ses baisers glissent sur mon cou. « Dans ce cas, laisses-moi te regarder. » je murmure, avant de guider son visage vers le mien pour lui donner un baiser. A la fin de celui-ci, mes yeux s’ouvrent doucement. J’invite Joanne à se redresser et me surplomber afin que je puisse l’admirer. Toujours ce léger sourire tendre quand je reconnais la guêpière. Elle n’avait pas mis de bas avec la dernière fois. Je frôle ses jambes du bout des doigts, longe ses cuisses et ses fesses. Mon regard la dévore, adorant la manière dont ses hanches et sa poitrine sont ainsi mises en valeur. Elle arrive à avoir l’air à la fois ingénue et terriblement sensuelle. Elle est ainsi, Joanne. Toujours douce, tendre, gracieuse, et pourtant capable de déclencher les plus grands feux. « Tu es magnifique. » lui dis-je tout bas, contemplatif. « Et incroyablement sexy. » j’ajoute avec un sourire plus malicieux. Je me redresse et, dès que son visage est à portée du mien, une fois mes doigts glissés entre ses mèches blondes, l’embrasse avec ardeur. Un baiser long et débordant d’une passion que je contiens pour le moment. Légèrement essoufflé, je reste au bord de ses lèvres un court instant. Je retire lentement ses bas pour pouvoir caresser la peau de ses jambes, frôler librement ses mollets. Je lui fais signe de se tourner, et s’installer assise en me tournant le dos. Parsemant sa nuque et ses épaules de baisers, je fais glisser son dessous le long de ses jambes jusqu’à ce qu’elle puisse l’éjecter hors du lit d’un petit coup de pied. En commençant par-là, j’ai tout le temps qui me sera nécessaire à l’ouverture de la guêpière pour sentir son intimité frôler la mienne, rendant ma peau bien plus brûlante. Malgré ce semblant de torture là, je prends tout mon temps pour dégrafer le bustier, un cran après l’autre. La peau de son dos se dévoile petit à petit, jusqu’à la dernière agrafe. Alors, la dernière pièce de lingerie tombant au sol, plus rien ne recouvre Joanne. Je la serre tout contre moi, trouve ses lèvres pour l’embrasser, toujours avec cette ardeur contenue. Mes mains prennent plaisir à parcourir son ventre, sa poitrine ; l’une d’elle garde un de ses seins empoigné, l’autre descend pour trouver son intimité.

Les intentions de Joanne font toujours leur effet. Sûrement parce que je l’ai connu timide et terriblement prude au début de notre relation. Je sais qu’elle est ainsi naturellement. Alors dès qu’elle tente une fantaisie –et elle met toujours dans le mille- je suis flatté qu’elle fasse un effort pour moi, et de plus, la surprise s’ajoute à l’excitation. Je la découvre ou la redécouvre à chaque fois, je joue tous les jeux qu’elle propose. Joanne s’est découvert ce petit plaisir consistant à me surprendre et à toujours chercher plus d’amour et d’admiration dans mon regard. Elle a rapidement compris l’importance que je donne à la part visuelle de nos ébats. En dehors de mon attrait pour la belle lingerie, du plaisir que j’éprouve à l’observer sous toutes ses coutures, il y a simplement ces moments de regards qui s’échangent, se parlent et me permettent de tout oublier. Ces moments où les mots n’ont pas leur place. Comme lorsque je défais lentement sa guêpière et prend le temps d’admirer la manière dont son dos se dévoile petit à petit ; quand j’embrasse son cou et sens sa tête pencher sur le côté, ses cheveux glisser sur sa nuque. Par-dessus son épaule, je peux jeter un coup d’œil à sa poitrine, son sein au creux de ma paume, et plus bas, son intimité apposée à la mienne. « Tu peux l’expliquer autrement. » je lui murmure en réponse, entre deux autres baisers, un léger sourire au coin des lèvres. Satisfait, dans le fond, d’avoir trouvé une femme me correspondant et me comprenant si bien à ce niveau-là. Car même si Joanne peut se plaindre d’un manque, on ne peut pas dire que nos ébats ne sont pas épanouissants lorsqu’ils ont lieu. Au contraire, notre parfaite complémentarité les rend harmonieux, la symbiose est totale. Il n’y a pas besoin de mots pour le décrire. De toute manière, je ne suis pas un bavard sous la couette. Si faire l’amour me permet d’échapper aux discours, ce n’est pas pour glisser des phrases par-ci par-là en pleine action. Un baiser, un souffle suffit amplement. Quand Joanne se retourne, il suffit de constater l’intensité avec laquelle je retrouve ses lèvres pour comprendre à quel point j’ai envie d’elle, envie de flatter chaque parcelle de son être avec tendresse. Ma main poursuit ses caresses sur son sein, l’autre, glissée dans ses cheveux, garde son joli visage près du mien et prolonge chacun de nos baisers. Finalement, la jeune femme se détache de moi le temps de s’allonger sur le lit, à côté. La regardant, encore assis un court instant, je frôle ses cuisses du bout des doigts, adorant suivre le tracé de cette courbe-là sur sa peau pâle. Je croise son regard, échange un sourire à la fois désireux et mutin ; le sien, je le comprends quand je sens sa main atteindre ma virilité pour la caresser légèrement. Facile de constater, ainsi nu et sous ses doigts, que je ne feins absolument pas mon envie pour ma fiancée, et que cette envie est toujours aussi rapidement et facilement attisée. Ses finesses caresses me font frissonner. L’instant d’après, je m’allonge auprès d’elle pour retrouver le contact total de son épiderme chaud contre le mien. Immédiatement, nos jambes, nos bras, nos langues et nos souffles s’entremêlent, le tout sujet aux légères ondulations qui nous animent malgré nous. Je passe parfois mes dents sur la lèvre inférieure de Joanne, saisit plus fermement sa chair, assimilant toute sa chaleur. L’embrasser en profitant tout simplement des caresses de nos corps nus, je pourrais demeurer ainsi pendant des heures. Petit à petit, l’appel de nos êtes se fait plus pressant, des picotements au niveau de mon bas ventre et la chaleur qui en émanent me poussent à vouloir passer à l’étape supérieure. Glissé entre les jambes de la jeune femme, les mouvements de plus en plus prononcés explicitent un peu plus ce désir alors que ma respiration et mon rythme cardiaque sont déjà bien décadents. Il ne manque que quelques millimètres et quelques secondes pour que nos corps s’unissent, et ces deux facteurs disparaissent bien vite dans un soupir de satisfaction une fois que je me trouve au plus profond de ma belle. Ses jambes cerclent ma taille, mes doigts s’entrecroisent avec les siens, les autres saisissent son fessier, et après un regard débordant d’une envie qui la dévore toute entière d’un simple coup d’œil, je dépose un fin baiser juste au bord de ses lèvres en effectuant un premier va-et-vient.

 

La mécanique naturelle s'installe et se fait progressivement de plus en plus intense. La douceur des premières minutes s'estompe petit à petit. Même pendant les ébats les plus fougueux, il demeure quasiment systématiquement cette première étape, celle pendant laquelle les corps s'assimilent, se retrouvent, entremêlés à nouveau avant de débuter leurs mouvements sensuels. Ne pas brusquer. C'est une chose qui reste tout de même systématiquement dans un coin de ma tête. Ne pas la casser en deux, ne pas lui faire mal, ne pas la choquer. Joanne s'est montrée bien moins fragile et de moins en moins prude avec le temps, pourtant ces craintes ne s'en iront sûrement jamais. Et cela est tout naturel aussi. Je prends soin de la femme que j'aime, attentif à ses envies, à ce qui lui plaît ou lui déplaît. Après tout, mon propre plaisir passe d'abord par le sien, sa satisfaction est aussi la mienne. Après tout, je me nourris de ces soupirs et de ces gémissements qui traversent ses lèvres ; l'air s'infiltre jusqu'à mes poumons pour faire résonner l'écho de ses petits cris dans tout mon corps. Ils font frémir mes os, mes muscles, et emplissent mon crâne. Parfois, mes sensations n'ont plus d'importance. Je les oublie au profit de celles de la jeune femme, focalisé sur les râles contenus au fond de sa gorge, à en obtenir plus, ou de plus épanouis, comme une récompense. Au bout d'un certain temps, il est rare que je ne m'oublie pas complètement. Mais à vrai dire, de nombreux concepts perdent tout leur sens. Elle, moi, l'envie, le plaisir, même le lit, les bruits, les mouvements ; tout finit par s'effacer. Il ne reste, dans cette bulle, qu'elle, moi, et l'amour qui passe d'un corps à l'autre, inlassablement, dans un cycle qui ne prendra fin que lorsque nous n'en pourrons plus. Lorsqu'il n'est même plus possible de respirer, que nos lèvres ne peuvent plus s'atteindre, Joanne prend le dessus. Ses jambes serrent ma taille pour me freiner, puis me basculent sur le dos. Quelques secondes furtives pendant lesquelles je me trouve un peu plus profondément en elle suffisent à m'arracher un gémissement. Elle se redresse, me laissant à peine le temps d'un coup d'oeil sur son magnifique corps luisant subtilement d'un mélange de sueur et d'huile ; elle m'attrape pour m'encourager à m'asseoir à mon tour. Nos bustes se retrouvent, nos coeurs battant à l'unisson derrière notre épiderme brûlant. Je récupère mes prises sur les cuisses et le fessier de ma fiancée tandis qu'elle me serre tout contre elle. Les mouvements reprennent à sa façon, plus lents et amples, plus tendres et appliqués. Ses iris bleus me prennent en otage -quoi qu'il m'arrive de parfois observer ses lèvres entrouvertes, humides et rougies, avec un désir impossible à dissimuler. Ses pommettes ont aussi pris des couleurs. Ses yeux brillent comme jamais et déversent dans les miens un flot ininterrompu de mots d'amour. Elle aspire mes râles, les provocant avec facilité et une sensualité qui me fait fondre comme neige au soleil. Je suis chacun des mouvements de Joanne, les aide, les accentue, ou parfois, quand un frisson de plaisir me paralyse une seconde, je lui laisse complètement la main pour mieux le sublimer. Avec quelle aisance elle me fait perdre mes moyens, ma belle. Elle m'envoûte, danse tout contre moi, et me voilà sans volonté aucune de résister à quoi que ce soit. Au bord de ses lèvres depuis de longues minutes, je finis par les capturer pour l'embrasser avec toute la démesure de cette passion qu'elle m'inspire. Quand les sensations m'emplissent de plus en plus et deviennent presque trop délectables, je fais basculer Joanne pour retrouver notre position initiale -celle qui me permet plus facilement de lui faire suivre la ligne droite vers le point de non retour avant que je n'en puisse plus. Je la laisse loger son visage au creux de mon cou, l'échine courbée, pour y étouffer ses gémissements quasiment ininterrompus. Elle saisit mon dos, y plante légèrement ses ongles autant qu'elle le souhaite. C'est ainsi que je devine quand elle frôle l'orgasme avant qu'elle s'y engouffre et se raidisse autour de moi. Je me relâche au même moment, une fois libéré en elle et frissonnant de plaisir.