« Cliché. Je suis pas un cliché. » N’en est-il pas un pourtant ? De mon côté j’ai tranché en sa défaveur il y a des mois déjà tant je manque de respect à son égard. Si j’en possédais une once, je m’en voudrais peut-être de le réduire à l’état d’esclave des temps modernes, mais j’en suis dénuée. « T’as pas envie d’entendre ce que j’ai à dire à ce sujet. » Certainement pas et, pour une fois, je suis polie. De quoi se plaint-il ?

Il refuse de me répondre, il utilise mes propres arguments contre moi et il m’arrache un sourire puisque je n’aime personne autant que les gens qui ont un peu de répondant. J’ai toujours considéré qu’il était dans la moyenne Loris mais ce soir il fait un effort, alors je suis bien obligée de sourire pour le féliciter, un peu comme un enfant qui marche à la carotte. « Si j’ai envie de débattre sur la question, j’irai voir un psy. Tu vois, je suis pas si con. J’apprends vite. » « J’aime pouvoir te vexer si facilement. » Nul doute que c’est plus le sujet en lui même - les secrets qu’il garde, et ceux que je lui ai révélé concernant sa soeur qu’il idéalisait certainement - que d’avoir été envoyé sur les roses qui l’agace. « J’ai pas réussi à lui mettre la main dessus. » J’esquisse un sourire en coin et j’insiste : c’est de bonne guerre, il ne m’a pas laissée m’en sortir concernant ma relation, concernant ma rupture non plus. « Qu’est ce que ça t’a fait de savoir qu’elle est pas si parfaite que ça. » Elle fait bien semblant Blanche Neige. « Qu’est ce que ça te fais de savoir que je pourrais tout lui dire moi même si je le décidais ? » Je le provoque et, défoncée comme je le suis, je distingue encore plus mal les limites qu’en temps normal.

J’attaque, il répond : je ne m’en offusque pas. Ce sont ses sous-entendus qui me déplaisent. « Si tu t’en foutais, ça devait pas être si grave non. Sauf que tu t’en fous pas. Tu es amoureuse. » « Je t’ai dit que non. » Qui je tente de convaincre : lui ou mois ? Je perds de ma superbe, je perds de ma répartie dès qu’il est question de lui, dès qu’il est question de la débâcle de la plus belle histoire que j’ai partagée. « Il touchait plus sa femme. On touche plus sa femme quand on dort avec moi. » Je me cache derrière mon égo puisque, ma fierté, il n’en reste plus grand chose.

« Là où il y aura moins de monde… A toi l’honneur. »
« T’es venu en caisse ?  »


@Loris Baumann

C’est vrai, je n’ai pas envie de l’entendre déclamer en adjectifs péjoratifs le portrait qu’elle m’a tiré, mais pas tant parce que j’en serais blessé. Je n’ai que faire d’être apprécié de cette femme et, au fond, elle le sait, Raelyn. Elle se décrit parfaitement lorsqu’elle se qualifie de vermine et qu’aurais-je à gagner qu’elle m’apprécie à ma juste valeur ? Elle ne serait pas retourner sur moi si je n’avais pas représenté pour elle une quelconque utilité. La réciproque étant vrai, je me contente de lui sourire d’un air entendu. Dommage qu’il contraste autant avec ma vexation. J’en fais l’étalage, bien malgré moi. C’est plus fort que la raison, presque autant que l’appel de la drogue. Elle, elle prend possession de moi. Que peut bien représenter ce bout de femme pesant quinze kilos toute mouillée et qui dépasse à peine un tabouret les bras levés ? Ce qu’elle détient sur moi, c’est dangereux. Mais, elle le racontera tôt ou tard : j’en ai fait une certitude. Depuis, j’attends. Je vis dans le doute et dans l’expectative. Cette rencontre fortuite, c’est une parenthèse durant laquelle je ne l’appréhende pas en ennemie, mais comme une congénère : nous partageons probablement, après descente, la même honte d’être aussi minable. Qu’à cela ne tienne cependant, j’élude ses questions au sujet de Leah et, à nouveau, je lui souris dès lors qu’elle se gausse de me titiller avec autant de facilité. « Sois pas si fière. Tu seras ni la première ni la dernière, crois-moi.» Quoique je ne sois pas réputé pour être susceptible. Je présume que c’est parce que ça vient d’elle et je me demande ce que ça peut bien révéler sur moi. « Et toi ? Qu’est-ce que ça te fait de pas être celle qu’on trompe, mais celle avec qui l’on trompe ? Qu’est-ce que ça te fait d’être celle avec laquelle on envisage pas d’avenir ? Qu’est-ce que ça te fait d’être celle qu’on a laissé sur le carreau ? Qu’est-ce que ça te fait d’avoir laissé un homme te jeter dans le précipice ?» Celui que la cocaïne ouvre à nos pieds ? Nul doute qu’il lui en faudra des efforts pour s’en sortir. D’après la rumeur, elle en a fait l’expérience. Cette récidive, c’est réduire de moitié ses chances de s’en tirer cette fois.« Parce que, dans le fond, qu’il ne la touche pas...» ai-je renchéri, heureux qu’elle se justifie. « C’est du pareil au même. Il a pas jugé bon de le dire. Il t’a cachée. Tu étais son sale petit secret.» J’ai l’impression qu’une moitié de foule se moque d’elle et une autre me pointe du doigt d’être aussi ignoble. Je veux m’en aller. Elle aussi. Sans doute pour me les arracher, mes yeux. Elle me l’a promis, mais qu’importe, j’ai besoin que l’ambiance s’allège et je ne connais qu’un seule remède. « Et elle est sur le parking.» ai-je commenté en jouant avec les clés tirées de ma poche et après un hochement de tête.

« Sois pas si fière. Tu seras ni la première ni la dernière, crois-moi. » Oh certainement que non : il est trop fier lui même pour que je sois la seule capable de le vexer en quelques attaques portée à l’encontre de son égo de mâle. Il est prévisible à ce niveau là Loris, j’en suis persuadée et prête à le répéter à qui voudra l’entendre. « J’en doute pas. » Et de plus, j’en fiche. L’exclusivité n’a jamais été au programme entre nous, même en ce qui concerne les attaques gratuites.

« Et toi ? Qu’est-ce que ça te fait de pas être celle qu’on trompe, mais celle avec qui l’on trompe ? »
« Je m’en fous. »
«  Qu’est-ce que ça te fait d’être celle avec laquelle on envisage pas d’avenir ? Qu’est-ce que ça te fait d’être celle qu’on a laissé sur le carreau ? Qu’est-ce que ça te fait d’avoir laissé un homme te jeter dans le précipice ? »

Ma mâchoire se contracte et mon regard se durcit. Dieu que j’ai mal, que je souffre alors que lui jubile certainement de venir jeter de l’huile sur le brasier de mes doutes, de ma détresse et de mon coeur brisé. Bien sûr que j’en suis persuadée, d’être celle qu’il décrit. Bien sûr que j’en suis persuadée, qu’Amos ne m’a pas envisagée comme une partenaire sur le long terme, et mes démons me soufflent parfois que je n’étais qu’une distraction pendant qu’il mettait sa vengeance en marche. Dans mes moments les plus lucides - ils deviennent de puis en plus rares - je sais que c’est faux. Je sais qu’il y avait quelque chose de réel entre nous, mais alors qu’il me souffle mes pire craintes d’un ton provocateur je l’oublie. Je la deviens, cette femme que l’on n’envisage que pour quelques nuits. Je l’ai toujours été de toute façon, pourquoi Amos aurait-il perçu quelque chose de différents ? « Parce que, dans le fond, qu’il ne la touche pas… C’est du pareil au même. Il a pas jugé bon de le dire. Il t’a cachée. Tu étais son sale petit secret. » Autrefois j’aurais été à peine touchée par ses mots, autant ceux là que les prédents. Autrefois je n’étais pas amoureuse. A présent mon coeur se brise, et la voix de Loris se mêle à celle de la cocaïne, de mon démon de toujours, les mots du brun deviennent les siens, une litanie qu’elle répète sans cesse et au refrain désagréable. J’ai joué : j’ai perdu. Il m’a blessée Loris, il m’a blessée malgré la drogue - les effets se dissipent - il m’a touchée malgré mon faux détachement. « Et elle est sur le parking. » En guise de seule réponse ma main s’écrase sur sa joue. La claque n’a rien d’une pichenette, j’y mets toute ma force et je me retiens de lui écraser mon mégot sur le visage. Pour calmer mes nerfs, je choisis la seule solution qui s’offre à moi ? Je tourne les talons, je jette ma cigarette par terre et je m’engouffre à nouveau dans la salle, je me faufile entre les danseurs en tentant d’ignorer mon sang qui bat violemment contre mes temps.




@Loris Baumann

Ces attaques, elles ne sont pas gratuites. Elles ne sont pas tombées au milieu d’une conversation légère et badine. Elle m’a cherché, Raelyn. Elle a été la première à m’assaillir en utilisant Leah. Elle, de loin, la femme la plus importante de ma vie, parce que je ne sais rien des histoires de l’amour et que je l’ai choisie pour modèle. Dans mon état normal, j’expliquerais que je la cherche un peu en toutes femmes, à l’image de ces fils qui habituellement recherchent un clone de leur mère. Et elle s’étonne que je me défende ? Est-elle surprise que j’appuie là où ça fait mal ? Je n’en serais pas effaré puisqu’elle me sous-estime, Rae. Elle me prend pour un con, un imbécile, une marionnette qu’elle pourra manipuler à sa guise et qui ne s’offusquera jamais et moi je regrette d’avoir dévoilé cette facette de ma personnalité que la coke exacerbe. Normalement, je me serais tu avant d’exagérer. J’aurais fermé ma gueule comme elle me l’a conseillé plus tôt. Or, je jubile. Je me fais un nez comme une fraise. Je ne suis que satisfaction et j’école d’une gifle ronflante et sifllante. Elle a résonné à mon tympan. Ma tête a valsé et, aidé par la drogue, j’ai eu l’impression qu’elle s’était décrochée de mon cou. Les chances que nous nous remontions l’un l’autre dans la voiture s’amenuisent. Déjà, elle se barre. Elle bat des coudes pour s’infiltrer à travers la foule et je la suite. Pourquoi ? Je n’en sais rien. Je ne suis pas certain de me sentir coupable ou de nourrir des remords. Je ne suis pas non plus animée de ravaler mes mots et mon fiel. Alors, pourquoi ? Pourquoi est-ce que je la rattrape sur le parking en l'interpellant si je n’ai pas d’excuses à formuler. Que vais-je lui dire d’ailleurs ? Reviens, que l’on se came ensemble ? Reviens, on partage ? Reviens, on va creuser des sillons dans la neige pour y enfouir nos emmerdes ? Nos frustrations ? Nos peurs ? Reviens, que je continue d’enfoncer le couteau dans tes plaies ? Reviens, je n’ai pas terminé de m’amuser ? Reviens, parce que ce n’est que moi ? « Qu’est-ce que tu en as à foutre de ce que je pense, Blackwell. Pourquoi tu fuis ? »  J’ai la réponse : elle dit non, mais j’ai bien compris qu’elle était amoureuse de ce type qui s’est vraisemblablement foutu d’elle. Il a arraché son coeur à mains nues et il l’a ensuite piétiné. «Pourquoi tu aurais été épargnée, de toute façon ? C’est comme ça. Tu feras comme tout le monde. Tu vivras avec.» En attendant d’apprendre, rejoins-moi, ai-je songé en faisant tinter mon trousseau de clés. « Elle a moins d’un mètre. Je te demande rien...» J’ai mon matos et elle n’en voudra pas. « Fallait pas parler de Leah.» Il n’y a plus rien de cousu dans mes pseudos-arguments. Aussi, ai-je renchéri d’un : « Tu crois que ça te ferait pas moins mal si tu lui laissais pas la satisfaction de savoir que tu vas te camer toute seule en plus ? » Comble du misérable, assurément.  

Je fuis. Je me méprise de choisir l’option de facilité alors que je suis une femme qui a du répondant à revendre, qui écrasent ceux qui osent la défier sous son talon aiguille. Je la choisis parce qu’il est question d’Amos et que j’ai l’impression qu’il attrape mon coeur à deux mains pour l’écraser. Je m’enfuis parce que je ne plane plus du tout et que j’ai l’impression de m’effondrer et qu’il est hors de question que je lui donne ce plaisir. Je préfère plutôt lui laisser une trace de cette soirée, celle de ma main sur sa joue, et tourner les talons. Je joue des coudes pour retrouver l’air de la rue : j’ai l’impression de suffoquer.

Pour la seconde fois de la soirée il me rattrape. Il m’interpelle, à nouveau il referme ses doigts autour de mon bras et je me dis que s’il n’en a pas fini avec moi, moi j’en ai fini avec cette soirée. Je veux rentrer chez moi. Je veux m’envoyer un nouveau rail à l’abri derrière les murs de mon appartement, puisque c’était le plan initialement. Je fais volte face, et je lui jette le regard le plus dédaigneux que j’ai en stock.

« Qu’est-ce que tu en as à foutre de ce que je pense, Blackwell. Pourquoi tu fuis ? »
« J’ai ma dose. »
« Pourquoi tu aurais été épargnée, de toute façon ? C’est comme ça. Tu feras comme tout le monde. Tu vivras avec. »
« Je vis déjà avec. Et ça se passe particulièrement bien. »

Alors fous moi la paix. Il est là le message, pourtant il insiste. Il parle à nouveau de sa voiture et moi je me demande ce qui le pousse à continuer de me courir après : il me hais autant que je le méprise Loris, lui et tout ce qu’il représente. Se sent-il seul au point que la cocaïne me prête les traits d’une amie ? « Elle a moins d’un mètre. Je te demande rien... » « Je monte pas dans la voiture des inconnus. » Je retrouve un peu de mes couleurs, un peu de ma superbe tandis que j’accompagne ma réponse d’un sourire hypocrite. « Fallait pas parler de Leah. » « Je la connaissais avant de te rencontrer. C’est fair game du coup, tu peux pas comprendre le lien qui nous unit. » Ça aussi ça pue l’ironie. « Tu crois que ça te ferait pas moins mal si tu lui laissais pas la satisfaction de savoir que tu vas te camer toute seule en plus ? » « T’es en manque à ce point pour insister ? » La aussi je me fous de sa gueule, et j’enfonce le clou en prime. « Ça fait deux fois que tu me cours après en une soirée. C’est presque inquiétant. » Je marque une pause, avant de reprendre. « Je viens si tu parles plus de lui. » C’est ma règle, et je fais les règles.



@Loris Baumann

Je ne sais pas pourquoi je la récupère au milieu du parking. Je ne me l’explique pas ou, pour être exact, je refuse d’accepter ce qui justifie ce geste que je décrirais comme un entre deux. Je ne suis pas prêt à accepter que je m’accroche parce que je n’ai pas envie de me droguer seul. Je n’ai pas non plus envie qu’elle s’en aille en étant furieuse après moi. Que ferait-elle si elle se mettait en tête de se venger ? Ce type, auquel elle semble tenir, celui qui devient son sujet tabou et dont je me suis servi pour éloigner Leah de notre conversation, il lui ferait perdre la raison sans peine. La preuve, sa superbe n’a plus rien à voir avec ce qu’elle a été lorsque je l’ai rencontré, lorsqu’elle a déployé l’éventail de ses menaces. Toutes ces causes aidants, je l’agrippe par le bras. Je lui jette au visage un semblant de justifications. Parfois, j’en rajoute une couche, mais je ne réalise pas ou pas vraiment. « Ta dose de quoi ?» De vérités ? De drogue peut-être. Mes idées s’embrouillent. Je suis confus. Il n’y a plus rien de logique dans mon discours. « Si ça t’aide de te dire que tu le gères bien, c’est parfait. J’accepte, même si ça n’a pas l’air.» Là encore, je dis de la merde, mais mes mains commencent doucement à trembler. Mon estomac me remonte dans la gorge. Je me dégoute d’insister au lieu de rire comme un diable monté sur ressorts qui sort de sa boîte. Je me dégoute et malgré tout, je lui propose ma bagnole comme refuge pour nos frasques. Je me dégoûte, mais je hoche de la tête alors qu’elle dépose ses conditions. « Je veux plus qu’on parle d’elle non plus.» J’ai joué avec mes clés pour m’aider à faire passer ma nervosité, mais mon regard n’a pas quitté le sien. « Et j’ai pas besoin de ta daube. J’ai pas besoin de….» Pas besoin qu’elle s’inquiète.... moi, je m’en inquiète aussi, je ne vais pas le cacher. « J’ai la mienne. Et ma caisse. Tu viens ou tu viens pas ? »  

Il me rattrape et si j’avais le coeur aux remarques acerbes je lui ferait remarquer qu’il me court après alors que je l’ai réduit en esclavage, alors que je lui manque de respect une phrase sur deux et que je le tiens par ses bijoux de famille pour en tirer ce qui m’arrange : qu’il est pathétique de s’accrocher à moi de la sorte. A la place, je tente de fuir, puis j’oublie. J’oublie parce que j’ai beau le haïr je n’ai pas envie d’être seule, parce que si sa compagnie est tout ce que j’ai alors je m’en contenterai et parce que je suis prise d’un vertige en marchant sur le parking, dans le noir, seule et entourée d’ombres invisibles qui m’enveloppent et me tirent chacune dans un sens, m’écartèlent en pensées. « Ta dose de quoi ? » « Ma dose de tes conneries. » Ma dose de ses remarques concernant mon couple, mon ancien couple, et l’homme que j’ai aimé, que j’aime. « Si ça t’aide de te dire que tu le gères bien, c’est parfait. J’accepte, même si ça n’a pas l’air. » « Ça tombe bien parce que je t’ai pas demandé ton avis, et que j’en ai rien à foutre. » Je me fiche qu’il accepte, qu’il me croit, et je me fiche plus largement de ce qu’il pense Loris.

Je veux juste planer, et ce soir pour une raison que j’ignore je veux planer avec lui, alors je pose des règles, des qui nous sauveront peut-être de nous étriper ce soir, qui le sauveront d’un coup de téléphone à Leah sous l’emprise de la drogue et qui me sauveront qu’il entoure ma gorge de ses doigts et qu’il m’étrangle jusqu’à ce que la vie finisse par me quitter. « Je veux plus qu’on parle d’elle non plus. » « Je vois pas de quoi tu parles. » Je hausse les épaules. Innocente, je ne peux que prétendre l’être mais je prétends, je prétends parce que maintenant c’est moi qui cours, moi qui réalise que j’angoisse déjà à l’idée de monter dans un taxi, de mes murs blancs, de mes meubles blancs, de mes draps blancs et de mon appartement vide mais rempli de photos sur lesquels je crains de tomber à chaque fois que j’ouvre un tiroir. « Et j’ai pas besoin de ta daube. J’ai pas besoin de… J’ai la mienne. Et ma caisse. Tu viens ou tu viens pas ? » « T’as pas mérité ma came de toute façon. C’est au mérite avec moi, tu le sais. Tu te contenteras de ta merde. » Et on en sera soulagés tous les deux. On se tient compagnie mais chacun de son côté, et c’est ce dont j’ai besoin. Je le suis jusqu’à sa voiture et, quand je m’installe avec lui à l’arrière, je la détaille avec un sourire narquois sur les lèvres. « T’aurais pu la nettoyer avant quand même. »



@Loris Baumann

Celle-là, je la lui accorde. On ne peut pas dire que j’ai brillé, ce soir, par mon intelligence. Je l’ai houspillée beaucoup et j’ai donné mon maximum pour obtenir les réponses à mes questions. Je n’ai pas hésité à être lourd par moment et mes quelques traits d’esprit n’auront pas aidé à relever le niveau. Alors, je comprends. Je ne dirais pas que j’excuse sa gifle pour autant - à moins que - mais que je lui ai tapé sur les nerfs me paraît cohérent. Du reste, je la trouve de mauvaise foi et, à peine conscient des limites, je relève qu’elle ment. Je me permets, encore. « Pour quelqu’un qui en a rien à foutre, ma joue s’en souvient encore.» Je ne la frotte pas : je refuse de lui faire ce plaisir, mais elle me brûle. Je suis sûre qu’elle est marquée et, dans mon délire, lequel délire qui s’affaisse, je l’imagine rouge cardinal. « Alors ? » Viendra-t-elle ou pas ? Acceptera-t-elle la contrepartie que je lui propose et qui concerne Leah ? Je suis prêt à éviter d’aborder son mec, mais ce ne serait pas gratuit, parce que je doute qu’elle soit aussi sereine qu’elle le prenait. Je doute également qu’elle soit emballée à l’idée de redescendre ou de se droguer seul. La preuve, elle a l’air intéressé. « Les moutons seront bien gardés.» ai-je ponctué d’un assentiment qui ne soulève en moi aucune frustration. Pour que faire ? Elle me suit jusqu’à ma voiture et, tandis que nous nous installons, je me demande si nous allons rester ici, sur ce parking, ou si nous allons prendre la route pour nous éloigner de la foule, qu’elle nous agresse moins, au même titre que la musique qui résonne dangereusement dans ma tête.« Elle l’est.» me suis-je défendu en hésitant entre démarrer, sortir le matos ou attendre, attendre que le ton soit lancé par ma partenaire. « Je sais pas si j’ai envie de rester là. J’ai l’impression qu’il me regarde.» Je vise du doigt deux statues réalisées dans la matière des ballons, gonflés sans doute avec le chapiteau. « Je les trouve flippantes, elles. »  

« Pour quelqu’un qui en a rien à foutre, ma joue s’en souvient encore. Alors ?» « Pour quelqu’un qui s’en souvient encore, t’as déjà l’air d’en redemander. » Si la violence ne suffit pas à lui faire comprendre qu’il a dépassé les limites de ce que je peux accepter, comment le lui faire comprendre ? Le cogner jusqu’à ce qu’il se taise ? Le laisser en plan, définitivement, et mettre mes menaces à exécution dès demain ? Je n’en suis pas encore là, mais je formule une dernière fois mon interdiction en espérant que le message passe cette fois ci. Il demande une contrepartie et je ne suis pas surprise : je dois dire que le marché me semble assez juste.

Alors soit, je ne parlerais pas de la brunette qui m’a servi d’acolyte il y a des années s’il ne fait plus la moindre allusion à mon amant, ou plutôt ancien amant que mon coeur pleure encore. « Les moutons seront bien gardés. » « Les moutons ? Je suis pas un mouton. Je suis... » Allumée, je réfléchis sérieusement à cette question et je plisse le front, mon cerveau tournant à vive allure. « Je suis un lion. Non, je suis un serpent ! Non, un loup. Je suis un loup. » Et lui je l’imagine ce soir dans un costume de petit singe de cirque qui tape dans ses deux cymbales. Moi, je n’ai jamais eu autant les apparât du loup solitaire que ces derniers temps.

« Elle l’est. » « Alors j’ai pas envie voir ce que c’est quand elle est sale. » Je retire mes bottines et je pose mes pieds sur le tableau de bord. « Elle est pas propre de toute façon. » Que je réponds, devant son regard réprobateur. « Je sais pas si j’ai envie de rester là. J’ai l’impression qu’il me regarde. Je les trouve flippantes, elles. » Il me montre les statut du doigt et un frisson me parcourt l’échine. « Attends, j’ai une solution. » Dans le noir je tatônne pour trouver le levier pour baisser mon siège. Lorsque je mets la main dessus, je le couche complètement à l’horizontal avant de lui adresser un sourire fier et de chuchoter. « Voilà. Là, je suis invisible. »


@Loris Baumann

Nul besoin d’être devin pour comprendre que sa réplique est un avertissement. A ne pas mesurer les limites de ce qui se dit, ne se dit plus, je risque de vivre ou subir un sentiment de déjà-vu. C’est d’une nouvelle gifle dont j’écoperai et, a priori, dans ma folie de junkie, je me fais la réflexion que ce sera toujours plus agréable que de la voir m’arracher les yeux ou m’arracher un poumon. Quelle bêtise que d’y songer et d’en sourir. Pour peu, la grimace paraîtrait insolente, mais je ne suis pas tout à fait avec elle. Moi, je suis déjà dans la voiture, j’ai déjà récupéré dans la bôite à gants de quoi m’envoler loi de mes emmerdes et, de préférences, avec elle. Elle plutôt que la solitude. Elle plutôt que la honte de réaliser que me droguer n’est pas lié au caractère festif du geste. Elle plutôt que personne, même si c’est ma came, ma merde, ma bagnole… et mes allégories qu’elle transforme. « Quoi ? J’ai jamais dit que tu étais un mouton, c’est un proverbe.» Ne le sait-elle pas ? La communication est bien plus compliquée qu’au moment de notre rencontre, mais en avons-nous besoin pour ce que nous envisageons ? « Si tu veux pas que j’en parle...» De ton ordure de type qui s’est foutu de ta gueule parce qu’il ne vaut pas mieux que les autres…. « Ne me lance pas de perche.» Parce que le seul animal que j’ai sous les yeux, aujourd’hui, c’est une perruche inséparable qui se laisserait crever d’avoir perdu sa moitié et qui piaille, qui piaille, qui piaille de plus en plus fort dans l’espoir que l’être perdu revienne par miracle. C’est pathétique, mais comme elle me suit, je ne pipe mot. Je prends place dans mon véhicule. Je lui confie que les statuettes en plastique du chapiteau me font flipper - et ça aussi, c’est ridicule - mais qu’à cela ne tienne ? Elle ne comprends pas. Elle renverse son siège…. elle se prétend invisible et… et je me demande si ce n’est pas moi qui suis complètement à côté de mes pompes. « ça a l’air efficace. Je te rejoins. Après… après que tu l’aies fait.» Parce que cette fois, c’est acté. J’ai besoin de plus et, sur ledit miroir caché au milieu de mes papiers, je prépare de qui m’euphoriser, sans lui en proposer.

Ses les effets des stupéfiants, je réfléchis sérieusement aux animaux que nous pourrions être tous les deux. Je suis comme une enfant lancée sur un sujet, j’ai saisi un mot au vol et mon esprit a déjà construit au tour sans que cela n’ait aucun rapport avec le reste de la conversation. Est-ce ça finalement, l’effet de la cocaïne ? De tous nous ramener à l’état d’être innocents ? « Quoi ? J’ai jamais dit que tu étais un mouton, c’est un proverbe. » « Pourquoi t’as toujours besoin de jouer les rabats joies ? » Je trouve ça drôle sur l’instant que de nous transposer dans un zoo, une savane ou une basse cour et voilà qu’il tente de me ramener les pieds sur terre. Je n’ai pas envie qu’il le fasse, je veux me gonfler à l’hélium et je veux m’envoler. « Ah j’oubliais. T’es flic. » Et ça, c’est l’explication universelle à chacun de ses travers à mes yeux. « Si tu veux pas que j’en parle… Ne me lance pas de perche. » « De perche... » Je l’observe un instant avant de me hisser sur la pointe des pieds pour attraper ses joues entre mes mains et les décoller pour les agiter à la façon des branchies d’un poisson. « C’est vrai que tu ressembles à une perche. Mais ça nous dit pas où t’es garé. »

Mais par miracle, il s’en souvient encore et une fois à l’intérieur, je prends mes aises. Je pose d’abord mes pieds sur le tableau de bord avant d’avancer mon siège pour pouvoir le coucher intégralement. Dans cette position, je me sens complètement à l’abri des regards et je ne peux m’empêcher de partager ma trouvaille avec mon compagnon de galère du soir. « Ça a l’air efficace. Je te rejoins. Après… après que tu l’aies fait. » Que je l’ai fait ? Je suis déjà en train de sortie la fiole de la poche de ma veste et je me retourne à plat ventre pour pouvoir la manipuler plus facilement. Je m’appuie sur mes coudes,  je la débouche et je porte la cuillère en or sous ma narine, d’une main tremblantes et fébrile. J’inspire un coup, je ferme les yeux, et l’espace d’un instant, je suis propulsée dans les étoiles. Je tends la mains pour trouver le levier du siège de Lorsi, je tâtonne, je m’énerve de ne pas réussir à l’actionner - ma main est à des dizaines de centimètres du bon endroit - alors j’abandonne et je lui adresse un signe de la tête. « Allez rejoint moi. Fais comme chez toi. »


@Loris Baumann

Je suis rabat-joie parce que je ne me sens pas bien. Je suis terre à terre parce que mes veines ont terminé de distiller à travers mes organes leur poison. Je n’ai plus rien de drôle parce qu’elle m’a forcé à redescendre un rien trop vite, bien malgré moi, parce qu’elle m’a attaqué au sujet de Leah et que j’ai dû en déployer des trésors de cohérence pour la renvoyer dans ses buts. Autant dire que cette gifle, si elle ne m’a pas ravi sur le moment, j’y repenserai avec satisfaction. Cette femme que rien ne semble pouvoir mettre à terre, je l’ai maintenue à terre, sous ma chaussure, sous mon talon. Nul doute que je m’en gausserai plus tard. Sur l’heure, j’encaisse ses moqueries avec un détachement qu’on lui aurait volontiers prêter au préalable. Je les encaisse parce que je n’ai plus qu’un objectif : retrouver ma bagnole, comme elle le réclame en me prêtant l’allure d’un poisson. J’aurais eu tôt fait d’enfoncer le clou de sa peine néanmoins. Mais, à quoi bon ? J’ai perdu mon sens des priorités. Aujourd’hui, il s’agit de combler ma solitude, d’éteindre la peur d’être effectivement aussi pathétique qu’elle, de me débarrasser de mon mal être avec l’aide d’une chimère. Dès lors, je nous conduis vers notre but et, tandis qu’elle pallie mes inquiétudes de gosses attardés d’un geste simple, je cligne des yeux à plusieurs reprises et, si je me désinterresse d’elle, c’est pour me consacrer à notre point commun. Dieu que c’est effrayant d’être aussi à l’aise dans mes manipulations alors que l’espace est exigü. Je redoute ce que ça peut bien déclarer sur moi, moi qui expire profondément, qui soupire, qui clos les paupières pour savourer les bienfaits de la coke. Je me sens mieux, plus à l’aise, presque surhumain. Je me découvre des qualités de super héros. « Qu’est-ce que tu fous, là ? » A tatonner à proximité de mon siège. Que cherche-t-elle ?« Tu as fait tomber un truc dans ma voiture de flic ? Fais gaffe.» Je taquine. Je lui adresse un clin d’oeil et je comprends. Je comprends et je m’exécute. « C’est mieux comme ça ? » Pourquoi ? Parce que, comme moi, elle essaie d’oublier qu’elle se sent terriblement seul dans sa mélasse. « Même si ça rime à pas grand chose ? Un peu comme éviter certains sujets d’ailleurs. C’était les plus intéressants.» ai-je conclu en haussant les épaules, presque déçu par nos propres interdictions.

Loris, il n’est jamais plus drôle qu’à son insu, sans le vouloir et parce que je me paye sa tête. Sur l’heure, parce que je suis allumée certainement, je trouve l’air que lui donnent mes mains qui pincent ses joues et qui les agitent à la façon d’une bouche de poisson est particulièrement convainquant. Sinon, je n’éclaterais pas de rire comme je le fais sur l’instant, lâchant ses joues légèrement rosies par mes pinces, avant de le suivre jusqu’à sa voiture.

Dans la voiture je ne résiste pas bien longtemps à l’idée de repartir pour un tour. Je le fais seule, sans lui tendre la fiole ou lui proposer de se repoudrer le nez sur son miroir avec lui : je lui ai dit qu’il ne le méritait pas et, de toute façon, la honte me brûle trop les veines pour ne pas le faire de façon furtive, rangeant rapidement le flacon dès que j’ai fait mon affaire. Par contre, je suis prise de paranoïa et j’imagine que, si je suis invisible et que lui ne l’est pas, il nous fera bêtement repérer. Alors je tente de baisser son fauteuil à lui aussi, je me débats avec une poignée invisible. « Qu’est-ce que tu fous, là ? » Je grogne mais mon visage s’illumine d’un sourire et je laisse mollement retomber mon bras. A plat ventre je m’étale, ma joue posée contre le tissu du siège. « Tu as fait tomber un truc dans ma voiture de flic ? Fais gaffe. » « Exactement. J’ai glissé un rapport détaillé de toutes les fois où je t’ai fourni, les drogues et les quantités. J’ai aussi détaillé nos ébats pour égayer un peu la lecture, position et durée. » Je scande mon texte comme si je l’avais appris par coeur : pourtant, il me vient par vague. « J’espère que c’est ton binôme qui tombera dessus. Homme ou femme ? » Ou bien n’a-t-il toujours pas été autorisé à reprendre le boulot ?

Il allonge son siège et je tourne mon visage pour l’avoir dans sa direction. Ma joue s’écase sur le tissu, ma tête est lourde mais mon sang commence à pulser violemment dans mes veines. « C’est mieux comme ça ? » Je hoche la tête doucement. « Comme ça on est coupés du monde. Personne ne peut nous voir et on ne peut voir personne. » Dans mon état, il s’agit du rêve absolu. « Même si ça rime à pas grand chose ? Un peu comme éviter certains sujets d’ailleurs. C’était les plus intéressants. » « Comment ça rime à pas grand chose ? C’est pour nous garder en sécurité. Comme les interdictions, mais si tu veux lever la tienne, je suis toute ouïe. » Amos lui restera sujet tabou.


@Loris Baumann

Moi, je sais pourquoi je suis parano et ça n’a rien à voir avec les sentinelles du chapiteau que je pointe du doigt. Elles, c’est mon prétexte. Elles, elles prennent le visage et les traits de Leah, de mes frères, de mes parents et même de Hannah Whitemore. J’ai également peur d’être reconnu par un citoyen lambda que j’aurais aidé en tant que flic, par un dealer qui choisirait ce parking pour une transaction, par un ami qui se serait perdu sans songer à me prévenir dans cette même soirée. Les chances sont minimes pourtant. Mais, je me hâte de m’en foutre plein les narines en me demandant ce qu’elle fuit, elle. Aurait-elle peur que son mec, pris de remords, vienne la chercher jusqu’ici ? Personnellement, je doute qu’il le fasse. Moi, j’ai statué: il se moque d’elle. Elle ne l’a intéressé que parce qu’elle a un joli petit cul rebondi et que la courtesse de ses jambes galvaniserait tout homme doté d’un ego surdimensionné. Pas de quoi s’enorgueillir. Pas de quoi replonger. Pas de quoi avoir honte non plus. Tout le monde a déjà été pris pour un con au moins une fois dans son existence. Elle n’en mourra pas. Dès lors, pourquoi est-ce qu’elle se cache pour se droguer ? « Je t’ai déjà dit que je t’avais vue. Je t’avais aussi dit que c’était plus la peine de faire semblant de rien.» Cela fait un moment que nous en parlons, que nous en discutons, que nous nous raillons et que nous chamaillons comme des gosses à ce propos. Ce n’est pas le dernier jeu à la mode pourtant. A quel point sommes-nous viciés par ce poison ? Est-ce possible qu’il altère notre personnalité au point d’en perdre en dextérité ? Je réalise qu’elle tentait de faire descendre mon siège et je ne compte pas à combien de reprises elle s’y est prise pour un résultat nul. Moi, je tire des déductions : « Très drôle. Autant, la première partie ne m’intéresse pas autant la seconde.» ai-je admis, l’air goguenard, étonné qu’elle en reparle. « Tu désinhibes, Raelyn ? C’est ce qu’il faut comprendre ? De qui tu essaies de te cacher ? » D’elle-même ? Ce n’est pas idiot. Je crois que je fais le même. Je crois aussi que je préfère qu’elle m’envoie sur les roses plutôt que de lui donner ce qu’elle veut : parler de Leah.

Si je me cache, ce n’est pas pour que Loris n’assiste pas au triste spectacle que je renvoie, junkie penchée sur sa dose comme si ça vie en dépendait. Non, c’est là le résultat de la force de l’habitude : à l’époque où je consommais, alors que je n’étais qu’une jeune femme, je le faisais chez moi, à l’abri derrière les murs de mon appartement et avant de sortir. Lorsque j’avais besoin de prendre une dose supplémentaire en soirée je me cachais et je pense que je cherchais simplement à maintenir l’illusion d’une jeune femme forte et indépendante. La drogue est une maîtresse comme une autre, et je voulais n’en avoir besoin d’aucune. « Je t’ai déjà dit que je t’avais vue. Je t’avais aussi dit que c’était plus la peine de faire semblant de rien. » Je tourne la tête, je range la fiole aussi vite que je l’ai sortie et je plonge mes yeux dans les siens. « Je m’en fous que tu me vois. » C’est faux, et c’est aussi pour ça que j’ai longtemps préféré prendre de l’XTC à d’autres stupéfiants : la prise est de loin la plus discrète. « Très drôle. Autant, la première partie ne m’intéresse pas autant la seconde. » « Pourquoi t’as besoin d’un résumé toi aussi ? » Mon sourire s’étire alors qu’il rentre dans mon jeu et si je ne ressens pas la moindre nostalgie en souvenir de nos ébats, je me complais à prétendre que c’est son cas et à le houspiller. « Je coucherai pas avec toi Loris. » Je répète, plus pour introduire la suite que le lui rappeler : il a compris. « Mais si tu veux fermer les yeux et imaginer que c’est le cas pendant que je te rappelle ce qu’on faisait à l’époque, libre à toi. » A plat ventre, je suis prise d’un haut le coeur, ma tête tourne et je me retourne pour prendre un peu plus d’air. Je tente d’ouvrir la fenêtre mais elle est électrique et sans le contact, ça ne fonctionne pas. « Tu désinhibes, Raelyn ? C’est ce qu’il faut comprendre ? De qui tu essaies de te cacher ? » « Je me cache de personne. » A nouveau et parce que je n’ai pas encore intégré que c’est vain, j’appuie sur le bouton censé faire descendre ma fenêtre. « Fous le contact, j’étouffe. » J’étouffe parce que, face au triste spectacle du brun qui aligne son rail sur un miroir, j’ai l’impression d’en contempler un moi aussi.



@Loris Baumann