La puissance des mots n’est pas négligeable. La conviction profonde est nécessaire mais les entendre à voix haute est toujours une pommade qui met un baume supplémentaire à l’âme. Il se réconforte et il s’enlise dans les bons sentiments, dans la force des mots prononcés et c’est en cela que le psychique devient intéressant. Important. Une petite vague qui tape contre les parois du crâne, un va-et-vient doux pour rappeler ce qui a été dit. Parfois, il faut savoir remonter les manches et répéter ces mots. Il faut le démontrer, mais le dire est encore mieux. Cela fait du bien aussi bien à l’émetteur qu’au destinataire. L’un le réalise, l’autre le confirme. Vous êtes sur la même longueur d’onde. Vous êtes présents l’un pour l’autre. Vous vous faites confiance mutuellement. Ce n’est pas anodin, ce n’est pas rien, ce n’est que la suite de votre partition commune ; il y a forcément des notes faibles, ou des notes trop fortes, des octaves qui s’envolent ou qui s’étouffent sans que vous n'ayez aucun contrôle dessus. Mais la musique reste belle malgré tout et c’est sur ce point qu’il faut rester et se remémorer.
« Anything you want. » alors tes yeux s’émerveillent contre lui, comme si ce n’est qu’une surprise que Jordan se plie non pas en quatre mais en dix sous ta moindre exigeance. Ce n’est pas une exigeance, pour toi, c’est une requête. Il aurait pu dire non - ce n’est pas glamour ni tentant, un massage de pieds. Mais tu as un être en toi, Birdie. Tu mérites qu’on prenne soin de toi. Tu as compris que ton partenaire sera là si t’as besoin. Tu vas arrêter de faire l’idiote et de vouloir montrer que t’es forte, indépendante, fière aussi. Tu n’as pas à être pudique ni avoir peur de te montrer faible devant Jordan - même s’il n’y a rien de faible à demander de l’aide. Ton partenaire en a demandé, pour sa tête, pour aller mieux, pour son bien-être et le vôtre. Alors tu te fais la promesse de ne pas lui créer non plus de frayeurs inutiles. De ne pas aller faire les courses toute seule - c’était si chiant, en plus, c’était bien par esprit de contradiction, pour ce coup. Tu n’es pas impotente, tu es encore libre de certains faits et gestes mais Jordan est ta béquille, en ce moment, et il n’attend que cela de pouvoir être utilisé.
« Tu as déjà des idées? » tu taponnes le peignoir d’un geste absent sur toi pour te sécher un minimum, les pensées tournées vers la question de Jordan. “Quelques unes.” tu fais des recherches de temps en temps, d’autant que vous en aviez parlé il y a quelques mois et que ton partenaire a fait une requête qui a au moins l’avantage de réduire les critères - ce qui est une bonne chose parce que mon dieu que tu es une indécise. « Gender neutral would be nice. » “Yeah, I know, I remember.” mais visiblement, pas Jordan, ce qui te fait légèrement sourire alors que tu le suis dans la chambre. “Au moins, ça réduit les champs de possibilités. Parce qu’il y a beaucoup trop de prénoms qui existent.” tes mains sur ton ventre constamment, tu regardes ton compagnon être adorable à bouger tous les oreillers les pour ton confort personnel - bien mérité. Tu n’enlèves pas le peignoir quand tu t’allonges dans un soupir d’aise automatique, comme si le marathon avait été parcouru. Il faut dire que vous avez pas mal bougé aujourd’hui. “J’en ai marre d’avoir l’impression d’être tout le temps fatigué. Vivement que l’alien sorte de ce corps pour que je le récupère dans toute sa flexibilité et son énergie.” que tu grommelles. T’as déjà râlé plusieurs fois en cinq mois car tu as vraiment du mal avec la sensation d’être habitée et de ne pas pouvoir faire ce que tu veux. “Et sa beauté, aussi, parce que là, ça donne pas très envie.” ta poitrine est trop grosse, ton ventre aussi, tes cuisses en ont pris aussi - même si ce n’est que dans ta tête certainement parce que ton corps reste majoritairement menu et tu es de ces femmes qu’on ne soupçonne pas d’être enceinte quand on te regarde de dos. Mais ton anatomie a toujours été frêle et bien proportionnée, tu l’aimais profondément mais voilà que l’alien est en train de te dégoûter un peu plus de toi-même. Ce n’est pas pour rien que tu gardes le peignoir. Les veines et les petites vergetures que tu dois atténuer à coups de crème te font horreur. “J’avais pensé à des Alex ou Max. Mais c’est d’une banalité affligeante. Il y a Jamie ou Charlie. Ou Sasha. Cameron. Morgan. Billie.” tu tapotes tes doigts sur toi en regardant le vide avant de remonter tes yeux sur lui. “Mais on a le temps d’y penser d’ici là. Malheureusement.” que tu rajoutes en grimaçant légèrement tout en tapotant ta paume contre ton ventre. Tu préfères quand même arriver à terme ; si l’alien née prématurément, ce n’est pas forcément une bonne chose.
C’est tellement naturel pour toi d’accepter de lui faire ce massage des pieds. En plus un massage, le truc où même toi va pouvoir profiter au passage car tu aimes vraiment trop toutes les parties de son corps ça en est pathétique à ce niveau.“ Quelques unes.” Apparemment vous allez avoir votre premier brainstorming de prénoms pour votre futur alien. “ Yeah, I know, I remember.” Et t’es surpris parce que tu ne t’en souvenais pas du tout de ton côté. Vous en avez déjà parlé. Tu lui as déjà dit et tu as envie de faire une tape dans l’épaule de ton Toi du passé pour avoir déjà mis sur le tapis le genre neutre du futur prénom. Comme quoi tu dis ça sur le ton le plus banal qu’il soit mais c’est un point vraiment très important pour toi. Elle sait. Bien sûr qu’elle sait. “ Au moins, ça réduit les champs de possibilités. Parce qu’il y a beaucoup trop de prénoms qui existent.” Et en plus elle te confirme que c’est vraiment une bonne chose sur plusieurs niveaux.
Elle s’installe enfin sur le lit et tu la laisses prendre ses aises avant de te mettre à l’œuvre. “ J’en ai marre d’avoir l’impression d’être tout le temps fatigué. Vivement que l’alien sorte de ce corps pour que je le récupère dans toute sa flexibilité et son énergie.” Tu fais une petite moue car y’a réellement rien que tu puisses faire pour que le temps passe plus vite. Or maybe there is. Je te vois Jordan à t’imaginer lui donner des orgasmes à volonté pour les mois à venir. Yeah. “ “Et sa beauté, aussi, parce que là, ça donne pas très envie.” Tu hausses les sourcils. « Ca me donne toujours envie. » Car c’est vrai. Car elle a besoin d’être rassurée. Tu ne vas pas dire que ses petits seins te manquent parce que ce serait aller vers le bas et elle n’a pas besoin de ça. Tu aimes son corps et sa personne quoi qu’il arrive et il n’y a pas que ça qui te fait envie quand vous vous allumez tous les deux. C’est un tout. C’est elle en entier que tu veux. Que tu aimes.
“J’avais pensé à des Alex ou Max. Mais c’est d’une banalité affligeante. Il y a Jamie ou Charlie. Ou Sasha. Cameron. Morgan. Billie.” Elle a l’air prête ? Installée ? Tu t’attendais à l’avoir nue sous tes yeux, ou à moitié nue mais on dirait que c’est tenue complète pour ce massage des pieds. Tu avais déjà dans l’idée de glisser et d’aller plus haut. Will do. Ouais tu n’as pas peur de t’immiscer sous ses vêtements, c’est pas un peignoir qui va t’arrêter. “ Mais on a le temps d’y penser d’ici là. Malheureusement.” Tu t’es positionné à ses pieds et tu commences doucement à les masser du mieux que tu peux et Dieu sait que tu sais y faire avec tes mains. « J’avais pensé à Ariana mais nope. » Pour des raisons évidentes. Il n’empêche que tu avais envie de le dire à Birdie. Tu veux partager ce qui se passe dans ta tête. Tu t’appliques sur ses pieds en jetant des coups d’oeil vers ta moitié de temps à autre.« J’aime tout ceux que tu as dit… » Il semblerait que tu ne sois pas difficile de ce côté là. Les prénoms unisex sont visiblement tous à ton goût. Réellement. T’es pas en train de lui laisser l’ascendant. « Je savais pas que tu y avais déjà autant réfléchit… » Une de tes mains qui monte doucement sur son mollet car visiblement ton expertise des massages des pieds va jusqu’aux mollets. All. Of. Her. Body. Oui oui ok Jordan. T’aimes juste caresser son mollet un petit instant avant de retourner à ta si dure labeur. « Y’a d’autres choses que tu me caches ? » Ton léger sourire en coin prouve que tu n’es pas tout à fait sérieux. Tu en profites d’ailleurs - car tu te sens intelligent - pour dégager le peignoir d’une de ses jambes. Comme si c’était son corps qu’elle te cachait là. Pas comme si. Ouais ouais. Effectivement y’a un petit quelque chose d’inhabituel et tu l’as déjà décelé.
« Ça me donne toujours envie. » “Ca en fait au moins un de nous.” le dégoût qui grandit au fur et à mesure de ton image dans le miroir. Ce n’est pas anodin que tu t’observes sous toutes les coutures depuis le premier jour. Oeil curieux aux critiques acerbés dans le coin de la tête, la fâcheuse petite voix du diable qui répugne ces formes disgrâcieuses qui t’incombent dans la création d’un nouvel être humain ; c’est ce que la voix sage et posée de l’ange te répète, pourtant. Plus facile à croire ce que l’on voit, tu ne ressens pas les bienfaits de l’aventure prodigieuse de la création mais tous ses défauts. Les nausées à ne plus en finir, les courbes qui changent et s’amplifient, les humeurs qui sautent et modifient les perceptions. L’émotion est touchante alors que les prunelles émues se posent sur le partenaire en bout de lit. Aucune once de de répugnance dans les siennes - cela pourrait venir avec le temps, il y a encore quatre mois à tenir.
Mais pas pour maintenant car ses mains se posent sur ton pied et tu grognes de satisfaction, replongeant la tête dans les oreilles. Paupières mi-closes, oubliant quasiment le sujet de la conversation en cours, tu soupires doucement, les mains sur ton ballon te servant de ventre. « J’avais pensé à Ariana mais nope. » mmh mmh. Ariana ? Oh. “J’ai capté la référence.” les lippes s’étirent et un œil s’ouvre pour croiser le regard de Jordan. La communication silencieuse est aussi présente que la vocale, sûrement plus ; la conception a après été bénite par Sainte Ariana. Une boucle fermée (ou presque) tellement qu’elle a bercé votre histoire sans vraiment le faire exprès. Une belle boucle, il faut bien l’avouer. « J’aime tout ceux que tu as dit… » “Tant mieux parce que c’est affreux d’avoir autant de choix. Je compte sur toi pour trancher si y a besoin.” même si le filtre “non binaire” s’ajoute, tu restes une éternelle indécise et il s’agit du prénom de ton alien. Le choix doit être fait avec réflexion, le prénom doit être beau, tu dois l’aimer d’amour pour un être que tu vas encore plus aimer - que tu aimes déjà. « Je savais pas que tu y avais déjà autant réfléchit… » haussement d’épaules et soupir lâche alors que les doigts remontent sur l’épiderme, le geste hasardeux car il n’est pas un professionnel mais ta jambe peut s’apparenter à une guitare ou un piano et ça, Jordan en est doué. Ton propre corps est à intégrer dans les instruments qu’il sait jouer.
« Y’a d’autres choses que tu me caches ? » attention retrouvée, tête se relevant légèrement pour coincer son visage en observation de ton partenaire. Il sourit, de ce petit air pas sérieux, alors qu’il te dévêtit une jambe d’un pan du peignoir. Si c’est anodin pour lui, tu fronces légèrement des sourcils avant de te mordre la joue ; c’est ridicule car tu viens de prendre un bain avec lui. “Qu’est-ce que je te cacherai ?” le ton est défensif et cela n’alourdit que les présemptions pourtant amusées de Jordan. “Je veux dire… Depuis gamine, je me demande comment appeler mes futurs potentiels enfants. Et il faut parfois bien passer le temps.” comme avec son affreuse machine de prise de tension du diable. Soucieuse que le ton ne passe pas, tu te reprends malgré tout, les mains sur ton ventre à moitié découvert. Tu tentes même de camoufler cette peau tirée en rabattant un peu ton peignoire un peu mieux par-dessus. Tu te rends compte que tu n’es pas rassurée par toi-même. Ce n’est pas la première fois que tu grimaces mais sûrement que la fatigue mélangée aux hormones n’aident pas à avoir la meilleure image de toi. La langue passe sur les lèvres et tu gigotes ton pied contre Jordan. “Oublie pas l’autre.”
“Ca en fait au moins un de nous.” T’aimes pas ces mots dans sa bouche. Tu comprends que c’est réellement une épreuve pour elle cette grossesse. Tu t’en voudrais presque de l’avoir mise dans cette situation car oui, c’est la force de tes soldats qui sont le résultat de toute cette situation. Elle prenait sa pilule comme toujours et le barrage a été forcé. Elle est celle de vous deux qui aime son corps; qui le montre trop. Pas que ça te dérange, mais si tu étais à sa place, tu aurais déjà creuser cent fois ta tombe de t’exposer de la sorte. Elle revendique son corps et le montre à qui veut regarder en l’embellissant encore plus - si c’est possible - de toutes les créations de vêtements qu’elle fait de ses jolies mains. C’est toi qui dit que tu t’aimes pas et elle qui dit combien elle veut te manger. She stole my line. Depuis le temps vous partagez tant. Tu la lui donnes cette ligne et toutes celles qu’elle veut et plus encore. Si seulement ça pouvait faire revenir ta partenaire Queen des naturistes. Mais ce n’est pas si facile. Malheureusement.
“J’ai capté la référence.” Parce que vos âmes ne font qu’un. Parce qu’il est de plus en plus facile de lire dans les pensées de l’autre. Tu lui caches rarement les choses, sauf bien sûr l’histoire vis à vis de ta mère qui ne te plaît pas à rappeler lorsque ta moitié est elle même enceinte. Sujet qui n’est pas venu tant de fois sur le tapis autrement pendant votre relation. Tu as tendance à parler de Rosa plus que d’Ashley pour des raisons évidentes. Tu as vécu avec une, jamais avec l’autre. “Tant mieux parce que c’est affreux d’avoir autant de choix. Je compte sur toi pour trancher si y a besoin.” Tu hoches la tête, appréciant qu’elle te laisse aisément le fin mot du prénom de votre futur enfant. Tu sais aussi que si elle n’est pas d’accord, elle le dira. C’est une décision bien trop grande. Ca va suivre votre alien toute sa vie.
“Qu’est-ce que je te cacherai ?” Au travers des soupires et autres bruits de contentement venant de ton oiseau grâce à tes massages, tu vois de part son ton là que oui, tu as touché dans le mil. La cible était immense en même temps. Impossible de le louper. Ton coeur se serre de la voir galérer avec son image, son corps dans lequel elle ne se sent plus aussi bien. C’était vraiment pas une partie d’elle que tu pensais s’en aller un jour. “Je veux dire… Depuis gamine, je me demande comment appeler mes futurs potentiels enfants. Et il faut parfois bien passer le temps.” Un joli rattrapage mais tu n’as rien loupé de l’énergie qu’elle renvoie là. C’est pas sensé être comme ça. Elle est la femme qui revendique son corps et qui t’en bouche un coin à chaque fois car tu es tellement incapable de ça. “Oublie pas l’autre.” Elle replace le peignoir sur elle et t’as juste envie de la serrer contre toi. Sauf qu’elle t’a demandé un massage des pieds et que tu t’exécutes.
Tu vas pour t’occuper de l’autre pied mais tu fais une pause avant. T’appuyant sur le lit de tes bras afin de maintenir ton corps à quatre pattes sur le matelas le temps d’aller approcher ton visage de celui de ton oiseau. Tu déposes un baiser sur ses lèvres parce que ça faisait trop longtemps que tu ne l’avais pas embrassé à ton avis. I’m sorry you’re going through this… Tes lèvres qui restent un poil trop contre les siennes par rapport à ce que tu avais en tête en entamant ton mouvement. Tu embrasses sa joue puis sa moue une fois de plus avant d’aller te replacer pour continuer le massage. C’est un truc concret qui lui fait du bien, tu ne vas pas t’arrêter là. Tu vas la masser jusqu’à ce qu’elle te dise de t’arrêter, même si ce sont des ronflements qui seront le signal qu’elle est tout à fait décontracté. « We look like we’re in a spa. » Tous les deux avec vos peignoirs. Le sien à elle qui est bien trop grand car elle a toujours refusé d’en acheté un, préférant les tiens. Pas grand chose mais signe immense de son amour pour toi. Ta petite phrase de moins de dix mots qui sert à pas grand chose à part à vous rapprochez en mettant en avant vos similitudes. Ca montre aussi que tu vois des bons côtés à ce qu’elle le garde sur son dos plutôt qu’elle ne reste à poil même si ton petit coeur se brise de te rendre compte de combien elle n’aime pas son corps de couveuse. Tes yeux sur ses pieds que tu chéris toujours avec intensité et délicatesse à la fois.
La moue tire, les traits se veulent nonchalants et détachés, comme toujours. Mais la mise en scène ne suffit pas, il faut de l'émotion. Celle-là est un peu trop tranchée à l’entente de la question, une indélicatesse de ta part qui te vaut un regard de ton partenaire - ou plutôt un haussement de sourcils qui ne fait aucun doute. La duperie n’est pas ton fort, par moment ; trop honnête, trop sincère, trop émotive aussi. Les hormones sont un véritable puits sans fond, tu les détestes car ils jouent de tes nerfs trop facilement, trop qui a la pudeur bien placée pour savoir te contrôler et maîtriser. Mais devant Jordan, et dans ta condition, le défi est double et quasiment impossible. Même s’il ne dit rien, son silence veut presque tout dire. Les illusions que tu dessines dans ta tête dévoilent les craintes que tu as que cela puisse arriver un jour ; son rejet, malgré le fait qu’il vient de dire l’exact opposé. Non pas que tu ne crois pas ses paroles, mais sait-on jamais. L’optimiste fait place au verre à moitié vide en se confortant dans le pire, en espérant à peine le meilleur car les jolies hormones ne pourraient pas tenir la cadence si l’espoir se crée.
Pourtant, c’est compliqué de tenir ce cap. Parce que Jordan joue sur ta peau, ce qui est agréable. La navigation entre les vapes d’endormissement et la réalité devient compliquée. La journée a été éprouvante. Elle a été longue à bien des égards. Mais satisfaite d’avoir été là pour lui. D’avoir percé un problème qui somnole depuis le début sans que tu en ai eu conscience. Pourquoi l’avoir caché ? Pourquoi ne pas l’avoir dit ? Pourquoi faire preuve de silence ? Voilà que tu te mets à réfléchir de nouveau. Mais, mais y a Jordan qui vient sur toi, les prunelles l’observent avec expectation avant que ses lippes ne touchent les tiennes. Serait-ce là une façon de te donner un second souffle ? Ton âme lui est volontiers offerte s’il veut l’aspirer. La main vient au contact de sa joue alors que perlent les baisers sur ton visage qui n’a rien de séduisant - des certitudes que toi seule peut appréhender et comprendre. Cela te suffit pour te détendre plus, pour t’apaiser aussi, dans un sens. Jordan n’est pas dupe ; il te connaît sûrement mieux que personne.
« We look like we’re in a spa. » tu souris légèrement, évasivement alors qu’il se repositionne à tes pieds, regrettant déjà sa chaleur et ses baisers. La langue sur les lèvres, les paupières de nouveau mi-closes, tu tangues entre l’envie d’en finir avec cette journée et celle de la question qui persiste au bout de ta bouche. Pourquoi ? Mais es-tu prête à remettre ça sur le tapis ? Est-ce qu’il ne faudrait pas attendre un autre moment, quand tu ne seras pas en train de comater dangereusement avec Morphée ? “Il faudra que tu me masses plus que les pieds pour être dans un spa. Même si c’est un bon début.” le sourire flottant toujours présent, tu te dis que ça va aller. C’est ridicule d’avoir peur ; Jordan réussit à te faire du bien juste par les pieds. Tant qu’il ne te demande pas de te lever ou de te tourner, aucune raison de bouger. Ça aurait été en dehors de ta condition que tu l’aurais déjà incité à venir foutre ses mains ailleurs. Ou il les aurait déjà placées là où tu aurais souhaité sans l’once d’une hésitation - mais là, ton partenaire sent que quelque chose ne va pas, c’est perspectible d’une façon ou d’une autre, et tu te pinces les lèvres. “Thank you, babe.” que tu murmures doucement, la sincérité de tes mots transpirant de ta bouche, autant que la fatigue qui commence à gagner du terrain et à envahir tes pores. Reconnaissante pour lui, pour vous, pour ses mains, pour ses attentions. Même si tu l’as disputé, même si c’est parfois pénible, tu apprécies tout ce qu’il fait. Sa présence. Son amour. Ce que vous avez. Tu n’aurais pas vécu ça sans lui - tu le répètes dans ta tête car c’est la vérité. Tu ne pourrais pas le faire seule. “I love you.” aussi simplement que cela, la tête qui vrille sur le côté pour mieux se positionner. Morphée ne rencontre aucune résistance. Tu finiras sûrement par te réveiller pour ôter ton peignoir dans la nuit parce que ça reste une contrainte malgré tout mais ton corps sera plongé dans le réconfort de la couette. Et du corps de ton partenaire à tes côtés. Everything will be fine.
“Il faudra que tu me masses plus que les pieds pour être dans un spa. Même si c’est un bon début.” Le sourire en coin qui se forme sur tes lèvres vaut tous les mots du monde. Don’t you worry. Tu vas la masser sur tous les coins de sa peau, de son corps changé. “Thank you, babe.” Tes yeux qui étaient reparti sur ses pieds pour t’appliquer comme il faut mais elle retrouve tout ton attention avec ces mots. « My pleasure. » Que tu ne peux pas t’empêcher de répliquer. “I love you.” Un sourire doux sur tes lèvres alors que ces trois derniers mots sont pour toi comme un appel à ses lèvres une nouvelle fois. Tu vas de nouveau t’approcher à quatre pattes de son visage pour lui déposer un long baiser sur ses lèvres avant de retourner la masser. Avant qu’elle ne sombre dans les bras de Morphée. All of this is temporary… Une ligne d’une chanson de Halsey qui te vient justement en tête pour la situation actuelle. Son corps ne sera pas toujours comme ça. Tu aimerais avoir le pouvoir de faire passer le temps plus vite. Vous avez autant l’un que l’autre des raisons bien distinctes de vouloir que l’alien sorte de son corps. Il va falloir être patient…
***
Voilà que le mois d’Avril pointe le bout de son nez. Ça veut dire que c’est l’anniversaire de ton oiseau. Tu l’aimes tellement, tu commences - joke - à la connaître parfaitement et autant tu n’aimes pas parler de ton anniversaire, autant tu aimes lui faire plaisir comme jamais au sien à elle. Pas comme si tu attendais son anniversaire pour lui faire des cadeaux, des surprises, mais ce jour là elle sait qu’il y en aura. C’est limite le jour où c’est le moins une surprise de ce fait. Les étoiles dans ses yeux alors qu’elle se réveille tout juste sont un bonheur à voir. Car elle sait que y’a quelque chose qui l’attend.
Ta main qui écarte les cheveux de son visage alors que vous êtes encore dans le lit. Tu murmures après lui avoir déposer un baiser sur ses lèvres. « Il doit faire un peu frais dehors. Je te suggère de te mettre une veste ou quelque chose sur le dos… » C’est peut être pas encore l’hiver, mais c’est plus l’été et la miss - Madame - est enceinte. Tu ne veux pas qu’elle prenne froid en sortant. Voilà un premier indice sur ce que tu lui as préparé pour son anniversaire. C’est dehors. Faut dire que Birdie est madame nature. Elle est aussi madame j’ai refait tout ton jardin - ou plutôt j’ai fait tout ton jardin - tu lui as laissé carte blanche et elle s’est donné à coeur joie là dessus. Faut dire que si quelqu’un d’autre s’en occupe, il ne te dérange pas ce jardin, il est même devenu plus qu’agréable.
Tu vas te pencher dans ta table de nuit pour y ouvrir le tiroir et en sortir une enveloppe que tu donnes à ton oiseau. Quelques mots écrit de ta jolie écriture.
Happy Birthday Bird, I can’t wait to see your art on that big wall in your garden. If you need an assistant, I vonlunteer. I’ll be around watching anyway. I love your face when you’re working on a piece. I love your face full stop. I love you. All of you.
-- Jordan
Quand elle te suivra jusqu’en bas. Jusqu’à son beau jardin, elle pourra y voir que tu as acheté des pots de peintures de différentes couleurs ainsi que des brosses et autres pinceaux larges, mais aussi des bombes de peinture. Tout ça posé au pied du mur de ta maison qui est le fond de son jardin. Elle a déjà pas mal de matos Madame Cadburry mais autant toi tu aimes quand tu as des nouveaux instruments et gadget pour ton studio, tu sais que du matériel supplémentaire et tout neuf pour peindre fera plaisir. « You can obviously use anything you want… » Que tu lui dis une fois que vous êtes devant le mur en brique de derrière ta maison. Tu te souviens combien elle avait été heureuse de décorer ta boîte aux lettres. Tu l’avais suggéré - l’air de rien - quand elle a emménagé chez toi. Il n’y a pas juste son nom qui a été ajouté, il y a toute son âme qui gravite ici et là. C’est peut être ta maison sur les papiers, mais c’est la votre dès qu’on franchis le portail. Cette boîte au lettre est unique, c’est une oeuvre d’art et tu as hâte de voir ce qu’elle va faire sur ce mur pour compléter son beau jardin de votre maison.
Le jour des blagues. Le jour où il est permis et toléré de faire des farces. Aussi le jour de mon anniversaire - en commun avec mon aîné, si ce n’est pas une preuve que l’univers s’amuse beaucoup avec les Cadburry. Pourtant, celui-là a un goût particulier. Je vieillis et je crée en même temps la plus belle création du monde. Ce qui le sera forcément plus tard, dans quelques mois, mais qui ne reste pour l’instant qu’une contrainte dont je finis par ne plus en voir le bout. Je deviens presque intime avec les toilettes et cela ne me convient que dans une mesure très restreinte. Mais aujourd’hui, ce n’est pas mon tube digestif avec lequel l’alien pourrait s’amuser de bon gré au grand damne de sa grincheuse de mère qui vit chaque étape comme une épreuve insurmontable qui me réveille mais bien la lueur du jour et le souffle réveillé de Jordan.
Je profite du répit de l’alien pour ouvrir les paupières et me contenter de ce que j’ai. J’essaie d’oublier la sensation bizarre qui me vient quand Jordan balaie les cheveux de mon visage et, pire encore, quand il m’embrasse. J’aurai eu le réflexe de me détourner si j’en avais eu le temps mais l’énergie est encore précaire, les affres du sommeil m’enveloppant encore délicatement et réussissant à me faire oublier ces petites contrariétés qui m’ont rendu de mauvaise humeur par moment dans les jours passés. Je sais que c’est ma journée encore plus que les autres jours et je sais que Jordan sait que je le sais. « Il doit faire un peu frais dehors. Je te suggère de te mettre une veste ou quelque chose sur le dos… » je souris légèrement en le regardant, le cœur dans les yeux mais l’envie de me décoller aussi. Alors que pourtant, nous sommes face à face avant qu’il se tourne pour attraper quelque chose et qu’il sorte, me laissant en tête-à-tête avec une enveloppe. Je me tourne sur le dos pour l’ouvrir, l’impatience agissant à ma place. Je sais que c’est dehors - un château gonflable ? du sable ? une piscine ? d’eau ou de boules ?
Happy Birthday Bird, I can’t wait to see your art on that big wall in your garden. If you need an assistant, I vonlunteer. I’ll be around watching anyway. I love your face when you’re working on a piece. I love your face full stop. I love you. All of you.
-- Jordan
oh. Encore mieux. Jordan m’offre un nouveau passe-droit sur ce qui forme être son chez lui mais qui se transforme depuis de longs mois en chez nous. Moi qui ai toujours eu l’habitude de ne jamais me poser, je n’arrive pas encore à imprégner l’idée dans ma tête que c’est autant chez moi ici qu’à Elimbah, me sentant parfois en intruse. Même après avoir eu le droit de repeindre sa boîte aux lettres. Et même quand Jordan y a rajouté mon nom. Je me mets à pleurer, stupidement. Les hormones, vous savez. Si je ne m’énerve pas, je pleure. Si je ne suis pas dégoûtée, je râle. Je subis moi-même les effets de mes humeurs et de mes émotions encore plus exacerbés qu’à l’accoutumée ; une véritable horreur. Les mots de mon partenaire me touchent tellement, me donnant encore plus envie d’aller me taper la tête contre le mur quand je me défile sous ses gestes ou ses regards. Quand je me mord la langue pour éviter de le disputer car il m’énerve, tout simplement, sans avoir de raison légitime. Que mes poils s’hérissent de plus en plus quand ses doigts trouvent ma peau, que ce soit innocent ou non. De toute façon, Jordan a dû sentir que quelque chose à changer car depuis quelques semaines, je fuis les rapports sexuels du mieux que je peux, prétendant toujours avoir mal quelque part - et franchement, ce ne sont qu’à peine des mensonges quand j’ai vraiment l’impression qu’on me tourne encore et encore les entrailles, que je dois aller aux toilettes toutes les quinze minutes et que je me trouve absolument affreuse avec cette peau tendue et mon envie de vomir encore plus accentuée.
Je profite d’une accalmie pour sortir du lit et mettre une grosse laine sur mes épaules - je dors de plus en plus couverte - que j’ai appris à faire moi-même avec l’aide de Maria avant de rejoindre Jordan dans le labyrinthe d’escaliers et de pièces à franchir pour accéder au jardin qui a été sauvé du béton par mon attrait particulier pour ce bout de terrain. « You can obviously use anything you want… » Un grand mur et tout plein de matériels neufs qui s’alignent en son pied devant mes yeux et mon sourire émerveillés. “All for me ?” le mur, la peinture, le feu vert, l’aval ? “All I want ?” car je ne sais pas dessiner mais j’ai appris à travailler les couleurs pour mes croquis, j’ai été à des ateliers de création, j’ai touché à beaucoup de choses et je suis émue que Jordan me fasse confiance pour peindre l’arrière de sa - notre - maison au gré de mes envies. Si en temps normal, je me serai accrochée à son cou pour l’embrasser en guise de remerciement, aujourd’hui est le jour où je me dirige plutôt vers les pots et les bombes et les brosses éparpillés un peu partout. Et je me remets accessoirement à pleurer. “Thank you, sweetheart.” je n’ai même pas la force de chercher un surnom. Je relève mes prunelles vers Jordan, les mains essayant déjà d’ouvrir un pot mais je- j’y arrive pas et ça m’agace alors que ma moue se transforme en désolation. “J’arrive pas ouvrir.” c’est un appel à l’aide pur et simple. Jje préfère être penaude qu’énervée. Je ne veux pas m’énerver pour mon anniversaire. Je ne veux pas que Jordan se prenne une soufflante même s’il aurait pu songer à les ouvrir, ces foutus pots, quand même.
Que tu précises. Tu n’as pas prévu qu’elle puisse faire toute la maison entière. Juste la partie qui est le fond du jardin en même temps. Peut être que tu aimeras si fort que tu voudras qu’elle fasse les autres surfaces de la façade de votre maison. Mais celui ci de derrière, le plus grand pan, tu le visualises parfaitement avoir sa propre identité par rapport à tout le reste. Ca va se mélanger parfaitement avec le jardin, tu le sais car c’est tout elle. “All I want ?” Tu hoches la tête alors qu’elle a l’air toute émerveillée. « Anything you want. » T’as un doux sourire sur les lèvres, aimant beaucoup la voir comme ça. Ca fait longtemps qu’elle ne t’avait pas apparu heureuse. Ça te rend triste en même temps mais tu essaies de chasser cette pensée pour profiter de la réalité présente. Elle est en train d’apprécier ton cadeau de toute sa valeur.
Elle s’approche vers le matériel et tu la regardes faire sans la déranger car elle est libre de faire tout ce qu’elle veut. Même de pleurer. Ça ne t’étonne pas. Tu es habitué maintenant mais, tu espères juste que c’est de bonheur. It is. “Thank you, sweetheart.” « You're welcome babe. » Un doux sourire sur tees lèvres. Tu prends soin de ne pas la prendre en photo pour immortaliser le moment comme la plupart des gens feraient pour un anniversaire, pour une surprise pareille. Tu sais très bien ce que c’est de ne pas s’apprécier physiquement. Tu oublies souvent de retenir certains gestes car c’est juste l’habitude. Comment passer de trois années à être l’un sur l’autre constamment de toutes les manières possibles, à ne plus la toucher. Tu ne mesures quand même pas l’extension de son mal être. Un baiser ici et là, une caresse sur sa joue, pour toi, ça passe. Mais la vérité c’est que tu ne sais pas. Elle s’est refusé à toi plusieurs fois, tu as pris note, tu n’as aussi pas pris la chose directement pour toi. Tu sais que bien des choses se trament en elle en ce moment et qu’elle est plus misérable qu’autre chose avec cette grossesse. Ca te rend aussi plutôt misérable de ton côté alors cette émotion dans ses yeux là, tu prends tout.
“J’arrive pas ouvrir.” Baby… Tu t’avances jusqu’à elle pour lui prendre le pot des mains pour le lui ouvrir. « Tu vas t’y mettre tout de suite ? » T’avais pas prévu ça, mais elle est libre de faire ce qu’elle veut. T’aurais juste aimé qu’elle aille manger ou boire quelque chose. Ou les deux. Mais tu la laisses se gérer. Tu ne seras pas sur son dos même si ça te demande beaucoup. « T’es inspirée ? » Tu ne comptes pas remonter tout de suite. Si elle commence à peindre tu veux voir ça. Si elle veut remonter tu la suivras. Si elle veut juste s’asseoir et admirer sa toile blanche (plutôt bordeaux, car les briques sont de cette couleur là) Tu aimerais qu’elle te parle de ce qu’elle imagine si elle a déjà une idée. T’aimerais qu’elle t’utilise comme un assistant et d’ailleurs voilà que tu rapproches la table où se trouve tout le matériel vers le mur. Pas trop non plus. Juste histoire qu’elle n’ait pas à faire cinq pas pour tremper son pinceau.
Dernière édition par Jordan Fisher le Ven 1 Oct 2021 - 11:51, édité 1 fois
« Well. All of this wall. » “Yeah, I got that.” je peux comprendre que je n’ai pas encore l’autorité sur le reste des murs, que Jordan ne veut peut-être pas que sa maison ressemble à une boule de Noël vivante avec de la peinture et des décorations incrustées partout ; gardons ça pour Elimbah, visiblement. Serait-ce mon ticket d’entrée pour pouvoir accéder au reste ? S’agit-il d’un jeu quelconque pour voir si je passe le test haut la main ? Je ravale mes pensées agaçantes parce que je ne veux pas m’agacer le jour de mon anniversaire - même si merci, Jordan, j’avais capté qu’il ne s’agissait que de ce mur, je suis blonde et enceinte, pas idiote et stupide. Les mauvaises ondes n’ont pas encore raison de moi car mon émerveillement est supérieur ; j’ai quand même une belle et grande toile à m’occuper, à remplir, ce n’est pas rien non plus. « Anything you want. » je peux y faire ce que je veux. Je n’ai pas de talent artistique très développé mais je ne me débrouille pas trop mal. J’ai fait des ateliers ici et là, ne serait-ce que pour pouvoir dessiner des croquis dignes de ce nom car parait-il que les potentiels clients pour mes vêtements apprécient de voir des dessins pour avoir un premier visuel. Quand je le faisais que pour moi, ce n’est qu’abstrait et je visualisais assez dans ma tête pour ne pas avoir à le dessiner ; mais voilà que je suis passée presque professionnelle - j’ai une business card, voyez le sérieux de la chose - et j’ai dû m’adapter. De toute façon, pour faire mes dessins, il n’y a jamais eu besoin de faire dix ans d’art pour y arriver ; des fleurs, des smileys, des personnages bizarres, des créatures étranges. Le tout est de savoir rendre la chose agréable et compréhensible à regarder ; encore pire quand il s’agit d’un mur car je ne peux pas arracher la page et recommencer. « You're welcome babe. »
Ma tête souriante se tourne vers lui mais je finis par déchanter légèrement en voyant que je suis incapable d’ouvrir un bordel de merde de foutu pot de peinture, ce qui dépasse clairement mon jugement. Quand Jordan s’approche pour m’aider, je me mords furieusement la lèvre pour éviter de lui dire qu’il aurait pu prévoir l’ouverture car il aurait dû savoir que j’allais vouloir regarder. Parce que c’est complètement irrationnelle comme pensée mais qu’importe ; je suis bouffée par l’alien qui obstrue tout jugement un peu plus chaque jour. Il paraît que c’est normal mais il n’empêche que ça me fait chier car je me chiffonne encore pire que d’habitude et c’est épuisant en plus d’être doublement agaçant. Jordan me fait plaisir et je me sens ingrate à avoir des reproches à lui balancer au visage. « Tu vas t’y mettre tout de suite ? » je regarde le mur, penchant la tête d’un côté puis de l’autre, puis fronçant le nez de réflexion. “Je sais pas.” il y a plein de choses que je ne sais pas. « T’es inspirée ? » “Je suis pas sûre.” non, ce n’est pas la bonne réponse. “Enfin, si, je le suis. Evidemment mais je… Je dois mettre à plat d’abord. Je peux pas faire n’importe quoi ni même me rater.” je passe une main contre ma nuque alors que Jordan fait racler la table pour l’approcher. “Ne me fous pas la pression comme ça, Jordan, je t’ai dit que j’étais pas sûre.” que je balance en faisant un pas en arrière, les traits préoccupés par un geste qui se veut pourtant aidant. Je soupire en passant ma main sur mes yeux. “Désolée, je...“ je quoi ? Est-ce que je vais me camoufler derrière l’alien ? La logique voudrait que oui parce que c’est de sa faute.
“J’ai vraiment hâte que l’alien sorte.” le pire ? Je ne peux même pas penser à me réfugier dans les bras de mon compagnon. Ou dans n’importe quels autres bras, d’ailleurs. Un fuck you de l’univers où je me retrouve à fuir le contact d’autrui. A me détester physiquement. Je ne suis pas habituée et ça m’agace prodigieusement. Comme passer d’une colère rapide à la tristesse. D’où les larmes tirent et coulent sur mes joues. “Je suis reconnaissante, Jordan, vraiment. Mais je peux pas m’y mettre tout de suite, car je veux faire les choses bien. Il faut que je réfléchisse, il faut que ça soit joli, que t’es pas honte ou que tu regrettes ou que ce soit moche et il faut que j’aime aussi et je-” c’est beaucoup de pression pour une femme enceinte. Les émotions se bataillent mon attention et je finis par aller m’asseoir sur une des chaises du jardin, comme l’impotente émotive gonflée que je suis, le visage entre les mains. “Ce n’est pas urgent, n’est-ce pas ?” que je demande stupidement ; je sais que Jordan se morfond, qu’il doit penser que tout va être de sa faute et je me déteste tellement. Parce que Jordan n’y est pour rien et, dans le fond, je n’y suis pour rien aussi. Je ne peux pas me contrôler. En temps normal, j’aurai sauté de joie, je l’aurai embrassé à perdre la raison, je serai déjà en train de lui expliquer mes milliard d’idées, j’aurai même commencé à le peindre lui avant de toucher le mur. Il me connait, Jordan, il sait que je suis une gosse et cette toile est absolument extraordinaire pour moi. Mais j’ai un alien qui bouscule absolument tout en moi, qui me rend ingrate au possible et autant j’aime notre enfant à venir, autant je la déteste de me faire subir tout ça. De faire subir à son père la sensation que je ne l’aime pas, que je le repousse, que je manque de reconnaissance alors qu’il mérite tout l’inverse. Et moi aussi ; je l’aime à en perdre la tête, Jordan, mais je ne suis pas foutue de le lui montrer depuis des semaines. Ou par intermittence, avant que la réalité me rattrape et que je le fasse sentir comme un intrus. Un inconnu. Nous avons toujours été si proches l’un de l’autre que l’absence de contact me tue et me bouffe. Et cela augmente avec le temps, ce qui est encore pire.
“Yeah, I got that.” Tu voulais juste être sûr qu’elle ait bien compris parce que tu n’en étais pas certain. C’est un détail important et quand bien même ça te vaut une remarque que tu aurais préféré éviter car… Elles pleuvent les remontrances ces dernières semaines. Tu lui fais un petit sourire qui veut dire ’I didn’t mean to be rude. I just wanted things to be clear.’ Mais tu juges qu’il vaut mieux ne rien dire à voix haute afin de ne pas attiser d’éventuelles flammes qui ne demandent qu’à être lancées.
“Je sais pas.” Tu hoches la tête. Donc c’est un peut être. “Je suis pas sûre.” Elle confirme le peut être. “Enfin, si, je le suis. Evidemment mais je… Je dois mettre à plat d’abord. Je peux pas faire n’importe quoi ni même me rater.” Tu hoches la tête de nouveau. « Ouais c’est une grande toile. » Y’a de quoi faire. Dans le doute, si elle se décide à commencer quoi que ce soit, tu avances la table avec le matos. “Ne me fous pas la pression comme ça, Jordan, je t’ai dit que j’étais pas sûre.” Mais elle prend mal tes mots, tes gestes aussi sûrement. Oh my god. Tu as cru qu’aujourd’hui serait différent des autres car y’a cette surprise qui aurait du remonter toutes ses humeurs non ? Parce qu’elle aurait fait un peu plus attention à comment elle te répond pour pas ruiner sa journée mais… Nope. Tu sais plus quoi faire car tout ce que tu fais, rien ne va. Tu prends fortement sur toi pour ne pas montrer à quel point tu es touché par tout ça. “Désolée, je…“ Car elle sait que tu mérites pas au fond. Et tu sais qu’elle ne le fait pas exprès non plus. “J’ai vraiment hâte que l’alien sorte.” Mais ça n’empêche que c’est de plus en plus difficile pour toi moralement. Tu ne lui as pas dit que tu as augmenté les doses de tes cachets et tu essaies vraiment de faire au mieux comme ça. Sauf que là c’est encore autre chose. C’est pas tes angoisses qu’elle meurt en mettant ton enfant au monde, c’est la peine de la voir te rejeter d’absolument tous les moyens. Verbaux et physiques. It’s hard. Et pas de la façon que tu aimes le lui dire d’habitude. Tu ne le lui dis pas là. Elle se met à pleurer, ça te brise le coeur. “Je suis reconnaissante, Jordan, vraiment. Mais je peux pas m’y mettre tout de suite, car je veux faire les choses bien. Il faut que je réfléchisse, il faut que ça soit joli, que t’es pas honte ou que tu regrettes ou que ce soit moche et il faut que j’aime aussi et je-” Tu comprends pas pourquoi elle se prend autant la tête pour ça, tu n’as rien dit. Tu as juste bougé la table et voilà son état.“Ce n’est pas urgent, n’est-ce pas ?” Tu vas remettre la table où elle était, comme si c’était la réponse à tout les problèmes actuels. T’as légèrement peur de te mettre à pleurer si tu prends la parole car ton cadeau n’a pas du tout le résultat escompté. Tu fais simplement non de la tête, n’ayant pas la force d’utiliser ta voix qui aura bien trop d’émotions. Tu le sais. Tu te connais. Tu les sens les larmes pas loin et tu ne vas pas les laisser filer. Tu t’approches de Birdie, va déposer un très rapide baiser sur le dessus de sa tête. L’odeur de son shampoing te fait du bien. Ca t’apaise un bref instant. « Y’a rien d’urgent. Joyeux Anniversaire. » Que tu lui dis le nez dans ses cheveux avant de te reculer car tu sais que tes bras ne vont pas mettre bien longtemps à l’enlacer si tu restes comme ça. Tu ne cherches pas d’excuse à lui dire pour retourner à l’intérieur. Tu la laisses profiter de son cadeau ou pleurer. Tu ne peux pas supporter de la voir comme ça sans pouvoir la prendre contre toi pour la consoler de t’avoir fait des remontrances injustifiés. Car yeah. Tu lui pardonnes la totalité malgré tout. T’as bien hâte que la grossesse arrive à son terme, même si ça rapproche du moment qui t’effraie le plus.
***
Quelques jours plus tard, tu arrives chez toi vers 22 heures. Tu n’as pas vu l’heure passer. Tu étais chez Trent en fin d’après midi et tu as beaucoup parlé de la situation qu’iel connait déjà. Tu as pas mal pleuré. Iel t’a consolé comme iel pouvait. Tu avais besoin de douceur et réconfort, iel t’a donné tout ça. Tellement que tu t’es endormi dans ses bras. Fatigué d’avoir trop pleuré. Fatigué de tout…
Tu t’es passé un coup sur le visage avant de partir de chez ellui mais voilà les yeux que tu te paies malgré tout. Tu espères qu’elle dort déjà ou qu’elle est dans la chambre et que tu n’auras pas à allumer la grande lumière. Sauf que nope. Bien sûr. Elle est dans le salon à regarder Harry Potter. La lumière est tamisée cela dit. Seulement une petite lumière allumée et l’écran qui éclaire la pièce. « Hey… » T’es encore fatigué même si t’as dormi une heure chez Trent. Tu regardes Birdie un bref instant te demandant si tu vas devoir te justifier de l’heure, de pas avoir prévenu. Si rien, tu iras dans ta chambre pour te rouler en boule dans ton lit et dormir pour que demain arrive plus vite.
Dernière édition par Jordan Fisher le Ven 1 Oct 2021 - 11:51, édité 1 fois
« Ouais c’est une grande toile. » une très grande toile. Impressionnante. Une toile non négligeable, non anodine. Parce que c’est chez lui avant d’être chez moi. C’est son lieu, son terrain, son habitat. C’est lui qui en a mis l’esprit, les formes, ses envies et ses choix. Je n’ai été que l’intruse qui s’est incrustée sous son aval. Un parasite qui a eu le droit de former son nid, son cocon et voilà que le parasite va se multiplier. J’aime beaucoup ce cadeau mais je ne l’apprécie pas à sa juste valeur. Mon cœur est gonflé d’émotions diverses et variées mais une constante est là et elle me répète sans cesse i’m sorry, i’m sorry, i’m so fucking sorry. Ce qui me fait pleurer davantage. Je suis misérable et je l'entraîne dans mon sillage. Je n’aime pas cette grossesse. Elle m’horripile de plus en plus. J’ai presque envie d’aller hurler à l’hôpital pour qu’on me le retire. Je n’en veux plus. J’ai mal tout le temps, partout ; au corps, au cœur, à la tête. Mes yeux ne sont que des fontaines et mon palpitant me fait réagir trop spontanément. Je pourrai aller me réfugier auprès de Will pendant quelque temps. Ou de Zoya - mais Zoya a une enfant et ça ne ferait que remuer le couteau dans la plaie. L’alien est mon fardeau et personne, personne ne peut visiblement comprendre à quel point je me sens mal - si, Zoya, puisqu’elle est passée par-là. Mais elle a été enceinte toute seule ; elle ne peut comprendre que le rapprochement de Jordan me fait mordre la lèvre ni même que je ferme les yeux en serrant fort les paupières pour ne pas trésaillir quand il embrasse le sommet de mon crâne. « Y’a rien d’urgent. Joyeux Anniversaire. » c’est le joyeux anniversaire le plus amer et le plus âpre que j’ai pu entendre jusqu’à maintenant. Je me recroqueville sur ma chaise, me retrouvant à apprécier l’attention de Jordan qu’à travers mes larmes et mon désarroi, seule et désemparée au possible.
*****
Une tisane dans les mains, un plaid sur les jambes et le ventre, positionnée de la façon la plus agréable quand on a un ballon de baudruche en guise de ventre pour pouvoir tenir devant la télévision. Depuis que Jordan a dit qu’il partait chez des amis en milieu d’après-midi, j’ai juste hoché la tête tout en lui souhaitant de bien s’amuser. Mais je sais qu’il me fuit. Parce qu’autrement, il m’aurait demandé si j’avais voulu venir. J’aurai répondu non, je ne suis pas en condition mentale de faire la tournée des grands ducs, ce qui m’agace prodigieusement. Mais le principe aurait été là. Non, Jordan me fuit et c’est de ma faute. Je n’arrive pas à prendre sur moi. Je le rejette. Je ne suis pas forcément agréable. Moi qui a toujours été positive, souriante, optimiste, énergique, je deviens tout l’inverse. Oui, mes organes bougent. Oui, mes hormones sont en ébullition. Oui, je suis en train de créer un être humain. Mais est-ce que cela justifie que je me sente de la sorte ? Aussi différente de ce que je suis d’habitude ?
Pour oublier que je suis seule - sans vraiment l’être, je rejoins Quirrel, je remarque dans un sourire amusé sans chaleur - je me suis mis des Harry Potter depuis qu’il est parti. Mon réconfort, mon univers, mon adolescence. J’ai le temps d’arriver vers la fin du deuxième quand j’entends la porte d’en bas s’ouvrir puis celle d’en haut pour laisser entrer un Jordan visiblement fatigué. « Hey… » je lui ai bien envoyé un ou deux messages pour savoir quand il rentrait ; sans réponse. Je ne cache pas que j’ai balancé mon téléphone contre le fauteuil en face de rage. Mais ça remonte à plusieurs heures, après avoir pleuré parce que j’ai l’impression de le perdre et que je ne sais pas quoi faire pour arranger les choses. “Hey.” que je répète stupidement en resserrant mes doigts autour de la tasse. Je me suis fait mille et un scénarii sur ce que je pourrai lui dire quand il rentrera ; l’engueuler de pas avoir prévenu, le blâmer d’être égoïste, lui reprocher de s’en foutre de mon existence ou de ce qu’il advienne de l’alien. Mais là, les vagues sont passées et je ne suis qu’un amas de désespoir désespéré avachi qui tente de plonger dans des histoires de magie pour retrouver un peu de moral. “J’imagine que tu t’es bien amusé, vu l’heure à laquelle tu rentres.” un reproche ou un constat, les deux à la fois. Je ne peux pas voir les yeux rougis de mon compagnon, ni même soupçonner une seule seconde que je me trompe sur toute la ligne. Mon regard est rivé sur l’écran et une partie de moi espère que Jordan ne va pas simplement aller se réfugier dans la chambre sans rien dire. Je ne pourrai pas le supporter autrement. Ce qui est ironique vu la situation, je m’épuise réellement.
“Hey.” Tu essaies d’examiner le ton de sa voix. Si elle est agacée, calmée, fatiguée. Y’a des fois où ça va, mais ça ne dure qu’une dizaine de minutes à la suite. Est-ce que tu as de la chance d’être sur une bonne tranche horaire ? “J’imagine que tu t’es bien amusé, vu l’heure à laquelle tu rentres.” Nah. Tu sors ton téléphone pour voir l’heure qu’il est. Et c’est là que tu vois ses messages qui datent de y’a quelques heures. « Fuck… » Tu soupires doucement. « I’m just seeing your messages now. I’m sorry… » Comment tu arrives à te sentir mal alors que c’est elle qui te fait vivre le pire rodéo de ta vie. Il n’y a pas d’autres mots. C’est des claques virtuelles que tu prends de tous les côtés. Ça te fait plus mal que si elle te frappait réellement. Car ça voudrait dire qu’elle te touche à son bon vouloir. Chose qui n’est pas arrivé depuis une éternité. Chose qui te tue. Tu sais que tout est lié à la grossesse mais tu pries fort que ce soit réellement le cas. Tu ne veux pas que cette Birdie soit celle qui sera la mère de ton enfant. Car c’est tout ce qu’elle sera dans ce cas là. Tu ne pourras pas supporter ça toute ta vie.
Tu restes dans l’axe qui est face au couloir qui mène à votre chambre, mais tu es toujours bel et bien dans le salon. Tu es à une distance plus que grande de ton oiseau sauvage et tu ne sais pas si tu fais un pas vers elle ou non. No. Nan, vu son ton, elle est énervée et tu vas t’en prendre une flopée de reproches dès qu’elle aura formée les phrases dans sa tête. « Please… I’m not in the mood to be told off. » Tu es triste et tu vas juste fondre en larmes sans préavis si ce sont de nouveaux piques qui sortiront de la bouche que tu voudrais qui se pose sur ta peau avec toute la douceur possible. Parce que tu as beau eu les bras et l’épaule de Trent pour quelques heures, tu as besoin de bien plus encore. Tu viens littéralement de rentrer entre ces murs où elle se trouve et où tu es de plus en plus mal à l’aise. Dans ta propre maison. Tu ne vas pas la comparer à ton père mais son rejet et les reproches systématiques qu’elle te fait y ressemblent beaucoup trop… La crainte de rentrer chez toi aussi... Tu pensais ne plus ressentir ces émotions quand tu as acheté ta maison. Ca devait être ton havre de paix jusqu'à la fin de tes jours. C’est vraiment de plus en plus dur.
Dernière édition par Jordan Fisher le Ven 1 Oct 2021 - 11:52, édité 1 fois
« I’m just seeing your messages now. I’m sorry… » j’hausse les épaules. “Je m’en suis remise.” après avoir fait ma crise. Chose que Jordan n’est pas obligé de savoir. Je ne lui dois rien tout comme je ne lui demande pas exactement où il a été. Avec qui. Ce qu’il a fait. Ou peut-être que ma phrase est un appel subtile pour qu’il le fasse de lui-même. C’est presque un pas en avant que je suis en train de faire, là. Je n’ai pas l’impression d’être sauvage, méchante ou mordante. Je suis simplement avec ta tisane entre les mains en regardant ma saga préférée. Si je fais mine que ça va, ça ira. Faire croire au corps ce que le cerveau veut peut avoir ses bénéfices. Si j’en oublie les perpétuels nausées qui persistent et les envies d’aller aux toilettes parce que l’alien s’amuse à appuyer dessus quand bon lui semble - autrement dit, beaucoup trop de fois à mon goût.
Je ne peux pas en vouloir à Jordan de fuir le domicile ; je ferai pareil à sa place. Je pourrai aller chez des amis mais plus le temps passe, plus je préfère la solitude. Au moins, il n’y a personne pour me faire sentir les reproches silencieux de mes excès que je ne peux pas contrôler. Je n’ai pas à faire subir à autrui mon ingratitude ou ma mauvaise humeur. Je n’ai personne à décevoir à part moi-même - et déjà rien que ça, ça suffit à être déplaisant au possible. Je ne peux pas non plus m’excuser de tout parce qu’y a personne pour s’excuser pour moi. Je suis facilement placée comme la vilaine, la méchante de l’histoire et c’est d’autant plus blessant de voir Jordan qui a l’air d’être sur le qui vive constamment, s’attendant à tout moment à ce que je lui balance un truc déplaisant à la figure. Peut-être que je ne lui ai pas rappelé à quel point je l’aime et que cette situation me détruit de l’intérieur. Pourtant, le fait que je porte son enfant devrait suffire pour lui rappeler que je l’aime, non ? C’est moi qui a un foutu être humain dans le bide, c’est moi qui subit ses aléas en premier lieu. C’est moi qui le sent bouger, c’est moi qui me retrouve aux toilettes constamment, c’est encore moi qui pleure pour rien, qui crise plus, qui a les émotions sans dessus dessous. C’est moi qui mange pour quatre, qui ne peut pas boire, qui ne peut pas se tenir, marcher, dormir, s’asseoir comme je veux. Et tout ça, je le subis parce que je l’aime mais il suffit que je me montre distante pour que lui fuit.
Mais comme j’ai déjà énuméré tout ça pendant son absence, je suis presque une coquille vide à cet instant précis. « Please… I’m not in the mood to be told off. » j’ai un bref rire froid qui s’échappe de mes lèvres. “Tu dis ça comme si je prenais du plaisir à le faire.” non, Jordan, je n’ai aucun plaisir à te reprocher que la terre tourne autour du soleil ou le fait que les flamants roses dorment sur une patte est absurde. Je tourne la tête vers lui, à des pieds de moi, réalisant qu’au lieu de me dire éventuellement ce qu’il a fait, il préfère attaquer directement. “Désolée de m’inquiéter.” parce que je m’inquiète toujours quand il part sans que je sache quand il revient. J’ai cette peur panique de l’abandon et ça empire terriblement ces dernières semaines. J’en viens même à me demander s’il va assouvir ce que je ne peux plus donner ailleurs. Est-ce que c’est de la tromperie si c’est pour aller extraire de la frustration ailleurs ? J’en sais rien. Je ne serai même pas si je pourrai le blâmer ou lui en vouloir. Mais l’idée me donne le vertige et je sais que j’en serai blessée au plus profond de moi. Mon regard retourne sur l’écran. J’apprends que parfois, il vaut mieux que je me taise. Je vais avoir le mauvais rôle quoiqu’il arrive alors autant le laisser faire sa vie sans chercher à en savoir plus. Plus que deux mois à tenir.
“Je m’en suis remise.” Elle a véritablement l’air dans un bon quart d’heure mais toi t’es fatigué au possible et tu t’attends au pire tout le temps maintenant. Tu crains ta partenaire et ça te brise le coeur. C’est pas supposé être comme ça vous deux. Tu ne réfléchis pas quand tu lui supplies de ne pas t’en mettre dans la tronche. Tu sais pas si tu supporteras alors oui, tu es en mode défense en l’attaquant peut être un peu. Tu as besoin de dormir. “Tu dis ça comme si je prenais du plaisir à le faire.” Tu sais… Bien sûr que tu le sais. C’est bien ça qui rend le tout bien plus compliqué. T’es frustré, mais elle est enceinte, tu peux pas taper sur elle sans conséquences car c’est votre enfant qu’elle porte. Car ça peut entrainer des complications certainement de ne pas avoir le soutient de son partenaire car oui, tu fuis. Mais tu ne sais juste plus quoi faire. Comment faire.
“Désolée de m’inquiéter.” C’est si compliqué… Ça te brise le coeur toute cette situation. Tu laisses un long silence passer car tu as autant envie d’aller te rouler en boule dans ton lit que d’aller la serrer contre toi. « I miss you… » La fatigue et les émotions qui ont raison de toi. Les larmes qui n’étaient pas bien loin de tes yeux sont à présent sur tes joues. « I miss you… So much… » Tu t’essuies les yeux alors que tu t’es appuyé contre le mur derrière toi. Pas décidé ni à aller dans la chambre, ni à aller la rejoindre, ni à allumer la lumière. Tu as le cul entre deux chaises, comme tous les jours depuis quelques semaines. Tu prends tout dans la gueule mais elle n’est qu’une victime de son état, tu peux pas lui en vouloir et c’est dur de juste subir les émotions irrationnelles de ton oiseau qui n’arrive plus à être proche et douce avec toi. Tu ne veux pas à aller voir un ami à toi pour te réconforter, c'est elle ta deuxième moitié. C'est elle ta personne. Celle que tu vas voir quand ça va pas et jamais tu n'aurais cru que le problème soit elle. La grossesse plus qu'elle mais elle est un incubateur, ça passe par elle. Malheureusement. Tu n’es pas en train de sangloter mais les larmes coulent encore et toujours sur ton visage que tu essuies au fur et à mesure plus pour occuper tes mains qu’autre chose. Tu n’as rien à voir ou lire là. Elle ne te voit certainement pas clairement non plus. Elle ne te regarde pas de toute façon. Tu l’as vu face à l’écran. T’as pas remarqué le film mais tu es sûr que c’est Harry Potter.
Dernière édition par Jordan Fisher le Ven 1 Oct 2021 - 11:52, édité 1 fois
L’atmosphère est si lourde, trop tendue pour que j’y sois à l’aise. C’est difficile, un mauvais moment à passer, quelque chose nous dépassant complètement mais je n’aime pas pour autant nous savoir comme ça. Je n’aime pas nous voir aussi distants, aussi effacés, aussi désemparés l’un envers l’autre. Je me crains moi-même autant que Jordan doit peut-être me craindre aussi. Mes réactions ne sont pas prévisibles, même si là, je réussis à me contrôler, à prendre sur moi, à ravaler les mauvaises ondes que ses phrases auraient pu provoquer. Sûrement car j’ai tempêté fort et si bien toute seule que je ne suis qu’une masse lourde de fatigue qui était jusqu’à présent éveillée par l’inquiétude grandissante de ne pas le voir venir. Maintenant que Jordan est rentré, je me sens mieux. Le savoir dans mon périmètre me réconforte tout de même ; il n’a pas fui trop longtemps - même si ces quelques heures ont été longues, elles m’ont fait du bien malgré tout. Autant de signaux différents que m’envoient mon corps et ma tête, me fatiguant et me donnant juste envie de me taper contre un mur pour qu’on arrête de me faire subir ça.
« I miss you… » portant mon attention de nouveau sur Jordan, je sens mon visage se décomposer en l’entendant. L’émotion est perceptible dans sa voix et ses mots… Ses mots ne furent pas ceux que j’aurai pu attendre mais ils font sûrement plus mal. Une odeur de mélancolie s’empare de moi alors que je ferme les yeux de nouveau, l’humidité se formant au bord. « I miss you… So much… » “I miss me too, Jordan.” une phrase qui pourrait être absurde hors contexte mais qui, à mon sens, veut absolument tout dire. Je me manque cruellement. Sur le point physique comme sur le point psychologique. Ça me manque de ne pas pouvoir l’embrasser à ma guise, de ne pas pouvoir trouver le soutien de ses bras, de ne pas vivre cette grossesse plus joyeusement. Je ne suis pas épanouie à cet instant, je me perds et je ne suis pas moi-même tout en restant moi malgré tout. Je passe ma langue sur mes lèvres. “I…” je fronce un sourcil en baissant mes prunelles sur mes mains ; je peux faire un effort. On doit se rassurer. Se rappeler de la base. Je peux faire un effort. C’est Jordan. Je mords ma joue. C’est un pas en avant. On a besoin d’être rassurés tous les deux ; je sais qu’il m’aime autant que moi. Mais il faut qu’on se rappelle. “Can you come here, Jordan ?” je demande doucement en tapotant le canapé à côté de moi. “Please ?” s’il te plait, s’il te plait, s’il te plait. Je peux faire l’effort. Pour lui, pour moi, pour nous. Il faut que je le lui rappelle. Qu’il est l’essentiel de ma vie. Que mes réactions ne sont pas le reflet de mes sentiments pour lui. Qu’ils n’ont pas bougé, eux. Ils sont toujours là ; est-ce qu’il en doute ? Est-ce qu’il ressent la même chose ? Est-ce que je suis en train de le perdre ? Je ne veux pas penser à cette alternative. Je ne peux pas vivre sans Jordan. Impossible.